Je veux faire voler ma bicyclette, je veux faire voler mon cerf-volant : Peter Müller et le Pedroplan
Hallo, kamarade. Wie gehts? Ich werde heute über ein sehr interessantes Thema sprechen, und…
Qu’avez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur? Vous semblez bien perplexe. Ahh, toutes mes excuses. Reprenons. Bonjour, camarade. Comment allez-vous? Je vais pontifier sur un sujet très intéressant aujourd’hui.
Il y a 90 ans aujourd’hui, un magazine hebdomadaire allemand, Kölnische Illustrierte Zeitung, je pense, à moins que ce ne soit un quotidien allemand, Kölnische Zeitung, originaires tous deux de Köln / Cologne de toute façon, publie un article illustré de 3 pages des plus intéressants sur le vol effectué par un aviateur allemand bien connu, aux commandes d’un aéronef connu sous le nom de Pedroplan.
Le jour précédent, à moins que ce ne soit le jour même, Peter Müller, le visage en sueur, s’envole de l’aéroport de Tempelhof, près de Berlin. Ayant atteint une altitude d’environ 100 mètres (330 pieds), il effectue un virage et, ayant pris la direction de Berlin, disparaît peu à peu dans le lointain.
Environ une demi-heure plus tard, Müller réapparaît. Il effectue un virage qui fait frémir les personnes qui l’attendent avec impatience et se pose sous leurs acclamations. Müller a parcouru une distance d’environ 22 kilomètres (environ 13.5 milles) en 29.5 minutes environ, à une vitesse moyenne de près de 45 kilomètres/heure (près de 28 milles/heure). Une performance ahurissante, et…
Vous semblez sceptique, ami(e) lectrice ou lecteur. Parcourir une telle distance à une vitesse aussi réduite n’a rien d’exceptionnel en 1931, dites-vous? Elle l’est, dis-je (tape-je?), si, comme Müller, vous pilotez une bicyclette volante. Si, si, une bicyclette volante, un aérocycle, enfin presque.
Vous voyez, le système de propulsion du Pedroplan consiste en une petite hélice actionnée par un petit moteur actionné par un petit compresseur actionné par un pédalier actionné par Müller. Et oui, le Pedroplan est un aéronef à propulsion humaine.
Aux dires du magazine hebdomadaire français Les Ailes, Müller remporte, et haut la main, le Prix Peugeot, créé en 1910.
L’article de Les Ailes se conclut toutefois dans un tout autre registre. L’article paru dans Kölnische Illustrierte Zeitung, affirme l’hebdomadaire parisien, est un abominable poisson d’avril, ou une magnifique galéjade, monté(e) de toute pièce par la direction du magazine allemand.
Est-ce de la déception que je lis sur votre visage, ami(e) lectrice ou lecteur?
Le Prix Peugeot est évidemment une blague, dites-vous ? Nenni. Le Prix Peugeot, ou Prix du décamètre, est on ne peut plus réel. Il est toutefois créé en 1912, par un grand pionnier de la construction automobile en France et en Europe, Robert Peugeot, président de la Société anonyme des Automobiles et Cycles Peugeot.
D’une valeur de 10 000 francs (près de 48 600 $ Can en monnaie de 2021), le dit prix a pour but de récompenser la personne qui, la première, parviendrait à effectuer un vol de 10 mètres (près de 33 pieds) dans un sens, suivi d’un autre vol de 10 mètres (près de 33 pieds) dans le sens opposé, à une altitude minimale de 20 centimètres (8 pouces). Ce vol devrait être effectué à bord d’une aviette, une machine volante à propulsion humaine à mi-chemin entre l’aéroplane et la bicyclette.
Et oui, le Musée des sciences et de la technologie du Canada, à Ottawa, Ontario, une institution sœur / frère de l’incroyablement bon Musée de l’aviation et de l’espace du Canada, à Ottawa, a une incroyablement bonne collection de bicyclettes.
Si près de 200 personnes s’inscrivent au Prix Peugeot, moins de 25 se présentent sur le site où il se déroule, en juin 1912, dans la région parisienne.
Un tant soit peu déçu par les résultats obtenus, Peugeot accepte la suggestion des juges d’organiser une seconde compétition, le Prix du décimètre apparemment, qui se tiendrait au début de juillet. Peugeot remettrait alors une somme de 1 000 francs (environ 4 860 $ Can en monnaie de 2021) à la personne qui, la première, parviendrait à effectuer un vol de 1 mètre (un peu plus de 39 pouces) dans un sens, suivi d’un autre vol de 1 mètre (un peu plus de 39 pouces) dans le sens opposé, à une altitude minimale de 10 centimètres (4 pouces). Ce vol devrait bien sûr être effectué à bord d’une aviette.
Un champion cycliste français spécialisé dans les courses de vitesse, Gabriel Poulain, remporte cette version du Prix Peugeot en franchissant des distances de 3.6 et 3.3 mètres (environ 11 pieds 10 pouces et 10 pieds 10 pouces).
Intrigué, un aéronaute français expérimenté et vice-président de l’Association générale aéronautique lance un autre Prix du décimètre. Georges Dubois Le Cour remettrait une somme de 500 francs (près de 2 450 $ Can en monnaie de 2021) à la personne qui, la première, parviendrait à effectuer un vol de 3 mètres (environ 9 pieds 10 pouces) à une altitude minimale de 20 centimètres (8 pouces). Le cycliste suisse (ou allemand?) Sigmar Rettich remporte ce prix en octobre 1912.
Un autre prix lancé par Dubois Le Cour, une somme de 700 francs (environ 3 435 $ Can en monnaie de 2021), irait à la personne qui, la première, parviendrait à atteindre une altitude de 10 mètres (environ 32 pieds 10 pouces). Il n’est jamais gagné.
Tout aussi intrigué, le fabricant de pneus français bien connu Michelin et Compagnie lance encore un autre prix, pour un vol de 5 mètres (environ 16 pieds 5 pouces). L’avocat et cycliste français Paul Didier remporte ce prix en décembre 1912.
En juillet 1921, alors qu’il est pratiquement à la retraite, « l’homme au maillot vert, » comme on appelle parfois / souvent Poulain, s’offre le luxe de franchir des distances officiellement reconnues de 10.54 mètres et 11.46 mètres (environ 34 pieds 7 pouces et 37 pieds 7 pouces). Il remporte ainsi le Prix Peugeot dans sa version initiale, soit la coquette somme de 10 000 francs (environ 15 800 $ Can en monnaie de 2021) – et oui, la valeur du franc a profondément baissé entre 1912 et 1921.
Les vols en question sont en fait la seconde paire réalisée par Poulain ce jour-là. Les juges ont rejeté des vols parfaitement bons faits une heure plus tôt parce qu’il a quitté le sol à l’extérieur de la zone désignée. Les personnes qui applaudissent la réalisation de Poulain acceptent assez mal cette décision (légèrement anale?). Ce dernier demande tout simplement un délai d’une heure pour reprendre son souffle – une réponse qui lui mérite l’admiration de très nombreuses personnes en France et ailleurs.
Une digression si je peux me le permettre. L’aviette de Poulain est conçue par des ingénieurs travaillant pour une des grandes avionneries au monde, une firme française, la Société anonyme des Établissements Nieuport.
Et oui, le merveilleux Musée de l’aviation et de l’espace du Canada a dans sa collection une reproduction / réplique d’un avion de chasse Nieuport Nie 17 C1, un type conçu pendant la Première Guerre mondiale.
Peu de temps après le triomphe de Poulain, Peugeot lance une autre édition, la troisième, de son prix. Il remettrait cette fois une somme de 20 000 francs (environ 32 000 $ Can en monnaie de 2021), à la personne qui, la première, parviendrait à effectuer un vol de 50 mètres (près de 165 pieds) dans un sens, suivi d’un autre vol de 50 mètres (près de 165 pieds) dans le sens opposé. Ce vol devrait encore une fois être effectué à bord d’une aviette.
Le nouveau Prix Peugeot suscite un certain intérêt, mais personne ne parvient à réaliser la performance demandée, pas même Poulain, dont la bicyclette à hélice Nieuport n’est apparemment jamais fabriquée.
Si vous aviez été pré-adolescent(e) ou adolescent(e) en 1930, ami(e) lectrice ou lecteur, vous auriez été peut-être intéressé(e) par ce que Glide-O-Bike Company de Dallas, Texas, a à offrir. En échange de 25 sous, vous auriez reçu une série de plans pour le dit Glide-O-Bike, qui consiste en une aile et une queue reliées par une mince poutre. Ce bidule peut être attaché à une bicyclette conventionnelle et utilisée pour faire de très brefs sauts de puce. Yiiiiiaaah! Désolé.
Curieusement, le leadership en matière de machines volantes à propulsion humaine se déplace vers l’Allemagne national socialiste et l’Italie fasciste au cours des années 1930. Compte tenu de ce fait, votre humble serviteur n’a aucune intention de mentionner les noms des personnes impliquées, ou leurs activités.
Veuillez me permettre de vous souhaiter une bonne semaine, ami(e) lectrice ou lecteur. Illegitimi non carborundum et gardez les pieds sur terre.
Et oui, j’ai moi aussi l’impression que Müller est un personnage fictif monté de toute pièce par la direction du Kölnische Illustrierte Zeitung.