Les trois jours du Spoutnik; ou, « Radio-Moscou admet que le chien tournant autour de la terre dans le satellite ne reviendra jamais » : Laïka, Spoutnik 2 et la presse quotidienne du Québec, partie 2
Bien le bonjour, ami(e) lectrice ou lecteur, et bienvenue dans l’espace, frontière de l’infini. Votre humble serviteur vous suggère d’aborder sans plus attendre et de plain-pied la seconde partie de notre premier sujet de novembre 2022 : Laïka, Spoutnik 2 et la presse quotidienne du Québec, et…
Oui, Laïka est un chien femelle envoyé dans l’espace le 3 novembre 1957 à bord du satellite artificiel soviétique Spoutnik 2. N’avez-vous donc pas lu avec ravissement la première partie de cet article? Ne répondez pas à cette question. S’il vous plaît.
Vous même avez une question, n’est-ce pas? Je m’y attendais un peu. L’expression Tsentral’nyy Dom Aviatsii i Kosmonavtiki DOSAAF Rossíi présente dans la légende de la photographie ci-haut signifie maison centrale de l’aviation et de l’astronautique de la DOSAAF Russie. L’acronyme DOSAAF quant à lui signifie Dobrovol’noye Obshchestvo Sodeystviya Armii, Aviatsii i Flotu, soit société volontaire d’assistance à l’armée, à l’aviation et à la marine.
La maison en question, un des tout premiers musées de l’aviation soviétiques si vous devez le savoir, inauguré à Moscou en janvier 1927, n’est malheureusement plus que l’ombre de ce qu’elle a déjà été. Vers le milieu des années 1950, le musée reçoit en effet environ 100 000 visiteurs et visiteuses par an. Dans les années 2010, il en reçoit moins de 10 000, mais je digresse.
Revenons par conséquent notre premier sujet de novembre 2022, soit Laïka, Spoutnik 2 et la presse quotidienne du Québec.
Le 5 novembre 1957, un quotidien de Québec, Québec, L’Action catholique, fait paraître un éditorial de son éditorialiste et rédacteur en chef, un médecin de profession passionné de journalisme mentionné dans des numéros d’octobre 2020 et avril 2021 de notre blogue / bulletin / machin. Louis-Philippe Roy y souligne que « L’URSS garde la vedette avec Spoutnik II et… Joukov. » Ce vedettariat, l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS) le conserve de troublante façon et…
Serait-ce votre main que je vois s’agiter dans l’éther de manière frénétique? Vous ne savez pas en quoi consiste ce Joukov? Joukov n’est pas un quoi, ami(e) lectrice ou lecteur, c’est un qui. Un très important qui.
Et oui, il y aura un jeu de mots sur les Qui et Quiville, en anglais Who et Whoville, rendus célèbre par le fameux auteur pour enfants et dessinateur américain Theodor Seuss Geisel, mieux connu sous le nom de Dr Seuss. En effet, le titre du film d’animation de 2008 basé sur le célèbre livre pour enfants de 1954 Horton Hears a Who!, en français Horton entend un chou! / Horton entend un zou!, est traduit en français, au Québec, par Horton entend un qui, et… Euh, je suppose que je viens de gâcher le jeu de mots. Désolé. Revenons à l’éditorial.
Le maréchal de l’Union soviétique Gueorgui Konstantinovitch Joukov est un des plus brillants commandants d’armées soviétiques de la Seconde Guerre mondiale. Nommé ministre de la défense en février 1955, il appuie les efforts de Nikita Sergueïevitch Khrouchtchev pour accéder au poste de premier secrétaire du Kommunistítcheskaïa Pártiïa Soviétskogo Soyoúza. Son prestige et sa popularité sont telles, toutefois, que divers membres influents du gouvernement soviétique, dont Khrouchtchev, y prennent ombrage. Joukov est limogé de ses fonctions fin octobre 1957.
Ce limogeage survient en fait après celui de de divers membres influents du gouvernement qui ont tenté de renverser Khrouchtchev en juin 1957. Même s’il n’est certes pas un enfant de chœur, ce dernier décide néanmoins de ne pas mettre à mort ses adversaires.
Aux yeux de Roy, toutefois, ces limogeages signifient que tout ne va pas pour le mieux en URSS. Il semble croire que quelque chose va se passer.
A l’heure voulue par la Providence – et que nous pouvons hâter en suivant les recommandations de la Vierge de Fatima – il se produira des événements d’une portée surnaturelle extraordinaire et qui auront aussi sur le monde des répercussions favorables.
Et oui, Roy fait ici référence au message transmis, affirme-t-on, à des enfants par Mariam / Marie, à Fátima, Portugal, en 1917. De fait, l’éditorialiste peut, je répète peut, faire référence au troisième secret de Fátima, encore secret en 1957 et qui ne peut être révélé qu’après 1960. Pourquoi, demandez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur? Parce que Mariam / Mary l’a décidé ainsi, voilà pourquoi.
Malheureusement pour Roy, le dit secret est encore secret au moment de son décès, en mars 1966, à l’âge de 66 ans, mais revenons à Spoutnik 2 et…
Soupir. Ce secret vous intrigue, n’est-ce pas? Sachez donc qu’il est révélé en juin 2000. Il s’agit d’une vision allégorique passablement sanglante faisant référence à des événements qui semblent appartenir au passé.
À supposer bien sûr que le secret révélé en juin 2000 soit le véritable secret. D’aucuns suggèrent en effet qu’il s’agit d’un faux. D’autres croient qu’une partie importante du secret demeure encore secrète. D’autres encore croient que le secret est mal interprété par l’église catholique, apostolique et romaine; les événements auxquels il fait référence sont encore à venir.
Croiriez-vous que certaines personnes au Québec peuvent, je répète peuvent, peut-être avoir cru jusqu’à tout récemment que le troisième secret de Fátima avait quelque chose à voir avec le Canada? Selon les versions, Mariam / Marie ou un pape ayant lu le dit secret aurait prononcé des paroles pour le moins inquiétantes : « Pobre Canada! » / « Povero Canada! » Il s’agit évidemment d’une légende urbaine, mais je digresse.
Roy souligne que le lancement de 2 satellites soviétiques en l’espace d’un mois, soit Spoutnik 1 le 4 octobre 1957 et Spoutnik 2 le 3 novembre, prend une valeur énorme. Les voyages vers la Lune ne sont plus une possibilité, ils sont maintenant une probabilité, ce qui laisse entrevoir des perspectives intéressantes. Une autre probabilité, la mise au point d’une arme absolue, le missile balistique intercontinental, laisse entrevoir des perspectives terribles.
Si Roy se dit convaincu que les États-Unis n’utiliseraient une telle arme que pour répondre à des lancements de missiles soviétiques, il se dit tout aussi convaincu qu’une URSS ayant la dite arme constituerait « un péril imminent pour le monde. » Dans un cas comme dans l’autre, toutefois, le fait est que l’entrée en service de missiles balistiques intercontinentaux va représenter « un péril pour notre planète. »
Catholique fervent et anti-communiste tout aussi fervent, Roy interpelle son lectorat. Les croyantes et croyants se doivent de réfléchir sur le message prétendument transmis à Fátima – un message souligné par un prêtre français et grand promoteur de ces événements, l’abbé R. Payrière, qui prononce 2 causeries radiophoniques au Québec en octobre 1957.
Le dit message a toutefois évolué un tantinet entre 1917 et 1957. L’Empire russe est en effet devenu l’URSS, une prison des peuples qui est à n’en pas douter pire encore. S’il est toujours question de conversion au catholicisme, l’organisation à abattre n’est plus la Russkaja Pravoslavnaja Cerkov’, l’église orthodoxe russe, c’est le Kommunistítcheskaïa Pártiïa Soviétskogo Soyoúza. Cette conversion s’obtiendrait par la prière et la pénitence, semble croire Roy.
L’éditorialiste mentionne avec approbation des propos de Lester Bowles « Mike » Pearson, des propos prononcés au début de novembre à la University of Minnesota, à Minneapolis,... Minnesota. Ce dernier n’y va pas de main morte, en anglais bien sûr, mais je me permets de traduire ses propos. L’URSS, dit-il, a progressé de manière tout à fait remarquable.
Nous ferions donc mieux de nous réveiller de notre illusion de supériorité technique et matérielle facile que nous chérissons, car nous avons une voiture dans chaque garage, des aliments surgelés dans chaque réfrigérateur électrique et du rouge à lèvres à l’épreuve des baisers sur chaque lèvre. Ces choses ne nous apporteront pas la victoire à travers la coexistence compétitive, même si nous les affichons avec éclat dans des messages publicitaires.
Les peuples des pays occidentaux se doivent par conséquent d’accepter la discipline, les sacrifices et les efforts nécessaire au maintien de leurs libertés.
L’édition du 5 novembre de L’Action catholique renferme par ailleurs une lettre au rédacteur des plus intéressantes. Son contenu est toutefois vraiment très, très détrangeant.
Cher monsieur le Rédacteur,
Permettez à un lecteur de votre journal de venir, par la présente, souligner d’un trait rouge, une nouvelle parue dans les journaux du lundi 4 novembre, à savoir que « La [American Society for the Prevention of Cruelty to Animals] a critiqué l’envoi d’une chienne à bord du deuxième satellite soviétique. M. Warren W. McSpadden, directeur général de la Société, a déclaré que des protestations seront envoyées à l’Union soviétique par l’intermédiaire du département d’État. »
Un tel comportement des Américains ne fait que confirmer l’état plus qu’infantile de ce peuple. Et un manque absolu du sens du ridicule (pour ne dire que cela) car évidemment chez eux, il est plus aisé de s’émouvoir sur la condition animale (pauvre petite chienne qui voyage à bord du satellite russe et qui dit-on est nourrie automatiquement), que sur la condition humaine car les récents incidents de Little Rock le prouvent abondamment, n’est-ce pas?
L’indécence se poursuit car la [National Canine Defence League] de Londres cette fois, demandent à tous ceux qui aiment les bêtes, de garder un moment de silence. Bon geste de confraternité que n’ont jamais bénéficié tous les noirs qui ont été lynchés dans les États du Sud des États-Unis, ou tous les noirs qui se sont vus refusés [sic] l’entrée des hôtels dans les Îles Britanniques et dans plusieurs autres îles sous la dépendance anglaise y compris l’Afrique du Sud.
Le slogan et la morale qui ressortent de ces faits peuvent se traduire en ces termes : « Better be a dog lover than a negro lover. »
De toute façon les Russes sont en train de donner une leçon scientifique aux surhommes américains et au nom du progrès et de la science ce ne serait pas la première fois qu’un animal servirait de cobaye pour des expériences. Ces protestations ridicules ne feront qu’affirmer ce que bon nombre de gens pensent de la grande république étoilée, championne maintenant de la cause canine.
Avec tous mes remerciements
Roberto Wilson
Si la référence à Little Rock, Arkansas, ne donne pas un petit choc à vos petites cellules grises, les deux paragraphes suivants devraient vous rafraîchir la mémoire.
En mai 1954, la United States Supreme Court émet un arrêt déclarant inconstitutionnelle toute législation visant à établir des écoles ségréguées, et demande la déségrégation des écoles de tout le pays. En 1957, la National Association for the Advancement of Colored People enrôle 9 étudiantes et étudiants afro-américain(e)s aux notes fort élevées à la Little Rock Central High School de Little Rock, Arkansas – une école secondaire blanche comme neige depuis sa fondation. Des millions d’Américain(e)s caucasien(ne)s bouillent de rage. À la rentrée des classes, en septembre 1957, le gouverneur de l’Arkansas, Orval Eugene Faubus, fait appel à la Arkansas National Guard pour empêcher ces incroyablement braves jeunes personnes de pénétrer dans leur école. Cet usage de la force militaire contre quelques adolescent(e)s sans défense fait le tour du monde. L’image de marque des États-Unis, le bastion de la liberté, dit-on, en prend pour son rhume. Avec raison.
Contacté par le maire de Little Rock, le président Dwight David « Ike » Eisenhower, un gentilhomme mentionné à plusieurs reprises dans notre vous savez quoi depuis mars 2018, utilise les pouvoirs que lui octroie son office pour prendre le contrôle de la Arkansas National Guard et envoyer sur place des troupes de la United States Army. Pour la première fois depuis la Guerre civile américaine, le gouvernement des États-Unis envoie des troupes dans un état qui s’était soulevé contre lui. La tension est à son comble. Jour après jour, des soldats maintiennent une foule dangereusement hostile à distance des Little Rock Nine (« Neufs de Little Rock »), comme on appelle les 9 étudiantes et étudiants. L’année scolaire 1957-58 est un cauchemar de tous les instants pour ces jeunes personnes. Cela étant dit, la crise de Little Rock constitue bel et bien un point tournant dans l’histoire des États-Unis. Le racisme systémique n’est pas un mythe. La vie des Noir(e)s compte!
Si vous me le permettez, j’aimerais mentionner le plus délicatement possible le fait que, contrairement à ce que pense Wilson, l’Afrique du Sud n’est pas sous dépendance britannique. Ce n’est pas non plus une île. Il s’agit en fait d’un dominion tout aussi indépendant que le Canada, un dominion dont le gouvernement, formé depuis mai 1948 et jusqu’en avril 1994 par le Nasionale Party / National Party, construit peu à peu un monstrueux édifice, l’apartheid, un système institutionnalisé de ségrégation raciale qui aurait rempli de joie et d’allégresse les cœurs de bien des résidents de Little Rock – et d’ailleurs.
Un dominion qui quitte le Commonwealth en 1961 lorsque sa demande de demeurer au sein de cette organisation en tant que république est fortement opposée par le Nigéria, la Malaisie, l’Inde, le Ghana et le Canada, des pays membres fortement opposés à l’apartheid.
Le premier ministre du Canada, John George Diefenbaker, un gentilhomme mentionné à quelques / plusieurs reprises dans notre blogue / bulletin / machin depuis octobre 2020, joue un rôle de premier plan, un rôle dont toute Canadienne ou Canadien devrait être fière / fier, lors de la rencontre des premiers ministres du Commonwealth, à Londres, Angleterre, en mars 1961.
Mais revenons à notre sujet d’aujourd’hui.
Qui est donc ce Wilson, vous demandez-vous? Une bonne question.
Votre humble serviteur s’excuses à l’avance de la longueur du texte biographique qui suit mais Wilson le mérite bien.
Victor Emmanuel Roberto Wilson voit le jour en novembre 1928, à Port-au-Prince, Haïti, dans une famille apparemment aisée. Il fait en effet des études en beaux-arts à la University of Pennsylvania, à Philadelphie,… Pennsylvanie, et peut, je répète peut, avoir suivi des cours de nature indéterminée à Caracas, Venezuela, possiblement à la Universidad Central de Venezuela.
Pendant sa jeunesse, Wilson contribue à un éphémère magazine de bande dessinée haïtien, Zobopes. Acteur, décorateur et dramaturge au sein de la Société nationale d’arts dramatiques, il peut par ailleurs avoir fait un peu de radio.
Wilson visite le Québec, la région du lac Saint-Jean semble-t-il, vers 1949-50 et tombe amoureux tant de ce coin de pays que d’une de ses jeunes résidentes, Lorraine Poirier. Cela étant dit (tapé?), il ne tarde pas à rentrer chez lui. Poirier se rend par la suite à Haïti où elle épouse son amoureux, en 1951.
Le couple s’installe au Québec, dans la région du lac Saint-Jean, vers la fin de 1952 ou le début de 1953. Commis, voire bucheron peut-être, pendant un bref laps de temps, Wilson se joint au personnel d’un quotidien de Chicoutimi, Québec, Le Progrès du Saguenay, où il occupe le poste de monteur d’annonces et dessinateur.
Wilson est à n’en pas douter un des premiers membres d’un minorité visible non-autochtone à vivre dans la région du lac Saint-Jean. Plus tard, il admet facilement que les bûcherons avec qui il avait travaillé trouvaient ses tentatives de reproduire des jurons et blasphèmes typiques du Québec absolument hilarantes.
Vers septembre 1953, Wilson lance une bande dessinée, une première québécoise, voire canadienne, pour un dessinateur / scénariste noir, dans les pages de l’hebdomadaire Le Régional de Chicoutimi. Publiée par la suite dans plusieurs autres hebdomadaires de la région du lac Saint-Jean, sans parler d’un journal en Ontario (Cornwall?), « La caverne au trésor » paraît jusque vers 1955.
Cette même année, Wilson lance Aventures, un magazine sportif et culturel dont un seul numéro paraît, en juin.
Fortement impliqué dans sa communauté, Wilson réalise « Le vainqueur du Saguenay » en 1956. Cet album d’une douzaine de 12 pages, dont 4 de bandes dessinées, a pour objectif d’aider un nageur de la région, atteint de poliomyélite pendant son enfance, à amasser les fonds lui permettant de participer à un marathon de nage au lac Ontario, en Ontario en fait, entre Niagara on the Lake et Toronto, en août 1956.
Robert Cossette, un géant québécois / canadien de la nage en eau libre, doit malheureusement déclarer forfait, tout comme les autres participants, 8 nageurs et 1 nageuse, tous et toute vaincu(e)s par les eaux froides du lac. Cossette termine en 3ème place.
Soit dit en passant, la première personne ayant réussi la traversée du lac Ontario, en septembre 1954, n’a pas encore 18 ans. Marilyn Grace Bell est Ontarienne, mais revenons à Wilson.
Avant que je ne l’oublie, veuillez noter que Wilson est animateur de radio pour des stations de Chicoutimi et Roberval, Québec, au cours des années 1950.
Wilson entame une relativement longue collaboration avec L’Action Catholique en 1956. En décembre, Wilson lance la bande dessinée policière « Les Aventures de Robert et Roland, » à n’en pas douter son œuvre la mieux connue. Le directeur général de ce quotidien on ne peut plus conservateur, un conférencier / écrivain / enseignant / historien / journaliste, le prêtre catholique Paul-Émile Gosselin, rédige initialement les textes des aventures de 2 jeunes garçons de Québec, je pense, Robert et Roland, qui jouent aux détectives.
Le titre de la première aventures de ces jeunes gens, « L’hôtel des sauvages, » est pour le moins choquant. Ce dernier mot réfère en effet aux Premières nations du Québec car c’est souvent ainsi que de nombreux Québécois francophones de l’époque appellent leurs voisins autochtones. On croit rêver. Mais revenons aux aventures de Robert et Roland.
La dernière bande de cette bande dessinée paraît en décembre 1959.
En avril 1957, au cours de la semaine sainte, L’Action Catholique publie les 4 planches d’une bande dessinée de Wilson, « La Passion de N. S. Jésus. »
Et oui, les lettres N. S. signifient notre seigneur.
Wilson peut fort bien travailler à cette époque sur le scénario d’un téléthéâtre, la première émission de télévision de ce type à être diffusée dans la région de Québec. Diffusé en direct en mai 1957, Le fruit défendu est une adaptation de la pièce éponyme du metteur en scène et dramaturge française Gabriel Imbert, alors, peut-être, directeur du Conservatoire d’arts dramatiques à Port-au-Prince. Le fruit en question est bien sûr celui qui entraîne l’expulsion d’Adam et Ève du paradis / jardin d’Eden.
Wilson tient le rôle du Serpent, un rôle qui lui revient peut-être en raison de sa grande taille (environ 1.95 mètre / environ 6 pieds 5 pouces).
Croiriez-vous que Wilson rédige le scénario et effectue la réalisation d’un film? Si, si, d’un film. La vie… La réalité et le roman sort fin novembre 1962. Un des principaux interprète de cette modeste œuvre de fiction s’appelle… René Lévesque. Et non, le René Lévesque en question n’est pas le ministre des Richesses naturelles du Québec, un gentilhomme, que dis-je, un géant québécois, dont la carrière politique ne fait que commencer.
Wilson rédige par ailleurs le scénario d’une autre modeste œuvre de fiction, La légende arawak, sorti en novembre 1961. Si les principaux personnages de ce film sont joués par des acteurs qui ne sont pas autochtones, la présence de nombreux membres de la troupe de danse Cabir Coubat, formés de membres de la Première nation wendate, est à noter.
Soit dit en passant, le terme Arawak ou, pour utiliser le terme apparemment utilisé de nos jours, Taïnos, réfère à un peuple autochtone qui vit dans les Grandes Antilles au moment où Cristobal Colom / Christoforo Colombo, un individu mieux connu sous le nom de Christophe Colomb, arrive dans la région en octobre 1492.
Devenu citoyen canadien en mai 1961, Wilson entre dans la fonction publique québécoise, au ministère des Affaires culturelles semble-t-il, en 1964. Il occupe successivement, je pense, des postes d’agent d’information, agent culturel et directeur des relations interparlementaires de l’Assemblée nationale du Québec.
Un autre mot d’avertissement. Le paragraphe suivant est très, très dérangeant.
En octobre 1970, Wilson est le secrétaire particulier / adjoint exécutif du ministre de l’Immigration et ministre du Travail et de la Main-d’œuvre du Québec. Enlevé en octobre par la cellule Chénier du Front de libération du Québec, Pierre Laporte est tué sans qu’on sache trop dans quelles circonstances et par un membre de la cellule Chénier que personne n'a jamais identifié.
Wilson publie un premier livre, un poème dramatique, Aguanamo - Légende Arrawak, en 1974. Le Général Alexandre Dumas – Soldat de la Liberté suit en 1977. Simon Bolivar vu par un citoyen du Québec paraît en 1983. Wilson publie son dernier livre, L’extraordinaire odyssée : Christophe Colomb, 1492-1992 : il y a cinq siècles, l’aventure du navigateur qui changea le destin du monde, en 1991.
Victor Emmanuel Roberto Wilson meurt à Québec en décembre 1995, à l’âge de 67 ans.
Un Prix Roberto Wilson voit le jour en 2014. Il récompense le coup de cœur du jury d’un événement annuel, le plus ancien festival de bande dessinée au Canada (1988), le Festival Québec BD, pour un album de bande dessinée en langue française issu d’une traduction.
Vous avez apprécié cette longue digression, n’est-ce pas? C’est bien ce que je pensais. Wilson gagne à être mieux connu, mais revenons à Laïka et Spoutnik 2, mais seulement la semaine prochaine. Désolé.