Felix Andries Vening Meinesz et son Gouden Kalf; Ou, comment la Koninklijke Marine a joué un rôle vital dans l’histoire de la gravimétrie océanique, partie 2
Bonjour / bon après-midi / bonsoir, ami(e) lectrice ou lecteur et bienvenue dans la seconde partie de cet article sur les recherches gravimétriques sous-marines menées par le géophysicien / géodésiste néerlandais Felix Andries Vening Meinesz, en coopération avec la Koninklijke Marine. Allons-bous commencer notre plongée profonde? Vermouilleux!
La Carnegie Institution, une organisation privée américaine impliquée dans le financement et la réalisation de recherches scientifiques, est à juste titre intriguée par ce que Vening Meinesz a accompli entre 1923 et 1927. Elle suggère que le gouvernement américain prenne des mesures similaires dans la mer des Caraïbes, en utilisant un sous-marin de la United States Navy. Cette suggestion est acceptée.
Plusieurs organisations américaines se joignent rapidement à ce projet d’expédition gravimétrique, notamment la National Academy of Sciences, le United States Coast and Geodetic Survey, le United States Naval Observatory et le United States Navy Hydrographic Office.
Le gravimètre utilisé par Felix Andries Vening Meinesz lors de son voyage à bord du sous-marin USS S-21 de la United States Navy. F.A. Vening Meinesz et F.E. Wright, « The Gravity Measuring Cruise of the U.S. Submarine S-21. » Publications of the United States Naval Observatory, Second Series, Vol. XIII – Appendix I (Washington: United States Government Printing Office, entre les pages 14 et 15.
Felix Andries Vening Meinesz, à l’extrême droite, avec le gravimètre utilisé lors de son voyage à bord du sous-marin USS S-21 de la United States Navy. Les autres personnes sont, de gauche à droite, Curtis Dwight Wilbur, secrétaire à la marine des États-Unis, et le capitaine Charles Seymour Freeman, surintendant du United States Naval Observatory. F.A. Vening Meinesz et F.E. Wright, « The Gravity Measuring Cruise of the U.S. Submarine S-21. » Publications of the United States Naval Observatory, Second Series, Vol. XIII – Appendix I (Washington: United States Government Printing Office, entre les pages 16 et 17.
Incidemment, une version non tronquée de la photographie que vous venez de voir inclue le coauteur de Vening Meinesz, Frederick Eugene « Fred » Wright, un scientifique / pétrologue / géophysicien américain travaillant au Geophysical Laboratory de la Carnegie Institution.
Le USS S-21 appareille début octobre 1928 et oui, Vening Meinesz est à bord avec son équipement de mesure. Il et il reviennent environ 8 semaines plus tard, fin novembre. Les quelque 45 mesures effectuées mettent en évidence un certain nombre d’anomalies gravitationnelles négatives significatives, soit des régions de la Terre où la force de gravité est généralement inférieure à la normale. De telles anomalies sont découvertes dans des fosses océaniques, ce qui signifie que ces régions de la croûte terrestre sont géologiquement actives.
Ce qui est étrange, c’est que de telles anomalies et activités ne correspondent pas à ce que les scientifiques savent, ou pensent savoir, sur la structure de la croûte de notre planète. Voyez-vous, à l’époque, les scientifiques pensent que les continents de la Terre ont toujours occupé la position qu’ils occupent dans les années 1920.
Les anomalies de gravité négative découvertes en 1928 sont parmi les premières preuves tangibles de l’hypothèse de la dérive des continents avancée en 1915 par le chercheur polaire / climatologue / géologue / géophysicien / météorologue allemand Alfred Lothar Wegener et, dans une certaine mesure, avant cela, en 1906, par l’alpiniste / géologue austro-hongrois Otto Ampferer.
Selon Wegener, les continents de notre grosse bille bleue ont bougé, ou dérivé, les uns par rapport aux autres, et ce depuis très loooongtemps.
Même si les idées de Wegener sont rejetées par le gros de la communauté scientifique, les membres de cette communauté doivent néanmoins reconnaître que les côtes de l’Amérique du Sud et de l’Afrique ont une forme similaire et semblent s’être rapprochées à un moment donné dans un passé lointain.
Et oui, Vening Meinesz fait partie des scientifiques qui rejettent les idées de Wegener. Ceci étant dit (tapé?), il garde apparemment l’esprit ouvert.
Soit dit en passant, votre humble serviteur a été intrigué par cette similitude de la forme des côtes de l’Amérique du Sud et de l’Afrique lorsque mes parents m’ont acheté un globe terrestre, il y a près de 60 ans. Les grands esprits se ressemblent, n’est-ce pas? Et oui, je suis une personne profondément humble.
Incidemment, encore, je me souviens vaguement, je dis bien vaguement, d’avoir trouvé des informations sur la dérive des continents dans un manuel scolaire du début des années 1970, mais je digresse.
Comme vous et moi le savons, l’hypothèse de la dérive des continents est finalement confirmée. De fait, quelques articles publiés entre 1965 et 1967 définissent un nouveau paradigme, la théorie de la tectonique des plaques, qui révolutionne tout simplement les sciences de la Terre.
Et non, une théorie scientifique n’est pas une opinion ou conjecture de peu d’importance. Une théorie scientifique est une explication fortement étayée d’un certain aspect du monde naturel. La tectonique des plaques est une théorie scientifique, tout comme l’évolution et la relativité générale. En comparaison, le créationnisme n'en est pas une, mais je digresse.
C’est à la fin des années 1960 que les scientifiques réalisent que les fosses océaniques sont des endroits où une plaque avec une croûte océanique plus fine mais moins flottante passe sous une plaque avec une croûte continentale plus épaisse mais plus flottante, produisant ainsi des anomalies de gravité négatives – ainsi que pas mal de tremblements de terre et éruptions volcaniques.
Une de ces zones de subduction, comme on appelle ces régions, s’étend du nord de la Californie jusqu’au sud de la Colombie-Britannique.
Veuillez noter que ce qui suit est assez horrible.
Quand, et non si du moins à première vue, un tremblement de terre que beaucoup appellent le Big One, en français le gros, se produira, la limite nord-ouest de l’Amérique du Nord pourrait, je le répète, pourrait, dans le pire des cas, chuter d’environ 1.8 mètre (environ 6 pieds) et rebondir d’environ 10 à 20 mètres (environ 30 à 65 pieds) ou plus vers l’ouest, et ce en quelques minutes.
Une partie de ce mouvement aurait bien sûr lieu sous l’océan Pacifique, déplaçant une énorme quantité d’eau. Cette eau se soulèverait, formant une énorme colline, puis s’effondrerait. Une partie de cette eau se précipiterait vers l’Asie. Le reste se précipiterait vers l’est et frapperait le nord de la Californie, l’Orégon, le Washington et le sud de la Colombie-Britannique.
Dans les 15 à 20 minutes suivant le début du Big One, toute cette région de l’Amérique du Nord serait méconnaissable. Des milliers de personnes pourraient périr.
L’eau se précipitant vers l’Asie, quant à elle, toucherait les côtes quelques / plusieurs heures après le début du tremblement de terre, ce qui pourrait permettre à de nombreuses personnes de fuir vers des zones plus élevées. Même ainsi, cette région serait également sérieusement dévastée. Des milliers de personnes pourraient périr.
Un tel Big One apocalyptique pourrait plonger le monde dans une nouvelle Grande Dépression.
Éloignons-nous de cet abîme, d’accord, ami(e) lectrice ou lecteur complètement sous le choc?
Les résultats du voyage de 1928 de l’USS S-21 sont publiés en 1930 par le United States Naval Observatory.
Et oui, ami(e) lectrice ou lecteur encore ébranlé, la photographie avec laquelle nous avons commencé notre voyage avec Vening Meinesz, dans la 1ère partie de cet article, montre notre scientifique avec l’équipage du USS S-21, mais revenons à notre histoire. Et je m’excuse de vous avoir ébranlé.
La découverte d’anomalies gravimétriques négatives significatives en 1928 conduit à une seconde expédition gravimétrique américaine, connue sous le nom de Navy-Princeton Gravity Expedition to the West Indies, qui a lieu dans la mer des Caraïbes en février et mars 1932, à l’aide du sous-marin USS S-48. Et oui, Vening Meinesz est à bord avec son équipement de mesure.
Il n’est cependant pas présent lors de la Gravimetric Survey Expedition qui se déroule dans la mer des Caraïbes entre fin novembre 1936 et mi-janvier 1937, à l’aide du sous-marin USS Barracuda.
Mentionnons par ailleurs les quelques mesures gravimétriques effectuées par un membre de la Wilkins-Ellsworth Trans Arctic Submarine Expedition en août et septembre 1931, dans l’Océan Arctique, au nord de l’archipel de Spitsbergen / Spitzberg, l’actuel territoire norvégien connu sous le nom de Svalbard. Ces mesures sont effectuées par l’alpiniste / explorateur de l’Arctique / médecin / skieur et acteur / producteur / réalisateur / scénariste de cinéma allemand Bernhard Villinger à l’aide d’un gravimètre acheté aux Pays-Bas.
Villinger fait alors partie de l’équipage du Nautilus, ex-USS O-12, un sous-marin de la United States Navy retiré du service en juin 1924, loué en 1930 pour une somme annuelle nominale, puis modifié pour sa mission très spéciale : atteindre le Pôle Nord en naviguant sous la glace.
Mal adapté à sa mission et endommagé en cours de route, le Nautilus n’effectue que quelques brèves plongées plus ou moins contrôlées sous la banquise. Ceci étant dit (tapé?), ces plongées pour le moins risquées sont les toutes premières réalisées sous la banquise par un sous-marin.
Jugeant que l’expédition est un échec, un de ses principaux commanditaire, un homme d’affaires / magnat de la presse écrite américain que l’Arctique passionne, William Randolph Hearst, refuse de payer la somme d’argent prévue.
Avant de revenir à Vening Meinesz, votre humble serviteur aimerait digresser, et pontifier. Voyez-vous, la Koninklijke Marine et la United States Navy ne sont pas les seules forces militaires impliquées dans la recherche gravimétrique sous-marine pendant l’entre-deux-guerres. Nenni.
En effet, un professeur agrégé / géophysicien du nom de Léonid Vassilievitch Sorokin est à bord d’un sous-marin de la flotte de la mer Noire de la Morskiye Sily Raboche-Krest’yanskoy Krasnoy Armii SSSR en août et septembre 1930 pour effectuer des mesures gravimétriques expérimentales. Cette première opération est suffisamment réussie pour justifier d’autres expéditions effectuées par les forces navales de l’armée rouge des ouvriers et paysans dans la mer Noire (1933-35), la mer du Japon (1937) et la mer d’Okhotsk (1937).
Incidemment, Sorokin travaille à Moskva / Moscou, Union des républiques socialistes soviétiques (URSS), à la Moskovskiy Gosudarstvennyy Universitet ou au Institut Issledovatel’skogo i Opytnogo Dela, autrement dit à l’université d’état de Moscou ou à l’institut de recherche et de travail expérimental.
Mais attendez, il y a plus. La Regia Marina italienne participe à 2 expéditions sous-marines en mer Méditerranée pendant l’entre-deux-guerres. La première est réalisée entre août et octobre 1931 par l’équipage du RN Vettor Pisani, à l’aide d’un gravimètre prêté en juillet par la Rijkscommissie voor Graadmeting en Waterpassing et…
Si, ce gravimètre est prêté par l’organisation avec laquelle Vening Meinesz est fortement impliqué. De fait, l’appareil utilisé par l’ingénieur / topographe italien et secrétaire du Comitato per la geodesia e geofisìca du Consiglio nazionale delle ricerche est celui que Vening Meinesz lui-même utilise. Mieux encore, Gino Cassinis apprend à l’utiliser auprès du scientifique néerlandais lui-même, en Italie. Incidemment, le gravimètre revient aux Pays-Bas en octobre 1931. Par avion.
Quoi qu’il en soit, lorsqu’elle décide de lancer une seconde expédition, la Regia Commissione geodetica Italiana se trouve dans l’impossibilité d’emprunter ce précieux instrument. Voyez-vous, la Koninklijke Marine prépare sa propre expédition. En conséquence, l’organisation italienne doit commander un gravimètre à Naamloze Vennootschap Nederlandsche Seintoestellen Fabriek, la plus grande firme de fabrication d’équipements radio des Pays-Bas.
Cassinis et son gravimètre naviguent à bord du RN Des Geneys en juillet et août 1935 et couvrent beaucoup de, euh, terrain dans les eaux de la mer Méditerranée.
Pour couronner le tout, le Dai-Nippon Teikoku Kaigun participe à des recherches gravimétriques sous-marines lorsque le sous-marin Ro-58 prend la mer en octobre 1932 pour effectuer des mesures expérimentales près de Yokohama, Japon. Le scientifique responsable est un géophysicien / professeur japonais bien connu. Ce même scientifique, Matuyama Motonori, né Matsuyama Motonori, navigue à bord du Ro-57 en octobre et novembre 1934 pour effectuer une série de mesures au large des côtes du Japon, dans l’océan Pacifique. Matuyama effectue d’autres mesures en octobre 1935, à bord du sous-marin mouilleur de mines alors connu sous la désignation I-24.
Et oui, le Sokuchi Linkai, autrement dit le comité géodésique japonais, je pense, avait commandé 2 gravimètres à Nederlandsche Seintoestellen Fabriek.
À ce moment-là, oui, en 1935, une autre marine est devenue la 6ème force militaire impliquée dans la recherche gravimétrique sous-marine. Voyez-vous, la Marine nationale française mène 2 expéditions sous-marines dans la moitié occidentale de la mer Méditerranée, une série de plongées réalisées par le Fresnel entre novembre 1932 et janvier 1933 et une autre série de plongées réalisée par l’Espoir entre mai et juillet 1936. Le responsable de ces projets est Pierre Marti, le fort respecté ingénieur hydrographe en chef du Service central hydrographique du Ministère de la Marine. Dans au moins un cas, le gravimètre utilisé avait été prêté plus ou moins directement par Vening Meinesz.
En 1938, la Royal Navy devient la 7ème force militaire impliquée dans la recherche gravimétrique sous-marine, et ceci grâce aux sollicitations du Department of Geophysics and Geodesy de la University of Cambridge, à... Cambridge, Angleterre, et la coopération du Hydrographic Department de l’Admiralty. Vening Meinesz ayant gracieusement accepté de prêter un gravimètre à ses collègues anglais, le sous-marin mouilleur de mines HMS Narwhal prend la mer en septembre 1938 avec le géophysicien anglais Benjamin Chapman Browne.
Seulement 2 mesures sont effectuées avant que la croisière soit annulée toutefois. Voyez-vous, une crise est en train de s’enflammer.
L’Allemagne nationale-socialiste veut s’approprier une partie de la Tchécoslovaquie où la majorité de la population parle allemand, et ce par la force si nécessaire. Tandis que l’Europe retient son souffle, attendant de voir si une guerre éclaterait, les premiers ministres effrayés du Royaume-Uni et de la France, Arthur Neville Chamberlain et Édouard Daladier, respectivement ami et allié de la Tchécoslovaquie, le dernier pays démocratique de cette région de l’Europe, s’agenouillent devant le monstrueux dictateur allemand, Adolf Hitler, lui permettant ainsi d’occuper sans problème la région frontalière des Sudètes / Sudetenland.
Le gouvernement tchécoslovaque, le parti le plus touché par cet ignoble coup de couteau dans le dos, n’a même pas été invité à prendre part à ces « négociations. » Avec des amis et alliés comme ceux-là, qui a besoin d’ennemis?
Quoi qu’il en soit, cette honteuse trahison marque la fin des mesures gravimétriques sous-marines pendant l’entre-deux-guerres.
Et oui, ami(e) lectrice ou lecteur avisé(e), il est fort probable que les expéditions lancées par l’URSS, le Japon, l’Italie, la France et le Royaume-Uni sont directement inspirées du travail réalisé par Vening Meinesz, mais revenons à notre personnage principal.
Le sous-marin Hr.Ms. K XVIII de la Koninklijke Marine lors de son départ pour son voyage vers les Indes néerlandaises orientales, novembre 1934. F.A. Vening Meinesz. Gravity Expeditions at Sea, 1934-1939, vol. III – The expeditions, the computations and the results (Delft : Drukkerij Waltman, 1941), entre les pages 14 et 15.
Vening Meinesz quitte les Pays-Bas à la mi-novembre 1934 à bord du Hr.Ms. K XVIII, alors que ce sous-marin navigue des Pays-Bas vers sa base d’opérations, oui, les Indes orientales néerlandaises. Et oui encore, c’est cette expédition qui empêche la Regia Commissione geodetica Italiana d’emprunter un gravimètre aux Pays-Bas.
L’objectif principal de l’expédition très bien planifiée du HR.MS. K XVIII est, entre autres, d’effectuer des mesures dans divers milieux, sur les plateaux continentaux et les plaines abyssales ainsi que dans les deux hémisphères de notre grosse bille bleue.
Le voyage d’environ 37 000 kilomètres (environ 23 000 miles terrestres / environ 20 000 milles marins) effectué par le Hr.Ms. K XVIII, le plus long réalisé jusqu’alors par un sous-marin, peut être ou non le premier réalisé sous les auspices de la susmentionnée Rijkscommissie voor Graadmeting en Waterpassing, une organisation connue à partir de 1937 sous le nom de Rijkscommissie voor Geodesie.
Et oui, ami(e) lectrice ou lecteur soucieuse / soucieux de la publicité, le formidable parcours du Hr.Ms. K XVIII est largement couvert par la presse des Pays-Bas. Désireuse de se promouvoir, la Koninklijke Marine s’en est assurée.
Voyez-vous, la réputation de ce service est au plus bas à cette époque. Voyez-vous, encore une fois, le chaos financier provoqué par la Grande Dépression conduit à des réductions des salaires à bord des navires opérant dans les Indes orientales néerlandaises et, peut-être, aux Pays-Bas. Début février 1933, des membres indonésiens de l’équipage d’un vieux cuirassé de défense côtière, le Hr.Ms. De Zeven Provinciën qui en ont vraiment ras le bol prennent le contrôle de ce navire sans blesser qui que ce soit et mettent le cap sur la base principale de la Koninklijke Marine dans la région, pour faire entendre leurs doléances.
Les autorités coloniales, complètement choquées, donnent leur bénédiction à une attaque pour mettre fin à ce qu’elles considèrent comme une mutinerie qui porte atteinte au prestige des Homo sapiens blancs mâles dans les Indes orientales néerlandaises.
Contrairement à ce que la direction de la Koninklijke Marine annonce, le pilote d’un hydravion largue apparemment volontairement une bombe sur le navire de guerre, plutôt qu’à une certaine distance devant lui, et ce, au cinquième jour de cette tragique affaire. Près de 25 personnes, en grande majorité indonésiennes, meurent sur place ou des suites de leurs blessures.
Alors que certains membres de la Tweede Kamer der Staten-Generaal à gauche du spectre politique montrent de la sympathie pour les marins, au moins deux des plus bruyants finissant en prison, pendant 3 et 5 mois, pour leur peine, presque tous les membres de la droite du spectre politique à la chambre basse du parlement néerlandais exigent qu’ils soient sévèrement punis.
De nombreux marins indonésiens sont finalement jetés en prison, où ils restent jusqu’à la prise de contrôle des Indes orientales néerlandaises par les forces armées japonaises au printemps… 1942.
Ayant enfreint un des commandements non écrits (le 11ème? le 12ème?) selon lesquels nous, valetaille / subordonné(e)s / subalternes / mignons / larbins / laquais / employé(e)s / assistant(e)s / aides / etc., devons vivre, à savoir « tu n’embarrassera point le boss, » le haut commandement de la Koninklijke Marine souhaite vivement faire connaître le voyage du Hr.Ms. K XVIII, en espérant que personne ne foire, bien sûr, mais revenons à notre histoire.
Pour donner à Vening Meinesz la meilleure occasion possible de mener ses expériences, l’équipage du Hr.Ms. K XVIII doit emprunter un itinéraire quelque peu détourné, qui comprend des escales en Amérique du Sud et Afrique australe.
Le sous-marin arrive aux Indes orientales néerlandaises vers la mi-juillet 1935, soit environ 8 mois après son départ des Pays-Bas, et personne n’avait foiré.
Chemin faisant, le Hr.Ms. K XVIII s’arrête dans de nombreux ports des côtes d’Afrique et Asie, des ports utilisés au cours des siècles passés par une célèbre société commerciale, une des premières sociétés par actions au monde en fait, la Vereenigde Oostindische Compagnie, dont les navires avaient navigué sur les flots bleus aux 17ème et 18ème siècles, entre les Pays-Bas et les Indes orientales néerlandaises.
Et oui, des officiers du Hr.Ms. K XVIII tentent de convaincre des représentants de l’Armada de la República Argentine et de la Marinha do Brasil qu’ils devraient envisager d’acheter des sous-marins construits pour elles aux Pays-Bas. Malmenées par la Grande Dépression, ces deux marines déclinent poliment.
Pouvez-vous vous imaginer, ami(e) lectrice ou lecteur, à bord d’un sous-marin comme le Hr.Ms. K XVIII, partageant un espace exigu avec 34 autres êtres humains pendant environ 8 mois? Pour ma part, je ne le peux pas. Je ne le veux pas.
Au total, Vening Meinesz effectue des mesures sur plus de 255 sites, dont une trentaine à terre.
Ces dernières mesures sont effectuées avec un gravimètre qui n’a pas été conçu par Vening Meinesz. Cet équipement est gracieusement prêté par la principale entité productrice de pétrole des Indes orientales néerlandaises, Bataafsche Petroleum Maatschappij Naamloze Vennootschap, une filiale du groupe Royal Dutch Shell, une entité singulière créée en 1907 par des firmes basées aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, à savoir Naamloze Vennootschap Koninklijke Nederlandsche Maatschappij tot Exploitatie van Petroleumbronnen in Nederlandsch-Indië et Shell Transport and Trading Company Limited.
Et oui, c’était une très loooongue phrase. Où est un tiret cadratin quand vous en avez besoin? (Bonjour, EP!)
Et vous avez une question, ami(e) lectrice lecteur. Pourquoi une entité productrice de pétrole a-t-elle besoin d’un gravimètre? Une bonne question. Voyez-vous, le champ gravitationnel de notre planète est déformé par des variations de densité des couches rocheuses sous nos pieds. Une des variations les plus importantes est celle causée par la proximité de roches et de grandes quantités de sel. Il se trouve que les dômes de sel, comme on les appelle, retiennent souvent du gaz naturel ou du pétrole.
Des scientifiques austro-hongrois effectuent la première étude gravimétrique liée à la prospection pétrolière, en 1915, près d’Egbell, Empire austro-hongrois, l’actuelle Gbely, Slovensko / Slovaquie, au moyen d’un appareil de mesure de la gravité appelé balance de torsion. Comme on peut s’y attendre, vu la guerre qui ravage l’Europe à l’époque, les résultats de cette expérience ne sont connus que de quelques personnes. Avec le retour de la paix, les balances à torsion et gravimètres deviennent progressivement des outils plutôt populaires dans l’industrie pétrolière de quelques pays.
Incidemment, le gravimètre prêté à Vening Meinesz avait été développé à Paris, France, en 1930 par deux physiciens français, Fernand Holweck, professeur d’université, et le jésuite Pierre Lejay.
Revenons à notre sujet principal, d’accord? Mais alors, seulement la semaine prochaine. Désolé.