Étudier les instruments acoustiques de la collection du département de physique de l’Université de l’Alberta
Ce blogue présente trois instruments acoustiques de la collection du département de physique de l’Université de l’Alberta que j’ai étudiés dans le cadre de mon stage sur le son et la science à Ingenium. L’objectif de ce stage était d’étudier des artefacts non encore documentés de la collection et de générer suffisamment d’information sur ces objets pour qu’ils puissent être intégrés dans une base de données internationale appelée Sound and Science qui a été mise sur pied par des chercheurs de Berlin, de New York et d’Ottawa afin de permettre à leurs homologues du domaine de la recherche de trouver plus facilement les objets acoustiques de collections partout dans le monde et d’établir des liens entre des artefacts semblables. Les instruments décrits ci-dessous auraient été utilisés, à un moment donné de leur histoire, pour la recherche acoustique. À l’Université de l’Alberta, leur fonction première était très probablement éducative, servant à démontrer des phénomènes acoustiques aux étudiants du département de physique.
Le démonstrateur de résonance « Cherry Bowl », vers 1900.
Le premier instrument que j’aimerais décrire est ce démonstrateur de résonance « Cherry Bowl », qui date environ de 1900. Il s’agit d’une variante de la cloche de résonance de Savart, qui est dotée d’une cloche qu’on fait sonner et d’un résonateur qui est déplacé de l’avant vers l’arrière pour résonner à des fréquences particulières. Mais avec le Cherry Bowl, on remplit plutôt un bol en verre de différentes quantités d’eau. Lorsqu’un archet de violon ou une main mouillée glisse sur le rebord du bol en verre, des ondes stationnaires sont créées dans l’eau. On déplace ensuite le résonateur cylindrique (à droite) vers le bol jusqu’à ce qu’il capte la fréquence de résonance. Cela fait vibrer – ou résonner – le cylindre en fonction de la fréquence, et on peut alors percevoir la vibration comme un son amplifié et audible. Tout cela permet de démontrer comment différentes quantités d’eau peuvent créer différentes fréquences, et comment différents modèles d’ondes stationnaires peuvent être produits en fonction de la fréquence générée.
La sirène de Cagniard, vers 1900.
Le deuxième instrument est la sirène de Cagniard inventée par Charles Cagniard. Cet instrument a été la première source sonore « artificielle » dont la fréquence pouvait varier en fonction de la vitesse de rotation. L’instrument qu’on voit ici, qui date environ de 1900, est constitué d’un disque métallique circulaire qui tourne, qui est percé de trous à intervalles réguliers et qui est posé sur un disque fixe de la même taille, percé de trous aux mêmes endroits. Les trous des deux disques, orientés dans des directions opposées, dirigent la circulation de l’air. Lorsque l’air est pompé à travers une cavité située sous le disque fixe, la pression de l’air augmente, ce qui provoque la rotation du disque du dessus. Lorsque la vitesse de rotation augmente la fréquence des « bouffées d’air » à travers les trous, la sirène commence à « chanter ». D’autres changements dans la vitesse de rotation du disque modifient la hauteur et la puissance du son. Le nombre de rotations est enregistré sur un cadran placé au-dessus de la sirène, indiquant le nombre de vibrations par seconde. On croit que Cagniard a baptisé son appareil « sirène » en référence aux sirènes de la mythologique grecque, qui attiraient les marins vers la mort avec leurs chants.
Un sonomètre, vers 1900-1950.
Le troisième instrument, qui a probablement été fabriqué au cours de la première moitié du XXe siècle, est un sonomètre. Le sonomètre est un instrument musical et scientifique qui a des origines anciennes, et qui était couramment utilisé dans des démonstrations d’acoustique pour montrer l’effet de la longueur, de la tension, du diamètre et des matériaux sur la hauteur de son d’une corde vibrante. Il était également utilisé pour montrer les harmoniques d’une corde qui vibre. Ce sonomètre-ci est composé d’une longue boîte creuse en bois au-dessus de laquelle sont tendues une ou plusieurs cordes exactement de la même longueur, tendues et attachées aux deux extrémités de la caisse, et dont la tension peut être modifiée à un des côtés. La longueur de la corde ou des cordes peut être réglée en déplaçant le chevalet situé sous la ou les cordes. L’utilisateur peut également utiliser un archet de violon s’il souhaite produire un son continu plutôt que de pincer la ou les cordes.
Un « junzhong » (均钟), datant environ du Ve siècle av. J.-C.
Il est intéressant de noter qu’un des plus anciens appareils connus qu’on peut associer au sonomètre moderne est le « junzhong » (均钟), qui date de plus de 2 400 ans. L’instrument montré ici est conservé au Musée provincial du Hubei à Wuhan, dans la province du Hubei, en Chine. Il a été trouvé dans les années 1970 dans la tombe du marquis Yi de Zeng, à Suizhou, dans le Hubei, au début de la période des Royaumes combattants. L’artefact arbore des représentations complexes de figures humaines et divines surmontant des dragons ainsi que douze phénix, symbolisant probablement des personnages légendaires de la mythologie chinoise et les origines anciennes de la gamme musicale en Chine. À l’époque, l’instrument avait cinq cordes mais elles n’ont pas survécu aux millénaires. Grâce à des analyses mathématiques et à l’étude de textes et de modèles, des historiens de la musique croient que cet instrument à cinq cordes n’aurait pas été un instrument de musique, mais plutôt un étalon pour accorder les cloches, comme l’évoquent certains textes anciens comme les « Discours des États ». Le junzhong montré ici serait le seul connu, et est considéré en Chine comme une relique culturelle nationale d’importance mondiale.
Les trois premiers artefacts décrits dans ce blogue font partie de la volumineuse collection conservée encore aujourd’hui au département de physique de l’Université de l’Alberta. Pour lire des descriptions plus détaillées de ces objets et voir d’autres pièces de la collection, prière de visiter la base de données Sound and Science, qui permet en outre d’établir des liens avec d’autres artefacts historiques, comme le junzhong, qui sont conservés dans d’autres musées et universités partout dans le monde.
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