Si loin de chez lui : Le Bellanca CH-300 Pacemaker du Musée de l’aviation et de l’espace du Canada, Partie 1
Vous aurez sans aucun doute remarqué, ami(e) lectrice ou lecteur, oh si observatrice / observateur, la présence de quelques automobiles, des voiturettes pour être plus précis, dans des récents numéros de notre blogue / bulletin / machin. Ce n’est pas que votre humble serviteur aime vraiment les automobiles. J’étais simplement intrigué par l’existence de ces véhicules.
Cette semaine, je voudrais assumer ma passion pour l’aviation, pour une fois. Voyons donc l’histoire d’un avion, et celle de son concepteur, à travers une photographie trouvée dans le numéro de février 1945 d’un mensuel américain depuis longtemps disparu, Air Trails Pictorial, dont le nom a changé plus d’une fois au fil des ans, de Bill Barnes, Air Adventurer à Air Trails – Hobbies for Young Men, mais revenons à notre histoire.
Giuseppe Mario « Joe / G.M. » Bellanca naît en mars 1886, en Sicile. Enfant, il fait souvent voler des cerfs-volants. En tant que jeune homme, il veut rejoindre le monde universitaire. En 1908, Bellanca obtient un certificat d’enseignement en mathématiques et un diplôme en génie et en mathématiques, au Istituto Tecnico Superiore de Milan, Italie, et à la Politecnico di Milano, également à Milan. Certains de ses premiers travaux concernent les hélices marines. Sa découverte de l’aviation met un terme aux plans de carrière de ce jeune homme plein d’humour, petit, opiniâtre, gentil et élancé. Bellanca rédige des articles (signés?) pour des magazines d’aviation italiens et français dès 1907, par exemple.
En 1908, il s’associe à 2 jeunes Italiens, Paolo Invernizzi et un collègue ingénieur, Enea Bossi. Le père de ce dernier finance le développement de la machine volante qu’ils conçoivent, construisent et testent en 1909. Ce biplan est un des premiers avions véritablement italiens. Bellanca peut l’avoir gravement endommagé lors des essais; comme presque toutes et tous les passionné(e)s d’aviation de l’époque, il ne sait pas comment piloter, ni comment construire un avion réussi d’ailleurs. En 1910, Bellanca complète un avion de sa propre conception. On ignore si ce biplan vole. Bellanca est peut-être trop pauvre pour acheter un moteur.
Si je peux me permettre une digression de 1 seconde ou 65, Bossi immigre aux États-Unis en 1914. Tout en travaillant pour Edward G. Budd Manufacturing Company, il supervise la conception du premier aéronef, et un des vraiment rares, fabriqués principalement en acier inoxydable. Complété en 1931 par American Aeronautical Corporation, une firme dirigée par Bossi, l’amphibie quadriplaces BB1 Pioneer est inspiré par l’amphibie S-31 conçu par Società Idrovolanti Alta Italia. De fait, American Aeronautical est fondée en octobre 1928 pour produire les hydravions et amphibies de la compagnie italienne pour les marchés nord- et sud-américains. Malheureusement, l’acier inoxydable ne s’avère pas un matériau pratique pour la construction d’aéronefs et seulement 1 Pioneer est construit. Il est exposé devant le Franklin Institute de Philadelphie, Pennsylvanie, en 1934, sans le revêtement en tissu de ses ailes et empennage. En 2020, le Pioneer est toujours là.
En 1936-37, Bossi conçoit et supervise la construction d’un des aéronefs à propulsion humaine les plus réussis de son époque. Construit en Italie en réponse à un prix offert par le gouvernement dirigé par le Partito Nazionale Fascista, une organisation peu ragoutante dirigée par Benito Amilcare Andrea Mussolini, une brute pompeuse et dictateur bouffon mentionné dans quelques numéros de notre blogue / bulletin / machin depuis août 2018, le Pedaliante propulsé par pédale effectue jusqu’à 80 vols, dont le premier vol à propulsion humaine soutenu. On ignore s’il prend l’air propulsé uniquement par son pilote qui pédale comme un dingue, mais revenons à notre histoire.
Devrais-je mentionner que l’époustouflante collection du Musée de l’aviation et de l’espace du Canada à Ottawa, Ontario, comprend un ornithoptère / aéronef à ailes battantes à propulsion humaine? Conçu par des étudiant(e)s du University of Toronto Institute for Aerospace Studies (UTIAS), le Snowbird crée une réelle effervescence partout dans le monde, en août 2010, lorsque son pilote, Todd Reichert, effectue le premier vol contrôlé et soutenu effectué par un ornithoptère à propulsion humaine. Cet événement est reconnu par la Fédération Aéronautique Internationale, une organisation mentionnée dans quelques / nombreux numéros de notre blogue / bulletin / machin depuis janvier 2018. UTIAS, quant à lui, est mentionné dans des numéros de janvier 2018, février 2019 et août 2019 de cette même publication hénaurmément connue. Ce numéro d’août 2019 de notre vous savez quoi contient des informations sur le Snowbird, mais vous le saviez déjà, n’est-ce pas, ami(e) lectrice ou lecteur? Mais revenons à notre histoire.
Dans les mois qui suivent l’émigration de sa famille aux États-Unis, en 1911, Bellanca conçoit un monoplan monoplace. Il le construit avec l’aide de ses parents et de ses frères et / ou sœurs, dans la cave de la maison familiale et / ou à l’arrière d’une épicerie appartenant à un des frères. Bellanca apprend vite à piloter tout seul. En novembre 1912, l’aviateur en herbe fonde Bellanca Aeroplane Company and Flying School. Un de ses élèves est Fiorello Henry La Guardia. Le futur pilote de la Première Guerre mondiale et maire de New York, New York, apprend à Bellanca à conduire sur sa Ford Modèle T.
Bellanca rejoint le département aéronautique de Maryland Pressed Steel Company en 1916. Il conçoit un trimoteur pouvant transporter environ 12 passagères ou passagers qui suscite l’intérêt du gouvernement britannique. Ce dernier peut, je répète peut, espérer utiliser cette machine comme avion de bombardement. Le manque de financement empêche la compagnie d’aller de l’avant. Bellanca conçoit également 2 biplans à 1 ou 2 places à faible puissance. Le Modèle CD est testé en vol à la fin de l’hiver 1917-18 ou au début du printemps. Le Maryland Pressed Steel en construit une poignée. Le Modèle CE, plus puissant, est testé vers mars 1919. Un seul est complété.
À ce moment-là, le directeur des ventes du département aéronautique de Maryland Pressed Steel met en avant l’idée d’utiliser l’un ou l’autre de ces avions dans les services de taxi volant qu’il veut mettre en place dans les grands parcs de New York et d’autres grandes villes de l’est des États-Unis. Le directeur de ce Air Pilots’ Bureau est un personnage haut en couleur du nom de Harry E. Tudor ayant dirigé un spectacle d’animaux sauvages bien connu, la Bostock Jungle, avant la Première Guerre mondiale. Malheureusement, le projet de taxi volant ne voit pas le jour
Les efforts plus ou moins contemporains de Tudor pour vendre les biplans de Bellanca comme « l’aéroplane pour l’homme moyen » s’avèrent également inutiles. Il y a tout simplement trop d’avions de surplus de guerre bon marché sur le marché. Incapable comme elle l’est d’obtenir des commandes civiles ou militaires, Maryland Pressed Steel sombre en 1920. Le seul et unique Modèle CE est peut-être vendu à un ancien mécanicien et pilote forain. Clarence Duncan Chamberlin peut également avoir acheté quelques Modèles CE incomplets.
Bellanca rejoint North Platte Aircraft Company peu de temps après avoir quitté Maryland Pressed Steel. Cette firme mal connue sombre avant d’avoir le temps de construire le plus récent concept de Bellanca. Une autre entreprise, Omaha Aircraft Company, offre un peu d’argent à Bellanca, mais elle s’effondre rapidement. Le début de l’après-guerre, inondé comme il l’est par des avions de surplus de guerre bon marché, n’est pas bon pour les petits nouveaux qui tentent de s’établir. Victor H. Roos, un des plus grands distributeurs du Midwest américain des motos et bicyclettes de Harley Davidson Motor Company, reprend le flambeau, avec l’aide d’un ingénieur en mécanique de Union Pacific Railway Company.
Et oui, Harley Davidson Motor est mentionnée dans des numéros d’août et novembre 2018 de notre blogue / bulletin / machin.
Bellanca peut ainsi compléter un seul exemple du Modèle CF Air Sedan, un monoplan à cabine à aile haute très efficace et innovant et l’ancêtre des concepts ultérieurs de Bellanca. Équipé d’un moteur acheté dans un dépotoir, le Air Sedan à 5 places est le premier avion équipé des larges haubans en forme d’ailes qui deviennent la marque de commerce de Bellanca. Roos-Bellanca Aircraft Company est créée en 1922 pour commercialiser le Air Sedan et les futurs concepts de Bellanca.
Le Air Sedan remporte environ 13 prix d’efficacité, d’endurance et de vitesse dans divers événements, en 1922-23. Dans une tentative de publicité, Bellanca et ses associés organisent même 2 mariages distincts à bord de l’avion. Malheureusement, le Air Sedan ne trouve aucun preneur. Comme il est dit (tapé?) plus haut, il y a trop d’avions de surplus de guerre bon marché en vente à l’époque. Roos-Bellanca Aircraft ferme ses portes vers 1923.
Yellow Air Cab Company, une filiale éphémère de la bien connue Yellow Cab Company créée en mai 1929, achète le Air Sedan dans l’espoir de mettre en place un service de taxi aérien. Elle modifie l’avion mais cesse ses activités avant que tout service ne puisse commencer. Soit dit en passant, le Air Sedan, maintenant entièrement restauré, est exposé au Steven F. Udvar-Hazy Center du National Air and Space Museum (NASM), à Chantilly, Virginie. Vous vous souviendrez bien sûr que le NASM, un musée connu mondialement, est mentionné dans quelques / plusieurs numéros de notre vous savez quoi depuis novembre 2017.
En 1924, le géant américain de l’aéronautique Wright Aeronautical Corporation engage Bellanca pour concevoir un avion qui mettrait en valeur les capacités d’un nouveau moteur en étoile refroidi par air qu’elle a développé, le Whirlwind, un des moteurs d’aéronefs les plus importants du 20ème siècle. Basés sur le Air Sedan, le très efficace mais éphémère Wright Bellanca WB-1 et son successeur, le WB-2 plus puissant, achevés en 1925 et 1926, sont les prédécesseurs immédiats des concepts subséquents de Bellanca. Le WB-1 fait ses débuts aux New York Air Races d’octobre 1925 et remporte une compétition d’efficacité. Malheureusement, il est détruit dans un accident avant que Wright Aeronautical ne puisse l’utiliser pour établir un nouveau record d’endurance.
Le WB-2, quant à lui, est l’avion à battre en 1926-27. Curieusement, Wright Aeronautical décide de ne pas mettre ce nouveau concept en production. De fait, elle se retire à toute fin utile de la fabrication d’avions. La firme pense peut-être que les commandes militaires importantes pour son moteur Whirlwind la maintiendraient à flot. D’un autre côté, elle ne veut peut-être pas contrarier les avionneurs établis en quête de moteurs.
Au début de 1927, Bellanca et un homme d’affaires / magouilleur / sportif millionnaire du nom de Charles Albert Levine forment Columbia Air Liners Incorporated, une firme bientôt rebaptisée Columbia Aircraft Corporation, pour acquérir le WB-2 et ses droits de production. Columbia, comme on l’appelle depuis la fin avril, attire l’attention d’un jeune aviateur qui prépare un vol en solo à travers l’Atlantique. Incapable de l’acheter car il ne peut accepter la demande de Levine que ce dernier choisisse l’équipage, Charles Augustus Lindbergh peut bientôt atteindre son objectif et gagner l’immortalité. Columbia, quant à lui, est utilisé sur quelques vols longue distance, dont 2 transatlantiques. Et oui, ami(e) lectrice ou lecteur fana d’aviation, Lindbergh est mentionné dans quelques numéros de notre blogue / bulletin / machin depuis septembre 2017.
Le premier des susmentionnés vols transatlantiques a lieu au début de juin 1927. Le tout aussi susmentionné Chamberlin est aux commandes. Lui et le premier passager à effectuer la traversée, Levine lui-même, volent sans escale des États-Unis vers l’Allemagne. Après avoir fait le plein, Chamberlin décolle en direction de Berlin. Il doit atterrir dans une tourbière, à une centaine de kilomètres (environ 65 milles) au sud-est de la capitale allemande, et casse son hélice. Une nuée de gens de l’endroit sort Columbia de la boue. Une hélice allemande est ensuite placée sur l’avion. Les foules de Berlinoises et Berlinois qui attendent à l’aéroport explosent de joie lorsque Chamberlin et Levine atterrissent. Avec ce grand voyage, Chamberlin établit un nouveau record du monde de distance (environ 6 300 kilomètres / 3 900+ milles).
Le second vol transatlantique de Columbia est le premier effectué par un Canadien. Le pilote vétéran de la Première Guerre mondiale James Errol Boyd vole de Harbour Grace, Terre-Neuve, aux îles Scilly, ou Sorlingues, au large des côtes du Royaume-Uni, au début d’octobre 1930. Il le fait avec un pilote / navigateur américain nommé Harry P. McLean Connor. Une canalisation de carburant obstruée les empêche d’établir un nouveau record du monde de distance. Au moment du vol, le WB-2 a été rebaptisé Maple Leaf, d’après la célèbre chanson de 1867 et hymne canadien non officiel The Maple Leaf Forever.
Et oui, Chamberlin, Boyd et Columbia / Maple Leaf sont mentionnés dans un numéro de septembre 2018 de notre vous savez quoi.
Le WB-2, le plus célèbre de tous les avions Bellanca, est perdu dans un incendie à l’usine de Bellanca, en janvier 1934, alors que Paramount Publix Corporation est sur le point de commencer le tournage d’un film détaillant sa carrière.
Bellanca est à ce point contrarié par le refus de Levine de laisser Lindbergh acquérir Columbia qu’il rompt avec lui et fonde Bellanca Aircraft Corporation of America vers le milieu de 1927. Sa renommée grandissante est telle qu’il se retrouve sur la couverture d’un numéro de juillet du magazine Time.
Au cours de la seconde moitié de 1927, Bellanca supervise la construction d’une version améliorée du WB-2. On espère que le Modèle J établirait un nouveau record d’endurance. À la suite de discussions avec Bellanca, Keystone Aircraft Corporation envisage la possibilité de construire de tels avions pour transporter le courrier. Le projet échoue rapidement. Cela étant dit (tapé?), Bellanca attire rapidement l’attention de 1 ou 2 membres de la riche et puissante famille du Pont, qui sont désireux de profiter du boom en aviation qui suit le vol de Lindbergh.
Au moment où une nouvelle firme, Bellanca Aircraft Corporation, est fondée, en décembre 1927, le ou les du Pont ne sont plus impliqués dans le projet. Avec 51% des actions, Bellanca peut enfin contrôler son propre destin. Il profite de cette occasion pour transformer le concept de base du WB-2 en une série de monoplans à cabine à aile haute très efficaces connus sous de nombreuses désignations et noms de modèles (CH-200, CH-300, CH-300 Pacemaker, CH-400 Skyrocket, E Pacemaker, F Pacemaker, 8 Pacemaker, J, PM-300 Pacemaker Freighter, 31-42 Senior Pacemaker, 31-55 Senior Skyrocket, etc.). Curieusement, seulement 155 à 185 de ces avions sont construits au cours des années 1920, 1930 et 1940, dont 13 au Canada, mais ceci est une autre histoire, et… D’accord, d’accord, éteignez les torches. Votre humble serviteur va aborder les avions Bellanca fabriqués au Canada, mais pas les autres, point final.
Les compétitions remportées par de nombreux pilotes célèbres pilotant les nouveaux avions Bellanca démontrent rapidement leurs qualités exceptionnelles, offrant ainsi la meilleure publicité possible à Bellanca Aircraft et Bellanca lui-même. Un exemple remarquable devrait suffire. Lors de l’édition de 1929 des National Air Races, qui se tiennent à Cleveland, Ohio, des avions Bellanca remportent 5 des 7 compétitions. Capables de transporter des charges plus lourdes que des rivaux de taille similaire, ces machines s’avèrent très populaires auprès des pilotes intéressé(e)s à établir des records de distance ou d’endurance.
Si je peux me permettre une brève digression, certains des avions produits par Bellanca Aircraft sont démontrés par une jeune pilote battante de records engagée vers 1930-31. Connue sous le nom de « Flying Flapper of Freeport, » Elinor Regina Patricia Smith a 17 ans lorsqu’elle établit un nouveau record d’endurance en solo pour les femmes (26 heures 21.5 minutes), en avril 1929, dans un avion Bellanca. Elle établit également un éphémère record d’altitude pour les femmes en mars 1930 en utilisant une machine similaire.
Les avions Bellanca sont impliqués dans un certain nombre de vols longue distance à la fin des années 1920 et au début des années 1930. Votre humble serviteur aimerait pouvoir dire que tous ceux-ci sont réussis mais, malheureusement, quelques personnes perdent la vie. Outre des vols longue distance, des avions Bellanca établissent également des records d’endurance. Encore une fois, quelques personnes perdent la vie.
En février 1929, le pilote d’essai en chef de Bellanca Aircraft pendant un certain temps, George William Haldeman, et un mécanicien du nom de James F. Hayden effectuent le premier vol sans escale entre le Canada et Cuba. Ils quittent Walkersville, Ontario, le 23 février, 20 ans jour pour jour après le premier vol contrôlé et soutenu d’un avion à moteur au Canada, et atteignent La Habana sans problèmes indus.
Le vol du 23 février 1909, dis-je, est effectué par un jeune ingénieur canadien, John Alexander Douglas McCurdy, à bord d’un avion qu’il a conçu. Le Aerodrome No. 4 Silver Dart est la machine la plus réussie développée par la Aerial Experiment Association (AEA), un groupe fondé au Canada en 1907 par l’inventeur américain d’origine écossaise Alexander Graham Bell. Et oui, ami(e) lectrice ou lecteur, vous avez bien raison de penser que Bell, McCurdy et la AEA nous sont connu(e)s. Elle et ils sont mentionné(e)s dans des numéros précédents de notre vous savez quoi :
- Bell, dans des numéros d’octobre 2018, novembre 2018 et juillet 2019, et
- McCurdy, dans des numéros de septembre 2017, octobre 2018 et novembre 2019.
La AEA, en revanche, est mentionnée à quelques reprises depuis octobre 2018, mais je digresse.
En mai 1931, Walter Edwin Lees et Frédéric A. Brossy, chef pilote d’essai et pilote de Packard Motor Car Company, demeurent en l’air 84 heures 33 minutes. Leur Bellanca Modèle J, qui est propulsé par un moteur diesel Packard, est probablement le premier aéronef de l’histoire à transporter un poêle à flamme nue pour faire du thé et café. Ce vol est considéré comme la plus grande réussite dans l’aviation aux États-Unis en 1931. En conséquence, Packard Motor Car reçoit le Aero Club of America Trophy, une récompense annuelle convoitée officieusement connue sous le nom de trophée Collier. Néanmoins, l’espoir de la compagnie que les ventes de moteurs diesel d’aéronef augmenteraient s’avère infondé. Ce type de moteur n’a jamais percé aux États-Unis.
Cela étant dit (tapé?), le record d’endurance établi par Lees et Brossy se maintient jusqu’en décembre 1986 lorsque le Rutan Modèle 76 Voyager et son équipage, Jeana Lee Yeager et Richard Glenn « Dick » Rutan, effectuent un vol sans ravitaillement autour du monde, achevé en 9 jours et pas tout à fait 4 minutes. Remarquablement, le record d’endurance établi par Lees et Brossy reste invaincu dans la catégorie des aéronefs à moteur diesel. Et non, Rutan n’est pas le concepteur du Voyager. Son frère, Elbert Leander « Burt » Rutan, l’est.
Il convient d’ajouter que les avions dérivés du WB-2 sont également populaires aux États-Unis auprès d’un certain nombre de firmes privées, d’opérateurs charter, d’étoiles de cinéma et d’agences gouvernementales. Le Bureau of Air Commerce du United States Department of Commerce, par exemple, utilise 8 Pacemaker au plus tard au milieu de 1933. Le trio de Skyrocket achetés par la United States Navy, quant à eux, sont les seuls descendants du WB-2 à porter des marques militaires américaines. Ils sont utilisés pour des tests radio et du travail de transport léger.
Les concepts de Bellanca Aircraft connaissent un succès relativement important en Amérique latine. La Arma de Aviación del Ejército Nacional, le corps aérien de l’armée de la République dominicaine, reçoit 2 Pacemaker vers 1932. À la fin de 1933, la Arma de Aviaçăo do Exército, ou corps aérien de l’armée brésilienne, a 12 Pacemaker équipés pour la cartographie photographique et d’autres fonctions. De plus, une compagnie aérienne de fret / brousse hondurienne, Transportes Aéreos Centroamericanos Sociedad Anónima, utilise 7 avions Bellanca. Au Mexique, Transportes Aéreos de Chiapas Sociedad Anónima en utilise 5 autres.
Près de 20 descendants du WB-2 arrivent au Canada dans les années 1920 et 1930, soit 11 machines civiles et 7 utilisées par l’Aviation royale du Canada (ARC), une force aérienne alors connue en français sous le nom de Corps d’aviation royal canadien mentionnée dans plusieurs numéros de notre blogue / bulletin / machin depuis novembre 2017. Le premier avion Bellanca importé au Canada et très probablement le premier avion Bellanca équipé de flotteurs est un Pacemaker appartenant à Andrew Sidney Dawes. Le directeur général et vice-président de la Atlas Construction Company basée à Montréal, Québec, l’utilise pour les affaires et loisirs, ce qui signifie des voyages de chasse. Les transports aériens de brousse canadiens qui utilisent des avions sur skis / hydravions à flotteurs Bellanca comprennent Canadian Airways Limited, Commercial Airways Limited et General Airways Limited.
Vers 1936, Dominion Skyways Limited de Rouyn, Québec, établit une filiale à Terre-Neuve, un territoire sous contrôle britannique jusqu’en 1949. Newfoundland Skyways Limited utilise ses 2 avions d’occasion pour transporter des prospecteurs et géologues vers des sites miniers potentiels au Labrador.
Il convient de noter que Canadian Vickers Limited de Montréal fabrique 6 Pacemaker pour l’ARC en 1931 à partir de structures de fuselage fournies par Bellanca Aircraft. Un d’eux est par la suite équipé d’un pilote automatique expérimental, le premier jamais utilisé au Canada, conçu au Royaume-Uni par le Royal Aircraft Establishment, une organisation connue mondialement mentionnée dans des numéros de septembre et octobre 2018 de notre blogue / bulletin / machin.
Les Pacemaker utilisés par l’ARC servent principalement à la cartographie photographique, une des activités les plus importantes de ce service pendant l’entre-deux-guerres. Au début des années 1930, le Conseil national de recherches du Canada et la Division du Génie aéronautique de l’ARC développent des supports capables de transporter plus d’une caméra. Ils testent un support double sur un Pacemaker au cours de l’hiver 1932-33. Un support triple suit en mars. Des versions améliorées du support triple comprenant une pièce moulée en magnésium sont utilisées sur les hydravions à flotteurs de cartographie photographique de l’ARC à partir de 1936.
Et oui, vous avez en effet tout à fait raison, ami(e) lectrice ou lecteur qui conserve religieusement chaque numéro de ce blogue / bulletin / machin, Canadian Vickers est mentionnée à quelques reprises depuis septembre 2018.
Fait intéressant, un groupe d’hommes d’affaires canadiens crée une compagnie associée à Bellanca Aircraft mais indépendante de celle-ci au début de 1930. Ils n’acquièrent jamais d’usine. Plus intéressant encore, le vice-président de Bellanca Aircraft of Canada Limited et Bellanca Aircraft est Robert Bernard Cornelius Noorduyn. Ce gentilhomme né aux Pays-Bas rejoint le personnel de Bellanca Aircraft au printemps 1929. Il quitte les compagnies américaine et canadienne à la fin de 1931 ou au début de 1932. En 1934, Noorduyn fonde Noorduyn Aircraft Limited, une compagnie connue plus tard sous le nom de Noorduyn Aviation Limited. L’avion qu’il conçoit et construit à Cartierville, Québec, le Noorduyn Norseman, est un des avions de brousse les plus réussis du 20ème siècle. Le Musée de l’aviation et de l’espace en a un dans sa collection, évidemment.
Et oui, Noorduyn et sa création sont mentionné(e)s dans des précédents numéros de notre blogue / bulletin / machin. Dois-je mentionner ces numéros, ami(e) lectrice ou lecteur? Oui, c’est une question rhétorique. Dans le cas de Noorduyn, ces mentions sont dans quelques numéros depuis janvier 2019. Le Norseman, quant à lui, est mentionné dans des numéros de janvier, mai et mai 2019 du dit blogue / bulletin / machin.
Consciente que les avions de brousse volant au Canada à la fin de la Seconde Guerre mondiale ne sont plus jeunes jeunes et que les concepts de Bellanca y sont très appréciés, une petite firme basée à Edmonton, Alberta, Northwest Industries Limited, acquiert la licence du susmentionné Senior Skyrocket. Son personnel le repense en profondeur et réussit à obtenir des commandes pour une cinquantaine d’avions, dont quelques-unes pour l’exportation (vers l’Alaska?).
Malheureusement, alors que la production du Senior Skyrocket commence, au début de 1946, le prix de l’or et la valeur du dollar canadien chutent. La plupart des opérateurs de brousse annulent leurs commandes suite au ralentissement de l’exploration minière. Remarquez, la disponibilité de Norseman autrefois militaires, à savoir ceux utilisée par l’ARC et les United States Army Air Forces, disponibles à faible coût, n’aident pas les choses. En fin de compte, Northwest Industries ne construit que 13 Senior Skyrocket. Aucun d’eux n’est exporté.
Jusqu’au milieu des années 1950, Bellanca Aircraft elle-même envisage peut-être la possibilité de relancer la production d’avions comme les Senior Pacemaker et Senior Skyrocket. Le début de la guerre de Corée, en juin, peut avoir mis fin à de telles pensées.
J’aurais aimé qu’il y ait du temps, ou de l’espace, pour raconter certaines des aventures vécues par des pilotes, membres d’équipage et passagères / passagers d’avions Bellanca dans les années 1920 et 1930. La triste vérité est qu’il faudrait probablement l’équivalent d’une bibliothèque de taille moyenne pour le faire. Compte tenu de cela, je vous dis au revoir et adieu, jusqu’à la semaine prochaine et la partie 2 de notre histoire.