Un conte de deux Reinhardt; ou, Un bref aperçu de deux brasseries canadiennes disparues et oubliées depuis longtemps
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In eine Geschichte aus zwei Reinhardts. À un conte de deux Reinhardt. To a tale of two Reinhardts.
On pourrait dire que notre histoire commence en 1812 avec la naissance de Gottlieb Friedrich Reinhardt, très probablement à Strümpfelbach, Württemberg, un des royaumes qui composent la Rheinische Bundesstaaten, une confédération éphémère (1806-13) d’états clients germanophones établie à la demande du souverain de France, l’empereur Napoléon Ier, né Napoleone di Buonaparte, un tyran mégalomane mentionné à quelques reprises dans notre blogue / bulletin / machin depuis décembre 2017.
Reinhardt émigre au Bas-Canada, le Québec actuel, en 1831. Il s’établit à Montréal, une des deux grandes villes de cette colonie britannique. Reinhardt devient peu à peu un membre important de la petite communauté germanophone du Bas-Canada. En 1835, par exemple, il devient un des membres fondateurs de la Deutsches Gesellschaft, une société montréalaise d’immigrants germanophones qui vient en aide aux immigrants germanophones récemment arrivés à Montréal et dans des villes avoisinantes. Reinhardt préside cette société en 1859-60.
En 1852, Reinhardt devient brasseur, utilisant une installation déjà existante. Il s’installe dans une toute nouvelle installation en 1862, donnant ainsi naissance à G. Reinhardt & Sons, si celle-ci n’est pas déjà formée. Reinhardt est apparemment associé à un autre immigrant, un gentilhomme du nom de Hötzel, à un moment donné dans les années 1850 et, peut-être, dans les années 1860.
Remarquez, un gentilhomme du nom de Gottlieb Reinhardt est boucher au début des années 1860. De plus, vers la même époque, un autre gentilhomme du même nom est le capitaine d’une compagnie d’une unité d’infanterie de la Milice canadienne, le Sixth Battalion Volunteer Militia / Hochelaga Light Infantry. Mais revenons à G. Reinhardt & Sons. En français, G. Reinhardt et fils.
Les fils en question, Charles Smith Reinhardt et George Reinhardt, achètent la participation de leur père dans la firme familiale à un moment donné dans les années 1860 ou 1870. Lorsque ce dernier frère meurt, en août 1880, Charles Smith Reinhardt devient l’unique propriétaire de ce qui reste G. Reinhardt & Sons. Ce frère décède en mai 1914.
Reinhardt père quitte ce monde en juin 1895, à l’âge de 83 ans.
Il convient de noter que, pas plus tard que 1886, un certain nombre de publicités de G. Reinhardt & Sons soulignent qu’il n’y a aucun lien entre elle et Reinhardt & Company, une brasserie de Toronto, Ontario, exploitée par Lothar Reinhardt, un gentilhomme qui n’est lié d’aucune manière avec la famille Reinhardt de Montréal.
Reinhardt, soit Lothar, est le brasseur d’une brasserie louée à un influent Germano-canadien, Johann Gotthilf Walz, le premier brasseur de lager à Toronto si vous devez le savoir, par un Germano-canadien encore plus influent.
Un ancien maître de poste et préfet, Ignatius Kormann, bien connecté et trilingue, joue un rôle des plus importants dans la colonisation des comtés de Bruce et Huron, en Ontario. Croiriez-vous que le gouvernement du premier ministre de l’Ontario, Oliver Mowat, l’envoie à Paris, France, afin de convaincre la multitude de gens qui visitent l’Exposition universelle de 1878 de déménager en Ontario?
Une digression fortéenne si je puis me permettre – et vous savez que le terme fortéen fait référence à des phénomènes anormaux, n’est-ce pas? Saviez-vous qu’une des filles de Kormann, Theresa Callista Kormann, épouse le magnat du théâtre canadien Peter Ambrose Joseph Small en novembre 1902? Et alors, dites-vous? Et alors!? Le jour même où il vend son empire du théâtre, pour 1 700 000 $, un cool (chaud?) 25 000 000 $ en devise de 2022, dans un bureau du centre-ville de Toronto, en décembre 1919, Small disparaît de la surface de la Terre. Malgré une recherche internationale, aucune trace de lui n’est jamais retrouvée. Plus d’un siècle après l’événement, l’affaire Small demeure un des mystères non résolus les plus déroutants et légendaires de l’histoire canadienne, mais revenons à notre histoire. Presque.
Une lager est une bière brassée et conditionnée à basse température. Une lager peut être pâle, ambrée ou foncée. Et oui, la lager pâle est le style de bière le plus consommé et le plus disponible dans le commerce sur la planète Terre. Malheureusement. Désolé, désolé.
Le terme lager est un mot allemand qui signifie entrepôt ou entreposer. Il fait référence au fait que les lagers sont entreposées avant d’être consommées – traditionnellement dans les mêmes caves fraîches utilisée pour les faire fermenter. Les plus anciennes lagers connues sont apparemment brassées en Bavière, dans ce qui est aujourd’hui l’Allemagne, dans les années 1830, mais revenons à notre histoire.
En 1881, Walz loue sa brasserie à Kormann et prend sa retraite. Ce dernier choisit de rester un partenaire silencieux dans la firme, même après avoir acheté la brasserie de Walz et le terrain en dessous, en 1889. Le visage de la brasserie et son brasseur est Lothar Reinhardt.
Pour une raison ou une autre, Kormann et Reinhardt mettent fin à leur partenariat en 1888. Ayant grandement besoin d’une brasserie, ce dernier acquiert bientôt East End Brewery (Incorporated? Limited?), à Toronto, une firme qui appartient alors à Thomas Allen, un Canadien anglo-irlandais impliqué dans le brassage depuis 1851 environ. Reinhardt renomme bientôt la brasserie Reinhardt & Company.
Les informations sur les premières années de Reinhardt, soit Lothar Reinhardt, sont contradictoires. Certains disent (tapent?) qu’il naît à Cologne, Prusse, vers 1837 tandis que d’autres disent (tapent?) qu’il naît en Bavière, en 1842 ou 1943. Désolé, 1843.
Quoiqu’il en soit, contrairement à la plupart des brasseurs de sa génération, Reinhardt reçoit une formation formelle dans ce domaine. En effet, il est diplômé avec mention de la Brauerschule de Worms, grand-duché de Hesse et du Rhin, une des rares écoles de brassage de la planète Terre à l’époque. Reinhardt acquiert par la suite une certaine expérience pratique chez Gebrüder Schmederer Aktienbrauerei, en Bavière.
Reinhardt travaille comme brasseur à Paris, oui, celle de France, et à Milwaukee, Wisconsin, avant d’émigrer au Canada, à Toronto plus précisément, en 1876. Il commence à brasser dans la ville reine vers 1877.
Une des bières brassées par Reinhardt & Company est la Salvador, un nom qui devrait activer vos papilles, ami(e) lectrice ou lecteur amateur(e) de bière. Le nom est familier, n’est-ce pas? Au bout de la langue, dites-vous? Et si j’ajoute le nom Paulaner à l’équation? Le doppelbock Paulaner Salvator, vous dites (tapez?)? Très bien. Très bonnes réponse et bière en fait.
Saviez-vous que, dans les années 1870, lorsque Reinhardt commence à brasser de la bière à Toronto la bonne, Paulaner Brauerei Gruppe Gesellschaft mit beschränkter Haftung & Compagnie Kommanditgesellschaft auf Aktien est connue sous le nom de… Gebrüder Schmederer Aktienbrauerei, la brasserie où Reinhardt acquiert une certaine expérience pratique? Et oui, Reinhardt & Company affirme qu’elle a la recette secrète du doppelbock Paulaner Salvator et les droits de brasser ce vrai nectar au Canada.
Une brève digression si vous me le permettez, un doppelbock est généralement une bière brune, sucrée et peu houblonnée. Les noms donnés aux bières de ce groupe se terminent souvent par les lettres ator en référence à la Paulaner Salvator. Vous ne me croyez pas, n’est-ce pas? Personne de peu de foi. Voici quelques exemples. Et oui, comme on peut s’y attendre, les appellations américaines ont tendance à être un peu plus flamboyantes.
Abita Andygator
Augustiner Maximator
Ayinger Celebrator
B52 Bourbonator
Bell’s Consecrator
Bushwakker Procrastinator
Christian Moerlein Emancipator
Cigar City Confectionator
Cigar City Resonator
Dark Horse Perkulator
Duck-Rabbit Duck-Rabbator
Fisherman’s Navigator
Gazillion Terminator
Goldfinger Złotonator
Hacker-Pschorr Animator
Löwenbräu Triumphator
McNeill Exterminator
Metropolitan Generator
New Glarus Gyrator
Phillips Instigator
Pivovar Náchod Primator
Prösslbräu Adlersberg Palmator
Schilling Indikator
Smuttynose S’muttonator
Spaten Optimator
Thomas Hooker Liberator
Three Floyds Decimator
Titletown Procrastinator
Tröegs Troegenator
Tucher Bajuvator
Valaduta Liquidator
Wasatch Devastator
Et n’oublions pas le Dum Duminator, un nectar brassé par Brasseurs du Temps Incorporée de Gatineau, Québec.
Ceci étant dit (tapé?), votre humble serviteur doit admettre que j’aimerais beaucoup essayer le Klosterbrauerei Ettal Curator. (Bonjour, EG et EP!) Au fait, la Kloster Ettal est une abbaye bénédictine dans le village de Ettal, Bavière.
Et oui, j’aimerais aussi essayer le Portsmouth Fraggle Bock.
Quoiqu’il en soit, Reinhardt & Company érige une brasserie à Montréal en 1900, sous la direction d’un gentilhomme du nom de Lothar Reinhardt, qui se trouve être un fils du fondateur de la brasserie. Cette nouvelle compétition ne plaît peut-être pas trop à la direction de G. Reinhardt & Sons – et chamboule peut-être plus d’un buveur de bière montréalais.
Quoiqu’il en soit, la brasserie exploitée à Montréal par Reinhardt & Company devient Salvador Brewing Company au plus tard en 1903. On se demande si le nom est choisi afin de différencier les 2 brasseries Reinhardt.
Croiriez-vous que, vers 1886, Edward Victor Reinhardt, un fils du fondateur de G. Reinhardt & Sons, la brasserie de Montréal, acquiert une petite brasserie opérée par un gentilhomme du nom de Spiers? Ladite brasserie se trouve à Berlin, Ontario, l’actuelle Kitchener, presque dans l’arrière-cour de Reinhardt & Company, la brasserie de Toronto.
Cette nouvelle concurrence ne plaît peut-être pas trop à la direction de Reinhardt & Company, et ce même si la nouvelle brasserie s’appelle Berlin Brewery (Incorporated? Limited?). Cet établissement ferme apparemment vers 1890. Il peut, je répète peut, avoir fermé à la suite des efforts continus déployés par Reinhardt & Company pour vendre ses produits à Berlin.
Berlin devient Kitchener à la suite d’un référendum tenu en mai 1916, un référendum en temps de guerre entaché d’intimidation et fanatisme.
Incidemment, le comte Kitchener de Khartoum et de Broome / vicomte Broome / vicomte Kitchener de Khartoum, de la rivière Vaal et de Aspall / baron Kitchener de Khartoum et de Aspall, né Horatio Herbert Kitchener, est le commandant en chef des forces britanniques en Afrique du Sud pendant la phase finale (novembre 1900-mai 1902) de la Guerre anglo-boer / Guerre des Boers / Guerre sud-africaine / Seconde Guerre des Boers de 1899-1902. Il meurt en juin 1916, pendant la Première Guerre mondiale.
Mais revenons à notre histoire. On dit que les produits de Reinhardt & Company sont assez bons. De fait, en 1905, une lager brassée à Montréal par Salvador Brewing aurait remporté une médaille d’or lors d’un concours international tenu à l’Exposition universelle de Liège, qui a eu lieu à… Liège, Belgique, entre avril et novembre 1905. À ce moment-là, Salvador Brewing est dirigée par Arthur Alexander Reinhardt, un des 4 fils du fondateur.
En avril 1907, jusqu’à 200 propriétaires d’hôtels, épiciers et marchands d’alcools montréalais, en grande majorité francophones à première vue, se regroupent pour former une sorte de coopérative, Imperial Breweries Limited, afin de briser le monopole informel mais ennuyeux exercé par des brasseries locales, majoritairement détenues par des anglophones, dont les hausses de prix successives grignotent leur marge bénéficiaire. Et oui, vous avez tout à fait raison, ami(e) lectrice ou lecteur, personne au Québec, ni au Canada d’ailleurs, n’a lancé un tel projet auparavant.
Et oui, choisir un nom comme Imperial Breweries n’est pas ce à quoi on aurait pu s’attendre de la part d’un groupe de Québécois francophones désireux de promouvoir les intérêts de leur communauté. Cela étant dit (tapé?), il y a une forte association entre la bière et l’Empire britannique à Montréal à l’époque. De plus, certains / plusieurs membres de la coopérative peuvent penser qu’un nom en anglais donnerait une aura supplémentaire à leur projet.
Quoiqu’il en soit, Imperial Breweries acquiert sa première brasserie, Salvador Brewing, au début de l’été 1907. Cette brasserie est peut-être en difficulté à l’époque. Malheureusement, Imperial Breweries, une firme abondamment intéressante, n’en acquiert pas une seconde.
Voyez-vous, au début de 1909, Imperial Breweries doit être mise en liquidation. Les raisons de l’échec de cette coopérative ne sont pas claires. La concurrence avec les autres brasseries locales est sans aucun doute féroce. De plus, les buveurs de bière francophones n’abandonnent peut-être pas leurs broues préférées en nombre suffisant. De fait, le fait que les lagers comme celles brassées par Imperial Breweries sont relativement nouvelles sur le marché québécois de la bière n’aide probablement pas.
Indépendamment de ce qui cause l’échec de Imperial Breweries, le fait est qu’un membre de la famille Reinhardt achète son ancienne brasserie lors d’une vente aux enchères, en août 1909, et la vend immédiatement, pour la même quantité de pognon, à un cartel brassicole formé en avril par un certain nombre de brasseries montréalaises détenues majoritairement par des anglophones. Le dit cartel, National Breweries Limited de Montréal, acquiert une quinzaine de brasseries québécoises au cours des mois suivants. Et oui, National Breweries sera le plus gros joueur au Québec pour des années à venir.
En mai 1914, un quatuor de Montréalais francophones achète les installations de Salvador Brewing et lui donne un nouveau nom. Cependant, Original Salvador Company Limited ne s’avère pas être une firme couronnée de succès. Elle est mise en liquidation en février 1915.
Cela signifie-t-il que la bière brassée par Reinhardt & Company ou Reinhardt ‘Salvador’ Brewery Limited, comme la brasserie devient en décembre 1908 lorsque Reinhardt senior prend sa retraite, ne peut pas être achetée à Montréal, demandez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur inquiet(e)? Ne craignez point, dis-je (tape-je?), car Frisco Soda Water Company de Montréal, reprend la, euh, bouteille. Ce tout nouveau (?) producteur d’eau gazeuse et boissons gazeuses devient l’unique distributeur de la brasserie de Toronto au plus tard en juin 1912.
Il est à noter que le chef du corps de police de la métropole du Canada, la Sûreté de Montréal, Olivier Campeau, est un des individus qui investissent du pognon dans Frisco Soda Water, tout comme son épouse. Un capitaine de ce service de police du nom de J.S. Trempe devient vice-président de cette firme à un moment donné en 1912-13.
Fait intéressant, certaines personnes travaillant pour Frisco Soda Water, dont Trempe, utilisent le nom de Campeau pour, et bien, encourager ou, euh, fortement encourager, des firmes locales à acheter ses produits – au vu et au su de ce dernier.
C’est du moins ce que prétend, en février et mai 1913, John H. Roberts, un Gallo Canadien bien connu et très bruyant qui est le secrétaire de la Dominion Alliance for the Total Suppression of the Liquor Traffic, une organisation prohibitionniste basée à Toronto dont les déclarations sont parfois anticatholiques / antisémites / racistes.
Campeau, qui a vendu ses actions en 1912, menace de poursuivre Roberts pour diffamation, mais abandonne apparemment l’idée. Il prend sa retraite en décembre 1918 mais, pour une raison ou une autre, se voit refuser une pension jusqu’en 1921. Trempe, quant à lui, prend sa retraite, ou a été invité à le faire, au milieu de 1913 – et obtient rapidement une pension. Les allégations portées contre Campeau and Trempe ne sont jamais prouvées.
En mars 1913, Roberts affirme également que Frisco Soda Water distribue les produits de Reinhardt ‘Salvador’ Brewery sans permis d’alcool. De nombreuses bouteilles et quelques barils sont bientôt saisis par des agents du Bureau du revenu du Département du trésor de Québec. Le juge de paix qui se penche sur l’affaire en avril l’écarte toutefois du revers de la main lorsque ces agents doivent admettre qu’ils n’ont pas goûté au contenu des dites bouteilles et tonneaux. Oups…
Mais revenons à Reinhardt ‘Salvador’ Brewery et… Oui, ami(e) lectrice ou lecteur facilement confus(e), Reinhardt ‘Salvador’ Brewery est la brasserie Reinhardt basée à Toronto.
J’ai le triste devoir de vous informer que Lothar Reinhardt décède en novembre 1915, à l’âge de 78 ans.
Reinhardt ‘Salvador’ Brewery devient pratiquement inactive lorsque la Legislative Assembly of Ontario adopte le Ontario Temperance Act, en avril 1916, une loi qui institue la prohibition dans cette province. De fait, compte tenu de l’utilisation de son bâtiment principal comme entrepôt, elle peut avoir fait faillite. Les actifs de Reinhardt ‘Salvador’ Brewery sont vendus par appel d’offres en 1917, mais il n’est pas clair si de la bière y est brassée plus tard, pour le marché d’exportation. De toute façon, le bâtiment de la brasserie est endommagé par un incendie en novembre 1924.
En août 1925, des intérêts américains (et torontois?) achètent Reinhardt Brewery Limited, comme on l’appelle alors. De nouveaux équipements de brassage arrivent bientôt des États-Unis. Le plan peut, je répète peut, être d’exporter la bière produite sur place. Et oui, il faut se demander où de la bière produite en Ontario peut être exportée en 1925. Légalement exportée en fait, car il y a un énorme marché illégal aux États-Unis depuis le début de la prohibition dans ce pays, en janvier 1920, mais je digresse.
Fait intéressant, alors que le gouvernement fédéral accorde une licence à Reinhardt Brewery, son homologue ontarien refuse de le faire. En conséquence, la firme obtient de mauvais résultats au cours des semaines et mois suivantes.
Un groupe torontois acquiert Reinhardt Brewery en avril 1927. Cette réorganisation entraîne un changement de nom. Reinhardt Brewery devient Reinhardt Brewery Company Limited.
En mai 1927, la prohibition prend fin en Ontario, ce qui soulève la question de savoir si le groupe d’hommes d’affaires sait ou non qu’un changement de cap est imminent. Alors, à votre avis, qu’arrive-t-il à Reinhardt Brewery, ami(e) lectrice ou lecteur? Des semaines, mois et années de belle navigation. Mauvaise réponse.
En septembre 1927, le récemment créé Liquor Control Board of Ontario (LCBO) suspend le permis de Reinhardt Brewery. Le crime de la brasserie? Des ventes illégales flagrantes de bière à un certain nombre d’hôtels de Toronto. Comment cette suspension est-elle appliquée, demandez-vous? L’approche utilisée par le LCBO est pour le moins originale. Ses inspecteurs confisquent la totalité des stocks de la brasserie en matière de bouchons couronnés, ces petits bouchons métalliques doublés de liège dont les bords sont sertis sur le goulot des bouteilles de bière.
La durée de la suspension du permis n’est pas claire, du moins pour moi. Il faut se demander si elle dure plus longtemps que le temps nécessaire pour remplacer l’approvisionnement en bouchons couronnés de Reinhardt Brewery. Désolé, désolé.
Cosgrave Dominion Brewery Company Limited de Toronto, une filiale de Canadian Breweries Limited de Toronto, reprend Reinhardt Brewery en janvier 1940. Remarquez, Canadian Breweries peut avoir acquis une participation majoritaire dans la brasserie en 1936.
Soit dit en passant, Canadian Breweries voit le jour en avril 1937. Anciennement connue sous le nom de Brewing Corporation of Canada Limited, ce cartel a l’intention de faire en Ontario ce que National Breweries a fait au Québec, c’est-à-dire prendre le contrôle d’autant de petites brasseries qu’il est humainement possible. Le plan fonctionne.
Mais revenons à G. Reinhardt & Sons. Oui, ami(e) lectrice ou lecteur encore perplexe, G. Reinhardt & Sons est la brasserie Reinhardt basée à Montréal.
Vous vous souvenez peut-être que George Reinhardt décède à Montréal en mai 1914. Ce qui se passe après, ou avant cette date d’ailleurs, est un peu obscur, du moins pour moi. À première vue, une des firmes acquises par National Breweries en 1909, Ekers Brewery Limited de Montréal, reprend les installations de G. Reinhardt & Sons à un moment donné. Les activités de brassage qui ont lieu sur le site, le cas échéant, ne sont pas claires.
Quoiqu’il en soit, la Congrégation des Frères des écoles chrétiennes acquiert les dites installations en février 1926 et… Non, ami(e) lectrice ou lecteur, cette congrégation catholique, apostolique et romaine n’a pas l’intention de brasser sa propre bière. Il lui faut simplement l’espace occupé par la brasserie alors inactive pour améliorer les installations du Collège Mont Saint-Louis, la première école secondaire ouverte au Québec par la congrégation, et ce dès 1888. De fait, la brasserie est démolie durant l’été 1935 pour faire place à une cour de récréation agrandie.
So endet unsere Geschichte aus zwei Reinhardts. Ainsi se termine notre conte de deux Reinhardt. Thus ends our tale of two Reinhardts.
Auf Wiedersehen. À bientôt. Goodbye.
Mein lesender Freund. Ami(e) lectrice ou lecteur. My reading friend.