« Cela sent la viande. Cela ressemble même à de la viande. » L’histoire oubliée depuis longtemps d’une viande synthétique / viande d’imitation / viande artificielle / succédané de viande / substitut de viande / simili-viande parfois appelée Sure Food
Salutations, ami(e) lectrice ou lecteur. Votre humble serviteur a une question à vous poser. Êtes-vous cuisinomane, autrement dit une ou un Homo sapiens très intéressé(e) par la cuisine et la consommation de différents types d’aliments? Oui? Vermouilleux! Connaissez-vous par hasard la viande synthétique / viande de substitution / viande d’imitation / viande artificielle / succédané de viande / substitut de viande / simili-viande / analogue de viande / analogue de produit carné?
Si, si, la viande synthétique. Le monde a terriblement besoin d’un tel produit. Ne savez-vous pas que la viande rouge est un contributeur important aux changements climatiques? De fait, c’est un facteur majeur de déforestation, notamment en Amérique latine. Le niveau actuel de production de viande rouge n’est tout simplement pas durable.
D’innombrables personnes dans les pays en développement se couchent chaque soir affamées parce que des terres qui pourraient être utilisées pour les nourrir sont utilisées pour nourrir du bétail, dont la viande est trop chère pour elles et eux et qui est de toute façon souvent destinée à l’exportation.
Et ne me parlez pas des efforts continus des pays occidentaux pour satisfaire nos, si, si, nos caprices et envies (huile de palme d’Indonésie, fleurs coupées du Kenya, avocats du Mexique, etc.). Toutes ces terres pourraient nourrir des gens.
Pis encore, manger trop de viande rouge est mauvais pour la santé des Homo sapiens. Des années, voire des décennies de recherche ont montré et continuent de montrer un lien clair entre une consommation élevée de viande rouge et un risque plus élevé de maladie cardiaque, diabète et cancer, sans parler du risque plus élevé de décès prématuré.
Le hic, bien sûr, c’est que, à mesure que les gens dans des endroits tels que l’Inde, la Chine et ailleurs deviennent plus prospères, la consommation de viande rouge augmente. Qui pourrait blâmer ces gens? Après des siècles d’exploitation occidentale, oserais-je dire (taper?) blanche, ils veulent vivre un peu. Les pays occidentaux ont cependant pollué notre grosse bille bleue, épuisé ses ressources et gâché le climat à tel point que les habitants des pays en développement se retrouvent désormais dans des conférences où chacune et chacun est invité(e) à se serrer la ceinture pour nettoyer le gâchis auxquels les pays en développement ont joué un rôle on ne peut plus limité.
Comment va cette expression encore, ami(e) lectrice ou lecteur, occidentaliser les profits et globaliser les pertes? Mais je digresse.
Beaucoup de gens ont tendance à penser que les viandes synthétiques sont des produits végétariens / végétaliens à base de soja, mais la vérité est que certaines d’entre elles sont en fait fabriquées à partir de lait. Si, si, de lait.
Toujours soucieux d’être plus bref que lors des mois précédents, permettez-moi de vous offrir quelques mots sur le gentilhomme au cœur de cette histoire. Non, pas le chimiste alimentaire canadien dont vous avez vu la photo au début de cet article. En d’autres termes, pas James Pearson. Le gentilhomme au cœur du numéro de cette semaine de notre éclairant blogue / bulletin / machin est Barnett « Barney » Sure, né en 1891 dans une région de l’Empire russe, le gouvernement de Wilna, qui correspond plus ou moins à l’actuelle Lituanie. Il fréquente l’école dans l’Empire russe et en Afrique du Sud.
Et non, le nom que Sure reçoit à la naissance n’est probablement pas Barnett Sure. Il acquiert apparemment ce descripteur lorsqu’il émigre aux États-Unis, vraisemblablement avec sa famille, en 1908, ou après cette date. Il devient citoyen naturalisé en 1915.
Sure étudie à la University of Wisconsin, à Madison,… Wisconsin, où il obtient un baccalauréat (1916), une maîtrise (1917) et un doctorat (1920). En juillet 1920, il devient professeur adjoint de chimie agricole à la University of Arkansas, à Fayetteville,… Arkansas. Sure peut, je répète peut, aussi avoir occupé le poste d’assistant chimiste à la Agricultural Experiment Station de cette université.
En 1927, Sure devient apparemment professeur titulaire. Mieux encore, il devient à un certain moment président du Department of Agricultural Chemistry à la University of Arkansas. Sure occupe apparemment cette position jusqu’à sa retraite, en 1958, je pense.
Barnett Sure. Anon., « U. W. Graduate Patents Vitamin B Production. » The Wisconsin State Journal, 9 avril 1935, 7.
La carrière de Sure suit une trajectoire voie régulière au cours des années 1930, 1940 et 1950. De fait, les travaux qu’il mène en chimie biologique et dans le développement et utilisation des vitamines sont parmi les plus importants de l’époque. Il suffit de mentionner sa contribution à l’introduction de la vitamine B12 / cobalamine et de la vitamine B1 / thiamine comme compléments alimentaires. Sure est également apparemment impliqué dans la découverte d’un groupe de vitamines collectivement connues sous le nom de vitamine E. De fait, il peut avoir proposé ce nom même.
Une petite digression si je peux me permettre. En 1949-50, Sure montre un grand intérêt pour un galactogogue vieux de plusieurs siècles originaire du Salvador, Mexique, Honduras, Guatemala et Belize, à savoir une espèce d’euphorbe connue localement sous le nom de ixbut, et…
Vous avez une question, n’est-ce pas, ami(e) lectrice ou lecteur perplexe? Un galactogogue est une substance qui favorise la lactation chez l’humain et d’autres animaux. Et oui, nous sommes des animaux, des très dangereux en fait.
Même si aucun essai clinique scientifiquement valide ne soutient l’utilisation du ixbut comme galactogogue, il existe des preuves que les animaux nourris avec certains types d’extraits d’euphorbe montrent une augmentation de la production de prolactine, une hormone responsable de la lactation et de la production de lait. Un test effectué en 1949, par exemple, aurait entraîné une augmentation d’environ 100 % de la production laitière de vaches, et cela sans diminution de la qualité du lait.
L’intérêt de courte durée pour le ixbut aux États-Unis résulte au moins en partie d’un article d’août 1949, joliment intitulé « Milkweed, » publié dans le très populaire hebdomadaire américain Time, qui examine certaines études récentes réalisées au Guatemala. Dans un cas, près d’un tiers des 1 800 femmes ayant des problèmes de production de lait qui ont joint une étude voient leur production augmenter au moins un peu grâce à une infusion de ixbut. La moitié des femmes ne peuvent produire du lait qu’après avoir pris l’infusion.
Ce qui attire l’attention des lectrices ou lecteurs américains, toutefois, c’est probablement la suggestion selon laquelle le ixbut pourrait donner à l’Homo sapiens mâle la capacité d’allaiter les enfants. Je ne plaisante pas.
Pour répondre à votre question, le titre de l’article, soit « Milkweed, » est joli car il s’agit d’un jeu de mots intraduisible. Une « weed » étant une mauvaise herbe, le titre se traduirait mauvaise herbe de lait. Dans la vie de tous les jours, milkweed se traduit asclépiade en français.
Incidemment, votre humble serviteur se demande si Sure sait que d’autres espèces d’euphorbes étaient et étaient encore utilisées comme galactogogues dans des endroits aussi éloignés que l’Inde et l’Estado da África Ocidental, une colonie portugaise en Afrique, l’actuel Angola, mais revenons à notre sujet.
Au milieu des années 1940, la grave carence en protéines subie par les peuples d’Europe à la suite de la Seconde Guerre mondiale, alliée à l’augmentation des prix de la viande aux États-Unis, conduit Sure à étudier la possibilité de développer un aliment à faible coût mais riche en protéines.
Fin été, début automne 1947, Sure achève le développement d’une viande sans viande, une « viande de lait » selon certains, composée de farine de blé entier concassée, solides secs de lait non gras, levure alimentaire, shortening végétal et tourteau de soja dégraissé, en d’autres termes de choses qui sont facilement / aisément disponibles en Amérique du Nord. Dans sa forme basique / brute, cette concoction est une poudre blanche.
Afin de la rendre mangeable, la dite poudre est mélangée avec de l’eau sur une base de 1 pour 1. Ce mélange est ensuite battu, cuit et mis en conserve. Une fois réchauffé / recuit, ce produit ressemble à de la viande, sent la viande et goûte la viande. Croiriez-vous qu’il aurait la même teneur en protéines que le bœuf maigre? Il est également riche en vitamines A, B et D, et en tant que tel est nettement supérieur au bœuf maigre.
Selon avec quoi et / ou comment le dit produit est cuit, il peut être transformé en boulettes de viande, croquettes, gaufres (!), pain de viande, saucisses, viande de hambourgeois, etc.
Un groupe d’environ 15 à 20 personnes composé de représentants de la British Food Mission in Canada, de la Société canadienne de la Croix-Rouge, du ministère de l’Agriculture du Canada, de journalistes, etc., goûte la Sure Food, comme on appelle parfois / souvent le nouveau produit, sous forme de pain de viande sans viande, à Ottawa, Ontario, au Château Laurier, en décembre 1947. Et oui, le dit pain de viande est préparé par un chef de ce prestigieux hôtel. Cuit jusqu’à ce qu’il soit doré, il est servi avec des pommes de terre, sauce, salade, etc.
Les réactions globales sont quelque peu mitigées. Le pain de viande est « anodin, » « bon » ou « comme du poulet, » mais chaque convive vide son assiette. L’avocat du diable en moi se demande si les cobayes humains sont simplement polis ou agissent par habitude.
John Franklin Singleton, directeur associé, Service de commercialisation, Produits laitiers, au ministère de l’Agriculture, est un peu plus positif. La Sure Food a un goût agréable. Sa ressemblance avec le vrai bœuf est frappante. Ceci étant dit (tapé?), Singleton ajoute : « Je ne sais pas si j’aimerais en faire ma nourriture habituelle. » R.L. Wheeler, directeur adjoint, Service de commercialisation, division des fruits et légumes, à ce même ministère, semble d’accord. « Ce produit est bon au goût et peut faire un repas agréable de temps à autre. »
Frederick Parmiter, vétérinaire en chef, inspection des viandes, de ce même ministère de l’Agriculture, déclare, et je cite : « Pour ma part, je suis un amateur de viande. Mais je dois reconnaître que ce produit est nourrissant. »
Et oui, les citations que vous venez de lire ont été traduites par votre humble serviteur. Il n’y a pas de quoi.
Beverley Woon Browne, commissaire nationale adjoint de la Société canadienne de la Croix-Rouge, n’a apparemment pas grand-chose à dire sur la Sure Food. Il souligne toutefois qu’il serait peut-être préférable d’envoyer ce produit à l’étranger sous sa forme originale en poudre, ce qui économiserait espace et poids. Remarquez, la Sure Food peut également être expédiée à l’étranger dans des boîtes de conserve, déjà cuite et prête à être réchauffée / recuite.
Parlant (tapant?) d’expédition d’outre-mer, il convient de noter que le chef adjoint de la British Food Mission au Canada, A.P. Lyons, ne pense pas que la Sure Food serait un des produits alimentaires canadiens achetés par le gouvernement britannique. Nenni. Il achèterait du bacon, du bœuf et des œufs.
Comme vous le savez, ami(e) lectrice ou lecteur, même si la Seconde Guerre mondiale est terminée, le rationnement alimentaire est encore d’actualité au Royaume-Uni en 1947. De fait, il ne prend fin qu’en 1954 et la viande est le dernier article à être rationné. Compte tenu de cela, les familles britanniques typiques ne voudraient probablement pas utiliser les précieux coupons des carnets de rationnement individuels délivrés par le Ministry of Food pour une nouvelle viande sans viande alors qu’ils peuvent obtenir la vraie chose. Et oui, la viande est le premier article à être rationné, en mars 1940.
Oh oui, et Lyons souligne que le pain de viande de Sure Food servi au Château Laurier lui rappelle les saucisses servies aux membres de la British Army pendant la Seconde Guerre mondiale. Ayoye…
Les journalistes qui couvrent la dégustation soulignent que c’est la première fois que la Sure Food est dégustée en public sur la planète Terre. Mieux encore, ils soulignent que le Canada serait le seul producteur de la Sure Food. Ces deux déclarations peuvent sembler un peu tirées par les cheveux, mais pourraient bien être vraies, du moins en partie.
Voyez-vous, le gentilhomme en charge de cette démonstration est, non, pas Barnett Sure. Il est le susmentionné Pearson. Vous vous souvenez que ce gentilhomme est chimiste alimentaire, n’est-ce pas? Bien. De fait, il peut bien être le seul et unique chimiste alimentaire à travailler pour une conserverie canadienne basée à Hamilton, Ontario.
D’une manière ou d’une autre, il entend parler de la Sure Food et est intrigué. De fait, Pearson est tellement intrigué qu’il peut avoir quitté son emploi et puisé dans ses poches pour acheter les droits de fabrication canadiens (et étrangers?) de la University of Arkansas Research Foundation. Il signe ensuite une entente avec son ancien employeur afin de produire la Sure Food à Hamilton. Ou peut-être pas.
Voyez-vous, l’ancien employeur de Pearson a une usine à proximité de Brantford, Ontario, à l’aéroport local en fait, et votre humble serviteur doute qu’il en ait une autre. La dite usine est située dans un hangar de la Seconde Guerre mondiale lié à une école de pilotage avancée exploitée sous les auspices du Plan d’entraînement aérien du Commonwealth britannique – une des plus grandes contributions du Canada à la victoire des Alliés en 1945. L’École de pilotage militaire No 5 est équipé de Avro Anson utilisés pour former les pilotes de bombardiers.
Et oui, il y a un Anson dans la collection impressionnante du Musée de l’aviation et de l’espace du Canada, à Ottawa.
Vous ne pensiez pas que cette glorieuse institution serait mentionnée dans ce numéro de notre blogue / bulletin / machin, n’est-ce pas? Étant donné qu’il y a une volonté de ma part de le faire aussi souvent que (in)humainement possible, vous pouvez être sûr(e) que je ferai de mon mieux pour trouver un moyen de le faire, mais revenons à notre histoire.
Même si le nom de cette entreprise canadienne n’est pas mentionné dans la presse, des jours de furetage m’ont conduit à un nom : Wentworth Canning Company Limited de Hamilton, et…
Comment ai-je déniché cette information inestimable, vous demandez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur un peu fouineuse / fouineur? Si vous me permettez de paraphraser mon vieux pote Felonius Gru, euh... bon, vous m’avez eu. Le truc de conservateur de musée, c’est juste un loisir. Dans la vraie vie, je suis espion. C’est un secret. Ne le dites pas à quiconque, sinon… Je plaisante. Peut-être. (Musique légèrement dérangeante / menaçante.) Revenons maintenant à notre histoire.
Oseriez-vous émettre des doutes si je vous disais que les 3 boîtes de Sure Food nécessaires pour faire le pain de viande englouti par les quelque 15 à 20 personnes qui participent au dîner du Château Laurier coûtent 29 ou 30 cents la boîte, une somme qui correspond à 4.30 $ ou 4.45 $ en devise 2023? Incidemment, ces 29 ou 30 cents auraient acheté environ 450 grammes (1 livre) de Sure Food.
Pearson est ravi de souligner que la Sure Food a beaucoup à offrir. Après tout, le nouveau produit polyvalent pourrait aider les personnes affamées / crevant de faim d’Europe ainsi que les familles nord-américaines aux prises avec des prix alimentaires élevés. Parlant (tapant?) de manière plus frivole, pour citer un journaliste, en traduction, « les végétariens avec un penchant secret pour la chair animale et les catholiques romains qui n’aiment pas le poisson l’accueilleront à bouche ouverte. »
Ceci étant… Vous semblez bien perplexe tout d’un coup, ami(e) lectrice ou lecteur. Ne saviez-vous pas que, jusqu’à la publication en octobre 1966 d’un document pontifical portant la signature du pape Paulus VI / Paul VI, né Giovanni Battista Enrico Antonio Maria Montini, les catholiques pratiquant(e)s n’ont pas la permission de manger de la viande le vendredi? Je ne plaisante pas. La publication du dit document provoque une baisse, que dis-je, une chute des ventes de poisson au Québec qui frôle les 35 ou 40 % – une baisse / chute supérieure à celle qui affecte les ventes ailleurs au Canada, dit-on.
Soit dit en passant, la dite baisse n’énerve pas particulièrement la direction des Pêcheurs-Unis du Québec, une coopérative fondée en mai 1939. En effet, le gros de la production des pêcheurs québécois, 90 % peut-être, est destiné à l’exportation.
Avant que je ne l’oublie, Montini est mentionné dans un numéro de novembre 2019 de notre blogue / bulletin / machin, mais revenons à notre histoire.
Ceci étant dit (tapé?), l’avocat du diable en moi se doit de souligner que le bœuf haché se vend environ 64 cents le kilogramme (29 cents la livre) à Québec, Québec, à la fin de 1947 ou au début de 1948. Autrement dit, la Sure Food semble être aussi chère que le bœuf haché. Compte tenu de cela, on est en droit de se demander si les familles canadiennes typiques voudraient dépenser leur pognon durement gagné pour une viande sans viande dernier cri alors qu’elles peuvent obtenir la vraie chose
En autant que votre humble serviteur le sache, au moins une dizaine de journaux anglophones de 5 provinces (Alberta, Colombie-Britannique, Ontario, Québec et Saskatchewan) publient l’article de la Presse canadienne sur la Sure Food en décembre 1947. Un seul journal francophone, Le Droit d’Ottawa, publie l’histoire à ce moment-là. Remarquez, un second, Photo-Journal de Montréal, Québec, publie cette histoire, en février 1948. L’article est annoncé en hénaurmes caractères, à la une de cet hebdomadaire: « La nourriture de demain : la viande dite ‘synthétique’. »
Soit dit en passant, l’article de Photo-Journal n’est apparemment pas basé sur le reportage de la Presse canadienne. Un journaliste mène des entrevues et recueillie une bonne quantité d’informations. Croiriez-vous que les seules photographies de 1947-48 liées à notre sujet que j’ai pu trouver sont les deux publiées dans Photo-Journal en février 1948? Vous avez déjà vu la principale, mais voici l’autre...
James Pearson à l’usine de Wentworth Canning Company Limited de Hamilton, Ontario. Anon., « La viande, synthétique, produit canadien, pourrait sauver de la famine les peuples affamés d’Europe. » Photo-Journal, 5 février 1948, 3.
Le numéro d’avril 1948 du magazine mensuel américain Food Industries contient des informations supplémentaires, traduites ici, sur la saga en continuation de la Sure Food.
Le nouvel aliment est mis en conserve avec succès à l’échelle d’une usine pilote sous six formes différentes. Conservé sous sa forme de base, il peut être utilisé dans toutes les recettes demandant de la viande hachée. Ou il peut être tranché, frit dans du shortening et utilisé dans des sandwichs. Il a également été mis en conserve en : (1) pains laitiers de composition différente pour répondre à différents niveaux de revenu, (2) boulettes laitières en sauce espagnole et spaghetti, (3) croquettes en sauce, (4) raviolis et (5) tamales, le tout prêt-à-manger.
Votre humble serviteur est à peu près sûr que la mise en conserve avec succès est réalisée par Wentworth Canning. Et oui, moi aussi je pense que le spaghetti est plus italien qu’espagnol mais qu’est-ce que j’en sais? La recette de tamal, quant à elle, peut être préparée pour plaire aux palais des habitants du Mexique. Une recette qui comprend du riz est apparemment développée pour plaire aux palais des personnes originaires d’Asie.
Au cas où vous ne le sauriez pas, un tamal est un plat mésoaméricain classique / traditionnel fait de pâte de maïs cuite à la vapeur dans une feuille de maïs ou de banane. Il peut être rempli de fromage, fruits, légumes, viande ou une combinaison de ceux-ci.
Soit dit en passant, Wentworth Canning a plus d’un tour dans son sac. Ses produits de marque Harvest comprennent de la margarine ainsi que des conserves d’asperges, cerises, compote de pommes, épinards, jus de tomate, maïs, pois, prunes et tomates.
Cela étant dit (tapé?), comme vous pouvez bien l’imaginer, Pearson et Wentworth Canning espèrent que diverses organisations et gouvernements viendraient frapper à leur porte pour commander de grandes quantités de Sure Food. Quoiqu’il en soit, le ciel, semble-t-il, est la limite et… rien ne se passe.
Voyez-vous, Wentworth Canning ferme apparemment ses portes en 1950. De fait, ses actifs sont vendus au début de 1951. York Farms Limited de Toronto, Ontario, une division du géant canadien de la production alimentaire Canada Packers Limited de Toronto, prend le contrôle de l’usine de Brantford au plus tard en août 1950.
Il convient de noter qu’une entité connue sous le nom de Wentworth Canning Company of B.C. Limited de New Westminster, Colombie-Britannique, est incorporée en février 1950. Elle devient Westminster Foods Limited en mars 1953. Cet emballeur d’huile à salade, margarine et shortening, le plus important du genre dans l’Ouest canadien, est officiellement repris par un vaste conglomérat (communications, construction, embouteillage, ingénierie et transformation des aliments) en octobre 1971.
En août 1977, le dit conglomérat, Agra Industries Limited de Saskatoon, Saskatchewan, vend Westminster Foods à CSP Foods Limited de Saskatoon, une entreprise créée et détenue par le Saskatchewan Wheat Pool de Regina, Saskatchewan, et Manitoba Pool Elevators Limited de Winnipeg, Manitoba. Ce dernier cède sa part en mars 1992.
CSP Foods est vendue à Dawn Food Products (Canada) Limited de Saskatoon, une filiale d’un fournisseur et société de distribution de produits de boulangerie américaine, Dawn Food Products Incorporated, en février 2002. Alors basée à Brampton, Ontario, Dawn Food Products (Canada) est toujours en pleine forme en 2023, mais revenons au fil conducteur de notre histoire.
L’échec du projet de production canadienne ne décourage pas Sure pour autant. Nenni. Les négociations pour produire son aliment à faible coût, riche en protéines et hypocalorique, vraisemblablement aux États-Unis, se poursuivent en 1952. À ce moment-là, la formule du produit a quelque peu changé, en raison d’une augmentation du coût du lait et d’un désir de simplifier la dite formule. En 1952, le produit se compose de farine de blé entier concassée, solides secs de lait non gras, shortening végétal et tourteau de soja dégraissé, en d’autres termes de choses qui sont encore facilement / aisément disponibles en Amérique du Nord. Oh oui, et du ketchup à la tomate est ajouté pour améliorer le goût.
Vous avez peut-être remarqué l’absence de l’expression Sure Food dans le paragraphe précédent. Votre humble serviteur a le sentiment que Sure peut avoir des doutes / réticences à propos de cette appellation.
Quoiqu’il en soit, Sure est toujours convaincu que son invention a beaucoup à offrir. La teneur en protéines de la nouvelle recette est encore comparable à celle du bœuf. Les informations fournies par Sure démontrent également que son succédané de viande est moins susceptible de nuire à la santé d’une ou un Homo sapiens typique. Un kilogramme de celui-ci contient environ 1 650 calories contre 2 650 calories dans le cas du bœuf mi-gras et 3 300 calories pour la viande de hambourgeois. De fait, Sure tient à souligner que bien des Américains et Américaines sont en surpoids – et payent un prix de plus en plus lourd à mesure qu’ils et elles vieillissent.
D’accord, d’accord, voici les mêmes informations en mesures impériales : une livre de Sure Food contient environ 750 calories contre 1 200 calories dans le cas du bœuf mi-gras et 1 500 calories pour la viande de hambourgeois.
D’ailleurs saviez-vous que la calorie utilisée lorsqu’il est question du contenu énergétique des aliments n’est pas, je répète pas, la calorie utilisée lorsqu’il est question du contenu énergétique d’un bécher d’eau dans le laboratoire de chimie d’école secondaire. Nenni, elle ne l’est pas. La calorie utilisée avec la nourriture est (devrait être?) appelée grande calorie / kilocalorie. Une calorie alimentaire correspond à 1 000 calories dites petites.
De fait, on pourrait dire que les unités de mesure connues sous le nom de calorie ne devraient pas du tout être utilisées. Nenni. Ce ne sont pas, je répète pas, des unités du Système international d’unités (SI), qui est l’itération moderne de ce qu’on appelle communément le système métrique. L’unité SI utilisée pour mesurer l’énergie est le joule, une unité nommée d’après le physicien et brasseur anglais James Prescott Joule, mais je digresse.
À la fin de 1952, la viande sans viande de Sure est utilisée comme allongeur de viande (boulette de viande, chili, hambourgeois, pain de viande, poivron farci, ravioli, steak haché, tarte de viande hachée, etc.) ou substitut de viande (chili, croquette, petit pâté, polpette al sugo, tarte de viande hachée, etc.) dans plus de 10 000 repas d’essai dans une variété de contextes, d’élèves ou étudiant(e)s d’écoles primaires, écoles secondaires et universités de l’Arkansas à des enfants mal nourris de Rome, Italie, sans parler d’adultes bien sûr. Certains des groupes d’essai comprennent jusqu’à 450 personnes. Dans l’ensemble, les cobayes humains pensent que le produit de Sure est tout à fait acceptable.
Qu’on ait dit ou non aux dits cobayes qu’ils mangeaient quelque chose de nouveau avant leur grande bouffe n’est pas clair. Qu’ils se soient plaints ou non n’est pas clair non plus. Ceci étant dit (tapé?), certains / plusieurs membres du chapitre de Fayetteville de la International Association of Lions Club qui participent à un essai ne sont pas amusés quand on leur dit.
Pour répondre à votre question, la polpette al sugo est un plat italien classique / traditionnel composé de boulettes de viande moelleuses et juteuses dans une riche sauce tomate. C’est un aliment-réconfort transcendant.
Sure semble convaincu que la production de masse de son produit alimentaire innovant réduirait le coût à environ 20 cents pour la boîte de 450 grammes (1 livre) qu’une famille typique pourrait acheter, ce qui correspond à environ 3.10 $ en devise canadienne de 2023. Les institutions qui achèteraient une boîte de conserve de 4.55 kilogrammes (10 livres) paieraient 14 ou 15 cents pour 450 grammes (1 livre) d’aliments de bonne qualité, ce qui correspond à quelque chose comme 2.15 $ à 2.35 $ en devise canadienne de 2023.
Pour autant que votre humble serviteur puisse le dire, l’aliment à faible coût, riche en protéines et hypocalorique de Sure n’est pas produit en grande quantité et tombe dans l’oubli, ce qui est bien dommage.
Sure lui-même quitte cette Terre en juin 1960. Il a 68 ans.
Et c’est tout pour aujourd’hui. Et oui, je pourrais avoir du thon végétalien pour le dîner. (Bonjour, EP!) Souhaitez-vous vous joindre à moi? Il y aura du gâteau au fromage au tofu comme dessert. Et de la bière, du cidre, des spiritueux / alcools forts et du vin, le tout sans alcool, pour aider à ce que tout descende bien.
Au fait, vous souvenez-vous de la ligne prononcée par le père du personnage de Sandra Annette Bullock dans la comédie romantique américaine de 2002 Deux semaines d’avis / L’amour sans préavis? Quelque chose à propos de manger un morceau de gâteau au fromage entièrement fait de soja – et de le détester.
Désolé, je digresse.