« Je suis Robert Robot, homme mécanique. Conduis-moi et dirige-moi partout où tu le peux : » Un petit bijou technologique datant des jours sombres de la guerre froide, Robert le robot, partie 2
Salutations, ami(e) lectrice ou lecteur, et bienvenue. Vous avez bien sûr lu la première partie de cette histoire fascinante – et l’avez mémorisée. Passons maintenant à la seconde partie de ce regard sur l’histoire de Robert le robot, un jouet développé par la firme américaine de fabrication de jouets Ideal Toy Corporation.
Présenté dans de nombreux journaux nord-américains à l’automne 1954, Robert le robot voit sa fortune augmenter lorsqu’il apparaît à New York, New York, en octobre 1954, en compagnie de Tobor, le protagoniste robotique du film de science-fiction américain de 1954 Tobor le grand / Le maître du monde. L’être humain à l’intérieur de ce robot à taille humaine est vraisemblablement l’acteur américain qui le joue dans le film, à savoir Jacob Lewis « Lew » Smith, Junior.
De fait, la promenade de Robert avec Tobor est l’occasion par laquelle le premier fait son apparition dans des journaux canadiens, dans des provinces comme l’Alberta, l’Ontario, le Québec et la Saskatchewan.
Remarquez, Tobor et Robert le robot sont également photographiés en compagnie de l’enfant acteur américain William McClellan « Billy » Chapin, un des principaux protagonistes de Tobor le grand / Le maître du monde.
Conscients de la nécessité de garder Robert le robot dans l’esprit du public, en particulier des enfants, Ideal Toy et d’innombrables magasins de jouets font abondamment la publicité de ce petit jouet. L’insérer dans le Sears 1954 Christmas Book, publié par Sears, Roebuck & Company, est une idée brillante. Remarquez, encore, Robert le robot peut également être trouvé dans les éditions de 1955 et 1956 de ce catalogue, et très probablement dans des éditions ultérieures également.
Robert le robot est également un des 100+ jouets américains présentés dans un numéro de novembre 1954 du magazine hebdomadaire américain très populaire et à succès Life. Et oui, c’est le seul robot du lot. Les révolvers jouets destinés aux futurs défenseurs de la liberté et les poupées destinées aux futurs épouses des dits défenseurs sont passablement plus nombreuses et nombreux.
Soit dit en passant, votre humble serviteur a identifié parmi ces 100+ jouets quelque chose avec lequel j’ai joué au milieu des années 1960, à savoir les American Plastic Bricks de Halsam Products Company – ou une version fabriquée ou emballée au Canada. Ces briques rouges flexibles sont emballées dans un tube en carton épais avec un fond en métal et un couvercle en métal amovible.
La version canadienne que j’ai reçue en cadeau est probablement fabriquée par Reliable Toy Company Limited de Toronto, Ontario, sous le nom de Easylock Bricks. Et oui, cette firme a fait l’objet d’un article téléchargé en décembre 2021.
Et oui, je me souviens avoir parcouru avec envie diverses éditions du milieu des années 1960 du Catalogue de Noël publié par T. Eaton Company Limited, de Toronto, je pense, une firme mentionnée dans quelques / plusieurs numéros de notre étonnant blogue / bulletin / machin, et ce depuis janvier 2019. Ou ais-je parcouru des catalogues publiés par Simpsons-Sears Limited de Toronto, une coentreprise entre une chaîne canadienne de magasins à rayons, Robert Simpson Company Limited de Toronto et une chaîne américaine de magasins à rayons, Sears, Roebuck and Company?
Quoi qu’il en soit, je me souviens d’avoir parcouru avec envie diverses éditions du milieu des années 1960 de catalogues de Noël. Si, si, avec envie. Voyez-vous, les salaires misérables versés par Dominion Textile Incorporated de Montréal, Québec, aux employé(e)s de son usine textile de Sherbrooke, Québec, ne permettaient pas beaucoup de frivolités.
Oh, avant que j’oublie, Dominion Textile est mentionnée dans quelques numéros de notre vous savez quoi, et ce depuis août 2018, mais je digresse.
Incidemment, Robert le Robot est impliqué dans une tempête dans un verre d’eau en juillet 1955. Voyez-vous, le président Dwight David « Ike » Eisenhower a l’audace d’acheter un cor des Alpes miniature, un modèle réduit d’avion et trois poupées pour ses petits-enfants dans un magasin de jouets bien connu à Genève, Suisse, quand il assiste à une réunion de haut niveau dans cette charmante ville.
Même si les opinions du quatuor de grandes puissances présentes (États-Unis, Union des républiques socialistes soviétiques, Royaume-Uni et… France) divergent diamétralement, le sommet de Genève de juillet 1955 se termine néanmoins par une note d’optimisme, soit dit en passant, mais je digresse.
Le président de la National Doll Manufacturers Association déclare dans un communiqué de presse que son industrie est scandalisée par l’action d’Eisenhower. David Rosenstein indique qu’il lui enverrait des jouets 100% américains comme cadeaux et rappels. Quatre d’entre eux, et les seuls mentionnés dans les journaux, sont des produits d’Ideal Toy. Et oui, Robert le robot est l’un d’entre eux. Les trois autres sont des poupées. Et oui encore, Rosenstein est le président de... Ideal Toy.
Plusieurs membres de la National Doll Manufacturers Association se plaignent rapidement de la plainte de Rosenstein, tout comme de nombreuses Américaines et Américains ordinaires. Remarquez, ces membres de la National Doll Manufacturers Association peuvent également être ennuyés par la publicité gratuite donnée à Ideal Toy.
Quoi qu’il en soit, Rosenstein envoie rapidement des excuses à Eisenhower, un gentilhomme mentionné dans de nombreux numéros de notre vous savez quoi depuis mars 2018, déclarant qu’un agent de presse trop zélé avait publié le communiqué de presse à son insu. De fait, il avait lui-même acheté des poupées au magasin que le président avait visité, mais revenons à Robert.
Les versions de Robert le robot produites en 1955 et 1956 sont un peu plus simples, moins chères et plus faciles à produire que la version originale de 1954. Les bras de la troisième version ne sont plus liés aux roues motrices par exemple et les yeux et l’antenne ne s’éclairent plus. L’ouverture où se trouve la trousse à outils a également disparu, tout comme la trousse à outils.
Croiriez-vous qu’Ideal Toy commercialise un dérivé de son robot jouet vers 1955? Cette version simplifiée et plus petite de Robert le robot est assise sur le siège conducteur d’un bouteur en plastique. Il est apparemment amovible de cette position. Le petit robot a une lumière alimentée par batterie sur le dessus de sa tête et ses bras bougent lorsque le bouteur bouge, et…
Vous avez une question, ami(e)lectrice ou lecteur qui a également lu la version anglaise de ce texte? Pourquoi utiliser l’expression crawler tractor alors que le mot bulldozer ferait aussi bien, demandez-vous? Une bonne question. Voyez-vous, techniquement, un bulldozer est une lame de raclage attachée à un crawler tractor. Pouvons-nous continuer maintenant?
Pour voir le dit bouteur avancer, il faut tourner la manivelle d’un contrôleur en forme de pistolet. Ce mouvement de rotation est transmis à un câble flexible qui relie le contrôleur aux chenilles du bouteur. Inverser la rotation de la manivelle fait reculer le jouet. En appuyant sur la gâchette du contrôleur, le véhicule d’environ 25 centimètres (environ 10 pouces) de long est envoyé là où sa jeune opératrice ou son jeune opérateur veut vivre sa prochaine aventure.
Ce jouet se vend également pour environ 6 $ ÉU, une somme qui correspond à environ 89 $ en devises canadiennes de 2024.
Incidemment, la façon dont beaucoup, sinon la plupart des Américains et Américaines, considèrent les bouteurs en 1955 ne peut pas être plus différente de la façon dont beaucoup, sinon la plupart d’entre elles et eux, les considèrent maintenant. Voyez-vous, les bouteurs jouent un rôle important dans l’acquisition de la victoire pendant la Seconde Guerre mondiale. Une fois cette victoire obtenue, on pense que ces véhicules joueraient un rôle important dans la reconstruction des États-Unis, en particulier de ses villes et de son réseau routier.
Croiriez-vous que quelques livres pour enfants chantent les louanges du bouteur? Des livres comme Benny the Bulldozer d’Edith Thacher Hurd (1947), Buster Bulldozer de Catherine Danner (1952) et The Busy Bulldozer de James Browning (1952).
Comme on peut s’y attendre, la réalité n’est pas aussi joyeuse que les illustrations des livres. La triste vérité est que près de 6 millions d’unités de logement sont passés au bouteur aux États-Unis entre 1950 et 1970. Un pourcentage disproportionné de ces unités sont les humbles demeures de locataires non blancs, des gens qui n’ont pas leur mot à dire sur ce qui leur est fait, des gens dont la vie et les quartiers sont simplement mis en pièces.
Au nord de la frontière canado-américaine, des quartiers entiers de Montréal et Toronto sont également rayés de la carte au cours des années 1960. Un pourcentage disproportionné de ces quartiers abrite les humbles demeures de familles pauvres, des gens qui n’ont pas leur mot à dire sur ce qui leur est fait, des gens dont la vie et les quartiers sont simplement mis en pièces.
Tant au Canada qu’aux États-Unis, l’opposition aux vastes plans de rénovation urbaine gagne progressivement du terrain et la destruction gratuite de quartiers entiers est progressivement maîtrisée. À ce moment-là, le bouteur n’est plus considéré comme un personnage héroïque. Loin de là, mais revenons à Robert.
Même si des chiffres de ventes fiables restent élusifs, Robert le robot peut être le meilleur vendeur d’Ideal Toy vers 1954-56.
Le succès est tel qu’Ideal Toy signe des accords de participation avec des firmes américaines qui produisirent des tee-shirts, pyjamas, lampes de poche, écharpes, chandails en molleton, ballons, etc. de Robert le robot, soit une douzaine de produits dérivés en tout.
Le responsable de la promotion des ventes de la firme, Melvin Norman « Mel » Poretz, affirme que la production de tels produits dérivés pour un jouet plutôt que pour un individu réel comme le chanteur / artiste de rodéo / acteur américain Roy Rogers, né Leonard Franklin Slye, ou un personnage fictif, comme le cow-boy Hopalong Cassidy, est une première dans l’industrie du jouet.
Comme on peut s’y attendre, le succès commercial de Robert le robot conduit au développement de robots jouets similaires par d’autres fabricants de jouets américains.
Louis Marx & Company Incorporated, un fabricant de jouets américain plus important, présente par exemple son Electric Robot en plastique et alimenté par batterie en 1955. Peu disposé à vendre sa création pour plus de pognon que Robert le robot, c’est-à-dire pas plus d’environ 6 $ ÉU, une somme qui correspond encore à environ 94 $ en devises canadiennes de 2024, Louis Marx & Company doit laisser de côté le tourne-disque.
Malgré tout, certain(e)s, sinon plusieurs, considèrent Electric Robot supérieur à Robert le robot car il est alimenté par batterie et se déplace sans les saccades associées aux mouvements de son concurrent d’Ideal Toy.
Mieux encore, ou pis encore, selon votre point de référence, Electric Robot regorge de fonctionnalités, notamment un bouton sur lequel un enfant peut tapoter des messages en code Morse. .-- .- .... -.-.--
Peu de temps après, Electric Robot est suivi par Electric Robot and Son, une paire de robots jouets.
Le succès commercial de Robert le robot conduit également au développement de jouets similaires par des firmes japonaises. Taiyō Kōgyō Kabushiki Kaisha, par exemple, introduit un robot fonctionnant sur batterie vers 1955. Ce jouet en fer blanc est très probablement conçu spécifiquement pour l’exportation.
Aussi tentant qu’il serait de penser que notre jouet l’a inspiré, la chanson Robert the Robot, composée en 1956, je pense, par le pianiste / parolier / directeur musical / compositeur australien Charles Zwar pour la revue américaine Sticks and Stones, n’a probablement rien à voir avec la création d’Ideal Toy. Après tout, la chanson raconte l’histoire un peu coquine d’une dame qui a une liaison avec un robot nommé Robert. Cette chanson est interprétée par une célèbre actrice (cinéma, télévision et théâtre) anglaise, Hermione Ferdinanda Gingold.
Deux chansons définitivement liées à notre robot jouet sortent cependant à temps pour la période de Noël 1956. Robert the Robot et Robert the Robot Saves the Day, chantées par les Tinkertones, font partie de la série Cricket Toy Tunes lancée par une étiquette de disques assez connue destinée aux enfants, à savoir Cricket Records. Voyez-vous, Ideal Toy est une des firmes avec lesquelles la maison de disques américaine Pickwick Sales Corporation a signé des accords de participation.
Un autre produit Ideal Toy avec une chanson dans la série Cricket Toy Tunes est Betsy Wetsy, une poupée très populaire qui, euh, fait pipi après avoir bu de l’eau. La chanson Betsy Wetsy est une des deux pièces trouvées sur un disque intitulé My Doll Family. La seconde chanson, Patti Prays, parle d’une poupée d’Ideal Toy nommée… Patti Prays, et vous savez ce qu’elle a fait, n’est-ce pas, ami(e) lectrice ou lecteur? Si, si, elle prie, mais je digresse.
Avant que j’oublie, Betsy Wetsy peut aussi verser des larmes. Vous pouvez même lui moucher le nez. Je ne plaisante pas.
Une pensée subversive si je peux me permettre. Quelle est exactement la différence entre des poupées comme Betsy Wetsy et Patti Prays et des robots jouets comme notre ami Robert? De fait, quelle est la différence entre une poupée et une figurine d’action, en anglais action figure, une expression inventée en 1964 par une firme américaine de fabrication de jouets bien connue, Hassenfeld Brothers Incorporated, pour commercialiser sa poupée, désolé, désolé, sa figurine d’action G.I. Joe.
Croiriez-vous qu’au moins un des innombrables Robert le robot réalisé par Ideal Toy joue un rôle muet dans un long métrage romantique et mélodramatique américain de 1956, Demain est un autre jour? Eh bien, vous devriez.
Le bien-aimé acteur américain Frederick Martin « Fred » MacMurray incarne Clifford « Cliff » Groves, un fabricant de jouets qui ne se sent pas apprécié par son épouse et ses enfants. L’actrice / danseuse / mannequin américaine Barbara Stanwyck, née Ruby Catherine Stevens, incarne Norma Miller, une ancienne employée de Groves devenue la charmante directrice divorcée d’une maison de couture. Les deux ne se sont pas vu(e)s depuis des années.
Groves tombe amoureux de Miller, qui l’aimait secrètement. En fin de compte, Miller, désemparée, se rend compte que tout type de romance impliquant Groves est impossible. Groves, tout aussi désemparé, regarde l’avion de ligne à bord duquel elle est montée voler au loin. Il retourne à sa famille.
Au cours d’une des scènes, Miller a brièvement entre les mains un des innombrables Robert le robot fabriqué par Ideal Toy. Vers la fin du film, Groves heurte notre ami robotique alors que celui-ci se trouve sur une table. Le jouet robot commence alors à se déplacer vers la caméra qui filme la scène. Alors que la caméra commence à avancer, son ombre tombe sur le robot jouet alors que celui-ci quitte progressivement la prise de vue.
Une digression Star Trek pour mes bonnes copines du monde des musées si je peux me le permettre. Avant de devenir l’actrice Barbara Stanwyck, Stevens travaille comme danseuse de revue et instructrice de danse dans des boîtes de nuit de New York appartenant à une actrice / entrepreneure / gestionnaire de bar clandestin / productrice américaine plus grande que nature du nom de Mary Louise Cecilia « Texas » Guinan. Si, si, Guinan, comme Guinan, la tenancière de bar et conseillère informelle el-aurienne à bord du vaisseau stellaire USS Enterprise-D. (Bonjour, SB, EG et EP!)
Il convient de mentionner que Robert le robot joue un petit rôle dans les combats du bon combat pendant la guerre froide, en affrontant les hordes impies du communisme. Désolé, désolé.
Comment notre ami robotique accomplit-il accompli ce devoir patriotique, demandez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur sceptique? En participant à l’American National Exhibition, bien sûr.
L’exposition en question se tient à Moskvá / Moscou, Union des Républiques socialistes soviétiques, de juillet à septembre 1959. Les objets exposés comprennent des automobiles, œuvres d’art, vêtements, etc. américain(e)s. Et oui, il y a des maisons modèles et des cuisines futuristes.
De fait, l’accent mis sur les maisons modèles et cuisines futuristes qu’on trouve dans les journaux américains s’avère problématique. Voyez-vous, ces journaux ne mentionnent pas beaucoup les avancées scientifiques et technologiques incluses dans l’American National Exhibition, une exposition dont le thème est The American Way of Life – America at Work and Play, en d’autres mots le mode de vie américain – L’Amérique au travail et au jeu.
Votre humble serviteur doit admettre être un peu agacé par l’utilisation du mot America pour décrire les États-Unis. Après tout, le continent américain dépasse un peu ce seul pays. Enfin, passons à autre chose.
Comme il fallait s’y attendre, Ideal Toy et / ou les organisateurs de ce magnifique exercice de propagande veillent à ce que le public américain sache ce qu’elle et ils font. Une des photographies publiées dans de nombreux journaux américains, et dans au moins un quotidien canadien, montre, vous l’aurez deviné, Robert le robot.

« Cet enfant à l’étrange coiffure démontre ici les talents de ‘Robert le robot’, un nouveau jouet mécanique. Les yeux de Robert clignent, et il peut parler, marcher et mouvoir ses bras. Le bambin n’a qu’à contrôler les gestes du jouet fabriqué par la compagnie Ideal Toy Corporation qui le présentera à l’exposition américaine de Moscou, cet été. On le vend environ quatre [sic] dollars. » Anon., « Un jouet américain pour les petits Russes. » Le Soleil, 1er mai 1959, 7.
De plus en plus conscient(e) de la nécessité de mettre à jour son offre robotique, Ideal Toy envoie Robert le robot aux pâturages en 1960, je pense, environ 6 ans après son apparition dans les rayons d’innombrables magasins. La firme lancé Mr. Machine la même année. Un autre robot jouet, Robot Commando, suit en 1961. Ces deux jouets connaissent également une longue et fructueuse carrière.
Il convient de mentionner que très, très, très peu de jouets lancés dans les années 1950 ont une carrière d’une durée d’environ 6 ans. Le jouet moyen est retiré des étagères après 1 ou 2 ans.
Même si les chiffres de vente fiables restent élusifs, il est suggéré que jusqu’à 500 000 Robert the Robot peuvent être produits. Wah!
Une des raisons de la longévité des plus inhabituelles de Robert le robot, outre son concept innovant et sa publicité incessante, est une réplique de ce jouet d’environ 3 mètres (environ 10 pieds) de hauteur, réalisée par le personnel d’Ideal Toy. Ce géant de bois et métal pesant environ 450 kilogrammes (environ 1 000 livres) apparaît dans des magasins, foires de comté, défilés, cinémas, auditoriums, etc., et ce partout aux États-Unis.
De fait, le géant s’avère si populaire qu’il faut en construire un second, en 1956, pour répondre à la demande.

Un des robots publicitaires de grande taille Robert le Robot, peu avant le début de l’édition 1956 du défilé de Noël du Globe Store exploité par Cleland-Simpson Company, Scranton, Pennsylvanie, novembre 1956. Melvin N. Poretz, « The Journeys of a Robot. » Advertising Requirements, mars 1958, 79.
Croiriez-vous que, à au moins une occasion, le robot géant est mis à l’honneur devant le Père Noël? Je sais, je sais, on croit rêver. En novembre 1956, à Scranton, Pennsylvanie, Cleland-Simpson Company organise le défilé de Noël de son célèbre Globe Store autour de l’arrivée en ville du dit robot. Le véhicule transportant le Père Noël entre dans Scranton derrière le camion dans lequel le robot peut être vu. Jusqu’à 15 000 personnes sont présentes pour applaudir le défilé de Robert le robot, euh, du Père Noël.
Parlant (tapant?) de défilé, le premier robot géant participe à l’édition 1955 de la célèbre Macy’s Thanksgiving Day Parade présentée par la chaîne de grands magasins américaine R.H. Macy & Company.
À cette époque, ou quelque temps plus tard, je ne peux pas le dire, un de ces mêmes robots est interviewé dans The Steve Allen Show par nul autre que… Stephen Valentine Patrick William « Steve » Allen, un célèbre acteur / comédien / compositeur / écrivain / musicien / personnalité télévisuelle et radiophonique américain mentionné dans un numéro de mai 2023 de notre glorieux blogue / bulletin / machin.
Une brève digression si je peux me le permettre. Votre humble serviteur se trouvait en Pennsylvanie en mars 1993 avec trois collègues de ce qui était alors le Musée national de l’aviation, aujourd’hui le magnifique Musée de l’aviation et de l’espace du Canada, à Ottawa, Ontario, lorsque le tristement célèbre blizzard de 1993 a frappé cet état. Entre 30 et 90 centimètres (12 à 36 pouces) de neige ont recouvert le nord-est et le centre de la Pennsylvanie. Et n’oublions pas les vents de 70 à 105 kilomètres/heure (45 à 65 milles/heure).
Nous avons dû tous les quatre trouver refuge dans un hôtel, pendant quelques jours, peut-être près de Scranton en fait, et attendre que la tempête passe. De fait, un gendarme de la Pennsylvania State Police nous a pratiquement ordonné de quitter la route. Il l’a fait juste après ou avant que notre véhicule fasse ce dont je me souviens vaguement comme une pirouette sur un pont glacé, une pirouette qui s’est terminée lorsque le côté droit du dit véhicule a touché la barrière de sécurité du pont – après quoi un couinement aigu a jailli de ma gorge alors que je regardais en bas, tout droit en bas, vers ce qui se trouvait en dessous du dit pont. Ah, les souvenirs. Nous les apprécierons. Pas. Fin de la digression.
Et non, Ideal Toy ne paye pas les frais de transport chaque fois que ses robots géants bougent. Une entreprise qui souhaite en avoir un sur son plancher doit payer les frais d’envoi. Une fois l’événement terminé, le robot est envoyé vers sa prochaine destination, le coût de transport étant pris en charge par l’entreprise concernée.
Remarquez, chaque entreprise doit prendre en charge le coût d’une publicité couvrant au moins un quart de page dans un journal local et payer la facture d’électricité du robot. Ideal Toy fournit apparemment des kits promotionnels gratuitement.
Incidemment, à au moins quelques reprises, les robots voyagent par voie aérienne, gracieuseté d’un important transporteur aérien américain mentionné dans des numéros de novembre 2017 et septembre 2021 de notre magnifique blogue / bulletin / machin, Trans-World Airlines Incorporated. Et oui, le robot géant voyage vraisemblablement dans les airs en étant allongé sur le dos.
Les robots géants d’Ideal Toy sont pilotés par un gentilhomme qui se hisse à bord par une trappe. Une fois le robot branché, son opérateur peut illuminer ses yeux et son antenne. Il peut jouer de la musique sur un phonographe interne. Il peut faire avancer et reculer le robot. Il peut lui faire serrer doucement la main d’une personne, jeune ou vieille, et… si, si, le robot, enfin l’opérateur en fait, peut parler à l’aide d’un microphone près de son visage et d’un haut-parleur situé dans ce qu’on pourrait qualifier de nombril du robot.
Comme on peut s’y attendre, les bonnes gens d’Ideal Toy placent un script près du microphone du robot afin que son opérateur puisse donner un discours promotionnel aussi bon que possible d’un point de vue robotique. Il y a également des conseils sur la façon de répondre aux requêtes inattendues.
Les conseils comprennent vraisemblablement un poème que l’opérateur peut lire si des gens appuient sur le bouton Recite a Poem, en français récite un poème, situé sur la poitrine du robot. Le poème en question est bien sûr, en traduction, « Je suis Robert Robot, homme mécanique. Conduis-moi et dirige-moi partout où tu le peux. »
D’autres boutons sont intitulés Sing a Song, Blink your Lights, en français chante une chanson, fait clignoter tes lumières, etc.
Ceci étant dit (tapé?), au moins un opérateur du robot géant doit improviser lors d’un séjour dans une succursale d’un grand magasin de premier plan situé à Arlington, Virginie. Alors qu’il est traîné par sa maman exaspérée, après une heure passée à discuter avec le robot, un petit garçon crie « see ya later, alligator, » en français, à plus tard, mon canard, ou quelque chose du genre. Vif comme l’éclair, le robot / opérateur répond, vous l’aurez deviné, « in a while, crocodile, » en français, à demain, mon lapin, ou quelque chose du genre, d’une voix traînante suffisamment épaisse pour être coupée à la scie.
Croiriez-vous que, lors d’un séjour dans un grand magasin situé à Pittsburgh, Pennsylvanie, un opérateur a la bonne idée de mettre sur le phonographe un disque avec de la musique mambo? Le dit opérateur fait ensuite bouger le robot au rythme. Je ne plaisante pas. Les gens présents s’enrouent à force de crier. Les bonnes gens d’Ideal Toy sont si impressionnés par l’initiative de l’opérateur, et par la réaction qu’elle suscite, que le disque de mambo est ajouté à la liste d’écoute du robot.
La taille même du robot géant s’avère problématique au moins une fois, fin septembre 1955, à Cincinnati, Ohio. Voyez-vous, l’entrée de fret de la succursale du centre-ville de John Shillito & Company, un grand magasin local, est tout simplement trop petite.
Des dirigeants quelque peu paniqués concluent que la seule manière de sauvegarder leur réservation de deux semaines est de placer le robot sur le trottoir devant le magasin. Des rallonges reliant le robot à une prise à l’intérieur du magasin sont rapidement dénichées. Certains panneaux sont également rapidement peints. En un rien de temps, le robot déambule sur le trottoir.
L’installation improvisée fonctionne à merveille. Elle fonctionne si bien qu’un constable du Cincinnati Police Department signale rapidement la présence d’une foule nombreuse devant le magasin. Des représentants du dit département se présentent rapidement. Après avoir pris connaissance de la situation, ils soulignent que John Shillito & Company ne peut pas faire déambuler un robot sur le trottoir sans permis.
Quelqu’un, vraisemblablement quelqu’un de John Shillito & Company, contacte rapidement les autorités municipales. Le directeur municipal, Charles Adair Harrell, se rend vite compte qu’une autorisation ne peut pas être accordée en vertu de la réglementation en vigueur. Il contacte donc le conseil municipal et demande qu’une ordonnance spéciale soit adoptée au plus vite pour que le robot puisse effectuer ses déambulations. Le conseil municipal donne son aval à cette suggestion. L’ordonnance est bientôt adoptée et le robot est en mesure de faire ce qu’il est censé faire pendant 8 jours début octobre, mais revenons à Robert le robot, mais pas avant que votre humble serviteur ne vous ait montré la preuve de l’histoire que je viens de vous raconter.

Une publicité pour la section Toyland 1955 de la succursale du centre-ville de John Shillito & Company de Cincinnati, Ohio. Anon., « John Shillito & Company. » The Cincinnati Enquirer, 2 octobre 1955, 25.
Maintenant, nous pouvons revenir à Robert le robot – ou pas.
Voyez-vous, en 1971, l’artiste écossais et pionnier du pop art Eduardo Luigi Paolozzi publie un ensemble de 8 photogravures en édition limitée, Cloud Atomic Laboratory. Une de ces 8 paires d’images comprend Le Robot ‘Robert’ voulait aller à New York mais le passager est trop lourd et Wonder Toy, Robert the Robot.
Si la seconde image, une photographie d’un garçon avec un des premiers exemplaires de Robert le robot très similaire à celle qui introduit la première partie de cet article, n’a pas vraiment besoin d’introduction, la première pourrait en avoir besoin.
Voyez-vous, cette image montre la première réplique géante de notre ami robotique au pied d’un escalier mobile menant à un avion de ligne de Trans-World Airlines, peut-être un Lockheed L-749 Constellation. La photographie que Paolozzi utilise pour créer sa photogravure avait été prise en 1955, peut-être en septembre ou octobre, apparemment avant le premier vol effectué par le premier robot géant réalisé par le personnel d’Ideal Toy. Le robot est en route vers Pittsburgh.
Croiriez-vous que, à l’époque, la direction d’Ideal Toy envisage brièvement la possibilité que le robot porte brièvement une agente de bord dans ses bras? Je ne plaisante pas, mais alors, comment pensez-vous que les protagonistes robotiques des films de science-fiction américains contemporains Robot Monster et Tobor le grand / Le maître du monde sont représentés sur des affiches, humm? Oui, vous l’avez deviné. Les deux portent une superbe et inconsciente jeune femme, et maintenant nous pouvons retourner à Robert le robot.
Curieusement, aussi important qu’il se soit avéré dans l’histoire des robots jouets, Robert le robot ne devient pas une icône durable de la culture pop, un sort qui est réservé à un autre robot de l’époque, l’étonnamment sympathique Robby le robot, un des personnages les plus mémorables d’un des films de science-fiction les plus mémorables des années 1950, le classique américain Planète interdite de 1956.
Bien sûr, Robby le robot a l’avantage de mesurer environ 2.1 mètres (environ 7 pieds) de hauteur. Il a également la capacité de tenir son bout dans n’importe quelle conversation. De fait, on pourrait affirmer que Robby le robot a un esprit un peu caustique. Il peut roter aussi, comme il le fait après avoir bu une lampée du véritable bourbon antique de fusée du cuisinier du croiseur C-57D des Planètes unies.
Si, si, le croiseur dont le capitaine est un séduisant mais guindé commandant John J. Adams, incarné par l’acteur / comédien canadien Leslie William Nielsen, un gentilhomme mentionné dans des numéros de novembre 2018, janvier 2020 et mars 2023 de notre stellaire blogue / bulletin / machin. Je vous assure, le gars est tellement droit qu’il marche sans plier les genoux, mais revenons à Robert.
Au cours des dernières décennies, Robert le robot est accepté comme objet de collection. De fait, un exemplaire en parfait état de ce jouet vaut une jolie somme en 2024.
Croiriez-vous que certaines firmes ont produit, et pourraient encore produire, des copies de Robert le robot? Au moins une de ces copies perd apparemment le disque rêche et grinçant au profit d’une puce sonore numérique. Au moins certaines de ces copies sont réalisées en Chine, ce qui, dans ce cas, pourrait signifier Taïwan.
L’attrait continu de Robert le robot peut bien provenir d’un sentiment de nostalgie que de nombreux Nord-Américains et Européens de l’Ouest d’un certain âge, pour la plupart des hommes blancs, ressentent à l’égard des années 1950. Avec tout le respect que je leur dois, ce « bon vieux temps » ne fait pas chaud au cœur à votre humble serviteur.
Les années 1950 sont après tout une époque où les hommes blancs hétéros « Papa a raison » régnaient sur le monde et où tous les autres Homo sapiens de la planète étaient censés s’incliner devant le passage d’un de ces cadeaux à l’humanité.
Une pensée subversive si je puis me permettre. Étant donné que les Homo sapiens mâles blancs hétéros âgés de 15 à 64 ans ne représentent guère plus de 20 % de la population du Canada en 2024, de quel droit exercent-ils autant de pouvoir et violence? Poser cette question, c’est peut-être y répondre.
Carpe diem, lectorem amici. Album homines non carborundum.
P.S. Je sais, je sais, la traduction Googlante de cette phrase est quelque peu amusante, mais vous savez ce que je voulais réellement dire. Je sais aussi que cette seconde partie de notre article sur Robert le robot est démesurément longue. Toutes mes excuses. Cet article aurait dû être composé de trois parties, et non pas de deux.