« Défendons ce bien précieux / Digne de défense » – Un bref aperçu de la campagne publicitaire de 1954 d’une importante firme canadienne de fabrication d’aéronefs, Canadair Limited de Montréal, Québec, partie 4
Bien le bonjour, ami(e) lectrice ou lecteur, et bienvenue à bord.
La publicité de la campagne de presse de l’avionneur Canadair Limited de Montréal, Québec, avec laquelle nous amorçons la 3ème, euh, la 4ème et dernière partie de cet article paraît en juillet 1954 dans des quotidiens canadiens et québécois. Elle paraît en août dans des magazines aéronautiques canadiens et étrangers, Canadian Aviation, Flight and Aircraft Engineer et Interavia, par exemple.
Cette publicité a pour titre « Le libre choix d’une carrière / Liberté de vocation, » en anglais « Freedom of Vocation. »
On peut y voir un jeune homme blanc qui tient un diplôme. Les portraits de nombreuses personnes, des hommes blancs dans tous les cas, en arrière-plan, offrent des exemples de carrières potentielles : arpenteur, artiste, chirurgien, mineur, pilote, etc. Et non, cette publicité n’a certes pas grand-chose à voir avec les libertés du président Franklin Delano Roosevelt mentionnées dans les autres parties de cet article.
La publicité balaye également allègrement sous le tapis le fait que les femmes représentent 22 % de la population active canadienne en 1951, mais revenons à notre histoire.
Le texte de la sous-version de langue française québécoise de cette publicité se lit comme suit :
Le libre choix d’une carrière est un droit essentiel que nous, des pays libres, avons toujours possédés, sauf dans les cas de grand péril national. Nous avons toujours pu choisir, sans restriction, une occupation honnête … Vous et moi pouvons être, à notre gré, artistes ou laboureurs – employés de bureau, avocats, professeurs, ingénieurs ou médecins.
Le libre choix d’une carrière est contraire aux principes du totalitarisme… car, par sa nature même, le régime totalitaire est voué à la pratique barbare de l’enrégimentation et de l’esclavage! Le libre choix d’une carrière mérite bien qu’on le défende!
Si votre humble serviteur peut se permettre un commentaire, vous et moi aurions pu être avocats, ingénieurs, médecins ou professeurs en 1954 à condition de pouvoir payer le coût élevé des études nécessaires pour décrocher ces emplois.
À cet égard, en 1954, le niveau de scolarité est moins élevé au Québec qu’en Ontario et le niveau de scolarité des jeunes Québécoises est encore moins élevé que celle des jeunes Québécois. C’est encore plus vrai pour les Québécoises et Québécois francophones.
Croiriez-vous que moins de 20 % des Québécois anglophones et francophones âgés de 15 à 24 ans en 1951 poursuivent des études, ou que moins de 15 % des jeunes femmes québécoises du même âge font de même? En guise de comparaison, pas moins de 66 % des Québécoises et Québécois âgé(e)s de 15 à 24 ans poursuivaient des études en juin 2023.
Ceci étant dit (tapé?), le surintendant de l’Instruction publique, Omer Jules Desaulniers, déclare à plus d’une reprise au cours des années 1950 que le système d’éducation du Québec, idéal, magnifique et parfait selon ses dires, est tout simplement le meilleur au monde.
Si un département de l’Instruction publique fonctionne dans cette province depuis 1875, il s’agit avant tout d’un organisme de gestion qui relève du Secrétariat de la province de Québec, une sorte de ministère de l’intérieur qui trempe dans des tas de choses.
Avant la création du ministère de l’Éducation, en mai 1964 (!), les vraies décisions concernant l’éducation de la grande majorité de la population du Québec, soit la population catholique francophone, se prennent en fait lors des réunions du Comité catholique du Conseil de l’instruction publique, un organisme dont les membres, non élus évidemment, sont les très conservateurs évêques catholiques, apostoliques et romains du Québec et un nombre égal de laïcs partageant la même foi qui ne brillent pas non plus par leur libéralisme.
Les affirmations de Desaulniers selon lesquelles le système d’éducation du Québec est le meilleur au monde sont en fait totalement ridicules. Le système d’éducation du Québec est à la fois sous-financé et archaïque. Croiriez-vous que, en 1951, environ 60 % des établissements scolaires de la province sont sans électricité et qu’environ 40 % n’ont ni eau ni toilettes à l’intérieur? On croit rêver.
Et oui, les institutions totalement inadéquates en question sont des écoles de rang, en anglais one-room schools. Mes parents fréquentent de telles écoles rurales à la fin des années 1930 et au début des années 1940.
Une brève digression concernant Desaulniers si vous me le permettez. L’Université de Sherbrooke, située à… Sherbrooke, Québec, fort possiblement par le biais de son recteur, un membre du clergé catholique, apostolique et romain, Irénée Pinard, lui décerne en octobre 1957 un doctorat honorifique en… pédagogie. Je ne plaisante pas, mais revenons à notre publicité de juillet 1954.
L’utilisation d’un terme aussi fort qu’esclavage a de quoi surprendre dans un texte publicitaire, et ce même s’il est associé au totalitarisme dans la publicité francophone québécoise. On le retrouve aussi dans le texte de la sous-version de langue française en provenance d’Europe : « La liberté de vocation encombre la voie suivie par l’État totalitaire … car, de par sa nature même, le totalitarisme est voué aux usages des époques primitives de soumission et d’esclavage! La liberté de vocation est digne de défense! »
Les sous-versions de langue anglaise de « Le libre choix d’une carrière / Liberté de vocation, » encore une fois identiques soit dit en passant, font appel à une version légèrement nuancée du terme esclavage, des mots traduits ici :
La Liberté de Vocation est tout à fait en travers de la route vers un état contrôlé... car, par sa nature même, un régime totalitaire est dédié à la coutume des âges sombres de la régimentation et du quasi-esclavage! La Liberté de Vocation... vaut la peine d’être défendue!
Si votre humble serviteur peut se permettre un commentaire concernant le rapprochement entre l’esclavage et des époques primitives / âges sombres, le fait est que ce système socio-économique n’est officiellement aboli aux États-Unis qu’en décembre 1865, plus de 6 mois après la fin de la guerre civile américaine.
Les auteurs des versions de langue anglaise de notre publicité essaient-ils de ne pas offenser leurs lecteurs et lectrices américain(e)s en utilisant l’expression quasi-esclavage, en anglais virtual slavery, demandez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur d’apparence diaboliquement angélique? Pas de commentaire.
Ceci étant dit (tapé?), le dernier état à ratifier et certifier l’amendement à la Constitution of the United States qui abolit l’esclavage le fait en… mars 1995 et février 2013.

La publicité « La libre initiative / Liberté d’entreprise, » en anglais « Freedom of Enterprise, » publiée par Canadair Limited de Montréal, Québec, dans le cadre de sa campagne publicitaire Défendons ce bien précieux / Digne de défense de 1954. Anon, « Canadair Limited. » La Presse, 10 août 1954, 33.
La publicité avec laquelle Canadair poursuit sa campagne publicitaire, en août 1954, s’éloigne encore une fois un tant soit peu des libertés de Roosevelt. « La libre initiative / Liberté d’entreprise, » en anglais « Freedom of Enterprise, » s’apparente toutefois un tant soit peu à la publicité du mois précédent, intitulée, vous vous souviendrez, « Le libre choix d’une carrière / Liberté de vocation. »
Il est à noter que, pour la première fois, les sous-versions européennes n’apparaissent pas au même moment que les sous-versions nord-américaines parues dans des journaux. On les retrouve en effet en mai 1954 dans l’hebdomadaire britannique Flight and Aircraft Engineer et en septembre dans le mensuel suisse Interavia, par exemple.
Dans tous les cas, le dessin la publicité « Le libre choix d’une carrière / Liberté de vocation » présente une série de petits commerces le long d’une rue – et non pas un quelconque complexe industriel ou commercial. Les mots inscrits sur les devantures des dits magasins sont en français ou en anglais, selon les cas : cordonnerie et shoe repair shop, ou encore boulangerie et bakery.
Le texte de la sous-version de langue française québécoise de la dite publicité se lit comme suit :
Dans une société libre, un homme peut travailler pour lui-même ou pour les autres … établit un petit atelier ou construire une usine. Dans un État totalitaire, l’individu ne compte pas … il est enrégimenté de force dans un système anonyme, tout-puissant et sans âme.
La liberté d’initiative est un droit que chacun doit posséder … le droit de choisir le travail qui nous convient le mieux … de tirer un légitime profit de notre activité … d’aspirer aux plus hautes situations. Assurément, la liberté de travail mérite bien qu’on la défende!
Vous avez bien sûr noté, ami(e) lectrice ou lecteur, que le texte de cette publicité fait appel au terme homme pour identifier la personne qui dispose de la liberté de choisir une carrière.
Vous me permettrez par ailleurs que la dite liberté dépend pour une bonne part du pognon et / ou de l’éducation dont dispose la dite personne.
Et oui, vous avez bien raison, les termes fascisme et communisme, présents dans des publicités parues plus tôt en 1954, ont totalement disparu, et ce au profit du terme totalitarisme.
Ce système politique est, soit dit en passant, dénoncé avec plus de force dans la sous-version de langue française parue en Europe que dans celle qui peut être lue au Québec. La citation suivante, extraite du texte européen, devrait prouver mon propos : « Dans le système totalitaire, [l’homme] n’est plus qu’un rouage … un numéro que brasse une monstrueuse organisation de contrôle et d’enrégimentement. »
Les textes identiques des sous-versions de langue anglaise de la publicité d’août 1954 abordent le totalitarisme sous un angle légèrement différent, des mots traduits ici : « Dans un état totalitaire, [l’homme] n’est qu’un rouage... un numéro sur une carte, inséré dans un plan directeur de fer de contrôle et de régimentation. »
Votre humble serviteur se demande si la reconnaissance du droit « de tendre vers les sommets, » mentionné dans la sous-version européenne de langue française de notre publicité, un droit présent dans la sous-version de langue anglaise européenne, des mots traduits ici en droit « d’atteindre les étoiles, » peut être liée à la devise du Corps d’aviation royal canadien, comme on appelle alors l’Aviation royale du Canada.
La dite devise est en effet Per ardua ad astra, en français à travers les embûches jusqu’aux étoiles, ou quelque chose du genre.
Et oui, vous avez sans doute raison, ami(e) lectrice ou lecteur, la présence d’un publicité intitulée « La libre initiative / Liberté d’entreprise » dans la campagne publicitaire de 1954 de Canadair n’est probablement pas accidentelle.

La publicité « La liberté de réunion, » en anglais « Freedom of Assembly, » publiée par Canadair Limited de Montréal, Québec, dans le cadre de sa campagne publicitaire Défendons ce bien précieux / Digne de défense de 1954. Anon, « Canadair Limited. » La Presse, 17 septembre 1954, 9.
C’est en septembre 1954 que Canadair présente aux lectrices et lecteurs de journaux canadiens une publicité intitulée « La liberté de réunion, » en anglais, « Freedom of Assembly. » Les lectrices et lecteurs de magazines canadiens et étrangers y auraient accès au cours du mois suivant, les titres de ces publicités étant « La liberté d’assemblée, » en anglais, encore une fois, « Freedom of Assembly. »
Les publicité qui paraissent en septembre dans des journaux canadiens et en octobre dans nos magazines (Canadian Aviation, Flight and Aircraft Engineer et Interavia) montrent quelques personnes, toutes blanches comme neige, qui arrivent à une réunion publique. Un homme bien habillé, pour citer en traduction le titre d’une chanson populaire de 1983 (!) du groupe de rock américain ZZ Top, probablement un autre participant blanc, les accueille à l’entrée d’un bâtiment d’apparence importante.
Si votre humble serviteur peut se permettre un peu de pinaillage, l’expression qui se trouve sur le panneau tout juste derrière cet homme diffère selon qu’il soit question des version québécoise et européenne de langue française de la publicité. Cette expression est respectivement Assemblée ce soir et Réunion publique. Les publicités de langue anglaise portent les mots Public meeting, en français réunion publique, soit dit en passant.
Le texte de la sous-version de langue française québécoise de cette publicité de Canadair se lit comme suit :
Les réunions publiques sont l’écho des sentiments et de la volonté du peuple. Elles forment l’opinion et sont la contradiction même de la dictature. Dès que le totalitarisme prend pied, il supprime la liberté de réunion.
Le droit de réunion tient de l’essence même de la démocratie, et l’air qu’on y respire est celui de la liberté. Pensons-y… La liberté de réunion vaut la peine d’être défendue.
Cette fois-ci, les différences entre les sous-versions française et anglaise de cette publicité sont assez minimes. En ce qui concerne la sous-version de langue française venue d’Europe, par exemple, les réunions publiques « sont la contradiction même de la dictature. » Pour ce qui est des sous-versions de langue anglaise, identiques il faut l’avouer, des mots traduits ici, ces mêmes réunions publiques « sont les ennemis jurés de toute forme de gouvernement autocratique. »
Les sous-versions de langue anglaise de la publicité enfonce par ailleurs davantage le clou en ce qui concerne la suppression des réunions publiques, des mots encore une fois traduits ici : « Elles sont les premières à être bannies lorsque le totalitarisme prend pied – et ne reviennent jamais. »
Comme il a été dit (tapé?) plus haut, la publicité qui paraît en octobre 1954 dans des journaux quotidiens canadiens, en d’autres mots « L’abondance du pain quotidien / Assurance contre le besoin, » est celle-là même qui avait paru en juin.
Vous souviendrez bien sûr que c’est vous, ami(e) lectrice ou lecteur, qui aviez souligné que la double présence de cette publicité n’était peut-être pas si curieuse que ça. C’est en effet en octobre que des familles canadiennes célèbrent l’Action de grâce, en anglais Thanksgiving.

La publicité dédiée aux membres des forces armées canadiennes morts en service que publie Canadair Limited de Montréal, Québec, dans le cadre de sa campagne publicitaire Défendons ce bien précieux / Digne de défense de 1954. Anon, « Canadair Limited. » La Presse, 9 novembre 1954, 35.
La dixième et dernière publicité de la campagne de presse de Canadair pour l’année 1954 paraît en novembre, dans des journaux canadiens ainsi que dans des magazines aéronautiques canadiens et étrangers. Cela n’est guère surprenant étant donné que l’Armistice qui met fin aux combats pendant la Première Guerre mondiale est signé en novembre 1918.
Et non, cette signature ne met pas vraiment fin à cette guerre. Les traités de paix signés entre juin 1919 et août 1920, avec peu d’enthousiasme, sinon sous la contrainte, par les parties perdantes, l’Allemagne, l’Autriche, la Bulgarie, la Hongrie et l’empire ottoman, mettent officiellement fin à la Première Guerre mondiale.
L’absence de titre accompagnant la dernière publicité de la campagne de Canadair, mise à part l’expression « Défendons ce bien précieux / Digne de défense, » en anglais « Worth Defending, » présente tout au long de l’année, est à noter.
Le dessin sur la publicité montre un monument aux morts et une multitude de croix semblables à celle qui se trouvent dans les cimetières militaires. Le monument, soit dit en passant, ressemble beaucoup au Cenotaph qui se trouve au Victory Square de Vancouver, Colombie-Britannique.
Le texte de la sous-version de langue française québécoise de cette publicité de Canadair se lit comme suit :
‘C’est la pierre sans tache et la pierre sans faute,
La plus haute oraison qu’on ait jamais portée,
La plus droite raison qu’on ait jamais jetée,
Et vers un ciel sans bord la ligne la plus haute.’
(Charles Péguy)
Mais l’oraison ne suffit pas. Il faut surtout que la sacrifice n’ait pas été vain. La ‘droite raison’ doit nous défendre d’un sentiment de fausse sécurité et nous faire porter bien haut le flambeau de la liberté.
Respectons le sacrifice suprême des soldats, des marins et des aviateurs canadiens qui ont donné leur vie dans les guerres passées. Et songeons que la cause à laquelle ils ont tout donné, vaut encore la peine d’être défendue!
Avant d’aller plus loin, permettez-moi de noter qu’il faudrait également respecter le sacrifice suprême des femmes portant ou non un uniforme qui ont donné leur vie dans les guerres passées.
Les quelques lignes qui introduisent la sous-version version québécoise de langue française de la publicité de novembre 1954 proviennent d’un long poème de 1913 du poète / essayiste / éditeur / écrivain français Charles Pierre Péguy, La Tapisserie de Notre-Dame. L’œuvre en question, une œuvre dédiée à Marie, Notre-Dame de Chartres, reliée à la magnifique cathédrale située à… Chartres, France, une œuvre et un lieu que bien peu de Québécoises ou Québécois connaissent, n’a strictement rien avec l’hécatombe qu’a été la Première Guerre mondiale, si ce n’est que Péguy meurt au combat en septembre 1914.
Votre humble serviteur doit avouer ne pas comprendre ce que Péguy vient faire dans cette publicité, si ce n’est qu’il est un intellectuel catholique qui rejette la modernité.
On est peut-être en droit de se demander si la personne qui rédige le texte de la sous-version de langue française québécoise de la publicité de Canadair fait partie des élites laïques et religieuses hyper-conservatrices présentes dans le Québec de l’époque pour qui l’agriculture, la famille, la langue française et la religion catholique, apostolique et romaine constituent les fondements de la société francophone québécoise, une société qu’elles veulent garder isolée des changements qui se produisent au-delà de ses frontières. Enfin, passons.
Le texte de la sous-version de langue française en provenance d’Europe ne cite pas Péguy. De fait, il cite une traduction d’un texte probablement assez bien connu au Canada, ne serait-ce qu’au sein de la communauté anglophone, un texte, dis-je, qui a un fort lien avec l’Armistice signé en novembre 1918. Voici le texte en question de la sous-version en question :
‘C’est à vous que nos mains défaillantes passent le flambeau;
Il vous appartient de le garder bien haut;
Si vous nous décevez dans notre foi, à nous qui mourrons le sommeil sera refusé; et les coquelicots pourtant s’épanouissent
Dans les champs de Flandre.’
Et cependant, lorsque la parade s’achève et que s’éteint la dernière note des trompettes, il est si aisé de ‘décevoir’ en se laissant envahir par le sentiment que ‘rien ne se passera ici’ … et, faute de vigilance, les fruits de la victoire et la liberté sont perdus.
‘Gardez bien haut le flambeau’ – mais avons-nous la volonté de la faire? Nous l’aurons si nous avons le respect des sacrifices de nos soldats, de nos marins, de nos aviateurs dans les combats gigantesques du passé. Réfléchissez-y … ils sont morts pour une cause qui est digne de défense, dès maintenant.
Le susmentionné texte probablement assez bien connu au Canada, ne serait-ce qu’au sein de la communauté anglophone, est évidemment In Flanders Fields, un poème de guerre écrit en mai 1915 par un médecin canadien servant en Europe dans le Corps expéditionnaire canadien (CEC), le lieutenant-colonel John McCrae, peu après les funérailles d’un jeune ami, lui aussi membre du CEC, tué au combat, le lieutenant Alexis Hannum Helmer.
Vous aurez bien sûr noté, ami(e) lectrice ou lecteur, que le texte de la sous-version de langue française québécoise de la publicité de Canadair ne contient référence précise à la perte des fruits de la victoire et de la liberté, acquis lors de la Seconde Guerre mondiale.
Cette même sous-version est par ailleurs la seule à préciser que les soldats, marins et aviateurs qui ont péri sont canadiens, les 3 autres sous-versions faisant référence à « nos » soldats, marins et aviateurs.
À cet égard, et au risque de dépasser les limites du bon goût, votre humble serviteur se demande comment cette référence à « nos » soldats, marins et aviateurs est traduite dans la version allemande de la publicité de Canadair, à supposer qu’il y en ait une bien sûr.
Maintenant que j’y pense, je dois avouer me demander comment l’auteur des textes en langue allemande se débrouille pour rédiger quelque chose qui fonctionnerait bien en Allemagne de l’Ouest. Je me demande également comment l’auteur des textes en langue espagnole se débrouille pour rédiger ses textes sur la liberté et les droits, compte tenu du fait que l’Espagne et de nombreux pays d’Amérique latine sont des dictatures en 1954. Enfin, passons.
Et c’est avec la publicité consacrée au souvenir des soldats, marins et aviateurs morts au combat que prend fin la campagne de presse de Canadair pour l’année 1954.
Il est à noter que cette campagne de presse ne fait pas appel à la quatrième liberté énoncée par Roosevelt, celle d’être libéré de la peur. Le programme international de réduction des armements qui rendraient impossible les conflits entre états, un programme proposé par le président américain en 1941, n’est en effet guère applicable en 1954, quelques années à peine après le début de la guerre froide, une période de fortes dépenses militaires s’il en est.
En 1947, par exemple, le gouvernement fédéral du Canada inscrit au budget environ 195 000 000 $ à la défense nationale. En 1952, il inscrit au budget environ 1 960 000 000 $, soit 10 fois plus, pour ce même objectif, un sommet qui ne serait dépassé qu’en… 1973, date à laquelle un dollar vaut environ 58.5 cents de 1952. Soit dit en passant, ces sommes correspondent à environ 3 085 000 000 $ et 22 520 000 000 $ en devises de 2024.
Si les calculs de votre humble serviteur sont exacts, ces sommes de 1947 et 1952 correspondent à environ 1.4 % et 7.8 % du produit intérieur brut (PIB) du Canada. Wah!
Ce sont là des sommes énormes pour le Canada mais il faut se rappeler que les sommes que les États-Unis consacrent alors à la défense nationale sont énormément plus élevées. La fraction du PIB consacrée à cette même défense nationale est par ailleurs pas mal plus élevée.
En guise de comparaison, les dépenses militaires du Canada en 2023 correspondaient à un peu moins de 1.35 % du PIB.
Incidemment, en valeur monétaire constante, le sommet de dépenses de 1952 est dépassé en… 1987.
Votre humble serviteur se permet de souligner avant d’aller plus loin que j’ai de fortes tendances pacifistes. Je reconnais toutefois la nécessité de protéger la planète contre tous les pas bons qui s’y trouvent.
Ceci étant dit (tapé?), les pressions subies par le gouvernement fédéral afin qu’il accroisse les sommes consacrées à la défense nationale, un accroissement de près de 50 % (!?), ou environ 12 milliards de dollars si cette augmentation avait lieu aujourd’hui, ne peuvent pas être satisfaites de 36 manières. Il faudra redistribuer des fonds, emprunter de l’argent (et / ou de l’équipement?), demander des dons d’argent (et / ou d’équipement), augmenter les taxes / impôts, etc., ou combiner ces options, et ce en dépit du fait que des coupures et redistributions pourraient affecter des programmes sociaux (bien-être, éducation et santé par exemple) dont bénéficient des millions de Canadiennes et Canadiens plus ou moins dans le besoin. Je vous dis ça comme ça, moi.
Remarquez, ce serait sans doute une bonne idée de transformer de fonds en combles le désastreux processus d’approvisionnement militaire du Canada avant de dépenser quoi que ce soit. Trouver un moyen d’attirer les nombreux milliers de jeunes personnes nécessaires pour utiliser et entretenir le nouvel équipement serait également une bonne idée.
Et c’est tout pour aujourd’hui, et… Si, si, cet article en 4 parties était un bref aperçu de la campagne publicitaire de 1954 de Canadair. Nous ne partageons évidemment pas la même définition du mot bref.