« La bombe qui tuera le marsouin » – Un usage choquant de la puissance aérienne dans le Québec de l’entre-deux-guerres : Le bombardement des bélugas du fleuve Saint-Laurent, partie 2
Permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue dans cette 2ème partie de notre article sur un usage choquant de la puissance aérienne dans le Québec de l’entre-deux-guerres, soit le bombardement de bancs de bélugas qui vivent dans les eaux du fleuve Saint-Laurent. Aussi choquant que soit le sujet de cet article, il n’en mérite pas moins un regard un tant soit peu poussé.
En 1926-28, des pêcheurs de la région de la Côte-Nord du Québec affirment se voir privés de leurs prises par les déprédations des bélugas. En 1927 par exemple, dans la région située entre Rivière-Pigou et Mingan, Québec, les prises de saumon et morue sont respectivement réduites de 80 et 90%, voire même plus, affirment Oscar Jules Morin, sous-ministre des Affaires municipales, et Alphonse Lessard, directeur du Service provincial d’hygiène, deux personnes qui ne sont pas de grands experts de la pêche commerciale, après un séjour dans la région en juillet. Privées de la majeure partie de leurs revenus, des familles vivent des heures terribles. Morin et Lessard parlent de menace de famine.
Certains pêcheurs désespérés suggèrent l’utilisation de mitrailleuses ou la création d’un programme de chasse de grande envergure. D’autres affirment se rappeler avoir lu vers janvier ou février 1927 dans un quotidien de Québec, Québec, Le Soleil, que des aéronefs avaient été utilisés au large des côtes allemandes pour bombarder des bancs de bélugas qui dévastaient les pêcheries. Ne pourrait-on pas faire la même chose sur la Côte-Nord?
Une brève digression si vous me le permettez. Votre humble serviteur doit avouer ne pas avoir trouvé la moindre mention de bombardements allemands dans Le Soleil ou ailleurs, et ce pas plus en 1927 que pendant d’autres années. Si de telles mentions existent, je vous serais profondément reconnaissant si vous me le laissiez savoir. Fin de la digression.
Interrogé en juillet 1927 par un journaliste de Le Soleil, le député gouvernemental siégeant à l’Assemblée législative de la province de Québec qui représente la Côte-Nord, l’avocat Edgar Rochette, affirme que les bélugas ont considérablement réduit les prises des pêcheurs de la région de Rivière-Pigou et Mingan en 1926. Des résidents de la région sont au bord du désespoir. Il faut absolument mettre fin aux déprédations annuelles des bélugas.
De nombreux pêcheurs de la Côte-Nord signent des pétitions demandant que le gouvernement provincial agisse. Des conseils municipaux de la région adoptent des résolutions dans le même sens. Le tout se rend évidemment au moins en partie à Québec, où siège le gouvernement dirigé depuis juillet 1920 par Louis-Alexandre Taschereau, un avocat mentionné à quelques reprises dans notre politiquement correct blogue / bulletin / machin, et ce depuis avril 2019.
Interrogé par la presse en septembre 1927, un missionnaire franco-canadien de la Congrégation de Jésus et Marie de l’église catholique, apostolique et romaine en poste depuis 1918 dans la région de Mingan confirme la détresse dans laquelle se trouvent des familles de pêcheurs qu’il connaît bien. Louis Garnier ajoute qu’une terrible tempête, vers la mi-août, avait par ailleurs détruit de nombreuses barques et démoli au moins un édifice. C’est ainsi avec terreur que plusieurs familles voient approcher l’hiver 1927-28.
Le gigantesque et vorace béluga ne réduit pas que les prises de morue et saumon. Nenni. Des pêcheurs d’anguilles qui œuvrent un peu en amont de Québec n’ayant pas capturé grand-chose en 1927, ils blâment à leur tour ce cétacé, qui est toutefois totalement absent de ce secteur du fleuve Saint-Laurent.
Témoignant en mars 1928, à Ottawa, devant la Commission royale chargée de l’investigation relative aux pêches propres aux provinces maritimes et aux Îles-de-la Madeleine, un avocat québécois, député fédéral représentant la Côte-Nord et whip en chef du parti au pouvoir à la Chambre des communes du Canada affirme que le nombre de bélugas présents dans l’estuaire et le golfe du fleuve Saint-Laurent a considérablement augmenté depuis le début des années 1920.
Aux dires de Pierre-François Casgrain, ce cétacé est « un dangereux agent de destruction et une véritable menace aux pêcheries de l’endroit. » Leurs déprédations comptent parmi les facteurs qui mettent en danger la survie même de l’industrie de la pêche sur la Côte-Nord. Le gouvernement fédéral se doit d’aider les gens de l’endroit à chasser et tuer le plus grand nombre possible de bélugas, une opinion partagée par le susmentionné Garnier.
Aux dires de nombreux pêcheurs, l’octroi d’une récompense pour chaque animal tué serait toutefois préférable à la simple destruction des bélugas. Après tout, plusieurs d’entre eux chassent et abattent déjà ces animaux, une activité qui gruge leurs revenus déjà fortement affectés.
Tout en reconnaissant le sérieux de la situation, Émile Benoist, un journaliste œuvrant pour Le Devoir, un quotidien de Montréal, Québec, ne peut s’empêcher de terminer un article paru en avril par une phrase un tant soit peu ironique : « Les marsouins [sic] sont bien à plaindre, maintenant qu’ils ont contre eux le whip en chef du parti libéral! »
Au plus tard en mars 1928, le médecin / inspecteur des pêcheries maritimes Joseph Émile Bernier présente un rapport sur les dommages causés par les bélugas à ses confrères d’un organisme à but non lucratif voué à la conservation, la Société Provancher d’histoire naturelle du Canada de Québec. Oui, la ville.
Réagissant aux pressions, le gouvernement provincial annonce au printemps 1928 la tenue d’une enquête visant à trouver des moyens de se débarrasser des bélugas.
La personne qui dirige la dite enquête est un chargé de cours au Department of Zoology de Harvard University et le conservateur responsable des mammifères au Museum of Comparative Zoology associé à cette prestigieuse université américaine. Le zoologiste américain Glover Morrill Allen a pour principal collaborateur un riche conservationniste / naturaliste amateur / pêcheur sportif américain, Copley Amory.
De fait, Amory passe un certain temps à sa maison d’été / camp de pêche, un véritable château dit-on, près de la rivière Matamek, sur la Côte-Nord, à tester diverses pièces d’équipement destinées à la chasse aux bélugas.
Remarquez, Amory peut, je répète peut, avoir contacté le ministère de la Colonisation, des Mines et des Pêcheries du Québec dès 1926, et ce afin de lui offrir ses services, et ce, encore une fois, sans aucun frais. Amory peut même être la personne ayant suggéré qu’Allen soit impliqué dans les recherches devant mettre fin aux exactions des bélugas.
Et non, il n’y a apparemment personne au Québec ou au Canada qui soit capable, ou disposé, à prendre cette mission, ce qui semble un peu étrange, mais revenons à notre histoire.
Craignant une autre mauvaise saison de pêche, la direction d’un hebdomadaire publié à Rimouski, Québec, Le Progrès du Golfe, y va de commentaires bien sentis sur la pénible situation des pêcheurs de l’est de la province et le souhait de ceux-ci d’obtenir de l’aide, et ce dans un numéro de juillet 1928 :
Restera-t-on sourd à leur légitime demande, ou attendre-t-on que, comme l’écrivait quelqu’un récemment, l’industrie de la pêche en Gaspésie soit irrémédiablement ruinée? Et elle le sera si les pêcheurs, impuissants à combattre seuls le fléau dont ils souffrent, ne recevant pas l’assistance voulue, se laissent décourager, abandonnent aux caprices des flots barques et filets pour aller trouver sur des rives plus hospitalières leur subsistance.
Le Bulletin des agriculteurs publie ce texte ce même mois de juillet.
Quelques jours plus tôt, l’agronome Firmin Létourneau, arrivait à Montréal après un bref séjour sur la Côte-Nord au cours duquel il avait eu tout le loisir de discuter avec des pêcheurs.
Ce secrétaire de l’Association des Gaspésiens de Montréal, rédacteur du susmentionné Le Bulletin des agriculteurs, un hebdomadaire, et président fondateur d’une conserverie, Le Poisson de Gaspé Limitée de… Mont-Louis, Québec, présente une résolution visant à protéger la pêche au saumon et à la morue au Québec lors de la réunion annuelle de la Canadian Fisheries Association, à Montréal. Cette résolution adoptée à l’unanimité demande au ministre de la Colonisation, des Mines et des Pêcheries du Québec, Joseph-Édouard Perrault, de prendre immédiatement des mesures afin de résoudre le grave problème que constitue le béluga.
Pendant un long séjour en France entre mai et juillet 1928, un séjour au cours duquel il assiste à quelques congrès et conférences, en plus de se taper quelques bons gueuletons, Perrault a l’occasion de discuter avec Louis Roule, un biologiste marin / embryologiste / ichtyologiste / professeur français et titulaire de la d’herpétologie et d’ichtyologie au Muséum national d’histoire naturelle, à Paris, France, et…
Pour répondre à la question que vous apprêtiez à me poser, ami(e) lectrice ou lecteur, l’herpétologie et l’ichtyologie sont les branches de la zoologie consacrées à l’étude des reptiles et poissons, mais revenons à notre récit.
Roule informe Perrault qu’aucune des nombreuses méthodes utilisées au fil des ans pour éliminer les bélugas n’avait donné de résultats satisfaisants. Une chasse active menée par les pêcheurs leur apporte toutefois certains revenus, ce qui est tout un peu curieux compte tenu du fait qu’il n’y a pas de bélugas dans les eaux territoriales françaises. Ce sont vraisemblablement d’autres espèces de cétacés qui périssent sous les balles ou harpons.
Et oui, ami(e) lectrice ou lecteur, le Muséum national d’histoire naturelle est bel et bien mentionné dans des numéros d’avril 2019 et juin 2024 de notre éblouissant blogue / bulletin / machin. J’ai oublié de mentionner ce détail lorsque cette institution muséale mondialement connue a été mentionnée dans la première partie de cet article, désolé.
Détail intéressant, pendant l’absence de Perrault peut-être, le ministère de la Colonisation, des Mines et des Pêcheries peut avoir contacté le United States Bureau of Fisheries seulement pour se faire dire qu’il n’y avait pas grand-chose à faire pour contrecarrer les bélugas.
En août 1928, peu après son retour au Québec, Perrault affirme en être venu à la conclusion que la chasse au béluga peut apporter un début de solution aux problèmes causés par ce mammifère marin. Mieux encore, elle pourrait s’avérer passablement profitable.
Chaque adulte peut en effet fournir jusqu’à environ 225 litres (environ 50 gallons impériaux / environ 60 gallons américains) d’une huile de bonne qualité. Il peut par ailleurs fournir environ 2.25 litres (environ 0.5 gallon impérial / environ 0.6 gallon américain) d’une huile de haute qualité, qui est fort prisée par les horlogers.
La peau du béluga peut être tannée afin d’en faire un cuir de bonne qualité, fort prisé en Europe dit-on. Ces peaux se vendent apparemment environ 31 cents le kilogramme (14 cents la livre), un montant qui correspond à environ 5.40 $ le kilogramme (environ 2.45 $ la livre) en devises de 2024.
Les os, quant à eux, peuvent être broyés afin d’être utilisés comme engrais ou aliment pour volailles.
Même la chair de la bête serait comestible, affirme le ministre, répétant alors ce que Roule lui avait dit. Ceci étant dit (tapé?), cette chair, séchée ou non, peut également être utilisée pour l’alimentation des chiens et animaux de ferme.
En tout et pour tout, chaque béluga adulte pourrait rapporter de 50 à 60 $ aux pêcheurs du Québec, valeur de la chair, des os et de la peau non comprise, une somme qui correspond à 900 à 1 075 $ environ en devises de 2024, ce qui n’est exactement de la petite monnaie.
Je sais, je sais, ces activités humaines ne sont guère ragoutantes. Ami(e) lectrice ou lecteur, pardonnez-leur car ils ne savaient pas ce qu’ils faisaient. Les gens des années 1920 ne réalisent pas que le béluga est présent dans les eaux du fleuve Saint-Laurent en très petit nombre. Ils ne réalisent pas davantage que c’est une des baleines les plus charmantes au monde. Cet animal on ne peut plus sociable peut par ailleurs produire une variété de sifflements, gazouillis, couinements et clics qui lui ont valu le surnom de canari des mers.
Faisant suite aux pressions qui l’assaillent, Perrault se rend sur la Côte-Nord en août 1928 avec son sous-ministre, Louis Arthur Richard. Un gentilhomme mentionné dans un numéro de septembre 2022 de notre inoubliable blogue / bulletin / machin, le secrétaire de la province de Québec, son ministre de l’intérieur en somme, l’avocat québécois Louis Athanase David, les accompagne. Les trois hommes visitent quelques villages alors qu’ils voyagent à bord du navire qui dessert cette région, le SS North Shore de la firme britannique Clarke Steamship Company Limited.
Perrault demande par ailleurs à Joseph Lizotte, un résident de Rivière-Ouelle, Québec, et à Omer Martin, un résident de Saint-Jean-Port-Joli, Québec, peut-être, deux personnes connaissant bien la chasse aux bélugas, de se pencher sur les moyens à utiliser pour maximiser les effets de cette activité.
Perrault annonce dès son retour à Québec son intention de faire revivre les grandes chasses aux bélugas d’autrefois, mais en les déménageant de la grande région de Québec vers le bas du fleuve Saint-Laurent. Bien organisée et outillée et effectuée par un nombre important de pêcheurs bien formés, cette activité pourrait s’avérer tout aussi lucrative que la pêche à la morue.
De fait, après environ un mois passé sur la Côte-Nord, les susmentionné Lizotte et Martin soumettent en septembre une liste de quelques (7?) endroits où il serait judicieux de chasser les bélugas.
Perrault annonce par ailleurs que son gouvernement va donner du bois aux pêcheurs afin que ceux-ci puissent faire construire des barques de grande taille leur permettant de pêcher la morue relativement loin des côtes et des bélugas, ceux-ci préférant demeurer près de celles-là.
Le ministre ayant noté, on se demande bien comment d’ailleurs, que les bélugas ne s’attaquent pas au flétan, un gros poisson plat vivant au large de la Côte-Nord que les pêcheurs n’ont jamais sérieusement dérangé, il suggère à ceux-ci de commencer à pêcher commercialement cette prise qui se vend beaucoup plus cher que la morue.
Fin septembre 1928, Perrault annonce son intention de remettre une petite somme d’argent à tout pêcheur qui souhaiterait acquérir une barque de grande taille lui permettant de pêcher la morue relativement loin des côtes et des bélugas. Remarquez, ces barques pourraient être utilisées pour la chasse aux bélugas, et ce à l’aide de fusils ou harpons.
Au moins une centaine de pêcheurs de la Côte-Nord demandent en 1928-29 cette subvention de 100 $, une somme qui correspond à environ 1 800 $ en devises de 2024. La construction des barques se fait apparemment sous la surveillance des maires et curés des villages.
Toutes ces déclarations du ministre tiennent en partie au fait que le susmentionné Allen avait conclu dans un rapport qu’il ne serait pas pratique de bombarder les bélugas. Et oui, vous avez raison, ami(e) lectrice ou lecteur, certaines personnes que Perrault avait rencontrées sur la Côte-Nord lui avaient demandé de faire appel au bombardement aérien.
Quelques jours plus tôt, avant les déclarations de septembre de Perrault, alors que le redouté béluga n’occupe plus les colonnes des journaux du Québec, Le Progrès du Golfe y va d’un commentaire ironique dans un entrefilet intitulé « S’ils pouvaient parler : »
On parle de faire une guerre impitoyable aux marsouins [sic] dont la présence près des côtes chasse la morue dont ils sont très friands.
Ces bons cétacés, s’ils pouvaient parler, diraient à l’espèce humaine acharnée à leur perte : que nous reprochez-vous? De manger plus petit et plus faible que nous-mêmes? La belle affaire! Avant de nous punir que ne jetez-vous un œil impartial sur ce qui se passe chez vous?
Fin août 1929, le bien connu journaliste / pamphlétaire / philanthrope / propriétaire de journaux québécois Joseph François Olivar Asselin y va de commentaires bien sentis sur l’industrie de la pêche au Québec dans le cadre d’une conférence, « L’industrie dans l’économie du Canada français, » prononcée lors des assises de la Semaine sociale du Canada de 1928, à Saint-Hyacinthe, Québec.
Érudit(e) que vous êtes, ami(e) lectrice ou lecteur, vous vous souviendrez bien sûr que les Semaines sociales du Canada sont des colloques culturels organisés, fort souvent au Québec, entre 1920 et 1964, par l’église catholique, apostolique et romaine pour faire connaître sa doctrine sociale, une doctrine ayant pour buts d’améliorer le sort de la classe ouvrière urbaine et de freiner la montée du socialisme / communisme dans les milieux industriels et urbains.
Avec votre permission, je vais citer Asselin sans utiliser le format de citation communément utilisée en ces lieux, et ce même si son texte va bien au-delà de la chasse aux bélugas.
Début de la citation :
Autre industrie à développer, pour ne pas dire à sauver: la pêche maritime. Il paraît que depuis quelques années on tente quelque chose dans ce sens sur la côte gaspésienne. Je veux le croire. Je sais cependant de connaissance personnelle, pour avoir passé pendant dix ans toutes mes vacances dans cette région, que le pêcheur gaspésien adopta le moteur à essence longtemps après ses concurrents de la Nouvelle-Écosse, qui n’était pas loin, et du Nouveau-Brunswick, qui était en face. Jusqu’aux environs de 1910 il allait en mer avec les agrès du temps de Jacques Cartier et de Nicolas Denis [sic]. Routine, oui; mais surtout pauvreté matérielle et fatalisme engendrés par un siècle de servage économique sur lequel les gouvernants avaient fermé les yeux, quand ils n’y avaient pas – pour obtenir l’appui électoral, pécuniaire et autre, des tout-puissants patrons jersiais – prêté les mains. L’établissement d’un crédit à la pêche sur l’initiative ou tout au moins avec le concours du gouvernement provincial aurait avancé les choses de dix années. Nos ministres parlent aujourd’hui de donner la chasse au marsouin [sic], dévoreur du hareng, qui sert de boette au pêcheur. Très bien! bravo! à condition que ces bonnes intentions persistent après les agréables excursions de péché au saumon sur des rivières toutes affermées à l’étranger. Mais il y a vingt ans que le pêcheur perd la moitié de son temps à haler de la roussette, si maladroitement surnommée « chien de mer, » et personne ne lui a encore appris qu’en certains pays cet autre ennemi de la morue, ce petit requin, en réalité poisson d’une suprême élégance, fournit de très bonnes conserves à l’Amérique du Sud. Je me suis enquis il y a quelques années à Ottawa de la possibilité d’implanter l’ostréiculture sur certains points de la côte gaspésienne : on m’a répondu que la chose serait probablement possible en soi, mais que, vu les prétentions contraires d’Ottawa et de Québec sur la propriété des fonds de mer littoraux, il ne fallait pas songer à l’entreprendre. Cela nous fait à la vérité une belle jambe! En attendant, une famille Sainte-Croix, du Barachois, pêche le pétoncle et y gagne de l’argent. Ce qu’il faudrait à la province de Québec et en particulier à la Gaspésie, c’est un dictateur de la pêche ayant puisé ses connaissances techniques à l’étranger et ayant à sa disposition tous les moyens d’action nécessaires.
Fin de la citation.
Ayoye, affirmez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur? Ayoye, en effet.
Compte tenu de l’importance du sujet et de l’influence d’Asselin, vous ne serez pas surpris d’apprendre que son texte est publié in extenso dans les pages du susmentionné Le Bulletin des agriculteurs, dans le magazine mensuel L’Action canadienne-française de Montréal, ainsi que dans au moins 2 journaux hebdomadaires (L’Éclaireur de Beauceville, Québec, et Le Progrès du Golfe de Rimouski) et 1 journal quotidien (La Tribune de Sherbrooke) de petites villes québécoises.
Et voici les réponses aux multiples questions qui se condensent peu à peu dans votre petite caboche :
- Nicolas Denys est un entrepreneur / explorateur / géographe amateur / gouverneur (Acadie, 1654-88?) / industriel / marchand / naturaliste amateur français impliqué dans l’industrie de la pêche en Amérique du Nord française, en d’autres mots en Nouvelle-France.
- Les tout-puissants patrons jersiais sont basés sur l’île de Jersey / Jèrri, une des îles anglo-normandes sous contrôle britannique situées près des côtes françaises.
- La boette est un appât utilisé pour attirer le poisson vers les hameçons ou filets.
- L’ostréiculture est l’élevage des huitres.
- Barachois est le nom communément donné au village de Saint-Pierre-de-la-Malbaie No. 1, Québec, en Gaspésie.
Des rumeurs circulent selon lesquelles la vaste compagne de chasse aux bélugas devant débuter au printemps 1929 pourrait suivre 2 parcours quelque peu différents : la création à terre d’une dizaine de mini-usines de traitement des bélugas approvisionnées par les pêcheurs vivant près de chacune d’entre elles, ou l’utilisation d’un petit navire-usine approvisionné par une flottille de bateaux de pêche. Le premier parcours semble soulever davantage d’intérêt.
Un chroniqueur du quotidien La Presse de Montréal s’interroge sur les conséquences de l’hécatombe qui va bientôt frapper le béluga : « Peut-être même que cet animal est appelé à s’éteindre tout à fait et à suivre la loi commune à une foule d’animaux chassé sans trêve ni merci. »
Ne l’oublions pas, il fut un temps où d’immenses troupeaux de morses occupaient les Îles-de-la Madeleine. Le dernier de ces pinnipèdes disparaît au 18ème siècle, mais je digresse.
Un député de l’opposition provinciale venu appuyer un candidat de son parti lors d’une élection partielle tenue à Québec, oui, la ville, fin octobre 1928, profite de l’occasion qui s’offre à lui pour écorcher le ministre de la Colonisation, des Mines et des Pêcheries, le susmentionné Perrault. Maurice Le Noblet Duplessis, un politicien très conservateur mentionné à moult reprises dans notre apolitique blogue / bulletin / machin, et ce depuis janvier 2018, affirme en effet que « Perrault avait été forcé de faire un grand voyage en Europe pour apprendre que le meilleur moyen de détruire les marsouins [sic], c’était de les tuer. »
Soit dit, en passant, ce n’est pas le parti dont Duplessis fait partie qui gagne la dite élection partielle.
Parlant (tapant?) d’élection, je présume que vous aimeriez bien pouvoir voter en faveur d’une fin rapide de la présente péroration. Je propose par conséquent de mettre fin à cette 2ème partie du présent article, et ce dès à présent. Appuyez-vous la motion, ami(e) lectrice ou lecteur? Vermouilleux!
À plus.