À la recherche d’une voiture canadienne : La Zar de toutes les Windsor
Comment ça va, ami(e) lectrice ou lecteur? À ce point-là? Génial. Sommes-nous prêt(e)s pour un autre voyage sur l’autobahn de la mémoire? Génial. Votre humble serviteur a un sujet qui devrait être raisonnablement intéressant, et ce même si ce sujet n’est peut-être pas sûr à conduire sur une autobahn.
J’ai trouvé l’article au cœur de notre sujet en parcourant des numéros de Le Petit Journal, un hebdomadaire de Montréal, Québec, qui passe l’arme à gauche en janvier 1978. Le numéro qui nous intéresse aujourd’hui est publié il y a 60 ans, le 25 octobre 1959.
Même si votre humble serviteur n’a jamais vraiment aimé les automobiles, je dois admettre que le véhicule de la photographie ci-dessus m’a intrigué.
Et oui, le titre de cet article est directement inspiré d’une exposition temporaire qui ouvre ses portes en juin 2010 au Musée des sciences et de la technologie du Canada à Ottawa, en Ontario – une institution sœur / frère du mondialement connu Musée de l’aviation et de l’espace du Canada, également situé à Ottawa. Si, si, mondialement connu, mais cette sœur / frère était / est pas mal cool aussi. Elle / il accueille par exemple la susmentionnée exposition, À la recherche de la voiture canadienne (Bonjour, EP et SB!), dont une version en ligne est disponible à l’adresse suivante :
Comment souhaitez-vous traiter le sujet d’aujourd’hui, ami(e) lectrice ou lecteur? Précis et concis – et bref, dites-vous? Vos désirs sont des ordres. Jusqu’à un certain point.
Au début du mois de mai 1959, des lectrices et lecteurs de journaux des régions ontariennes de Windsor et de Toronto, et peut-être ailleurs, trouvent un article sur une petite et nouvelle entreprise de Windsor intéressée par la fabrication d’une automobile canadienne vraiment raisonnable, fabriquée au Canada par des Canadien(ne)s pour des Canadien(ne)s. Et non, ce petit véhicule économique n’est pas la première automobile entièrement canadienne. L’auteur de l’article au cœur de la péroration de cette semaine, ou peu importe qui au journal imagine ce titre, se trompe – et je ne vois pas comment ou pourquoi un tel titre est utilisé. Et non encore une fois, votre humble serviteur ne digressera pas aujourd’hui au sujet de la première automobile entièrement canadienne.
Incorporée en Ontario en 1959, Zar Auto of Canada Limited est dirigée par 4 gentilshommes de la région de Windsor :
- Leo Finnigan, président, et ancien président fondateur de National Auto Radiator Manufacturing Company de Windsor, une affirmation qui semble quelque peu exagérée selon le successeur de cette firme, l’actuel NARMCO Group, également de Windsor;
- Frank W. Herman, vice-président et directeur, et ancien superviseur des ventes de Fibreglass of Canada Limited dans l’Ouest ontarien;
- Roger Lauzon, secrétaire-trésorier, et ancien président de Sun Parlor Pool Company Limited de Windsor; et
- Howard C. Neal, président du conseil d’administration, et ancien directeur des ventes de Union Gas Company Limited.
Il va sans dire, et me voilà le disant quand même, que Zar Auto of Canada n’a aucun lien avec Zar Car Ednolichno Druzhestvo s Ogranichena Otgovornost, un atelier de réparation / entretien d’automobiles en Bulgarie très actif en 2019, mais je digresse.
L’annonce du début de mai est une surprise un peu désagréable pour nos 4 gentilshommes qui avaient l’intention de dévoiler leur projet seulement au début de juin, probablement lorsque le tout premier prototype de la Zar Zar-Car serait prêt. Et non, le nom ne roule pas sur la langue aussi bien que Ford Mustang ou Pontiac Firebird, 2 automobiles mentionnées dans un numéro de février 2019 de notre blogue / bulletin / machin.
Comment la presse entend-elle parler de la Zar-Car, vous demandez-vous? Et bien, il s’avère qu’un échevin de Windsor, Maurice Lucien Bélanger, entend parler du projet, se renseigne et présente ses conclusions lors d’une réunion du conseil municipal. Cet ancien enseignant déclare que la Greater Windsor Industrial Commission a étudié de manière approfondie les possibilités de Zar Auto of Canada. Aucun des articles que votre humble serviteur a lu ne dit quoi que ce soit à propos de ces possibilités, une carence que je trouve très ennuyeuse. Bélanger ajoute toutefois que des sociétés tant américaines qu’européennes ont manifesté au moins un certain intérêt pour Zar Auto of Canada. En comparaison, les entreprises de Windsor ou des environs ne font que des offres négligeables.
Incidemment, Bélanger est né à Sherbrooke, Québec, la ville natale de votre humble serviteur. Le monde est petit, n’est-ce pas?
Quoiqu’il en soit, quand un journaliste de la Presse canadienne lui demande de parler de Zar Auto of Canada, le susmentionné Finnigan déclare que la compagnie espère avoir un prototype de la Zar-Car prêt en juin, comme il est dit (tapé?) plus haut, et 11 automobiles construites au plus tard à l’automne 1960. Ce prototype est construit à la main sur le châssis d’une automobile italienne, peut-être une Fiat 600.
Maintenant, pourquoi le regard abattu, ami(e) lectrice ou lecteur? Craignez-vous que votre humble serviteur s’engage encore dans une nouvelle digression, celle-ci étant sur la FIAT 600? Étant donné que vous vous attendez à vous faire digresser, quel type d’hôte serais-je si je ne répondais pas à vos attentes? Je serai bref. Et oui, Fabbrica Italiana Automobili Torino Società Anónima (FIAT) est mentionnée dans des numéros de mars 2019 de notre blogue / bulletin / machin.
La FIAT 600, dis-je, est produite par FIAT entre 1955 et 1969. Le géant automobile italien produit environ 2 695 000 de ces véhicules à 4 places à la fois économiques et capables. Ce total inclut probablement un nombre de FIAT 600 Multiplia de 4 à 6 places, un précurseur des véhicules polyvalents d’aujourd’hui. Remarquez, environ 2 225 000 FIAT 600 sont également fabriqués, jusqu’en 1985 environ, en Allemagne de l’Ouest, en Argentine, au Chili, en Espagne et en Yougoslavie, pour un total d’environ 4 920 000 véhicules. Les nombreuses FIAT 600 assemblées en Australie (?), en Colombie, en Malaisie et en Uruguay, avec des pièces fabriquées ailleurs, sont comprises dans ce total.
Avez-vous déjà entendu parler de la Ghia Jolly, ami(e) lectrice ou lecteur? Non? Moi non plus. À la fin des années 1950 et, peut-être, au début des années 1960, FIAT livre plusieurs FIAT 600 à une maison de design italienne. Carrozzeria Ghia Società per azioni les équipe de sièges en osier et d’un toit à franges optionnel. Croiriez-vous que la Jolly est conçu à l’origine pour être utilisée par des propriétaires de yachts suffisamment grands pour la recevoir? Ça doit être bien d’avoir de l’argent. Salut, patronne, salut.
Les propriétaires de tels véhicules de luxe, qui possèdent ou non des yachts, hénaurmes ou non, comprennent des actrices et des acteurs de cinéma célèbres, tels que Yul Brinner, né Yuliy Borisovitch Briner; Grace Patricia Kelly; Mary Pickford, née Gladys Louise Smith; et Mary Jane « Mae » West, sans oublier des notables comme le président / dictateur yougoslave Josip Broz Tito et le magnat de la navigation Aristotelis « Ari / Aristo » Onassis. Est-ce que je vous surprendrais si je déclarais que West est mentionnée dans un numéro de mai 2019 de notre blogue / bulletin / machin? Mais revenons à notre histoire.
En autant que je le sache, les exemplaires de série de la Zar-Car doivent être propulsés par un petit moteur européen, peut-être celui de la FIAT 600, ce qui va à l’encontre des mots « entièrement canadienne » dans le titre de l’article du Le Petit Journal, vous ne pensez pas?
Ce détail technique n’est cependant pas ce qui attire l’attention de l’œil baladeur de votre humble serviteur. La Zar-Car, dis-je, a une carrosserie en fibre de verre. Et non, ce n’est pas la première automobile avec une telle carrosserie. La Chevrolet Corvette, par exemple, est introduite en 1953, et même cette voiture de sport classique n’est pas la première automobile de série avec une carrosserie en fibre de verre. Cet honneur revient apparemment à la Glasspar G2, une autre voiture de sport américaine, introduite en 1951 mais fabriquée en très, très, très petit nombre.
Au Canada, l’honneur d’être la première revient à la La Dawri Cavalier, encore une autre voiture de sport, introduite en 1956 mais fabriquée en très, très, très petit nombre. Cela étant dit (tapé?), La Dawri Coachcraft Incorporated déménage aux États-Unis en 1957, où elle devient, à un moment donné au cours des années 1960, un des plus importants fabricants de carrosseries de voitures de sport en fibre de verre au monde, mais je digresse. Désolé.
À ce point, je ressens le besoin de noter que les ailerons horizontaux à l’arrière de la Zar-Car ont l’air dangereux. Un enfant qui heurterait un de ces machins pourrait se blesser.
Le lancement de la Zar-Car concrétise un rêve avec lequel Finnigan vit depuis le milieu des années 1930, voire un peu avant, quand il est adolescent. Alors que la production et l’assemblage de la célèbre Ford Modèle A s’arrêtent, en 1931 ou un peu plus tard, aux États-Unis, en Union des Républiques socialistes soviétiques, au Royaume-Uni, au Japon, au Canada, en Australie, en Argentine et en Allemagne, il commence à penser à construire une petite automobile abordable au Canada.
Un journaliste du Le Petit Journal du nom de Arthur Prévost se rend à Windsor en octobre 1959 pour s’entretenir avec Finnigan et d’autres membres de l’équipe de direction de Zar Auto of Canada. Votre humble serviteur croit que ce journaliste est le Arthur Prévost qui écrit les articles au cœur de 2 numéros de notre blogue / bulletin / machin publiés en juillet 2018 et en mai 2019, ceux intitulés
- Le frère venu d’une autre Buckingham, et
- La Lune est une des stations de vacances les plus relaxants de l’univers. Appelez-nous, aujourd’hui, pour un pamphlet d’information gratuit!
Croiriez-vous que je n’avais pas remarqué la présence de Prévost avant de compléter la version originale de ce texte? Mais revenons à notre histoire.
À Windsor, Prévost apprend que quelques automobiles supplémentaires ont été achevées, ce qui peut être vrai – ou pas. Une Zar-Car a parcouru près de 34 000 kilomètres (environ 21 000 milles) sur des routes (ontariennes?) en 1959 pour voir si tout fonctionne correctement.
Finnigan a de grands espoirs pour la Zar-Car. Au début, Zar Auto of Canada produirait 50 automobiles par jour. Ce nombre doublerait avec l’introduction d’une seconde ligne de production. Selon le susmentionné Lauzon, il est très probable que cette seconde ligne soit située au Québec.
Finnigan espère éventuellement produire 3 modèles différents de Zar-Car : un véhicule à 4 ou 5 places, possiblement le modèle initial; un véhicule de sport; et un type de véhicule encore indéterminé. Économique en carburant et relativement peu coûteuse, la Zar-Car a beaucoup à offrir.
Finnigan est particulièrement fier de la carrosserie monocoque en fibre de verre de son automobile, qui est si robuste qu’on peut la frapper avec une masse sans l’abîmer de quelque façon que ce soit. Remarquez, la dite carrosserie est également à l’épreuve de la rouille.
Curieusement, Finnigan dit à Prévost qu’il est grand temps que le Canada devienne un pays producteur d’automobiles. Après tout, déclare-t-il, des pays comme les Pays-Bas et la Suède, qui regroupent environ 18 millions d’habitants, possèdent chacun une industrie automobile, alors que le Canada, avec 17 millions d’habitants, dont 5.5 millions d’âmes en Ontario, n’en a pas.
Une telle déclaration est vraiment étrange compte tenu de la présence de longue date sur le sol canadien de sociétés comme Chrysler Corporation of Canada Limited, Ford Motor Company of Canada Limited et General Motors of Canada Limited (GMC), les filiales des géants américains de la construction automobile Chrysler Corporation, Ford Motor Company et General Motors Corporation (GM).
Votre humble serviteur ne peut pas croire que Finnigan tente d’induire Prévost en erreur à ce point-là, ou que ce dernier ne comprend pas du tout ce qu’on lui dit. Finnigan pense peut-être que les automobiles fabriquées au Canada par Chrysler Corporation of Canada, Ford Motor Company of Canada et GMC ne sont que de simples versions locales d’automobiles américaines, alors que la Zar-Car est un modèle original. Je ne peux que reconnaître que le contenu de l’article de Prévost me laisse profondément perplexe.
Comme nous le savons tous les 2, les firmes de construction automobiles mentionnées ci-haut sont mentionnées dans divers numéros de notre blogue / bulletin / machin :
- Chrysler Corporation, dans des numéros de janvier, février et mars 2019,
- Chrysler Corporation of Canada, dans un numéro de mars 2019,
- Ford Motor Company, dans quelques numéros depuis décembre 2018,
- Ford Motor Company of Canada, dans un numéro de décembre 2018,
- GM, dans quelques numéros depuis mars 2018, et
- GMC, dans des numéros de novembre 2018, février 2019 et avril 2019.
Étant l’expert(e) en automobile que vous êtes, ami(e) lectrice ou lecteur, vous saurez bien sûr que Chrysler fait maintenant partie de FIAT Chrysler Automobiles Naamloze Vennootschap. Oui, cette FIAT. Le monde est petit, n’est-ce pas?
Zar Auto of Canada disparaît pratiquement sous les projecteurs après l’automne 1959. Au milieu de 1960, la Zar-Car n’est toujours pas en production. À ce moment-là, il semble qu’elle serait propulsée par un moteur britannique. Fait intéressant, l’intérêt (très?) limité exprimé par les entreprises et / ou les investisseurs de la région de Windsor peut amener la direction de Zar Auto of Canada à s’installer dans un endroit encore indéterminé au Québec. Il est possible que Finnigan vende la société avant ce déménagement. Les rumeurs selon lesquelles GM ou GMC prennent le contrôle de Zar Auto of Canada ne peuvent pas être confirmées.
Cette entreprise canadienne depuis longtemps oubliée ferme apparemment ses portes vers 1960-61, ou un peu plus tard.
Votre humble serviteur n’est pas parvenu à découvrir ce que Herman, Lauzon et Neal font après cette date. Finnigan décède malheureusement en septembre 1962. Il a 54 ans.
Une pensée si je peux me le permettre. On peut se demander si le susmentionné Musée des sciences et de la technologie du Canada peut souhaiter envisager la possibilité de réfléchir à l’idée d’acquérir ce qui peut fort bien être la dernière Zar-Car en existence, sinon la seule jamais construite. D’accord, d’accord, la préservation d’une Zar-Car n’est peut-être pas d’intérêt exceptionnel et d’importance nationale après tout. Pourquoi pas une La Dawri Cavalier alors? Je vous dis ça comme ça, moi.
Ciao.