« Qu’il neige! Qu’il neige! Qu’il neige! » La souffleuse à neige domestique Blo-All de Autocanner Enregistré de Montréal, Québec
Bonne année, ami(e) lectrice ou lecteur. Et oui, notre sujet cette semaine est une souffleuse à neige domestique, une pièce d’équipement fort appropriée vue la saison, enfin, la saison qui affecte la partie nord de l’hémisphère nord de la planète Terre, et une démonstration de ma volonté inébranlable de faire preuve d’une plus grande brièveté en 2023.
Avant d’aller plus loin, permettez-moi de citer la légende qui accompagne la photographie de la souffleuse à neige domestique parue en janvier 1948 dans le quotidien Montréal-Matin de… Montréal, Québec.
Préparez-vous. C’est une costaude.
Les citoyens de la métropole ont eu à maintes reprises l’occasion d’admirer, après une violente chute de neige, le beau travail exécuté par les souffleuses à neige de la cité de Montréal. Aussi ils ne tardèrent pas à manifester le désir d’en avoir une semblable, mais évidemment beaucoup plus petite et plus facile à manier. Aujourd’hui, grâce à l’Autocanner Reg’d, ce rêve est devenu une réalité. Hier après-midi les journalistes de la métropole étaient invités à assister, sur la rue Sherbrooke près de la rue St-Denis, à une démonstration d’une souffleuse à neige. Là les journalistes purent constater le travail magnifique de cet instrument en peu de temps. Cette souffleuse fabriquée à Montréal est mue par un moteur à essence et montée sur des patins. Elle peut lancer la neige à une distance de [près de 23 mètres] 75 pieds et ne pèse que [23.5 kilogrammes environ] 52 livres. Inutile d’ajouter que son maniement est des plus facile. Elle enlève [46 centimètres] 18 pouces de neige de large à la fois. Dans un pays comme le nôtre sujet aux violentes chutes de neige, c’est un jouet très utile et très apprécié.
Au fait, saviez-vous que le Québécois Arthur Sicard est généralement crédité comme l’inventeur de la première souffleuse à neige vraiment pratique? Il achève un prototype de déneigement de rue en 1925 mais peut, je répète peut, avoir cogité sur le déneigement depuis le milieu des années 1890. Les résidents d’Outremont, Québec, sont les premiers êtres humains à bénéficier de l’utilisation d’une souffleuse de déneigement de rue. Ce véhicule entre en service durant l’hiver 1927-28.
Sicard fonde la Compagnie de machines à neige Sicard Limitée, à Montréal, en septembre 1929. En novembre 1937, cette dernière devient Sicard Limitée, une firme qu’il ne faut apparemment pas confondre avec Industries Sicard Limitée de Montréal, une firme fondée en mars 1945.
En 2023, Groupe Sicard SSI Incorporé de Knowlton, Québec, est une division d’une entité américaine, SMI-Snowblast Incorporated.
Avant que j’oublie, saviez-vous qu’une souffleuse à neige opérée par la ville d’Outremont bien après la Seconde Guerre mondiale se trouve dans la collection du Musée des sciences et de la technologie du Canada d’Ottawa, Ontario, une institution sœur / frère du prodigieux et formidable Musée de l’aviation et de l’espace du Canada? Et oui, le Musée des sciences et de la technologie du Canada n’est pas mal. D’accord, d’accord, il n’est pas mal du tout. Seigneur, quel atrabilaire vous pouvez être, ami(e) lectrice ou lecteur.
Incidemment, le véhicule sur lequel est monté le bidule souffleur de neige Sicard du Musée des sciences et de la technologie du Canada est fabriqué à Kitchener, Ontario, au cours des années 1950, par Four Wheel Drive Auto Company Limited, la filiale canadienne d’une firme américaine, Four Wheel Drive Auto Company, mais revenons à notre histoire.
Si le quotidien Le Devoir de Montréal ne publie pas de photographie de la souffleuse à neige de Autocanner dans un article de janvier 1948, il précise toutefois que la démonstration se fait au Canadian Club, la branche montréalaise d’un mouvement fondé en 1893 qui s’étend sur tout le dominion, de Nouvelle Écosse à la Colombie-Britannique.
Le quotidien montréalais Le Canada précise que la démonstration, « quoique convaincante, n’était pas entièrement satisfaisante, la neige étant plutôt rare. »
Aux dires de Le Devoir, le dispositif de Autocanner « est un chasse neige très pratique pour les maisons d’enseignement, les garages et en général pour toute entreprise ou maison particulière qui a quelques dépendance. » Il va de soi que quelqu’un peut également l’utiliser pour nettoyer une patinoire, cour ou trottoir.
De fait, aux dires de Le Canada, le concierge d’une paroisse catholique de Montréal utilise un véhicule tout terrain U.S. Army Truck, ¼-ton, 4×4, Command Reconnaissance, en d’autres mots une « Jeep » acheté aux surplus de guerre, et une souffleuses à neige Autocanner, depuis décembre 1947 pour nettoyer « les abords très vastes de l’église, les trottoirs, la patinoire de l’école […]. » Il se dit enchanté par le produit de la petite firme montréalaise.
Mentionnons à titre d’exemple qu’une personne travaillant seule peut nettoyer en moins d’une heure une patinoire de taille moyenne recouverte par environ 20 centimètres (8 pouces) de neige. Combien de bras, pelles et temps faudrait-il pour effectuer une telle corvée?
Il est à noter que la souffleuse à neige Autocanner ne semble pas être encore disponible en magasin en janvier 1948.
Son concepteur est, dit-on, le propriétaire fondateur de Autocanner, Henri Guay. De fait, c’est fort possiblement lui qui pousse la souffleuse visible sur la photo avec laquelle votre humble serviteur lance ce numéro de notre blogue / bulletin / machin. Guay aurait commencé à travailler sur ce projet vers le milieu de 1946.
Une brève digression si vous me le permettez. Votre humble serviteur se demande si le Guay de Autocanner est le marchand Henri Guay qui fonde Henry Machine Shops Limited de Montréal en août 1942, avec le garagiste Rouville Rocheleau, propriétaire de Rocheleau Automobile Limitée de Montréal.
Curieusement peut-être, ce n’est pas Montréal-Matin qui publie la publicité de Autocanner que votre humble serviteur a trouvée après des heures, que dis-je (tape-je?) des siècles, d’intense labeur. Nenni. La dite publicité paraît en janvier 1948, dans un autre quotidien montréalais, La Patrie ainsi que dans le seul quotidien francophone d’Ottawa, Le Droit. Connaissant votre curiosité insatiable en matière de science et technologie, je vous la présente sans plus attendre.
Publicité de Autocanner Enregistré pour sa souffleuse à neige domestique. Anon., « Autocanner Registered. » Le Droit, 24 janvier 1948, 13.
Vous noterez que les données techniques présentes dans la costaude de légende que vous venez de vous taper se trouvent également dans cette publicité.
Une publicité parue en février dans Le Devoir révèle que Autocanner utilise maintenant la désignation Blo-All pour identifier sa souffleuse à neige.
Votre humble serviteur se doit ici d’exprimer un certain doute en ce qui concerne la puissance de la souffleuse à neige de Autocanner. De la neige projetée à une distance de près de 23 mètres (75 pieds)?! En 1948?! Qu’en pensez-vous?
La dite souffleuse à neige est par ailleurs un jouet passablement coûteux. Le 185 $ plus taxes mentionné dans la publicité correspond en effet à environ 2 330 $ en devises 2022, soit plus de 4 fois le prix de certains types de souffleuses à neige domestiques disponible au Québec et Canada en 2022.
Un des détails les plus intéressants dans notre histoire tient au fait que la firme américaine bien connue Toro Motor Company, mentionnée dans un numéro de novembre 2021 de notre stupéfiant blogue / bulletin / machin, introduit sa souffleuse à neige domestique automotrice Snow Hound en… 1952.
Cette même année, une autre firme américaine bien connue, Ariens Company, lance la souffleuse à neige domestique Sno-Thro. Ce dispositif automoteur peut projeter une bande de neige de 43 centimètres (17 pouces) de large à une distance de 4.5 mètres (15 pieds). Croiriez-vous que la Sno-Thro semble faire partie d’une famille de 3 dispositifs utilisant le même châssis de base? Les 2 autres membres de la famille sont les motoculteur à fraise rotative Yardster et une tondeuse à lame rotative. Chaque membre de la famille se vend aux environs de 150 $ ÉU en 1952-53, soit un peu moins de 2 300 $ en devises canadiennes 2022.
Toujours en 1952, une petite firme américaine, Tate Equipment Company, offre à sa clientèle une famille de 3 dispositifs utilisant le même châssis de base, le motoculteur à fraise rotative Roto-Hoe, une tondeuse à lame rotative et une souffleuse à neige. Votre humble serviteur ne peut pas dire comment / si ce produit est lié à un similaire trio d’appareils, qui comprend également le nom Roto-Hoe, introduit au plus tard en janvier 1952 par une autre petite firme américaine, Roto-Hoe & Sprayer Company.
Pas plus tard qu’à l’automne 1952, la George Garden Tool Division de Community Industries Association, une organisation fondée par une petite église protestante, offre une fixation de souffleuse à neige, une des 15 fixations différentes disponibles, aux personnes qui achètent un de ses tracteurs de pelouse et jardin. La fixation et le tracteur coûtent respectivement 29.50 $ ÉU et 119.50 $ ÉU, des sommes qui correspondent à quelque chose comme 440 $ et 1 780 $ en devises canadiennes 2022.
Cela étant dit (tapé?), Rome Riebeth, un chroniqueur d’un quotidien américain, Minneapolis Morning Tribune de… Minneapolis, Minnesota, fait l’essai d’une souffleuse à neige domestique en décembre 1949. Il ne donne malheureusement pas le nom du fabricant du dispositif en question, capable de projeter une bande de neige de 41 centimètres (16 pouces) de large à une distance de 7.5 mètres (25 pieds). Riebeth mentionne toutefois que la dite souffleuse à neige coûte 159.50 $ ÉU, soit environ 2 725 $ en devises canadiennes 2022.
Cette même année 1949, au tout début de l’année en fait, la firme américaine Maxim Silencer Company met sur le marché une souffleuse à neige destinée davantage aux commerces qu’aux familles. Le Maxim Snow Thrower, un dispositif automoteur, peut projeter une bande de neige de 71 centimètres (28 pouces) de large à une distance de plus de 15 mètres (50 pieds). Il coûte la modique somme de 415 $ ÉU, soit environ 7 100 $ en devises canadiennes 2022.
Cela étant dit (tapé?), Maxim Silencer met sur le marché en 1949-50 trois modèles de souffleuses à neige, dont au moins un, sinon deux, sont destinés davantage aux familles qu’aux commerces.
Et vous avez une question, n’est-ce pas, ami(e) lectrice ou lecteur. De quels types de silencieux, en anglais silencer, est-il question? Il est question de silencieux pour armes à feu. Le président fondateur de Maxim Silencer, Hiram Percy Maxim, semble en effet inventer le premier silencieux d’arme à feu commercialement réussi, vers 1902. Et oui, la firme met par la suite au point des silencieux pour les automobiles.
Le papa de Maxim est nul autre que Sir Hiram Stevens Maxim, un inventeur américano-britannique surtout connu pour sa mitrailleuse, la première arme automatique vraiment réussie, fabriquée initialement au Royaume-Uni mais fabriquée sous licence par la suite, des années 1880 aux années 1940, dans quelques / plusieurs pays, y compris le Canada, je pense.
La mitrailleuse Maxim et ses dérivés prouvent leur efficacité meurtrière à d’innombrables reprises au cours de la Première Guerre mondiale. Elles donnent cependant une idée de ce qu’elles peuvent faire dans des campagnes coloniales à sens unique en Afrique dans les années 1890. Il suffit de penser aux lignes sinistres écrites par le controversé soldat / satiriste / poète / orateur / militant / marin / historien / écrivain franco-anglais Joseph Hilaire Pierre René Belloc : « Quoi qu’il arrive, nous avons la mitrailleuse Maxim, et eux non, » des lignes trouvées dans le recueil de vers de 1898 The Modern Traveller.
Remarquez, Maxim a dans son portfolio des inventions aussi variées qu’un fer à friser et un piège à souris.
Soit dit en passant, avez-vous déjà joué à Mouse Trap Game / Mouse Trap, le jeu de société en 3 dimensions lancé en 1963 par le géant américain du jouet Ideal Toy Corporation? Votre humble serviteur n’a jamais eu ce plaisir, mais je digresse.
L’hénaurme aéroplane à vapeur, un simple véhicule d’essai en fait, dont Maxim supervise la construction, en Angleterre, parvient à se soulever de ses rails pendant quelques instants en juillet 1894, mais revenons à notre sujet de la semaine, mais indirectement.
Voyez-vous, au moment où débute l’hiver 1948-49, W.H. Perron & Compagnie Limitée, le nom informel / non officiel de W.H. Perron & Company Limited, offre à sa clientèle un motoculteur de la firme américain Gravely Tractor Company muni d’une souffleuse à neige capable de projeter une bande de neige de 64 centimètres (25 pouces) de large à une distance de 23 mètres (75 pieds). L’ensemble se vend 506 $, soit près de 6 550 $ en devises 2022.
Les gens qui ont déjà un tracteur Gravely peuvent évidemment acheter séparément la souffleuse qui peut s’y attacher. Le coût? 156 $, soit près de 2 025 $ en devises 2022.
Vous n’avez pas oublié, j’espère, que W.H. Perron & Company / W.H. Perron & Compagnie est mentionnée dans un numéro de mai 2021 de notre vous savez quoi.
Détail intéressant, la raison sociale en français semble apparaître pour la première fois dans Gazette officielle du Québec en 1974.
Autre détail intéressant, le numéro de décembre 1948 du magazine mensuel américain Popular Mechanics publie un entrefilet avec photographie sur une souffleuse à neige attachée à une tondeuse à gazon dont la fabricant n’est malheureusement pas identifié. Le dispositif en question semble fort versatile. Une personne peut en effet acheter des fixations qui transforment le dit dispositif en motoculteur, épandeur de pesticides (liquide ou poudre), etc.
Se pourrait-il que la souffleuse à neige domestique de Autocanner soit la première sur le marché au monde? C’est possible, mais probablement impossible à confirmer. Elle compte certainement parmi les premières sur le marché.
Avant que votre humble serviteur ne l’oublie, ami(e) lectrice ou lecteur, que diriez-vous de quelques lignes sur Autocanner? Et oui, c’était là une question purement rhétorique.
La (courte?) aventure de cette firme semble commencer avec la sertisseuse électrique Madelon, un dispositif capable de fermer 12 boîtes de conserves à la minute. Si cette sertisseuse est fameuse aux dires de publicités parues en octobre 1945 dans l’hebdomadaire L’Étoile du Nord de Joliette, Québec, je dois avouer ne rien avoir trouvé à son sujet, surtout pas le nom d’un fabricant.
Cela étant dit (tapé?), Autocanner annonce en avril 1946 que la dite sertisseuses Madelon, la seule sertisseuse automatique électrique alors fabriquée au Canada, affirme-t-on, va désormais porter le nom de sertisseuse Autocanner. La question est de savoir si le fabricant X de la sertisseuse change de raison sociale pour devenir Autocanner or si celle-ci acquiert les droits de production de la sertisseuse.
Une version de la sertisseuses Autocanner disponible au plus tard en août 1947 semble être en mesure de sceller des boîtes de conserves d’assez grande dimension. Elle est offerte en bonne partie aux nombreuses institutions religieuses du Québec.
Soit dit en passant, le machin en question se vend entre 69.50 et 85 $, soit près de 1 120 $ à 1 370 $ en devises 2022. Incidemment, une sertisseuse automatique électrique typique se vend apparemment environ 2 600 $ en 2022.
Remarquez, Autocanner semble être alors le vendeur basé à Montréal des machines à laver électriques de la firme américaine Young Corporation. En 1948, la firme montréalaise ajoute les machines à laver électrique Little Giant de la firme américaine Little Giant Incorporated aux produits offerts à sa clientèle. La dite machine à laver se vend 99.50$, ce qui correspond à plus de 1 250 $ en devises 2022. Incidemment, une machine à laver électrique se vend environ 700 $ ou plus en 2022.
En avril 1948, Autocanner annonce qu’elle va produire des cuves en aluminium utilisables pour le lavage des ustensiles de cuisine et d’autres choses, bien sûr. Vous me direz qu’une telle annonce n’a rien de bien important. C’est on ne peut plus exact. Cela étant dit (tapé?), votre humble serviteur se doit de noter que l’aluminium de la dite cuve a une épaisseur de plus de 6 millimètres (0.25 pouce). La cuve de Autocanner, c’est du solide.
Il est à noter que, au plus tard au moment où l’hiver 1948-49 prend fin, Autocanner vend une souffleuses à neige pouvant être attachées à un tracteur de ferme fabriqué par Ford Motor Company, un géant américain mentionné à quelques / plusieurs reprises dans notre vous savez toujours quoi depuis décembre 2018.
Un fabricant montréalais d’évaporateurs utilisés par les fabricants de produits de l’érable, Évaporateur Dominion (Enregistré? Incorporée?), acquiert les droits de production de la sertisseuse Autocanner vers juin 1950. Cette acquisition signifierait-elle que Autocanner, la firme bien sûr, a fait faillite? C’est bien possible. En effet, Autocanner n’est plus mentionnée dans les quotidiens du Québec depuis la fin de l’hiver de l’année 1948-49.
Et c’est ainsi que prend fin ce premier numéro de l’année 2023 de notre incomparable blogue / bulletin / machin. Je vous avais bien dit que je m’efforcerais d’être plus bref dans mes péroraisons. Et vous qui ne me croyiez pas, ami(e) lectrice ou lecteur de peu de foi…
À la revoyure.