« Oubliez que les temps sont durs et sombres, prenez courage et souriez avec Sunny Jim » – La saga croustillante de la Force de Force Food Company, la 1ère céréale pour petit déjeuner aux flocons de blé commercialement réussie de la Terre, partie 3
Bonjour, ami(e) lectrice ou lecteur, et bienvenue à la 3ème et dernière partie de cet article sur la Force de Food Company, la première céréale pour petit déjeuner aux flocons de blé commercialement réussie de la planète Terre. Vous vous souviendrez que la 2ème partie de notre article s’était terminée avec l’effondrement de l’empire commercial de l’homme d’affaires américain Edward Ellsworth – et l’existence d’une explication plutôt intéressante du dit effondrement.
Avec votre permission, ou sans elle si besoin est, je vais citer un texte sur l’échec commercial d’Ellsworth, un texte plutôt intéressant publié dans un numéro de juillet 1907 d’un hebdomadaire américain, Commercial Bulletin of Southern California, et ce sans utiliser le format de citation couramment utilisé dans ce blogue / bulletin / machin. Incidemment, votre humble serviteur a trouvé cette citation dans un numéro du début août 1907 du The Merchants Journal, un hebdomadaire publié à Topeka, Kansas.
Début de la citation, traduite ici :
Les détaillants en alimentation des États-Unis, près de 200 000, ont contribué plus que tout autre élément à l’échec de 2 760 000 $. Les sociétés Force et H-O ont compté sans le détaillant. Elles le considéraient comme un élément nécessaire mais indésirable de la distribution; un élément à utiliser mais à ne pas respecter. Et elles ont échoué.
Les directeurs des ventes de la Force ne dépendaient que d’une seule chose pour leur succès : la publicité auprès de la consommatrice ou consommateur. Ils en ont conclu qu’une demande de la Force générée par la publicité représentait tout ce qui était nécessaire. Et pendant un temps, ce fut le cas. Le consommateur a réclamé la Force et le détaillant a été obligé de la stocker. Il a acheté la caisse de trois douzaines entre 4.25 et 4.50 $ et l’a vendue à deux pour vingt-cinq cents, réalisant une marge bénéficiaire qui le ruinerait si elle représentait la marge sur toutes ses ventes d’épicerie. Pendant un certain temps, il était sans défense. Les milliers de dollars investis dans la publicité ont entraîné une demande inévitable, à laquelle il a fallu répondre même à perte. Tant que l’immense publicité a continué, la Force a été un gros vendeur malgré les protestations, même si, à l’apogée de la demande, la société Force a perdu des milliers de ventes parce qu’elle avait le soutien indifférent ou l’inimitié indéniable du détaillant. Le détaillant souffre depuis longtemps et ses protestations contre le bénéfice médiocre de la Force ont été faibles. Cette faible opposition a conforté la conviction de Force Food Company selon laquelle le détaillant n’était pas à prendre en compte et vendrait des produits sans aucun bénéfice du tout si elle faisait suffisamment de publicité. « Investissez chaque dollar dans l’éducation du consommateur et le consommateur dictera sa conduite au détaillant », telle était la conclusion.
Ensuite, les Korn Kinks ont été mises sur le marché; un vendeur à cinq cents qui a payé au détaillant un munificent bénéfice brut d’environ un demi cent par paquet ou une perte nette, le coût de l’exploitation pris en compte étant de 8 à 10 pour cent. Mais les Korn Kinks ne se sont pas vendues. Des milliers de dollars ont été versés en publicité et les marchandises étaient de qualité moyenne pour les aliments du petit déjeuner. La raison? Les détaillants de tout le pays, en associations et en tant qu’individus, se sont élevés contre ce mépris pour leur profit et ont refusé de stocker les Korn Kinks. Ces derniers milliers de dollars dépensés dans un effort infructueux pour forcer le détaillant à vendre des marchandises à perte ont mis cette entreprise céréalière entre les mains d’un syndic. Ou pour être exact, les détaillants des États-Unis ont mis la compagnie entre les mains du syndic.
La leçon à tirer de cela par les autres fabricants est que le détaillant doit être pris en compte. Il est l’élément le plus important dans le commerce.
Il peut dicter la fabrication et la vente des choses aussi puissamment que n’importe quelle autre classe. Il peut acheter ce qu’il veut et où il veut, et s’il n’aime pas une ligne, il peut la mettre de côté et en prendre une autre à son goût. Le fabricant peut penser que le détaillant est une petite patate, mais il découvre rapidement qu’il y en a beaucoup dans une colline. Le détaillant a sa place et il la remplit bien, et malheur au fabricant qui essaie de faire de cette place et de ce remplissement un fardeau. Il y a des milliers de marchands pour un seul fabricant. Leur puissance est grande. En vérité le petit gars n’est pas à mépriser. Il est plutôt à courtiser et caresser un peu. Et c’est bien.
Fin de la citation.
Avant que je ne l’oublie, la faillite de 2 760 000 $ ÉU mentionnée ci-dessus correspond à plus de 126 000 000 $ en devises de 2024, ce qui est un échec assez important.
Vous voudrez peut-être noter que ce qui suit est assez odieux. Et oui, le sujet ici sont les Korn Kinks.
Lancée fin 1906 par H-O Company, Korn Kinks est une céréale pour petit-déjeuner à base de flocons de maïs dont les publicités mettent en scène les mésaventures d’une jeune fille afro-américaine. Kornelia Kinks est représentée comme une jeune fille pieds nus avec des lèvres épaisses et yeux exorbités – une représentation extrêmement insultante d’une jeune membre d’une minorité opprimée.
Et la terrible vérité est que les Afro-Américains étaient, et sont toujours, une minorité opprimée. Au moins 4 400 Afro-Américains ont été lynchés entre 1877 et 1950 aux États-Unis, un pays où « tous les hommes sont créés égaux », comme l’affirment, en traduction, les signataires de The unanimous Declaration of the thirteen united States of America, propriétaires d’esclaves en plusieurs cas, en juillet 1776.
Par rapport à leurs compatriotes blancs comme neige, les Afro-Américain(e)s ont également une probabilité beaucoup plus élevée d’être incarcéré(e)s, ou d’être blessé(e)s ou tué(e)s par des policiers, qui sont presque exclusivement des hommes blancs dans les années 1900.
Je ne rendrai pas hommage à l’odieux produit que sont les Korn Kinks en citant des exemples de publicités publiées dans un grand nombre de journaux et magazines américains, ainsi que dans pas mal de journaux publiés dans au moins 5 provinces canadiennes (Alberta, Colombie-Britannique, Ontario, Québec et Saskatchewan).
Je passerai également sous silence l’ensemble de 6 cartes postales couleur publiées à l’époque.
Les Korn Kinks sont vendues aux États-Unis au moins jusqu’en 1914. On les trouve sur les étagères d’épiceries canadiennes au moins jusqu’en 1909. Et non, les Korn Kinks ne disparaissent pas parce qu’elles sont est un produit raciste.
Incidemment, le géant américain des jeux de société Milton Bradley Company inclut dans sa gamme de produits de 1907 un jeu de société intitulé Kornelia Kinks at Jamestown. Ce jeu met en scène les mésaventures de Kornelia Kinks à la Jamestown Exposition, une grande exposition tenue à Jamestown, Virginie, entre avril et décembre 1907, pour commémorer le tricentenaire de la fondation de la première colonie anglaise permanente sur le continent américain.
Votre humble serviteur doit-il mentionner que Jamestown est aussi la colonie anglaise sur le continent américain où des esclaves africains font leur apparition, en août 1619? Je ne le pensais pas.
Tournons maintenant la page sur les Korn Kinks et ne mentionnons plus jamais cet odieux produit, d’accord?
Il est intéressant de noter que, en mai 1910, H-O publie une brochure richement illustrée, oui, celle qui est visible au début de cette 3ème partie de l’article actuel, Through Foreign Lands avec « Sunny Jim » du célèbre illustrateur / dessinateur éditorial / caricaturiste américain William Wallace Denslow.
Oui, encore une fois, ce Denslow-là, celui qui avait illustré un roman pour enfants de 1900 écrit par l’auteur américain Lyman Frank Baum. Vous avez peut-être entendu parler de lui. Le Magicien d’Oz vous dit-il quelque chose? Oui, oui, le livre qui a inspiré le film musical fantastique américain de 1939 Le Magicien d’Oz, mettant en vedette Judy Garland, née Frances Ethel Gumm, une actrice / chanteuse / danseuse américaine mondialement connue mentionnée au tout début de cet article. Le monde est petit, n’est-ce pas?
Ceci étant dit (tapé?), vous êtes-vous déjà demandé(e) si, comme le célèbre capitaine Jack Sparrow, un gentilhomme (?) mentionné dans plusieurs numéros de notre blogue / bulletin / machin depuis septembre 2018, votre humble serviteur écrit un plan à l’avance, ou improvise au fur et à mesure? Un gentilhomme ne dit jamais rien, dit-on, et le non gentilhomme que je suis fera de même aujourd’hui, mais je digresse.
Through Foreign Lands avec « Sunny Jim » montre, en traduction, « SUNNY JIM dans de nombreuses situations ridicules parmi les cannibales, les Chinois, les Russes, les pirates et autres. » Et oui, plusieurs, sinon la plupart des étrangers mentionnés dans cette brochure sont traités de manière très condescendante. Curieusement ou pas, peut-être, les Japonais sont un des rares peuples étrangers traitées avec un certain respect. Les forces armées japonaises avaient après tout sérieusement tabassé leurs homologues russes pendant la guerre russo-japonaise de 1904-05.
Les familles qui n’ont pas 4 certificats de prime doivent envoyer 10 cents en timbres américains ou canadiens pour payer la brochure, des sommes qui correspondent à environ 4.50 $ en devises de 2024.
Incidemment, les aspect et ressenti de notre vieil ami Sunny Jim dans la brochure peuvent, je répète peuvent, avoir été inspirées par des publicités que Denslow avait vues lors d’une visite en Angleterre en 1909. Et oui, la brochure qu’il illustre est proposée en prime aux États-Unis et en Angleterre, et peut-être au Canada.
Incidemment, encore une fois, il a été suggéré qu’une grotte marine située à La Jolla, Californie, devient connue sous le nom de Sunny Jim Cave au plus tard en 1908 lorsqu’un Baum en visite est frappé par la ressemblance entre l’entrée de la dite grotte marine et une vue de profil de la tête de Sunny Jim.
Pour citer, hors contexte et en traduction, un Américain de 6 ans, espiègle et aventureux, nommé Calvin : « Je ne suis pas stupide. Je maîtrise simplement des informations totalement inutiles. » Mais revenons à notre histoire.
Incidemment, votre serviteur est tombé sur des publicités plutôt intéressantes pour Force qui sont publiées dans des journaux canadiens après l’effondrement de l’empire commercial d’Ellsworth.
Une publicité pour la céréale pour petit déjeuner Force publiée par H-O Company de Hamilton, Ontario. Anon., « H-O Company. » Manitoba Free Press, 16 juillet 1910, 44.
Une autre publicité pour la céréale pour petit déjeuner Force publiée par H-O Company de Hamilton, Ontario. Anon., « H-O Company. » L’Action populaire, 20 juillet 1916, 2.
Avez-vous découvert pourquoi je pense que ces publicités sont intéressantes, ami(e) lectrice ou lecteur observatrice / observateur? Non? Soupir… Vous n’avez pas remarqué la présence de Sunny Jim dans sa forme originale dans les deux publicités?
Maintenant, ami(e) lectrice ou lecteur pas trop observatrice / observateur, comparez ces publicités avec celle-ci...
Une publicité pour la céréale pour petit déjeuner Force publiée par H-O Company de Buffalo, New York. Anon., « H-O Company. » Buffalo Evening News, 8 mai 1916, 12.
Où est Sunny Jim, demandez-vous sans être incité(e) à le faire? Bonne question. À ce qu’il semble, notre ami disparaît des publicités pour la céréale pour petit-déjeuner Force aux États-Unis, mais pas au Canada, dans les années qui suivent l’effondrement de l’empire commercial d’Ellsworth.
Au fil des ans, Sunny Jim acquiert une certaine notoriété, aujourd’hui peut-être oubliée, dans l’histoire de la publicité en tant qu’exemple d’une campagne qui, bien qu’elle ait acquis une grande renommée, n’a finalement pas réussi à vendre le produit.
En mars 1908 par exemple, Gaston LeRoy, directeur de la publicité de Western Clock Manufacturing Company, une firme américaine sur le point de devenir célèbre pour ses réveils Big Ben, écrit dans une note à la direction de la dite firme que, et je cite, en traduction :
Personnellement, je ne recommanderais pas de publicité soi-disant « astucieuse » ou de texte humoristique comme nous avons dû le faire de temps en temps avec le commerce ou par exemple comme la campagne Sunny Jim de Force Breakfast Food Co. mais une campagne purement éducative, décrivant le BIG-BEN, soulignant ses différents avantages par rapport aux autres et mettant l’accent sur le prix pour le consommateur qui, jusqu’à nouvel ordre, je supposerai être de 1.50 $.
Croiriez-vous que ces 1.50 $ ÉU correspondent à environ 70 $ en devises de 2024? Si vous me demandez mon avis, c’est beaucoup de pognon pour un réveil. Trop de pognon en fait, mais revenons à la notoriété de Sunny Jim.
Dans son livre influent de 1914 Newspaper Advertising, un directeur de publicité / écrivain américain tout aussi influent, George Henry Edward Hawkins, affirme, en traduction, que
‘Sunny Jim-Jim Dumps’ est presque un souvenir. Il était un personnage national tant qu’il existait, mais le problème était qu’il n’y avait pas assez de lien direct entre ‘Sunny Jim, et le produit. Dans ce cas, on ne savait pas s’il fallait demander ‘Sunny Jim’ ou de la Force.
À un moment donné, Earnest Elmo Calkins, le célèbre cadre publicitaire américain mentionné dans la 2ème partie de cet article, ajoute son grain de sel à la discussion, des mots traduits ici : « La publicité a absolument vendu Sunny Jim au public, mais elle n’a pas vendu la Force. L’humour, voyez-vous, est un très bon serviteur mais un mauvais maître. »
Compte tenu de ce que nous avons vu plus tôt dans cet article, à savoir l’échec du remaniement des efforts publicitaires de Force Food et le soutien indifférent ou l’inimitié indéniable des détaillants, la représentation de notre ami Sunny Jim comme un échec est un tantinet injuste, ne diriez-vous pas?
Tous ce babillage eupeptique sur l’industrie de la publicité américaine ont fait penser votre humble serviteur à la façon dont la Force se débrouille dans son foyer en terre autochtone, en anglais home on native land, après l’effondrement de l’empire commercial d’Ellsworth, si votre humble serviteur peut citer, hors contexte et en traduction, quelques mots de la version de l’hymne national de langue anglaise Oh Canada chantée en février 2023 par une compositrice / chanteuse / auteure / actrice canadienne, Jully Black, née Jullyann Inderia Gordon Black, mentionnée dans des numéros de mai, juin et septembre 2023 de notre fulgurant et stupéfiant blogue / bulletin / machin.
En décembre 1924, une firme américaine, Hecker-Jones-Jewell Milling Company, filiale d’une autre firme américaine, Standard Milling Company, acquiert ce qui est alors H-O Cereal Company Incorporated, le producteur américain de la Force, je pense, ainsi que sa filiale canadienne, H-O Cereal Company of Canada Limited d’Ayr, Ontario.
Hecker H-O Company Incorporated et Hecker H-O Company of Canada Limited voient le jour début juillet 1925.
En février 1929, Gold Dust Corporation, un important producteur / distributeur américain de nombreux produits, prend le contrôle de Standard Milling. Gold Dust change de nom et d’organisation en novembre 1936 et devient Hecker Products Corporation. Fin décembre 1942, Hecker Products fusionne avec une firme américaine, The Best Foods Incorporated, pour créer, eh bien, The Best Foods Incorporated 2.0 et… Oui, ami(e) lectrice ou lecteur très littéral(e), le 2.0 n’est pas dans le nom de la firme en 1942. Je l’ai ajouté pour faire passer un message.
Ce qui est alors H-O Cereal Company, je crois, fusionne officiellement avec The Best Foods en avril 1944 et perd apparemment son identité. À son tour, Hecker H-O Company of Canada devient Best Foods (Canadian) Limited en juillet 1945, mais nous avons pris de l’avance. Enfourchons notre machine à remonter le temps et retournons aux années 1930.
En 1932, Hecker H-O ou sa firme de publicité américaine, Erwin, Wasey & Company, une des premières agences de publicité américaines à développer un réseau de bureaux à l’étranger, commence à rechercher des moyens d’augmenter les ventes des H-O Oats et de la Force.
Pour ce faire, une d’entre elles contacte un acteur / écrivain / réalisateur de radio anglais très polyvalent et énergique, qui a de nombreuses émissions à son actif en sol américain, Herbert C. Rice, et lui propose de parrainer une émission pour enfants qu’il créerait.
Étant donné la similitude entre le nom d’un ranch et les lettres H-O, Rice imagine une histoire sur un orphelin, Bobby Benson, qui a hérité d’un ranch au Texas, le H-Bar-O Ranch pour être plus précis.
Les bonnes gens de Hecker H-O adorent l’idée, tout comme les bonnes gens de Columbia Broadcasting System Incorporated (CBS), un réseau de radiodiffusion américain mentionné à quelques reprises dans notre éthéré blogue / bulletin / machin, et ce depuis février 2020. Croiriez-vous que CBS donne en fait à H-Bar-O-Rangers un créneau dans sa grille, à partir de fin septembre 1932?
Leurs instincts s’avèrent justes. H-Bar-O-Rangers connaît un succès phénoménal. En quelques mois, Hecker H-O a besoin d’une douzaine de femmes pour répondre au courrier des fans et traiter les lettres contenant des morceaux de boîtes de H-O Oats qui sont échangées contre une variété de primes Bobby Benson annoncées dans l’émission : bols de céréales, cartes, jeux de cartes, livrets de décalques, règles de codage, verres à boire, etc.
Les garçons sont encouragés à devenir membres du H-Bar-O Rangers Club en envoyant un morceau de boîte de H-O Oats. En échange, ils reçoivent, entre autres choses, un certificat d’adhésion, un insigne métallique et une photo du jeune acteur qui joue Benson, Richard Wanamaker (1932-33) ou William « Billy » Halop (1933-36). Jusqu’à 90 000 garçons (et filles?) deviennent membres du club en l’espace de quelques mois, en 1932-33.
Il convient de noter que le tuteur adulte de Benson, un Anglais riche, mystérieux et actif connu sous le nom de, vous l’aurez deviné, Sunny Jim, est progressivement écarté à partir de 1933.
Au moment où The H-Bar-O-Rangers quitte l’antenne, en décembre 1936, plus de 700 épisodes de 15 minutes ont été diffusés. Malheureusement, aucun enregistrement n’est connu.
Il est intéressant de noter qu’une autre version de The H-Bar-O-Rangers prend l’antenne en Californie en 1932. Son histoire semble être un peu plus obscure que celle de son homologue de l’est des États-Unis. Aucun enregistrement de cette version n’est connu.
Ceci étant dit (tapé?), des séries complètes d’une bande dessinée en couleur, The Adventures of Bobby Benson and Sunny Jim, imprimées au dos de boîtes de Force, ont survécu. Ces 16 bandes peuvent poliment être décrites comme très condescendantes, voire carrément racistes, dans leurs représentations des Autochtones Américain(e)s ainsi que des Latino-Américain(e)s. Et oui, on peut y voir Sunny Jim de temps à autres.
Benson et ses amis ne disparaissent cependant pas encore définitivement. À partir de juin 1949, une seconde émission de radio prend l’antenne. La première de deux séries télévisées suit en avril 1950. Vu l’absence de tout lien avec Sunny Jim, je m’abstiendrai de décrire en détail cette renaissance. Il n’y a pas de quoi.
Au début de 1933, le célèbre vice-président d’Erwin, Wasey & Company, Owen Burtch Winters, étudie la possibilité de réintroduire Sunny Jim dans sa publicité, dans l’espoir de stimuler les ventes de la Force. Et oui, Erwin, Wasey & Company est peut-être inspirée par le succès continu de la Force au Royaume-Uni, un succès mentionné plus loin.
Incapable de trouver l’initiatrice du concept, connue alors sous le nom de Minnie Maud Ayers, Erwin, Wasey & Company pense que ce serait une bonne idée de publier, dans quelques, voire plusieurs journaux, une petite ritournelle comme les ritournelles de Sunny Jim composées une trentaine d’années auparavant. Une ritournelle demandant à Ayers de contacter Erwin, Wasey & Company.
Quelques jours avant la publication de la dite ritournelle, un nouvel annuaire téléphonique révèle les coordonnées actuelles d’Ayers. Malgré tout, l’agence de publicité trouve l’idée de publier la ritournelle si mignonne qu’elle décide de le faire quand même, et ce en février 1933.
Ayers voit la ritournelle et contacte Erwin, Wasey & Company. Croiriez-vous que quelqu’un de cette firme l’aurait aidée à concocter une ritournelle tout aussi mignonne pour répondre à la création de la firme? Je ne plaisante pas.
Bien qu’Ayers ait accepté de fournir certains textes pour les nouvelles publicités, Erwin, Wasey & Company ou Hecker H-O choisissent apparemment de ne pas les utiliser. Même si de nouvelles publicités sont produites, les ventes n’augmentent pas beaucoup. Et voici une des publicités en question…
Une publicité atypique pour la céréale pour petit-déjeuner Force publiées par Hecker H-O Company Incorporated. Anon., « Hecker H-O Company Incorporated. » Boston Evening Globe, 7 juillet 1933, 11.
La faible augmentation des ventes fait en sorte que Sunny Jim retourne assez vite dans le placard du néant.
Et maintenant, pour quelque chose de très triste. Les trois enfants, une fille et deux fils, auxquels Ayers donne naissance dans les années 1900 et 1910 sont atteints de poliomyélite dans leur jeunesse. Son époux ne peut pas supporter ce fait et prend la poudre d’escampette. Oui, vous avez bien lu. Ce ******* abandonne sa famille.
C’est probablement dans le cadre de leur campagne publicitaire qu’Erwin, Wasey & Company ou Hecker H-O ont l’idée de distribuer un jeton en laiton d’environ 32 millimètres (environ 1 ¼ pouce) sur lequel est représenté le profil de Sunny Jim et des mots, traduits ici, qui auraient pu trouver un écho auprès de personnes qui tentent de survivre au milieu de la Grande Dépression : « Ramenez la prospérité avec Sunny Jim / Oubliez que les temps sont durs et sombres, prenez courage et souriez avec Sunny Jim. »
Vous vous souviendrez bien sûr que ces mots sont inclus dans le titre de cet article et… Vous ne vous en souvenez pas, n’est-ce pas? Soupir… Pour citer le principal pas bon du film de science-fiction français, oui, oui, français, de 1997 Le Cinquième Élément, le marchand de mort Jean-Baptiste Emanuel Zorg, fondateur et propriétaire de Zorg Industries Incorporated, je suis très désappointé!
Remarquez, je dois avouer un faible pour une pensée plus réfléchie de Zorg : « L’honneur a fait des millions de morts mais n’a jamais sauvé qui que ce soit. » Enfin, passons à autre chose.
À un moment donné dans les années 1930, peut-être parallèlement à la disparition progressive de Sunny Jim de H-Bar-O-Rangers, l’apparence même de ce personnage sur les boîtes de la Force subit un certain changement.
Parlant (tapant?) de la Force, comment ces céréales pour petit-déjeuner se débrouillent-elles à l’époque, demandez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur? Une bonne question.
Entre 1907 et 1983, Force Food et les firmes qui lui succèdent aux États-Unis connaissent près de 10 changements de propriétaire. Dans presque tous les cas, les ventes de Force représentent un pourcentage de plus en plus faible des ventes totales des firmes qui supervisent sa production. Il semble qu’elle n’ait pas été beaucoup annoncée dans les journaux et magazines américains à partir des années 1930.
De fait, votre humble serviteur n’a aucune idée de la date à laquelle la Force est finalement arrachée des étagères des épiceries américaines. Cette année-là peut être 1983 pour autant que je sache. La dernière mention que votre humble serviteur a vue dans la presse date de 1949, toutefois, et…
Vous avez une question, n’est-ce pas, ami(e) lectrice ou lecteur? Pourquoi ai-je mentionné l’année 1983, me demandez-vous? Lisez la suite et découvrez-le.
Le dernier propriétaire de la marque Force, le fournisseur américain d’ingrédients pour aliments et boissons CPC International Incorporated, clôt ses opérations de mouture en 1983, mettant ainsi fin à la saga de la Force aux États-Unis. Pour citer hors contexte le maléfique Asgardien Loki Laufeysson dans le film de super-héros américain de 2013 Thor : Un monde obscur / Thor : Le Monde des ténèbres, tadaa…
Cette date tardive soulève la question de savoir quand la Force est arrachée des étagères des épiceries canadiennes. Et non, je n’ai pas de réponse à cette question. Ceci étant dit (tapé?), on peut encore la trouver dans de tels magasins en 1940, et probablement plus tard.
Votre humble serviteur a cependant quelques informations sur la saga de la Force au Royaume-Uni. Voyez-vous, la Force reste très populaire dans ce pays bien après sa date de péremption américaine. Laissez-moi vous mecspliquer pourquoi il en est ainsi.
Pour une raison ou une autre, la filiale britannique de Force Food, Force Food Company, je pense, décide apparemment en 1903-04 de ne pas abandonner le Sunny Jim original et ses ritournelles fantaisistes. Ceci étant dit (tapé?), votre humble serviteur n’a pas pu trouver beaucoup de publicités dans les journaux qui le mettent en vedette, et pas beaucoup de publicités pour la Force non plus. Sunny Jim peut cependant être affiché sur des panneaux d’affichage et tramways.
Quoi qu’il en soit, en 1910, un Anglais du nom d’Alfred Channon Fincken quitte son poste chez Force Food, oui, vraisemblablement la britannique, et crée A.C. Fincken & Company pour distribuer la Force dans tout le Royaume-Uni. La céréale pour petit déjeuner en question est produite à Hamilton, Ontario, et ce pendant un bon bout de temps. Et voici la preuve…
Une publicité typique pour la céréale pour petit déjeuner Force publiée par A.C. Fincken & Company. Anon., « A.C. Fincken & Company. » Sunday Pictorial, 23 mai 1926, 4.
Euh, oui, maintenant que votre humble serviteur voit l’image, les mots Made in Canada, en français fabriqué au Canada, sur la boîte ne sont pas vraiment lisibles. Désolé pour ça.
Pour une raison ou une autre, cependant, A.C. Fincken & Company décide d’abandonner Sunny Jim et, à ce qu’il semble, toute publicité pour la Force vers 1911, ou est-ce 1914 peut-être, en raison du début de la Première Guerre mondiale.
Quoi qu’il en soit, encore, notre ami est apparemment banni des publicités des journaux jusqu’à l’automne 1921 et le début d’une campagne publicitaire de grande envergure qui cible les mères et enfants, une campagne supervisée par la nouvelle firme de publicité d’A.C. Fincken & Company, Smith’s Advertising Agency Limited. Et voici quelques exemples de publicités de 1921 publiées par A.C. Fincken & Company.
Une publicité typique pour la céréale pour petit-déjeuner Force publiée par A.C. Fincken & Company qui n’inclut pas Sunny Jim. Anon., « A.C. Fincken & Company. » The Daily Mail Incorporating Hull Packet and East Yorkshire and Lincolnshire Courier, 23 juin 1921, 5.
Une publicité typique pour la céréale pour petit-déjeuner Force publiée par A.C. Fincken & Company qui inclut Sunny Jim. Anon., « A.C. Fincken & Company. » Nottingham Evening Post, 24 novembre 1921, 5.
Une boîte de Force peut être achetée pour 11 ½ pence à l’époque, une somme qui correspond à environ 3.45 $ en devises de 2024.
Et oui, des poupées Sunny Jim similaires à celles vendues aux États-Unis font leur apparition au Royaume-Uni vers 1922. Elles deviennent rapidement très populaires. Quelle est la popularité de ces poupées, demandez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur? Eh bien, pas moins d’environ 250 000 sont vendues au plus tard en 1927, du moins c’est ce qu’on prétend. Au plus tard 1933, pas moins d’environ 1 000 000 de poupées ont été vendues, du moins c’est ce qu’on prétend.
À un moment donné, Sunny Jim devient ce que l’on pourrait décrire comme un vieil oncle vif et légèrement excentrique portant un monocle et un solide bâton de marche.
Les ritournelles sont progressivement remplacées par une simple comptine. Nous avons déjà rencontré celle, traduite ici, qui avait séduit le public: « Bien au-dessus de la clôture saute ‘SUNNY JIM’ - La ‘FORCE’ est la puissance qui l’a soulevé, » en anglais « high o’er the fence leaps ‘SUNNY JIM’ – ‘FORCE’ is the power that lifted him. » Vous vous en souvenez, n’est-ce pas, ami(e) lectrice ou lecteur? Oui, cette ritournelle se trouvait dans la 2ème partie de cet article, je crois.
Et oui, ami(e) lectrice ou lecteur légèrement bébête, le terme anglais high a effectivement pris une toute nouvelle signification au cours des dernières décennies. Euh, passons à autre chose.
En 1930, l’année où la Force atteint son apogée au Royaume-Uni et où la Grande Dépression commence vraiment à marteler ce pays, les familles britanniques achètent près de 12 500 000 boîtes de cette céréale pour petit-déjeuner.
Une publicité typique pour la céréale pour petit-déjeuner Force publiée par A.C. Fincken & Company, qui inclut Sunny Jim ainsi qu’un coupon qu’une personne peut utiliser pour acheter une cuillère à fruits. Anon., « A.C. Fincken & Company. » The Birmingham Mail, 17 août 1939, 11.
Les avions jouets, ballons, bas, casse-têtes en bois, disques de bouteilles de lait, cuillères à fruits, disques de gramophone, épingles en métal, masques faciaux, partitions, yoyos, etc., portant le nom de Sunny Jim contribuent aux ventes, sans compter les publicités diffusées à partir de 1933 environ par Radio Luxembourg, une station de radio privée située à Lëtzebuerg / Luxembourg / Luxemburg, dans le grand-duché éponyme.
L’introduction des babioles liées à Sunny Jim peut, je répète peut, être liée à la première campagne publicitaire vraiment agressive lancée au Royaume-Uni par Kellogg Company, la célèbre firme américaine qui produit les tout aussi célèbres Kellogg’s Toasted Corn Flakes. De fait, la céréale pour petit-déjeuner en question est produite par Kellogg Company of Canada Limited de London, Ontario.
A.C. Fincken & Company redessine apparemment la boîte dans laquelle la Force est vendue à cette époque, et sans doute pour la même raison qu’elle avait introduit les susmentionnées babioles, à savoir pour contrer sa rivale de plus en plus populaire.
Et oui, vous avez tout à fait raison, ami(e) lectrice ou lecteur, l’utilisation d’une usine canadienne pour produire des céréales pour petit-déjeuner destinées au marché britannique est liée aux nouveaux tarifs imposés sur les articles produits hors de l’empire / Commonwealth britannique à la suite de la British Empire Economic Conference qui se tient en juillet et août 1932, à Ottawa, Ontario.
Et oui encore, ami(e) lectrice ou lecteur à l’aise avec les médias, d’innombrables familles britanniques préfèrent les programmes radiophoniques divertissants de Radio Luxembourg aux programmes très comme il faut, oserais-je dire ceux à la limite de l’indigeste, proposés par la British Broadcasting Corporation (BBC), un radiodiffuseur d’état ayant un monopole de diffusion radiophonique mentionné à moultes reprises dans notre très digeste blogue / bulletin / machin, et ce depuis mai 2018.
Comme vous auriez pu vous y attendre, de nombreuses firmes britanniques payent un bon pognon à Radio Luxembourg pour faire la publicité de leurs produits. Croiriez-vous qu’aucune publicité de ce genre ne peut être diffusée par la BBC à l’époque?
Et oui, encore une fois, certains des programmes radiophoniques divertissants diffusés par Radio Luxembourg sont enregistrés au Royaume-Uni avant d’être expédiés au Luxembourg.
Comme vous auriez pu vous y attendre, encore une fois, les grosses légumes de la BBC ne sont pas amusés. Ils sont béatement ignorés par toutes les parties concernées, mais revenons à notre histoire.
Le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, en septembre 1939, met apparemment un terme aux livraisons de la Force, ce qui est compréhensible compte tenu des circonstances. De fait, il semble qu’un seul envoi de Force ait traversé l’océan Atlantique, en 1942.
Et oui, Radio Luxembourg cesse de diffuser ses programmes publicitaires et divertissants en mai 1940, lorsque le Luxembourg est occupé par l’Allemagne nationale-socialiste. Reprise par le radiodiffuseur d’état allemand, Großdeutscher Rundfunk, elle balance de la propagande en direction du Royaume-Uni jusqu’en 1944.
Malheureusement, Minnie Maud Ayers, née Hanff, la personne qui a créé Sunny Jim en 1902, avait alors quitté notre monde ravagé par la guerre. Elle décède en décembre 1942, peu après son 63ème anniversaire. Dorothy Goddard Gwynne, née Ficken, l’artiste qui avait créé les aspect et ressenti originaux de Sunny Jim, décède en février 1978, peu avant son 92ème anniversaire.
La Force revient, euh, en force, désolé, désolé, au Royaume-Uni seulement en 1954, voire 1955. De fait, cette année-là semble avoir vu la production de notre céréale pour petit-déjeuner commencer en Angleterre. Cette production est rendue possible par des négociations entre A.C. Fincken & Company et la susmentionnée The Best Foods. Cette production continu encore et encore, et encore…
Au fil des décennies, ces ventes sont favorisées par des versions actualisées de la poupée Sunny Jim, sans parler d’articles comme des torchons, tee-shirts, grosses tasses, tabliers, sous-verres, sacs de courses, plateaux à thé, horloges murales à piles, bocaux de rangement, etc.
Croiriez-vous que des poupées Sunny Jim restent disponibles à la vente jusqu’à la fin des années 1990? Je ne plaisante pas. Vous auriez pu en acheter une en 1991 contre 2 jetons de paquets de Force et 1.95 £, une somme qui correspond à environ 7.60 $ en devises de 2024. Et oui, diverses petites modifications sont apportées au fil des ans pour maintenir les poupées au goût du jour.
Des produits associés à la Force sont fabriqués jusqu’aux années 2000. Il suffit de penser aux ensembles de 3 oursons en peluche miniatures et 3 camions de livraison moulés sous pression miniatures.
En juillet 1990, deux géants multinationaux de l’alimentation, General Mills Incorporated des États-Unis et Nestlé Société anonyme de Suisse, acquièrent Ranks Hovis McDougal Public Limited Company, la société britannique qui contrôle A.C. Fincken & Company depuis 1989 environ. General Mills et Nestlé font cette acquisition par le biais d’une coentreprise appelée Cereal Partners Worldwide Société anonyme.
À ce moment-là, la Force avait largement dépassé son apogée. De fait, on la trouve dans un nombre de plus en plus réduit d’endroits. La direction de Cereal Partners Worldwide tire finalement la plogue en janvier 2013. À ce moment-là, Sunny Jim était probablement un des plus anciens personnages commerciaux de la planète Terre.
Je m’excuse pour la longueur excessive de la 3ème partie de cet article. Certaines informations ont été découvertes tard dans le jeu. Elles ne pouvaient pas être ignorées.
Et c’est tout pour aujourd’hui. Le petit-déjeuner, ça vous tente? C’est moi qui paie. Et oui, ami(e) lectrice ou lecteur d’estrade, il aurait peut-être été judicieux de diviser cet article en 4 parties. Et rien que pour ça, c’est VOUS qui payez.
Je vais même ajouter à la longueur excessive de la troisième partie de cet article en affirmant que la dame derrière Sunny Jim, Minnie Maud Hanff, est la tante d’une écrivaine et personnalité américaine réputée. Helene Hanff était, et est encore, surtout connue comme l’auteure d’un livre paru en 1970, le recueil épistolaire 84, Charing Cross Road, qui constitue la base d’une pièce de théâtre, d’une pièce de télévision et d’un film populaires. Ce dernier a sa première en février 1987. Ses principales vedettes sont l’actrice / réalisatrice américaine Anne Bancroft, née Anna Maria Louisa Italiano, et l’acteur gallois Philip Anthony Hopkins.