Un bref portrait d’un duo dynamique de dentistes de Québec, Québec, Henri Edmond Casgrain et Marie Wilhelmine Emma Casgrain, née Gaudreau, pendant la Belle Époque – et un peu d’info sur leur première voiture sans chevaux, une Bollée Voiturette, partie 2
Rebonjour, ami(e) lectrice ou lecteur et bienvenue dans cette 2ème partie de notre article sur un duo dynamique de dentistes de Québec, Québec, pendant la Belle Époque, une 2ème partie dans laquelle les noms de Henri Edmond Casgrain et Marie Wilhelmine Emma Casgrain, née Gaudreau, ne seront mentionnés que bien rarement.
Après tout, votre humble serviteur vous avait mentionné mon intention d’assouvir votre désir d’en savoir plus long sur la Bollée Voiturette.
Léon Auguste Antoine Bollée, vers 1913. Anon., Les Journées Léon-Bollée. (Angers : Éditions C. Hyrvil, 1920), non paginée.
Commençons par le commencement. Léon Auguste Antoine Bollée naît en avril 1870, à Le Mans, France.
Son père, Amédée Ernest Bollée est un fondeur de cloches et pionnier de l’automobile qui supervise la fabrication d’un véhicule à vapeur à 12 places, le premier véhicule automobile familial au monde, L’Obéissante, en 1873, d’un véhicule à vapeur à 6 places, le premier véhicule automobile produit en série (environ 50) au monde, La Mancelle, en 1878, et d’autres véhicules à vapeur, et ce au cours des années 1870 et 1880.
Léon Bollée est un brillant jeune homme fort doué pour la mécanique. Vers 1883-85, il fabrique un « vélocipède nautique, métallique, insubmersible. » Il obtient par la suite un brevet et…
Oui, oui, ami(e) lectrice ou lecteur, vous avez parfaitement raison. Le dentiste au cœur de la 1ère partie de cet article, autrement dit Casgrain, fabrique lui aussi un « vélocipède nautique, » mais en 1886 toutefois.
Se pourrait-il qu’il que Casgrain ait entendu parler de l’embarcation de Bollée, demandez-vous? C’est bien possible, d’autant plus qu’une gravure de la dite embarcation paraît dans un numéro de décembre 1884 de l’excellent hebdomadaire de science populaire français La Nature, une publication qui peut être disponible à Québec, Québec, où vit Casgrain.
En outre, ce même magazine avait publié, en novembre 1883, une gravure du tricycle aquatique qu’un marin anglais du nom de Terry avait utilisé pour traverser la Manche, de l’Angleterre à la France, fin juillet 1883. Si, si, la Manche, je ne plaisante pas.
Croiriez-vous qu’un numéro d’octobre 1881 de La Nature contient une gravure montrant l’héritier au trône britannique en train de s’amuser dans le Windsor Great Park, en banlieue de Londres, Angleterre, à bord d’un « water velocipede, » en français vélocipède d’eau, conçu par un ingénieur suédois, un certain capitaine Lundberg? Si, si, Albert Edward « Bertie » de la maison Saxe-Coburg and Gotha, le futur roi Edward VII, mentionné dans des numéros de novembre 2018, avril 2023 et août 2023 de notre excellent blogue / bulletin / machin, mais je digresse.
Un peu avant ou après la conception de son vélocipède nautique, Bollée conçoit une bicyclette sans chaîne et une machine pour contrôler les billets de chemin de fer.
Soucieux d’aider son père, alors aux prises avec la création de nouvelles tables numériques liées à la fabrication des cloches, Bollée, oui, Léon, le fils, conçoit et fabrique deux machines à calculer mécaniques en 1888-89. La seconde remporte une médaille d’or dans le cadre de l’Exposition universelle de 1889 qui se tient à Paris, France, de mai à octobre.
La tradition familiale veut qu’un grand inventeur américain mentionné dans des numéros de juillet 2019, janvier 2022 et octobre 2023 de notre blogue / bulletin / machin, Thomas Alva Edison, est à ce point impressionné par ce qu’il lit au sujet de la machine à calculer de Bollée qu’il se rend sur le site de l’Exposition universelle de 1889 pour la voir. Mieux encore, il invite le jeune homme à venir travailler pour lui aux États-Unis.
Remarquez, Edison se rend officiellement à Paris début août 1889 pour jeter un coup d’œil sur les installations électriques qui se trouvent sur le site de l’exposition et qu’il y avait fait installer.
Avant que je ne l’oublie, Bollée complète une troisième machine à calculer mécanique en 1895.
Au moins une des machines à calculer conçues par Bollée semble être produite en (petite?) série, mais entrons maintenant dans le vif de notre sujet, la Voiturette.
Bollée commence à plancher sur un véhicule tricycle à essence biplace en janvier 1896. La construction de ce prototype breveté en décembre de l’année précédente l’occupe pendant environ 2 mois.
Cette Voiturette, un terme dont Bollée obtient peut-être les droits, est le premier véhicule automobile rapide au monde. Il peut en effet atteindre, voire dépasser les 30 kilomètres/heure (près de 20 milles/heure). Wah!
Il va de soi que Bollée sillonne les routes qui entourent Le Mans afin de peaufiner son véhicule. Il parcourt ainsi plusieurs centaines de kilomètres (quelques centaines de milles) en quelques semaines. Bollée a tout le loisir de confirmer que son véhicule consomme bien peu d’essence et qu’il est maniable, simple, solide et stable, du moins lorsque les routes sont sèches. Si celles-ci sont détrempées, toutefois, la Voiturette peut effectuer un tête à queue, voire un tour de 360 degrés, et ce en criant ciseau.
En contrepartie, la présence de pneumatiques rapidement démontables (2 minutes versus 15) améliore la tenue de route et, jusqu’à un certain point, le confort, la Voiturette n’étant pas munie d’amortisseurs. Soit dit en passant, ces pneus sont fabriqués par le fabricant français de pneus Michelin & Compagnie. Si, ce Michelin-là.
Bollée a présumément par ailleurs tout le loisir de constater que le positionnement du levier de commande, sur le côté gauche du véhicule, réduit un tant soit peu la maniabilité. De même, la présence d’une passagère ou passager assis(e) devant lui réduit un tant soit peu la visibilité.
Parlant (tapant?) de Bollée ou, de manière plus générale, du conducteur d’une Voiturette, permettez-moi de vous présenter la phrase suivante, extraite de la chronique « Causerie scientifique » du supplément d’un numéro de janvier 1899 de La Croix de Paris : « Sa besogne est facile et sa position est d’autant plus enviable que son compagnon de route, ou sa compagne, lui sert de coupe-vent. »
Je sais, je sais, Somsoc, le chroniqueur scientifique non identifié de ce quotidien qui affiche on ne peut plus clairement son obédience religieuse, par le biais d’un grand dessin de Jésus de Nazareth agonisant sur la croix en première page de chaque numéro, n’est pas ce qu’on appellerait un très grand romantique.
Cela étant dit (tapé?), les qualité de la Voiturette, alliées à un prix de vente potentiellement peu élevé, font de cette machine un véhicule qui pourrait intéresser de nombreux acheteurs. La Voiturette semble promise à un brillant avenir.
Un peu après la mi-avril 1896, je pense, Bollée se lance sur la route qui relie Le Mans à Paris, une randonnée somme toute audacieuse compte tenu de la distance, plus de 200 kilomètres (plus de 125 milles), qui séparent ces villes. Ce périple se déroule sans anicroche.
Une fois dans la ville lumière, Bollée se pointe aux bureaux d’un des plus importants quotidiens français de l’époque, Le Petit Journal. Le directeur de ce journal, Hippolyte Auguste Marinoni, connaît déjà Bollée. Ce brillant mécanicien, concepteur d’une presse rotative qui rend possible la production d’hénaurmes quantités de journaux quotidiens, au risque de désarbrer des continents entiers, avait été impressionné par la machine à calculer que Bollée lui avait montrée fin 1895, début 1896.
Marinoni est fort impressionné par le véhicule que Bollée lui présente, un véhicule qui diffère à la fois des motocyclettes et automobiles.
De fait, la Voiturette est à ce point différente de ce qui existe alors que, au printemps 1896, l’Automobile Club de France, le premier club automobile au monde (1895) et un temple de la misogynie depuis près de 130 ans, se voit forcé d’ajouter aux catégories automobiles et motocyclettes une catégorie dite véhicules divers ou quelque chose du genre, pour ses compétitions, mais revenons à Marinoni.
Celui-ci est à ce point impressionné par la Voiturette (« Je cherche ce qui peut bien y manquer. Rien n’y manque! ») qu’il réserve la première page de l’édition du 3 mai 1896 de son quotidien à un article illustré sur ce véhicule automobile.
Une des premières illustrations montrant une Bollée Voiturette, publiée en mai 1896 par Le Petit Journal de Paris, France. Si le conducteur du véhicule est sans doute Léon Auguste Antoine Bollée, qui est célibataire à l’époque, l’identité de sa passagère est beaucoup moins certaine. Pierre Giffard, « La Voiturette de M. Léon Bollée. » Le Petit Journal, 3 mai 1896, 1.
Le seul item qui n’est pas balayé par cette décision est l’épisode du jour du feuilleton que publie alors Le Petit Journal, soit La Joueuse d’Orgue, une œuvre du romancier populaire français Xavier Henry Aymon de Montépin ou d’un de ses prête-plumes, une œuvre qui va donner lieu à une pièce de théâtre éponyme datant de 1897, et…
Si, si, prête-plumes. Comme plusieurs auteurs à succès français de la Belle Époque qui semblent produire des feuilletons au kilomètre (0.6214 mille), au risque de désarbrer des continents entiers, de Montépin a recours à des auteurs sous-traitants qui, pour la plupart, sont inconnus.
Habitué(e)s comme nous le sommes par la présence polluante et dangereuse de myriades d’automobiles dans les rues, promenades, boulevards et avenues du monde entier, nous ne pouvons pas imaginer l’impact que peuvent avoir Bollée et sa Voiturette. C’est par milliers que des Parisiennes et Parisiens de tous les horizons sociaux sont figé(e)s de stupeur dans les rues. Plusieurs d’entre elles et eux avaient vu des automobiles auparavant, bien sûr, mais aucune qui pouvait aller aussi vite ou avec une telle agilité.
Des rumeurs circulent selon lesquelles Bollée aurait obtenu 350 commandes (fermes?) en l’espace de quelques jours. Chaque véhicule se vendrait 2 000 francs, dit-on, une somme qui correspond à environ 22 500 $ en devises de 2024. Et oui, s’il faut en croire Dame Rumeur, Bollée aurait obtenu en quelques jours des commandes (fermes?) valant 700 000 francs, soit près de 8 000 000 $ en devises de 2024. Wah!
Une des ventes qui devient réalité concerne Marie Didon, née Boisseau, une des premières femmes automobilistes françaises. Fascinée par ce qu’elle lit en mai 1896 dans Le Petit Journal, cette dame de 48 ans se rend à Le Mans et y achète une des premières Voiturette.
Un des gentilshommes figés dans les rues de Paris est un représentant de British Motor Syndicate Limited, une firme anglaise fondée en novembre 1895 à partir de Daimler Motor Syndicate Limited, une firme elle-même fondée en mai 1893. Ce représentant peut fort bien être le directeur commercial de la dite firme, le cycliste de course / journaliste anglais et pionnier de l’industrie automobile britannique Herbert Osbaldeston Duncan.
Quoi qu’il en soit, le dit représentant est à ce point impressionné qu’il invite Bollée à se rendre à Londres afin que lui et sa Voiturette soient présent(e)s lors d’une visite privée effectuée par des membres de la Honourable the Commons of the United Kingdom of Great Britain in Parliament assembled sur le site d’une exposition d’automobiles organisée par le Motor Car Club anglais.
Et oui, la vitesse et la maniabilité de la Voiturette suscitent des commentaires élogieux.
Le jour suivant, le co-fondateur et président de British Motor Syndicate, autrefois concepteur de bicyclettes et pilote cycliste de course, se dit prêt à acquérir les droits de production britanniques du véhicule français. Henry John « Harry » Lawson mentionne apparemment à Bollée la modique somme de 20 000 £, soit environ 5 600 000 $ en devises de 2024. Bollée accepte sur le champ. Lawson peut, je répète peut, lui avoir remis un chèque pour le cinquième de cette somme, le reste devant être payé à échéances fixes.
Pourquoi un tel enthousiasme, demandez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur très près de ses sous? Voyez-vous, British Motor Syndicate souhaite acquérir les droits de production de divers types de véhicules français, britanniques, etc. afin de les produite, ou de les faire produire, sous licence en Angleterre.
Soyons brutal, Lawson souhaite contrôler l’industrie automobile britannique par le biais de British Motor Syndicate et d’une firme anglaise qui la contrôle, Great Horseless Carriage Company Limited. L’objectif de cet homme d’affaires rusé semble être de mettre la main sur le maximum de brevets afin de les revendre par la suite à prix d’or à des firmes qui fabriqueraient les véhicules.
Deux jours après leur prestation remarquée à Londres, Bollée et sa Voiturette sont à Coventry, Angleterre. Des dames, enfants et gentilshommes sont figé(e)s de stupeur dans la rue lorsqu’elles et ils les voient passer. Il va de soi que Bollée accepte volontiers d’offrir des courtes balades à diverses personnes, dont le maire de Coventry, John Baird Loudon.
S’il ne met pas la pédale au plancher, Bollée va quand même plutôt vite et c’est là que le bât blesse. Voyez-vous, les automobilistes britanniques vivent alors encore sous le joug du Locomotives (Amendment) Act 1878.
Croiriez-vous que cette mesure législative limite toujours la vitesse des automobiles à environ 6.5 kilomètres/heure (4 milles/heure) dans les campagnes et environ 3.25 kilomètres/heure (2 milles/heure) en ville, je pense, et exige la présence d’un piéton marchant environ 18 mètres (60 pieds) devant toute automobile, et ce afin de prévenir les autres utilisateurs de la route de la présence de la dite automobile? Les autorités locales peuvent, je répète peuvent, avoir le droit d’exiger que cette personne agite un drapeau rouge. En 1896. On croit rêver.
En pareille circonstances, on serait en droit de s’attendre à ce que la Coventry City Police sévisse contre Bollée et ses excès de vitesse. De fait, certains résident(e)s de l’endroit s’y attendent aussi. Or il n’en est rien. Pis encore, des membres du dit service de police ouvrent la voie à Bollée et Loudon afin qu’ils puissent foncer à loisir.
Si votre humble serviteur peut se permettre de paraphraser, en traduction, une phrase célèbre du roman court La Ferme des animaux, publiée en 1945 par George Orwell, le nom de plume de l’écrivain / essayiste / journaliste anglais Eric Arthur Blair, tous les êtres humains sont égaux, mais certains êtres humains sont plus égaux que d’autres.
Et oui, la Voiturette conduite par Bollée semble être la première automobile à circuler dans les rues de Coventry.
En juillet 1896, peu après le retour de Bollée en France, avec son précieux chèque de 4 000 £, soit environ 1 125 000 $ en devises de 2024, un incendie se déclare dans l’usine de Humber & Company Limited qui doit produire la Voiturette. Cette usine est plus ou moins détruite. La liasse de plans préparée par le personnel de la firme ainsi que la Voiturette laissées à Coventry par Bollée, et ce afin d’aider le dit personnel, subissent le même sort.
Lawson demande aussitôt que Bollée lui fournisse un véhicule de remplacement. Jugeant inacceptable le délai de 2 mois mentionné par son partenaire français, il décide de ne pas payer le second versement dû à Bollée. Jugeant inacceptable cette décision unilatérale, Bollée refuse d’envoyer la Voiturette de remplacement. C’est l’impasse.
Effaré par ce qui se passe, le susmentionné Duncan parvient à convaincre Lawson de préparer un chèque de 16 000 £, soit environ 4 475 000 $ en devises de 2024, au nom de Bollée. Il convainc par ailleurs celui-ci de lui remettre un véhicule en échange du dit chèque. Une fois cet accord en place, ou avant d’en avoir parlé à Bollée, Duncan prend le train pour Douvres, Angleterre, puis un traversier en direction de Calais, France, et finalement un train à destination de la ville de Le Mans.
Bollée accueille son visiteur avec la plus grande amabilité. De fait, il fait jouir Duncan de la proverbiale hospitalité française pendant 4 jours, sous surveillance constante, le temps que sa banque encaisse le chèque signé par Lawson. Je ne plaisante pas. La confiance, semble-t-il, ne règne pas.
Le chèque ayant été encaissé, Duncan prend possession de la Voiturette tant désirée et rentre illico presto à Coventry.
Bollée compte parmi les rares personnes qui font du pognon sur le dos de Lawson, le contraire étant normalement de mise.
Les premiers exemplaires de la Coventry Motette, la version britannique de la Voiturette produite en Angleterre par Coventry Motor Company et, peut-être, Humber & Company, battent le pavé au plus tard en mai 1897. Ces véhicules, munies pour la plupart d’un moteur anglais, comptent parmi les premières automobiles produites en série en Angleterre.
Une des premiers véhicules produits en Angleterre, ou une des Voiturette importées en Angleterre, permet à un étudiant en génie mécanique anglais passionné par le cyclisme et l’automobilisme de voyager à bonne vitesse au printemps 1897, entre Coventry et Cambridge, Angleterre, là où il étudie, à la University of Cambridge. Son nom? Charles Stewart Rolls. Si, si, ce Rolls-là, le co-fondateur de Rolls-Royce Limited.
Croiriez-vous qu’une Motette participe aux célébrations de juin 1897 entourant le 60ème anniversaire de l’accession au trône de la reine Victoria, née Alexandrina Victoria de la maison Hanover, une monarque mentionné dans quelques numéros de notre blogue / bulletin / machin non-monarchique, et ce depuis novembre 2018?
Pour être plus précis, la Motette en question participe à l’édition de 1897 de la Godiva Procession, un événement annuel qui commémore le légendaire passage dans les rues de Coventry, au 11ème siècle, de la comtesse Godgifu / Godiva, épouse de Leofric, comte de Mercie et seigneur de la ville.
Oui, cette Godiva-là. Celle qui, selon la légende, traverse Coventry à dos de cheval, en tenue d’Ève, pour amener son époux à supprimer les lourds impôts qui accablent les habitants de la ville. Le dit époux finit par le faire, soit dit en passant, selon la légende.
La Coventry Motette qui participe aux célébrations entourant le 60ème anniversaire de l’accession au trône de la reine Victoria, née Alexandrina Victoria de la maison Hanover, en juin 1837, Coventry, Angleterre, juin 1897. St. John Nixon, « Coventry Car Pioneers Tried Hard to Impress the Public – ‘Fool’ Was Driver of 1897 ‘Motette’. » The Coventry Evening Telegraph, 4 June 1959, 17.
Conscient du fait que les rues de Coventry seraient noires de monde, Lawson a l’idée de placer la dite Motette sur une sorte de structure elle-même placée sur un camion à essence. Une phrase choc se trouve de chaque côté du camion. Une fois traduite, elle se lit comme suit : « Un idiot peut conduite la Coventry Motette. » Une cheval de bois d’enfant placé devant les conducteurs du camion complète l’ensemble.
Deux employés de Coventry Motor assis sur les sièges de la Motette saluent la foule. Le jeune homme assis sur le siège du conducteur, Percival Lea Dewhurst Perry, est déguisé en clown et tient une hénaurme ombrelle. Celui qui prend place sur le siège du passager, William Malesbury Letts, est déguisé en jeune femme. Si, si, une jeune femme et un clown dans une automobile publicisée avec la phrase « Un idiot peut conduite la Coventry Motette. » Ayoye.
Les noms des deux jeunes hommes vous disent-ils quelque chose, ami(e) lectrice ou lecteur au fait de bien des choses? Oui? Non? Peu importe.
Letts, par la suite sir William, compte parmi les personnalités les plus remarquables de l’histoire de l’industrie automobile britannique.
En 1928, Perry, alors sir Percival, devient quant à lui président de Ford Motor Company Limited, la filiale britannique de Ford Motor Company, deux firmes mentionnées à moult reprises dans notre blogue / bulletin / machin, et ce depuis février 2018. Avant que je ne l’oublie, sir Percival est élevé à la pairie en tant que baron Perry de Stock Harvard en février 1938.
Une Coventry Carriette ou Motette Trader typique. Anon., « The Coventry Motette Trader. » The Autocar, 6 mars 1897, 155.
Soit dit en passant, Coventry Motor commercialise avant même la fin de l’hiver 1896-97 une version commerciale de la Motette, la Coventry Carriette, ou Motette Trader, dont les deux porte-paquets sont facilement détachables. Le porte-paquets avant peut même être remplacé par un siège.
Une Coventry Sociable Motette typique. Anon., « The New Coventry Motette. » The Autocar, 6 novembre 1897, 712.
Coventry Motor commercialise par ailleurs, et ce avant même la fin de 1897, une version de la Motette connue sous le nom de Coventry Sociable Motette. Votre humble serviteur se demande si ce véhicule muni d’un siège double à l’avant et d’aucun à l’arrière n’est pas en fait la version dite pour dames du véhicule.
Soit dit en passant, la version standard de la Motette peut être munie d’un auvent imperméable facilement détachable. On est en droit de se demander si la Coventry Sociable Motette peut être équipée de la même façon. Nous savons toutes et tous à quel point le temps en Angleterre peut être agréable, n’est-ce pas? Du sarcasme, demandez-vous? Nan…
Et oui, votre humble serviteur présume que la Voiturette entre en production en France dès 1896. La firme impliquée dans ce projet est un fabricant de machine outils, machines à coudre et bicyclettes français, Diligeon & Compagnie.
Incidemment, la susmentionnée Michelin & Compagnie achète toutes les Voiturette produites entre juillet et septembre ou octobre 1896, soit environ 200 véhicules. Elle acquiert par ailleurs 100 tricycles motorisés produits au cours de la même période par le grand rival de Bollée et de Diligeon & Compagnie, la firme française De Dion-Bouton & Compagnie, un des plus importants fabricants d’automobiles au monde.
Michelin & Compagnie souhaite vendre tous ces véhicules en août 1896, lors d’enchères par soumission cachetée. Le prix de départ pour chaque Voiturette est de 2 600 francs, une somme qui corresponds à environ 29 000 $ en devises de 2024. Le quart des sommes recueillies irait à Michelin & Compagnie. Un autre quart irait au Touring-Club de France, un organisme consacré au développement du tourisme en France. Le reste irait au susmentionné Automobile Club de France.
Le Touring-Club ayant poliment décliné l’offre de Michelin & Compagnie, votre humble serviteur ne saurait pas dire comment les sommes tirées des ventes d’automobiles sont partagées. De fait, je ne sais pas comment se déroule la vente aux enchères.
Remarquez, une firme du nom de Société anonyme des voiturettes automobiles voit le jour au plus tard en janvier 1897 pour produire des Voiturette. Bollée peut y être impliqué financièrement.
Pendant que j’y pense, veuillez noter qu’une intense querelle étymologique met en présence la dite Société anonyme des voiturettes automobiles et un autre fabricant d’automobiles français, la Société nouvelle des Établissements Decauville Ainé, au cours de l’année 1897. Cette dernière s’insurge en effet du fait que sa rivale veuille s’arroger l’usage exclusif du terme voiturette. Décidant en fin de compte que le jeu n’en vaut pas la chandelle, la Société nouvelle des Établissements Decauville Ainé décide en 1897 de baptiser ses petites automobiles à 4 roues des voiturelles, mais je digresse, et ce pour la dernière fois aujourd’hui.
La suite et fin de la fascinante histoire de la Voiturette vous parviendra sous peu.