L’invention, c’est 1% d’inspiration, 99% de transpiration et 10% de télévision
Salutations, ami(e) lectrice ou lecteur. La télévision est sans aucun doute l’une des grandes inventions du 20ème siècle. C’est la meilleure des choses, c’est la pire des choses, si je peux paraphraser Charles John Huffam Dickens. Voudriez-vous m’accompagner sur le sentier de la mémoire pour examiner une des meilleures émissions de télévision dont vous n’avez jamais entendu parler, une histoire qui vous est présentée par une photo trouvée dans le numéro du 7 octobre 1948 de Photo-Journal, un hebdomadaire publié à Montréal, Québec?
Il était une fois, vers septembre 1947 pour être plus précis, un gentilhomme britannique mince, plein d’humour, aux cheveux gris et à lunettes part en vacances dans le sud de la France. Cette personne, Leslie Hardern, travaille pour Gas Light and Coke Company, une entreprise nationalisée en 1949 et intégrée au North Thames Gas Board. Il part avec le dernier groupe de touristes autorisé à quitter le Royaume-Uni en 1947 sans avoir à obtenir la permission du gouvernement britannique et… Vous semblez perplexe devant ce que vous venez de lire, ami(e) lectrice ou lecteur. Laissez-moi vous expliquer. À cette époque, le Royaume-Uni est confronté à une crise économique. Pour paraphraser un autre numéro d’octobre 2018 de notre blogue / bulletin / machin, vers la fin de la Seconde Guerre mondiale, en 1945, cette grande puissance n’est plus qu’une ombre de ce qu’elle était avant le conflit. Pour être franc, le Royaume-Uni est pour ainsi dire en faillite. Dépenser de l’argent à l’étranger pour des choses aussi frivoles que des vacances est donc mal vu, dans une certaine mesure, mais je m’égare.
Alors qu’il profite du temps passé loin de chez lui, Hardern devient convaincu que, le Royaume-Uni étant dans les cordes, l’industrie britannique a désespérément besoin de nouveaux produits qu’elle peut exporter dans le monde entier. Il conçoit l’idée d’utiliser un nouveau médium, la télévision, pour exploiter l’inventivité du peuple britannique et la porter à l’attention du monde des affaires. Une présentation télévisée d’un inventeur serait beaucoup plus efficace qu’un texte et / ou une photographie avec légende. Hardern contacte le Talks Department de la British Broadcasting Corporation (BBC). Le fait qu’il semble avoir travaillé avec ce radio / télédiffuseur appartenant à l’état, dans le cadre d’une ou quelques émissions de design domiciliaire, l’aide peut-être à surmonter la bureaucratie. Quoi qu’il en soit, quelques personnalités influentes de la BBC s’avèrent suffisamment intriguées par l’idée de Hardern pour lancer une émission mensuelle de 30 minutes, en avril 1948. Cette émission télévisée s’appelle The Inventors’ Club.
Comment les inventions montrées aux téléspectatrices et téléspectateurs sont-elles choisies, vous demandez-vous? Une bonne question, ami(e) lectrice ou lecteur avisé(e), et une question importante, car cette sélection des idées dignes de présentation s’avère être le plus gros problème auquel l’équipe responsable du The Inventors’ Club doit faire face. Comme on peut s’y attendre, le nombre de soumissions augmente à mesure que davantage de personnes entendent parler de l’émission. À un moment donné, l’équipe doit ainsi examiner 200 demandes chaque mois. Toutes doivent inclure quelques photos et / ou dessins de l’invention. Même si la plupart des idées proviennent de sujets britanniques vivant au Royaume-Uni, les inventions proposées par des étrangères et étrangers sont également les bienvenues. Les soumissions sont en fait ouvertes par des personnes autres que celles responsables du The Inventors’ Club. Hardern veut faire en sorte que rien de mal ne se produise. Vous voyez, lorsque la série fait son apparition sur les ondes, certains inventeurs lui offrent de l’argent ou une part des redevances pour s’assurer que leur idée soit diffusée à la télévision.
Au total, de 40 à 50% des soumissions sont rapidement éliminées pour diverses raisons (contrats commerciaux déjà existants, inaptitude à la présentation à la télévision, similitude avec des soumissions antérieures, absence de perspectives commerciales, absence de brevet, etc.). Les idées restantes sont évaluées par un panel d’experts de différents domaines. Des personnes familières avec des inventions récentes dans certains domaines peuvent également être consultées, le cas échéant. La moitié des soumissions restantes sont abandonnées au cours de cette phase du processus. Un autre examen élimine la moitié des soumissions restantes. Les personnes qui ont soumis les quelque 20 à 30 idées laissées en lice sont invitées à Londres pour les présenter à un public de journalistes, d’inventeurs et de responsables de la BBC. L’équipe choisit une poignée de participantes et participants dans ce groupe. Il semble que Hardern et les membres du groupe d’experts suggèrent à ces heureuses et heureux élu(e)s comment leurs idées peuvent être utilisées, améliorées et commercialisées. Hardern dirige une sorte de bureau de conseil informel que toute personne ayant une idée peut contacter. Tout conseil donné est gratuit.
Le président du groupe d’experts pour une période de temps incertaine est le président de la Design and Industries Association, Lord Sempill, également connu sous le nom de baronnet de Craigevar, né William Francis Forbes-Sempill. Compte tenu de l’orientation aéronautique / aérospatiale de notre blogue / bulletin / machin, vous serez heureuse / heureux d’entendre (lire?) que ce pilote impétueux et obstiné de la Première Guerre mondiale continue de s’intéresser par l’aviation pendant l’entre-deux-guerres. De fait, Sempill est président de la Royal Aeronautical Society pendant quelques années au cours de cette période. Si vous me permettez une digression pendant 1 moment ou 3, votre humble serviteur se souvient avoir effectué des recherches à la bibliothèque de cette auguste institution, la plus ancienne organisation au monde consacrée à l’encouragement de la locomotion aérienne, au tout début des années 1980.
Sur une note beaucoup plus sombre, et soyez prévenus que d’autres aspects de la vie de Sempill sont vraiment très sombres, cette personne est un antisémite qui fait partie de plusieurs organisations d’extrême droite dans les années 1930, comme quelques autres passionnés d’aviation britannique. Si je puis me permettre une brève parenthèse, pour quelques secondes, d’accord, plusieurs secondes, une exposition temporaire (en ligne?) sur les liens entre l’aviation et des dictatures vicieuses des années 1920 et 1930 comme l’Allemagne, l’Italie, le Japon et l’Union des républiques socialistes soviétiques pourrait être très intéressante - et quelque peu dérangeante. Une telle exposition pourrait / devrait inclure des éléments sur les liens entre l’aviation et les extrémistes, essentiellement d’extrême droite, dans des démocraties telles que le Royaume-Uni, la France, les États-Unis et le Canada.
Si, si, le Canada. N’avez-vous pas entendu parler du Club d’aviation canadien Incorporé fondé à Montréal, Québec, en juillet 1931? Il peut être un outil du Parti national social chrétien fondé par Adrien Arcand, un journaliste et figure marquante de l’extrême droite au Canada et au Québec. Le club ne connaît pas un grand succès et peut avoir fermé ses portes (bien?) avant l’arrestation d’Arcand et l’interdiction de son parti, en mai 1940. Vous vous souvenez peut-être, ami(e) lectrice ou lecteur, qu’Arcand est mentionné dans un numéro de janvier 2018 de notre blogue / bulletin / machin, mais revenons à Sempill.
Croiriez-vous que ce personnage peu ragoutant vend des informations sensibles / secrètes sur les aéronefs britanniques et d’autres sujets aux autorités japonaises vers 1925-26 et aux alentours de 1939-41, c’est-à-dire peu avant les attaques japonaises sur les territoires américains et britanniques d’Asie du Sud-Est et du Pacifique en décembre 1941? Même si les informations à cet effet atteignent les plus hauts niveaux du gouvernement britannique, aucune mesure n’est prise contre Sempill. Poursuivre un membre des pouvoirs établis, en particulier en temps de guerre, alors que les forces armées britanniques sont battues par les Japonais, aurait été bien trop gênant. En outre, les pouvoirs en place veulent garder secret le fait que les déchiffreurs de code britanniques lisent plusieurs / la plupart des messages échangés par les diplomates japonais à Londres, à Tokyo et ailleurs. Sempill trahit peut-être son pays pour payer certaines de ses dettes.
Un autre membre du groupe d’experts éminents du The Inventors’ Club est une personne qui n’a absolument rien de sinistre. Ingénieure en électricité et championne des droits de la femme, dame Caroline Harriett Haslett est directrice de la Electric Association for Women, une organisation qu’elle aide à fonder. Soit dit en passant, en 1948, elle est également la seule femme membre du British Institute of Management et de la British Electricity Authority. L’intérêt premier de Haslett tout au long de sa carrière fascinante et multiforme consiste à utiliser l’électricité pour libérer les femmes des tâches ménagères, leur permettant ainsi de quitter la maison et de poursuivre leurs propres ambitions. Elle est la professionnelle britannique la plus fameuse de sa génération.
Assez curieusement, Haslett n’est pas une élève particulièrement bonne. Elle semble incapable de coudre une boutonnière. Haslett quitte son village avant la Première Guerre mondiale et se rend à Londres pour trouver du travail. Elle se joint rapidement à la Women’s Social and Political Union (WSPU), ce qui alarme beaucoup ses parents conservateurs de classe ouvrière. Révoltée par le refus continu du gouvernement britannique d’adopter un projet de loi qui donnerait aux femmes le droit de vote, cette organisation quasi militaire dirigée par Emmeline Pankhurst, la principale suffragette militante du pays, se tourne de plus en plus vers la violence pour changer les choses. À son tour, le gouvernement fait peu pour mettre fin à la brutalité policière contre les suffragettes. Il instaure même une politique effroyable et unique au monde d’alimentation forcée pour les femmes qui entament une grève de la faim en prison.
Cela vous dérangerait-il si je proposais l’idée que le premier ministre britannique, Herbert Henry Asquith, est un BLINK, voire même un BLINK AU CARRÉ borné de la pire espèce? Incidemment, le rôle de Haslett dans la campagne militante de la WSPU au début des années 1910 est plutôt mineur.
Lorsque la Première Guerre mondiale commence, en 1914, Haslett est commis pour un fabricant de chaudières écossais, Cochran & Company. Alors que de nombreux employés partent pour le front, volontairement ou en tant que conscrits, la jeune femme est promue à plusieurs reprises. À la fin de la guerre, Haslett dirige le bureau de Londres de la compagnie. L’expertise de cette femme au début de la vingtaine étonne les hommes d’affaires et fonctionnaires de carrière qui sont souvent assez âgés pour être son père. Cochran & Company est tellement impressionné par les capacités de Haslett qu’elle lui donne une formation de base d’ingénieur. En 1919, elle devient la première secrétaire de la récemment formée Women’s Engineering Society, de même que la première rédactrice de son magazine. La montée vers la gloire de Haslett ne fait que commencer. Mais revenons à notre histoire.
Au fil des mois, The Inventors’ Club devient une des émissions de télévision les plus populaires de la BBC. Fait assez remarquable, elle le fait avec peu de publicité. En 1951, plus de 500 000 personnes regardent chaque épisode, et ce à un moment où le nombre de téléviseurs au Royaume-Uni est relativement faible mais augmente rapidement (près de 764 000 en 1951 et près de 1 450 000 en 1952). Certaines des personnes qui regardent The Inventors’ Club sont des hommes d’affaires qui appellent souvent la BBC avant la fin d’un épisode, afin de prendre contact avec un(e) inventeuse / inventeur.
Hardern anime l’émission en tant que projet à temps partiel. Un auteur et inventeur à succès nommé Geoffrey Boumphrey est l’évaluateur en ondes de l’émission. The Inventors’ Club est peut-être la seule émission de télévision de la BBC de son temps à échapper aux critiques de la presse britannique, ce qui n’est pas une mince affaire. Curieusement, plusieurs des inventeuses / inventeurs qui envoient des idées regardent rarement, voire jamais, l’émission. Plusieurs / la plupart d’entre elles et eux ne possèdent même pas de téléviseur.
En date de 1955, lorsque l’émission quitte les ondes, les inventeuses / inventeurs ont soumis plus de 7 000 idées au personnel du The Inventors’ Club. Ces personnes viennent de tous les horizons, des directeurs d’entreprises, ingénieurs et acteurs de la BBC aux travailleurs non qualifiés, vendeurs, ménagères et agriculteurs. Hardern présente de 580 à 600 de leurs idées à ses téléspectatrices et téléspectateurs. À leur tour, plus d’un quart de ces idées attirent l’attention d’entreprises britanniques. Si je peux digresser un instant, le nombre d’idées présentées semble un peu élevé compte tenu du nombre d’épisodes de The Inventors’ Club diffusés au fil des ans.
Il est intéressant de noter que The Inventors’ Club est diffusé depuis le Palais Alexandra pendant au moins une partie de son histoire. Pourquoi est-ce intéressant, vous demandez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur sceptique? Et bien, ne vous souvenez-vous pas que le « Ally Pally, » comme cette destination de divertissement très populaire à Londres est communément appelée, est un endroit où Samuel Franklin Cody, un individu mentionné dans un autre numéro d’octobre 2018 de notre blogue / bulletin / machin, présente des spectacles plus d’une fois? Le monde est petit, n’est-ce pas?
Êtes-vous prêt(e)s à entendre (lire ?) quelques lignes sur quelques inventions, ami(e) lectrice ou lecteur? Oui, vous l’êtes. Ne le niez pas. L’idée la plus intéressante diffusée lors du premier épisode de The Inventors’ Club est apparemment un canot de sauvetage insubmersible qui fonctionne tout aussi bien à l’envers qu’à l’endroit. L’inventeur, un certain H.A. Gaskin, Herbert A. Gaskin peut-être, supervise la construction d’un prototype spécialement équipé, le Green Dolphin, apparemment achevé après son passage à l’émission, à bord duquel il souhaite traverser de l’Atlantique. Bien qu’annoncé dans des journaux en 1948, ce voyage épique n’a apparemment pas lieu. On peut dire la même chose du saut des chutes Niagara, à la frontière canado-américaine, que Gaskin tente d’organiser en 1959, par l’intermédiaire de son entreprise, H.A. Gaskin Lifeboats Limited. Dans l’ensemble, il semble que le canot de sauvetage réversible de Gaskin ne dépasse pas le stade du prototype ou de la pré-production.
Fait assez intéressant, un Américain qui passe une grande partie de sa vie au Royaume-Uni brevète un canot de sauvetage insubmersible qui fonctionne tout aussi bien à l’envers qu’à l’endroit au plus tard en 1929. Son nom est, attendez-le, attendez-le, non, pas H.A. Gaskin. Cet individu est un certain Thomas Herbert Gaskin. Votre humble serviteur n’a trouvé de lien direct entre cette personne et H.A. Gaskin mais je soupçonne que les deux hommes sont parents. Ils sont peut-être même père et fils. Quoi qu’il en soit, Gaskin sénior commence à développer son canot de sauvetage vers 1906-08. L’auteur de ces lignes ne peut pas dire s’il est mis en production. D’une certaine manière, j’en doute.
Si votre humble serviteur peut être autorisé à faire une digression pendant 1 minute ou 3, j’aimerais attirer votre attention sur un petit mystère qui a lieu en août 1920 dans un quartier calme de Londres. Non, pas celle de l’Ontario, celle de l’Angleterre. Des mécréants invisibles commencent à lancer des pierres lisses et arrondies de taille variable sur la maison / villa où l’inventeur du canot de sauvetage Gaskin, comme on appelle Gaskin sénior dans les journaux, vit avec sa famille depuis 1906 environ. Les bombardements quotidiens ont lieu le soir alors que les Gaskins vont se coucher. De nombreuses fenêtres des chambres de la façade sont cassées. Le fils de Gaskin est même frappé par un caillou. Curieusement, les pierres ne sont pas lobées sur la résidence. Elles viennent tout droit, comme si tirées plus ou moins horizontalement par un lanceur invisible mais puissant.
Fortement outrés par ces attaques, de nombreuses personnes procèdent à des fouilles approfondies du quartier, avec ou sans l’aide de policiers. Même si beaucoup de ces individus grimpent sur des toits et des arbres pour localiser les coupables, personne ne peut voir d’où viennent les pierres. À vrai dire, certaines personnes surveillant les toits sont frappées. Au fur et à mesure que la nouvelle des bombardements se répand, des foules se rassemblent près de la résidence de Gaskin soir après soir. Quelques jours après le début de ces événements étranges, les policiers, complètement déconcertés, demandent des renforts. En conséquence, un soir, plus de 40 policiers montent la garde dans la maison, dans la rue, sur des toits ou dans des arbres. Malgré tout, les pierres continuent d’arriver. Les attaques nocturnes sur la résidence Gaskin prennent apparemment fin 1 jour ou 3 après cette démonstration de force. Ceci étant dit (tapé?), le Metropolitan Police Service, une organisation renommée connue sous le nom de Scotland Yard, est incapable de résoudre le mystère. Si vous me demandez mon avis, il est vraiment dommage que Sherlock Holmes ne soit pas une vraie personne.
Pour paraphraser le chanteur du groupe new wave américain Talking Heads, dans sa chanson à succès de 1981 Once in an lifetime, vous pouvez vous demander pourquoi j’ai inclus cette histoire dans ce numéro de notre, oh, si sérieux, blogue / bulletin / machin. Votre humble serviteur doit par la présente admettre un intérêt de longue date pour les phénomènes fortéens, en d’autres termes, pour des phénomènes anormaux qui semblent remettre en cause les connaissances scientifiques acceptées. Le terme fortéen est créé en reconnaissance du travail effectué par un auteur et chercheur américain, Charles Hoy Fort, dont les livres sont encore imprimés en 2018, plus de 85 ans après son départ de ce monde. Et oui, l’incident Gaskin est mentionné dans un des livres fascinants de Fort.
En parcourant systématiquement les journaux et les périodiques scientifiques, cet autodidacte à la connaissance encyclopédique du monde met au jour d’innombrables exemples de phénomènes anormaux que les scientifiques rejettent ou ignorent parce qu’ils ne peuvent pas être expliqués. Fort exerce un scepticisme sain dans son travail mais il aime se moquer de l’ordre établi scientifique et de ses prétentions / pomposités. Et je refuse respectueusement, ami(e) lectrice ou lecteur, de répondre à toute question sur le fait que je sois ou non membre d’une organisation fortéenne. Sur cette note, puis-je suggérer que nous revenions au sujet qui nous concerne?
De nombreuses idées présentées aux téléspectatrices et téléspectateurs du The Inventors’ Club sont transformées en produits pouvant être achetés au Royaume-Uni et à l’étranger. Ils ont tendance à refléter les préoccupations du moment. Les inventions ménagères sont particulièrement populaires, par exemple. Une centaine d’hommes dont les épouses adorent le tricotage proposent différents types de bobineuses de laine, par exemple. Près de 100 personnes envoient des concepts de tamis de cendres pour les feux de charbon. Sur une note plus sinistre, quelques individus, presque certainement des hommes, qui d’autre pourrait avoir de telles idées, proposent des machines de punition corporelle pour bâtonner des élèves masculins indisciplinés.
En parlant d’hommes, Hardern affirme que la seule bonne idée envoyée par une inventeuse est un fer à vapeur avec 4 petites jambes rétractables. Votre humble serviteur ne sait pas ce que vous en pensez, mais je ne peux pas dire que j’aime beaucoup cette déclaration. En tout état de cause, le commentaire de Hardern semble ignorer une invention réussie proposée par une propriétaire d’hôtel ayant conçu des moules spéciaux qui donnent des formes exotiques à des carottes et pommes de terre pendant la cuisson. Ces moules sont à ce point réussis qu’elle peut avoir vendu son hôtel pour se consacrer à la conception et à la production de moules plus grands et de meilleure qualité. Ceci étant dit (tapé?), le fait est que les inventeuses ne présentent apparemment que 5% de toutes les idées soumises à l’équipe du The Inventors’ Club. La plupart d’entre elles concernent des équipements de cuisine ou de bureau. D’un autre côté, de nombreux inventeurs masculins soulignent que l’idée qu’ils envoient leur vient de leurs épouses ou sœurs.
Avez-vous une question, ami(e) lectrice ou lecteur? Vous souhaitez avoir un peu de contenu aéronautique et spatial, c’est bien ça? Il y en aura bientôt mais pas maintenant. Voulez-vous lire en lieu et place quelques lignes sur quelques inventions qui sont mises en production? N’en dites (tapez?) pas plus. Voici une brève liste :
- un monte-escalier pour personnes à mobilité réduite;
- un tournevis lumineux visible et trouvable dans le noir;
- un pantalon dont la taille peut être ajustée à n’importe quelle taille;
- un verrou de sécurité avec 10 000 combinaisons pour véhicules à moteur;
- un tube de dentifrice qui se replie comme un accordéon pendant qu’il se vide;
- une bouteille de bière pouvant être ouverte avec n’importe quelle pièce de monnaie;
- un récipient en métal et carton, ou tube de Bickle, utilisé pour les crèmes pour le visage;
- une plomberie domestique qui peut être détachée et réparée avec une touche sur un levier; et
- une machine d’alimentation des porcs dont le mécanisme réduit la consommation de nourriture par 30%.
L’une des idées couronnées de succès présentées au The Inventors’ Club en est une qui semble apparaître chaque fois que des inventeuses / inventeurs se réunissent. Cette idée, vous l’avez compris, est un piège à souris infaillible / imbattable. Richard Evans est un ingénieur qui conçoit des installations de chauffage et des chaudières gigantesques pour son employeur. À la fin des années 1940, il commence à développer un pulvérisateur de charbon pour de telles chaudières. Evans teste son prototype dans un atelier de jardin derrière sa maison. Sachant à quel point la poussière de charbon est sale et inflammable, il teste son pulvérisateur avec du riz. En conséquence, les bancs et étagères de l’atelier sont rapidement recouverts de poussière de riz. Des armées de souris affamées s’y installent. Evans achète évidemment des pièges, mais il découvre rapidement que de nombreux rongeurs savent comment voler l’appât fromagé. Il découvre également à quel point il est douloureux d’avoir un piège se fermer sur un doigt. Il doit y avoir un meilleur moyen, pense Evans, et c’est ainsi qu’il en vient à inventer un meilleur piège à souris.
En vedette sur The Inventors’ Club à la fin de 1949, le dit piège ne passe pas inaperçu. Plusieurs entreprises contactent Evans qui refuse poliment leurs offres. Il choisit de former une petite entreprise qui sous-traite la production du piège. En quelques mois, la firme d’ingénierie légère avec laquelle Evans signe un contrat fabrique 5 000 pièges à souris par semaine. Avant même 1 an, il envisage la possibilité de vendre des licences de production dans des endroits aussi éloignés que les États-Unis et la Nouvelle-Zélande. Votre humble serviteur ne sait pas si Evans conclut un accord. Incidemment, il garde son travail de jour. On ne devenait / devient / deviendra pas riche en fabriquant et / ou en vendant des pièges à souris.
Et oui, ami(e) lectrice ou lecteur, la mangeoire pour les poules dont l’image peut être trouvée au haut de cet article est mise en production. Conçu par un éleveur de volailles, ce casse-tête pour oiseaux sauvages et rats, comme on l’appelle officieusement, comprend une barre de métal de section carrée dont la rotation perturbe les susmentionnés ravageurs à un point tel qu’ils ne touchent pas à la nourriture des poules. La mangeoire se rentabilise ainsi rapidement. Assez curieusement, la barre rotative ne déstabilise pas les poules, comme le voient fort bien les personnes qui regardent un épisode de 1948 du The Inventors’ Club au cours duquel la mangeoire est présentée. L’environnement étrange et les caméras de télévision ne semblent pas trop déstabiliser les poules non plus. L’inventeur de la mangeoire fait apparemment fabriquer 1 000 de ces dispositifs avant son apparition au The Inventors’ Club, afin de répondre aux commandes non sollicitées de personnes ayant entendu parler de son invention. Son apparition à l’émission suscite des milliers de commandes supplémentaires provenant de tout le Royaume-Uni.
Votre humble serviteur aimerait maintenant présenter certaines des inventions qui sont mises à l’épreuve pendant divers épisodes du The Inventors’ Club, mais qui ne sont pas produites. Dans certains cas, une idée apparemment valable ne suscite pas d’intérêt. Dans d’autres, l’invention est, disons, un peu trop insensée. Quoi qu’il en soit, veuillez trouver ci-joint quelques inventions qui ont attiré mon œil baladeur :
- un fauteuil qui se transforme en lit en 4 secondes;
- un chien électrique pour effrayer les cambrioleurs;
- des patins spécialement conçus pour rouler en montée;
- un dispositif, appelé ionette, qui repasse les rides du visage;
- une serviette qui s’attache à un bébé sans épingle à nourrice;
- un tourne-page électrique actionné par pédale pour musiciens;
- un chauffe-pieds pour les personnes allergiques aux bouillottes;
- des feux à main pour cyclistes pour indiquer les virages pendant la nuit;
- des gants avec panneau transparent au poignet, où l’on porterait une montre;
- une crème pour les mains qui transforme la saleté en petites boules qui tombent;
- un silencieux à trompette avec microphone interne et des écouteurs pour le joueur;
- un trou de vidange qui permet à l’eau d’une baignoire de s’écouler sans gargouillis;
- un joug qui verrouille automatiquement la tête d’une vache se nourrissant à une auge;
- un petit moteur qui utilise l’ouverture et la fermeture des portes pour produire de l’énergie;
- une petite voiture électrique que les ménagères peuvent utiliser pour leurs tâches ménagères; et
- une machine à laver qui peut aussi laver et sécher la vaisselle, éplucher des pommes de terre et mélanger de la pâte.
Une autre bonne idée, si je peux me permettre de le dire, est une automobile et bateau à moteur combinés. En arrivant à une marina dans sa voiture spécialement conçue, le fier propriétaire conduit son véhicule sur le pont de son bateau. Le volant et l’essieu moteur de l’automobile se verrouillent alors au gouvernail et à l’hélice du bateau. Le susmentionné propriétaire peut alors naviguer sans quitter son siège.
Il est intéressant de noter qu’une automobile et bateau à moteur combinés est dévoilée en janvier 1958 au Mid-America Boat Show à Cleveland, Ohio. Le bateau à moteur est mis au point par Seamobile Corporation de Cleveland. Il s’appelle William T. Sweeny, à la mémoire d’un constructeur naval des Grands Lacs bien connu, décédé en 1932. Cette automobile et bateau à moteur combinés ne semble pas connaître de succès commercial. Votre humble serviteur ne peut pas dire si ce véhicule est inspiré par la proposition soumise au The Inventors’ Club et… Qu’y a-t-il ? Vous ne me croyez pas? Honte à vous, ami(e) lectrice ou lecteur incrédule comme Thomas. Veuillez noter que cette information est extraite des pages, plus précisément de la page 2, du numéro du 9 novembre 1958 de L’Action catholique, un quotidien de Québec, Québec.
Dans certains cas, votre humble serviteur n’est pas en mesure de déterminer si une idée est mise en production ou pas. L’une d’elles est une corde à linge qui ne nécessite pas l’utilisation d’épingles. Développée par un couple marié, elle se compose de 2 cordes torsadées et tendues. Les vêtements à sécher sont simplement glissés entre les cordes. Une planche à repasser pliable avec siège intégré est une autre idée pour la maison. La planche peut être utilisée comme pupitre. Une autre invention concerne un instructeur de danse automatique. Les élèves debout sur une feuille de verre surélevée posent leurs pieds sur des empreintes de pas projetées par des lumières placées sous celle ci. La couleur des empreintes et la rapidité de leur apparition varient selon le pas de danse. Des flèches clignotantes avertissent les élèves qu’un pas est sur le point d’apparaître.
Une voiture d’enfant à 8 roues proposé par un gentilhomme tchèque en 1948-49 mérite également d’être mentionné. La configuration des 6 roues à l’arrière permet de maintenir la voiture horizontale en toutes circonstances, qu’il s’agisse de monter un escalier ou de descendre une colline. Votre humble serviteur a eu le plaisir de trouver une photo de cette voiture d’enfant.
La voiture d’enfant proposée par le gentilhomme tchèque. Anon., “Moins d’efforts pour la maman.” L’Action catholique, 22 janvier 1949, 7.
D’après la source de tout savoir, Wikipedia, la configuration de roues tri-star que l’on retrouve sur la voiture d’enfant a été brevetée est aux États-Unis en 1965, par 2 ingénieurs de Lockheed Aircraft Corporation. La photo publiée par L’Action catholique plus de 15 ans plus tôt invalide complètement cette affirmation. De nos jours, une des applications les plus courantes de la configuration de roues tri-star est le franchisseur d’escaliers personnes à mobilité réduite. L’application la plus spectaculaire de cette configuration est sans aucun doute le Landmaster, un véhicule amphibie massif et unique conçu et construit pour le film de science-fiction 1977, Les survivants de la fin du monde.
Un inventeur de 15 ans cause tout un émoi au cours de l’été 1952. John A. Lowrie doit se rendre à The Inventors' Club pour présenter un concept d’autobus à 2 étages révolutionnaire. L’adolescent place le moteur de son autobus à l’arrière, ce qui lui permet d’abaisser le plancher et le toit sans réduire la hauteur de plafond. La British Transport Commission est à ce point impressionnée qu’elle accepte qu’un de ses experts interroge Lowrie devant les caméras. Elle demande également à une des sociétés nationalisées sous son contrôle, Bristol Tramways & Carriage Company, de coopérer – et c’est à ce moment que le vous savez quoi frappe le ventilateur.
Vous voyez, ami(e) lectrice ou lecteur, des ingénieurs travaillant pour ce fabricant bien connu et respecté situé à, vous l’aurez deviné, Bristol, Angleterre, travaillent sur un concept d’autobus similaire depuis 1949, sans trop de succès. Ils ne souhaitent pas être ridiculisés par un adolescent. En conséquence, le patron de Bristol Tramways & Carriage refuse de se conformer à la demande de la susmentionnée commission. Que cet individu ait changé d’avis, volontairement ou pas, n’est pas clair. Votre humble serviteur ne peut que présumer que Lowrie présente son concept lors d’un épisode de 1952 de The Inventors’ Club.
Croiriez-vous que Lowrie remporte un prix national d’ingénierie avant l’âge de 20 ans? Comme vous l’avez deviné, il devient ingénieur. Cette personne exceptionnellement douée rejoint le personnel de Nottingham City Transport à la fin des années 1950. Un autobus urbain à 2 étages très perfectionné qu’il conçoit pour cette organisation s’avère très efficace. Lowrie devient finalement directeur de l’ingénierie chez Nottingham City Transport Limited, le nom de l’organisation de transport en commun de la ville après sa privatisation en 1986. Il prend sa retraite en 2002 mais ne reste pas inactif. Lowrie passe du temps à développer des technologies de moteurs diesel (et à essence?) avec des ingénieurs et des chercheuses / chercheurs universitaires et industriels.
Avez-vous une question, ami(e) lectrice ou lecteur? Ah oui, le contenu aéronautique et spatial. Vous êtes persistant(e), je vous l’accorde. Après beaucoup de recherches, votre humble serviteur pense avoir un petit bijou pour vous, ami(e) lectrice ou lecteur parfois agaçant(e). L’idée la plus innovante et la plus inhabituelle proposée à l’équipe du The Inventors’ Club vient sans doute d’un homme âgé qui invente une poudre très spéciale. Avant de monter dans un avion ou un hélicoptère, il suffit à une personne de mettre dans ses poches un peu de cette poudre, dont les ingrédients sont un secret bien gardé. Si une urgence en vol se produit, cette personne n’a qu’à quitter le susmentionné avion ou hélicoptère pour descendre lentement vers le sol. Fortement intrigué par cette idée remarquable, Hardern demande à l’inventeur s’il serait disposé à la démontrer en sortant d’une fenêtre du sixième étage d’un immeuble, probablement celui de la BBC. Le vieil homme refuse catégoriquement. Et non, son invention n’a pas été montrée aux téléspectatrices et téléspectateurs.
Le dernier épisode de The Inventors’ Club est diffusé vers 1955. Vous pouvez être heureux de lire ou non, votre choix, que cette émission de télévision inspire le développement d’une version française. Diffusé par Radiodiffusion-Télévision française, le Club des inventeurs est une émission hebdomadaire de 30 minutes diffusée pendant un nombre d’années encore indéterminé au cours des années 1950. Toute information que vous pourriez trouver sur ce joyau gaulois, ami(e) lectrice ou lecteur, serait la bienvenue.
Croiriez-vous que l’idée qui sous-tend The Inventors’ Club se révèle beaucoup plus populaire en Australie que dans son pays natal? Produit par la chaîne publique Australian Broadcasting Corporation (ABC), The Inventors entre en ondes en 1970. Lancée en tant que bouche trou estival à petit budget, cette émission hebdomadaire d’une demi-heure devient une des émissions télévisées les plus populaires de ce pays de l’autre côté de la Terre. Plus de 60% des centaines d’inventions présentées à ses téléspectatrices et téléspectateurs finissent par être produites. L’épisode final de The Inventors est diffusé en 1982. Avant cette date, une chaîne privée, Nine Network, filiale de Nine Entertainment Company, crée une émission concurrente qui remplace sa rivale, en partie grâce à son utilisation de membres de son comité d’évaluation, débauchés à cet effet. What’ll They Think Of Next? existe pour un nombre d’années encore indéterminé. Croiriez-vous qu’un descendant de ABC, ABC1, lance The New Inventors en mars 2004? Cette émission hebdomadaire très populaire d’une demi-heure dure jusqu’en août 2011. Les Australiennes et Australiens semblent vraiment aimer leurs inventeuses / inventeurs, n’est-ce pas?
Votre humble serviteur se demande pourquoi des télédiffuseurs d’état comme la Canadian Broadcasting Corporation et son homologue francophone, la Société Radio-Canada, ne produisent apparemment jamais d’émission comme The Inventors’ Club.
On pourrait en dire (taper ?) un peu plus sur ces émissions française et australiennes, les inventions et les différents membres des panels d’évaluation, mais les doigts que j’utilise pour taper, et il n’y en a que 2, sont fatigués. Donc, toutes mes excuses pour ce texte inhabituellement long et verbeux. Croirez-vous que votre humble serviteur a songé à abandonner ce sujet parce que je craignais qu’il n’y ait pas assez d’informations disponibles? En tout cas, je souhaite remercier toutes les personnes qui ont fourni des informations. Toute erreur contenue dans cet article est de ma faute, pas de la leur. À la revoyure, mon pote.