À l’époque, ça semblait être une bonne idée : Les bananes du Cameroun britannique et l’aéroglisseur Cushioncraft CC1
Comment allez-vous en ce jour, ami(e) lectrice ou lecteur?
Votre humble serviteur a un aveu à faire : il y a autre chose dans la vie que les avions – et je dois remercier une ancienne collègue de l’avoir souligné il y a de nombreuses années. (Bonjour, CF!) Une liste d’items couverts dans cette catégorie non aéronautique serait très longue. Toute liste digne de ce nom devrait cependant inclure les bières de style belge, et non, pas une infusée au piment serrano, les dinosaures et les ptérosaures (Bonjour, SB, EG et EP!), ainsi que les véhicules à coussin d’air. En d’autres termes, les aéroglisseurs. Qu’est-ce qu’un aéroglisseur, demandez-vous? La question en soi est douloureuse. Elle montre à quel point les gens oublient une machine polyvalente qui promettait de révolutionner le transport dans des zones assez plates où les véhicules conventionnels ne pouvaient pas, et ne peuvent toujours pas, passer – de la toundra arctique aux marais équatoriaux.
Un aéroglisseur utilise des ventilateurs de types variés pour accumuler un énorme volume d’air sous sa coque. Cet air est typiquement contenu dans une jupe flexible. Une ou des hélices entraînées par le ou les moteurs fournissent généralement la poussée nécessaire pour déplacer l’aéroglisseur. Canaliser une partie de l’air aspiré par les ventilateurs fonctionne tout aussi bien, au moins pour les véhicules relativement petits.
Ce que votre humble serviteur a trouvé dans l’édition d’août 1960 du tristement disparu magazine mensuel Canadian Aviation est une photographie avec légende.
L’histoire de l’aéroglisseur dans cette photographie commence sans doute en 1946, au Royaume-Uni, à la de Havilland Aeronautical Technical School, une école technique fondée par de Havilland Aircraft Company Limited, une avionnerie très connue mentionnée dans des numéros de février 2018 et septembre 2019 de notre blogue / bulletin / machin.
Forester Richard John Britten et Nigel Desmond Norman, nés respectivement en mai 1928 et août 1929, se rencontrent dans cette école en 1946 et deviennent rapidement de bons amis. Après avoir terminé leurs études, ce duo dynamique conçoit, construit et font courir quelques voiliers de course à la fin des années 1940 et, peut-être, au début des années 1950.
Britten et Norman, tous deux pilotes à l’époque, conçoivent, construisent et testent, en mai 1951, le Britten Norman BN-1 Finebee. Cet avion léger / privé monoplace conçu en partie pour aider à relancer le vol privé au Royaume-Uni rencontre cependant des problèmes et n’est pas mis en production.
Britten et Norman fondent Britten-Norman Limited, une firme mentionnée dans un numéro de mai 2018 de notre vous savez quoi, en 1953. À cette époque, les 2 hommes ont réalisé que les avions peuvent jouer un rôle important dans la lutte antiparasitaire. S’associant à un pilote australien, un pionnier de l’aviation agricole dans ce pays en fait, James « Jim » McMahon, ils acquièrent quelques biplans d’entraînement élémentaire de Havilland Tiger Moth (Bonjour, EP!) des surplus de guerre et les convertissent en avions agricoles. Une partie du travail est effectuée dans une église déconsacrée. Quelques Tiger Moth sont exportés vers la Nouvelle-Zélande.
Une société d’application agricole basée en Grande-Bretagne, Crop Culture Limited, plus tard connue sous le nom de Crop Culture (Aerial) Limited, est créée vers 1955. En peu de temps, elle devient une des plus grandes entreprises de ce type au monde, avec jusqu’à 80 aéronefs dans sa flotte. Britten, Norman et McMahon pilotent apparemment des avions agricoles en Afrique, dans des endroits comme le Soudan anglo-égyptien et le Cameroun britannique, pendant les premiers jours de la firme.
Fait intéressant, du moins pour votre humble serviteur, Britten et Norman forment Micronair Limited en avril 1956 pour développer et produire l’atomiseur rotatif récemment conçu par l’Austro Britannique Thomas Julius Bals afin de réduire tant la quantité de produits chimiques nécessaires pour détruire les ravageurs que la pollution qui en résulte. Le système de pulvérisation développé par Micronair constitue la base des systèmes utilisés dans le monde entier pendant plusieurs années après cette date.
En pulvérisant des bananeraies au Cameroun britannique, un territoire sous tutelle des Nations Unies en Afrique contrôlé par le Royaume-Uni, Britten et Norman voient à quel point il est difficile de transporter ces fruits fragiles des dites plantations vers les navires qui les acheminent en Europe et en Amérique du Nord. Une fois de retour au Royaume-Uni, ils décident de concevoir, vous l’aurez deviné, un aéroglisseur – le second au monde à être testé en fait. Des aéroglisseurs, pensent Britten et Norman, pourraient être utilisés pour transporter les bananes plus ou moins des plantations aux navires qui les acheminent en Europe et en Amérique du Nord.
Le développement du Britten-Norman BN-1 Cushioncraft, un véhicule triplace bientôt rebaptisé Britten-Norman CC1 Cushioncraft, afin qu’il ne soit pas confondu avec le susmentionné Finebee, est financé par une firme britannique de distribution de fruits, Elders & Fyffes Limited, propriété d’un géant américain de la distribution de fruits spécialisé dans la banane, la (tristement) célèbre United Fruit Company.
Une firme ayant des amis haut placés, à Washington, district de Columbia, dont les tentacules se répandent en Amérique centrale et dans les Caraïbes, United Fruit contrôle de vastes territoires et réseaux de transport (trains et navires). Sa mainmise sur ce coin de notre globe, une expression étrange étant donné qu’une sphère n’a pas de coin, et la Terre est une sphère, faites confiance au Monstre spaghetti volant à ce sujet, sa mainmise est est telle, dis-je, qu’elle conduit à l’utilisation de l’expression république bananière / de bananes pour décrire des pays comme le Costa Rica, le Guatemala et le Honduras dont les grandes figures voient peut-être leurs comptes bancaires croître étonnamment vite.
Croiriez-vous que cette expression jaillit de l’esprit brillant du géant américain montant de la nouvelle William Sydney Porter, mieux connu sous le nom de O. Henry, en 1896?
Soit dit en passant, la banane en question est la variété Gros Michel, connue officieusement sous le nom de « Big Mike, » et non la banane Cavendish que l’on trouve dans les supermarchés de nos jours, du moins pour l’instant. Pour l’instant, vous dites (tapez?), ami(e) lectrice ou lecteur? Oui, pour l’instant, dis-je. Voyez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur de plus en plus inquiète / inquiet, les plantations de bananes Gros Michel sont presque effacées par une maladie mortelle dans les années 1950 et 1960 – et une maladie tout aussi mortelle attaque actuellement les plantations de bananes Cavendish dans quelques pays. Écarter la diversité pour augmenter les profits est très agréable, jusqu’à ce qu’un parasite quelconque apparaisse, mais revenons à notre histoire.
Conçu et fabriqué sur une période de 8 mois, le Britten-Norman BN-1 Cushioncraft / CC1 Cushioncraft « vole » pour la première fois en juin 1960. Vous vous souviendrez qu’il porte une immatriculation d’aéronef civil britannique, et… Vous ne vous en souvenez pas, n’est-ce pas? Soupir… Peu importe.
Malheureusement, le CC1 se révèle difficile à contrôler. À une occasion, le pilote aurait glissé doucement / lentement le long d’une légère pente et ne peut pas la remonter. Il faut faire appel à une grue pour soulever le CC1 et le remonter. Cette grue peut être utilisée quelques fois.
Incidemment, Cushioncraft Limited, une filiale de Britten-Norman, voit le jour en 1960.
L’année suivante, la partie nord du Cameroun britannique rejoint le pays nouvellement indépendant du Nigéria, anciennement une colonie / protectorat britannique, tandis que la partie sud rejoint le nouveau pays indépendant du Cameroun, anciennement un territoire sous tutelle des Nations Unies contrôlé par la France. La vie quotidienne des gens qui travaillent dur dans les bananeraies ne change toutefois pas. Les gens blancs de Elders & Fyffes sont toujours au sommet de la chaîne alimentaire, mais je digresse.
Et tant qu’une digression est en cours, pourquoi ne pas l’aggraver avec une autre digression? Saviez-vous que des bananes sont apparemment cultivées au Cameroun il y a environ 4 500 ans? Étant donné que ce fruit tropical est peut-être cultivé pour la première fois dans ce qui est maintenant la Papouasie-Nouvelle-Guinée, à un bon 14 500 kilomètres (environ 9 000 miles) de distance, il semble que Homo sapiens a la bougeotte depuis un certain temps.
Nous sommes des Africain(e)s sous la peau, après tout, ami(e) lectrice ou lecteur, les ancêtres des non-Africain(e)s d’aujourd’hui ayant quitté le continent de leur naissance il y a environ 80 000 ans. Si l’histoire de la vie sur Terre était réduite à une période de 24 heures, cette migration aurait lieu moins de 2 secondes avant minuit. Nous devrions tous tenter de nous entendre, pour citer, en traduction, le président américain de la comédie de science-fiction de 1996 Mars Attaque! / Mars Attacks! Fin de la digression.
Britten-Norman / Cushioncraft examinent des applications potentielles du CC1 dans quelques pays en développement – et pas nécessairement uniquement pour le transport de bananes. Les aéroglisseurs pourraient provoquer une révolution dans le transport terrestre dans ces pays. Bien que le narrateur anglophone d’un bref clip d’actualités filmées de 1960 produit par British Pathé News Limited n’aille pas aussi loin, il fait définitivement allusion au fait que l’aéroglisseur a beaucoup à offrir. Le CC1 peut faire en 90 minutes ce pour quoi un camion et une barge ont besoin de 2 jours, par exemple.
Et oui, le coussin d’air qui maintient le CC1 en l’air est produit par un ventilateur en forme d’anneau totalement exposé, un risque pour la sécurité s’il y en est un, entraîné par une roue d’automobile montée verticalement, ce qui peut être clairement vu dans la vidéo suivante.
Après avoir vu les 2 vidéos, seriez-vous surpris(e) d’entendre (lire?) que plus de quelques personnes qualifient le CC1 de soucoupe volante?
Soit dit en passant, saviez-vous que Christopher Sydney Cockerell, le père de l’aéroglisseur comme il est souvent appelé, n’est pas la première personne à travailler sur des véhicules à coussin d’air? Dans l’Union des Républiques socialistes soviétiques, un ingénieur du nom de Vladimir Izrailevitch Levkov supervise la construction de quelques prototypes très intéressants entre 1935 et 1941.
Une pensée si je peux me le permettre. Une petite exposition temporaire simple et gérable sur les aéroglisseurs pourrait ne pas être une mauvaise idée. Je vous dis ça comme ça, moi.
Avez-vous une question, ami(e) lectrice ou lecteur? Combien de régimes de bananes le CC1 peut-il transporter, demandez-vous? Une très bonne question. Il est possible que Cushioncraft et Elders & Fyffes envisagent réellement la possibilité d’utiliser un aéroglisseur plus grand et beaucoup plus lourd, le CC3, pour transporter régulièrement des bananes. Pour une raison ou une autre, leurs plans n’aboutissent pas. À dire vrai, le CC1 n’est pas mis en production et le CC3 n’est même pas construit.
Malgré cela, Cushioncraft teste 5 autres types d’aéroglisseurs au cours des années 1960. Un seul d’entre eux, le CC7, dépasse le stade du prototype – et de bien peu. Et oui, le CC7 est mentionné dans des numéros de mai 2018 de notre blogue / bulletin / machin.
Cushioncraft devient une firme distincte en 1967, afin que British Hovercraft Corporation (BHC), un leader mondial incontesté dans le domaine mentionné dans des numéros de mars 2018 et janvier 2019 de notre yadda yadda yadda, puisse acheter une part minoritaire. Confronté à de graves problèmes financiers, Britten-Norman cède ses parts restantes dans Cushioncraft à BHC vers le mois d’octobre 1971. Cette vente, qui a eu lieu quelques jours avant la mise sous séquestre de la petite entreprise, annule pratiquement tout travail de développement, vu le manque d’intérêt du nouveau propriétaire dans ce que Cushioncraft a conçu.
Britten et Norman vendent leurs parts de la susmentionnée Crop Culture (Aerial) à d’autres membres du conseil d’administration en 1963, pour consacrer tout leur temps au développement du Britten-Norman BN-2 Islander, un petit avion de ligne bimoteur très réussi mentionné dans un numéro de mai 2018 de notre vous savez toujours quoi.
Britten et Norman continuent à coopérer pendant plus d’une décennie, sur le Islander par exemple. Norman décède en novembre 2002, à l’âge de 73 ans. Britten, en revanche, quitte cette Terre en juillet 1977. Il n’a que 49 ans.
Demeurez en sécurité, ami(e) lectrice ou lecteur.