Les Canadiennes et Canadiens adorent les céréales chaudes pour déjeuner Red River ou n’en ont jamais entendu parler : La saga croustillante d’un produit alimentaire quintessentiellement canadien
Vous préparez-vous souvent un bol de céréales chaudes pour le petit-déjeuner, ami(e) mangeuse ou mangeur, euh, lectrice ou lecteur? Votre humble serviteur doit admettre que je n’ai jamais développé de goût pour ce produit alimentaire. Malgré tout, je vais vous divertir aujourd’hui, j’espère, avec l’histoire d’une iconique, du moins c’est ce qu’on me dit, céréale chaude pour déjeuner canadienne.
La saga des céréales Red River commence en avril 1887, dans le village de Teeswater, Ontario, avec la naissance de Gertrude Edna « Gert / Gertie » Skilling.
Les premières années de cet enfant brillante sont tout à fait typiques.
Cependant, après avoir terminé ses études secondaires, Skilling décide de fréquenter une école normale et de devenir enseignante. Elle obtient son diplôme vers 1906. Skilling enseigne pendant environ 5 ans, dans une école primaire et une école secondaire situées autour de Teeswater. Elle déménage ensuite à Calgary, Alberta, une décision un tant soit peu inhabituelle pour une jeune femme de son époque, et enseigne encore quelques années.
En juin 1915, Skilling épouse Harvey Kavaner, un marchand de céréales et homme d’affaires à l’avenir prometteur qui se trouve être le directeur à Calgary d’une firme de silos à grains, Imperial Elevator and Lumber Company de Winnipeg, Manitoba.
La famille déménagea dans cette ville en mars 1918, lorsque Kavaner se voit offrir un nouveau poste, celui de directeur d’une autre firme de silos à grains, Dominion Elevator Company de Winnipeg.
En 1924, après de nombreuses expérimentations, Mme Kavaner imagine une recette de céréales chaudes pour le petit-déjeuner. Elle le fait pour fournir à ses enfants des céréales adaptées au petit-déjeuner. Son époux est impressionné par le mélange de blé (85 %), de seigle (10 %) et de lin (5 %) moulu à la main, et il n’est pas le seul.
Les céréales Red River, comme la nouvelle céréale chaude pour le petit-déjeuner devient connue, sont en vente au plus tard en octobre 1926 dans la section épicerie du magasin de Winnipeg d’une firme mentionnée dans un numéro de décembre 2023 de notre étonnant blogue / bulletin / machin, The Governor and Company of Adventurers of England Trading into Hudson’s Bay.
Avant que j’oublie, les céréales Red River doivent bien sûr son nom à la rivière américano-canadienne qui traverse Winnipeg, la rivière Rouge, en anglais Red River.
La première annonce publiée par Red River Grain Company Limited de Saint-Boniface, Manitoba, est publiée dans un quotidien de Winnipeg, The Manitoba Free Press, en novembre 1926, je crois. Et voici une copie de la dite publicité que votre humble serviteur a trouvé dans un autre journal…
La première publicité dans un journal pour les céréales Red River publiée par Red River Grain Company Limited de Saint-Boniface, Manitoba. Anon., « Red River Grain Company Limited. » The Winnipeg Evening Tribune, 8 décembre 1926, 7.
Fait intéressant, du moins pour votre humble serviteur, Red River Grain n’est pas créée pour produire des céréales Red River. Nenni. Voyez-vous, cette firme voit le jour en février 1923. Elle possède un seul silo à grains à Saint-Boniface. Kavaner, oui, l’époux, est le président et / ou directeur fondateur de la firme.
L’équipement qui produit les céréales Red River est quant à lui mis en place au plus tard au début de 1927 – et peut-être quelques mois plus tôt. À l’origine, 4 personnes au total sont impliquées dans la production de cette céréale chaude pour petit-déjeuner.
Les céréales Red River comptent parmi les nouveaux produits présentés lors de l’édition 1926 de la Canadian National Exhibition, tenue à Toronto, Ontario, en août et septembre. Un ou deux frères et / ou sœurs de la créatrice du dit produit distribuent des échantillons gratuits dans des petits gobelets en papier aux personnes et familles qui visitent le bâtiment alimentaire.
La popularité des céréales pour petit-déjeuner manitobaines ne cesse de croître à mesure que les semaines se transforment en mois. On peut les trouver en Saskatchewan au plus tard en février 1927. Les céréales Red River arrivent en Alberta et Ontario au plus tard en avril. On peut les trouver au Québec au plus tard en juillet. Les familles britanno-colombiennes, néo-brunswickoises et yukonnaises peuvent en profiter au plus tard en février 1928, mai 1928 et avril 1929. Celles de l’Île-du-Prince-Édouard peuvent, je répète peuvent, avoir à attendre jusqu’en mai 1933.
Votre humble serviteur doit avouer ne pas avoir trouvé de date concernant la Nouvelle-Écosse et les Territoires du Nord-Ouest.
Cela étant dit (tapé?), croiriez-vous que les céréales Red River peuvent se retrouver sur les étagères de magasins anglais au plus tard en janvier 1930?
Compte tenu de ce succès, vous ne serez pas surpris(e) d’entendre (lire?), ami(e) lectrice ou lecteur, que Kavaner, oui, l’époux, demande un brevet canadien en mars 1927. Ce brevet est délivré, à lui et non à son épouse, en août 1929. Dans ce brevet, Kavaner est décrit comme le concepteur de Maple Leaf Milling Company Limited de Winnipeg.
Qu’est-ce que Maple Leaf Milling, demandez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur perplexe, et quel son rôle dans notre histoire? Deux bonnes questions.
L’histoire de Maple Leaf Milling commence en novembre 1904 avec la fondation de Maple Leaf Flour Mills Company Limited d’Ottawa, Ontario, par un petit groupe d’hommes d’affaires du Manitoba, de l’Ontario et du Québec.
Ces personnes concluent toutefois assez vite que déménager le siège social de la firme à Winnipeg, une ville prospère beaucoup plus proche des champs de blé du Canada qu’Ottawa, est tout à fait logique. De fait, le changement a lieu en décembre 1906.
Et oui, Maple Leaf Flour Mills subit une réorganisation en avril 1910 et devient Maple Leaf Milling.
Pour une raison ou une autre, Maple Leaf Milling juge préférable de fusionner avec une firme de silos à grains, Toronto Elevators Limited de… Toronto, en février 1961, pour former Maple Leaf Mills Limited de Montréal, Québec, une multinationale canadienne de production de viandes et aliments emballés connue en 2024 sous le nom de Maple Leaf Foods Incorporated de Mississauga, Ontario, mais revenons aux céréales Red River avant que de la fumée ne commence à sortir de vos oreilles exaspérées.
Maple Leaf Milling reprend la production et distribution des céréales Red River à l’automne 1928. La production réelle de ces céréales pour petit déjeuner est transférée de Saint-Boniface à Medicine Hat, Alberta, vers novembre. La production de la nouvelle usine de Maple Leaf Milling serait vendue de la Colombie-Britannique jusqu’à Fort William, dans l’ouest de l’Ontario.
Votre humble serviteur présume que Red River Grain ne disposait tout simplement pas des ressources nécessaires pour produire les quantités de céréales Red River requises par la demande croissante.
Qu’en est-il des ventes dans le reste de l’Ontario et au Québec, demandez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur inquiète / inquiet? Eh bien, à première vue, ces ventes se poursuivent plus ou moins au même rythme, ce qui signifie que le mandat des installations de Maple Leaf Milling est rapidement modifié, ou qu’une autre installation est mise en service.
Parlant (tapant?) de ventes, en novembre 1928, Maple Leaf Milling s’associe à la station de radio CKLC d’Edmonton, Alberta, pour lancer une émission musicale d’une heure intitulée Red River Cereal Hour. Votre humble serviteur ne sait malheureusement pas combien de temps cette émission reste à l’antenne, quelques semaines seulement peut-être.
Une publicité pour les céréales Red River publiée par Maple Leaf Milling Company Limited de Winnipeg, Manitoba, qui met en vedette Donald James Baldock, le grand champion du concours pour bébés organisé lors de l’édition 1929 de la Canadian National Exhibition. Anon., « Maple Leaf Milling Company Limited. » The Winnipeg Evening Tribune, 12 octobre 1929, 11.
Maple Leaf Milling cherche à promouvoir encore davantage les ventes de son nouveau produit en insérant dans une de ses publicités de 1929 une photographie de Donald James Baldock, le grand champion torontois du concours de bébés organisé lors de l’édition 1929 de la Canadian National Exhibition.
La famille Kavaner fait malheureusement partie des innombrables familles canadiennes qui perdent beaucoup à la suite du krach de Wall Street en 1929, un événement sans précédent qui donne naissance à la Grande Dépression.
Le couple peut, je répète peut, se séparer vers 1936-37. Elle retourne à Teeswater (avec ses enfants?) pendant que lui reste à Winnipeg.
Alors que des millions de Canadiennes et Canadiens se débattent face au chaos économique engendré par la Grande Dépression, Maple Leaf Milling se débat également. Ceci étant dit (tapé?), elle cherche à maintenir, voire à améliorer ses ventes en s’associant à 3 stations de radio de l’est du Canada, CFRB de Toronto, CKAC de Montréal et CKPC de Brantford, Ontario, pour créer une nouvelle émission, The Half-Hour of Happiness, lancée en octobre 1934 mais apparemment supprimée en janvier 1935.
Et oui, des représentants de Maple Leaf Milling se trouvent dans le bâtiment alimentaire de la Canadian National Exhibition en 1934, 1936, 1938 et 1939 – et peut-être au cours d’autres années également. Il va sans dire qu’ils proposent des offres spéciales.
En 1936, par exemple, les consommateurs peuvent obtenir un grand sac à provisions, un testeur de gâteaux et un parachute jouet avec un paquet de céréales Red River, et tout cela à un prix réduit. Payer quelques sous de plus permet aux dits consommateurs de quitter le kiosque de Maple Leaf Milling avec une casserole en aluminium. En 1939, en revanche, une somme d’argent un peu plus importante permet à ces clients de repartir chez eux avec un jeu de tennis de table.
Dix des 48 vignettes de la série Know Canada produites pour Maple Leaf Milling Company Limited de Winnipeg, Manitoba, par la National Poster Stamp Society de Chicago, Illinois, et distribuées dans des emballages de céréales Red River. Anon., « ‘Know Canada’ Poster Stamp Series. » Poster Stamp Bulletin, décembre 1938, 6.
Votre humble serviteur serait négligent si je ne soulignais pas que, à la fin de 1938, Maple Leaf Milling lance une série de 48 vignettes. Publiée en ensembles de 4 dans 12 couleurs différentes, Know Canada présente des vues intéressantes et scènes célèbres des 9 provinces du Canada, des vues et scènes comme l’hôtel de ville de Toronto, les silos à grains de Fort William et les édifices du Parlement à Ottawa.
Les vignettes sont vraisemblablement produits par la National Poster Stamp Society de Chicago, Illinois.
Une des publicités publiées par Maple Leaf Milling Company Limited de Winnipeg, Manitoba, pour la série de vignettes Know Canada offerte dans des emballages de céréales Red River. Anon., « Maple Leaf Milling Company Limited. » The Ottawa Evening Citizen, 26 octobre 1939, 15.
Étant donné que la première d’une petite série de publicités (4 en tout?) pour ces vignettes sort apparemment en novembre 1939, votre humble serviteur ne sait pas quand les dites vignettes commencent à apparaître dans des emballages de céréales Red River.
Et oui, comme il faut s’y attendre, les enfants et préadolescent(e)s qui collectionnent ces vignettes peuvent les mettre dans un bel album avec une reliure en similicuir et du lettrage rouge et or qui peut être obtenu en envoyant à Maple Leaf Milling un timbre de 2 sous et deux étiquettes découpées sur des emballages de céréales Red River.
Sous l’espace où peuvent être collées les vignettes, les jeunes collectionneuses / collectionneurs peuvent lire un texte d’une cinquantaine de mots sur chaque vue ou scène.
Et oui, encore, les collectionneuses / collectionneurs, éventuellement adultes, peuvent acquérir la série entière d’un seul coup en envoyant 15 sous à la National Poster Stamp Society, ou à son associée récemment fondée, la International Poster Stamp Society de Toronto. En retour, un album peut être acheté pour 25 sous.
Ces sommes correspondent respectivement à un peu plus de 3 $ et 5 $ en devises de 2024.
Et oui, vous avez bien calculé, ami(e) lectrice ou lecteur. La valeur du susmentionné timbre de 2 sous correspond à environ 40 sous en devises de 2024, ce qui est bien en deçà du 1.07 $ (!) que vous et moi devons payer pour poster une lettre.
Pour autant que votre humble serviteur puisse en juger, les vignettes remplacent un ou quelques types de babioles (de fabrication américaine?) qu’on trouvait auparavant dans les emballages de céréales Red River.
Et oui, ces vignettes et leur album sont peut-être disponibles en français. Scènes canadiennes semble atteindre les magasins d’alimentation en octobre ou novembre 1939. Et en voici la preuve. Quant à savoir si les textes sur les vignettes et ceux de l’album sont traduits, c’est une autre affaire.
La version française d’une publicité publiée par Maple Leaf Milling Company Limited de Winnipeg, Manitoba, pour la série de vignettes Scènes canadiennes offerte dans des emballages de céréales Red River. Anon., « Maple Leaf Milling Company Limited. » La Presse, 2 novembre 1939, 9.
Remarquez, Maple Leaf Milling met d’autres types de cadeaux dans des emballages de céréales Red River, une chemise de peinture magique ou… un crayon avec une gomme en caoutchouc au bout.
Ouais, un p*t**n de crayon, pour citer, hors contexte et très, très poliment / respectueusement, le chef de mafia russe américaine Viggo Tarasov, oui, celui qui connaît une fin tragique dans un très réussi et populaire film de suspense et d’action américain de 2014, John Wick.
Alors que les jours, semaines, mois et années se transforment en semaines, mois, années et décennies, les céréales Red River poursuivent leur petit bonhomme de chemin. Pour paraphraser un dicton bien connu, bien connu en français enfin, les céréales du petit-déjeuner heureuses n’ont pas d’histoire.
Il semble que les Canadiennes et Canadiens adorent les céréales Red River ou n’en ont jamais entendu parler. Les personnes appartenant à ce second groupe ont tendance à être un peu plus jeunes que celles du premier groupe.
Une brève digression, si vous me le permettez.
Une publicité très intrigante des céréales Red River paraît dans des journaux de Buffalo, New York, et apparemment nulle part ailleurs, en mars et avril 1948. Et la voici…
La publicité publiée par Maple Leaf Milling Company Limited de Winnipeg, Manitoba, pour un Jet Pilot’s Cap offert, semble-t-il, seulement aux ami(e)s américain(e)s des céréales Red River vivant à Buffalo, New York. Anon, « Maple Leaf Milling Company Limited. » Buffalo Evening News, 11 mars 1948, 14.
Intéressant, n’est-ce pas ? Tout(e) préadolescent(e) ou adolescent(e) intéressé(e) à obtenir un bonnet de pilote d’avion à réaction n’a qu’à envoyer 10 sous en monnaie et le dessus d’une boîte de céréales Red River à Maple Leaf Milling. Facile comme bonjour. Soit dit en passant, ces 10 sous correspondent à environ 1.75 $ en devises canadiennes de 2024.
Maintenant, je vous demande, ami(e) lectrice ou lecteur, pourquoi Maple Leaf Milling se donnerait-elle la peine de commander des lots de bonnets de pilote d’avion à réaction et ne ferait-elle aucun effort pour les distribuer au-delà de Buffalo? Et pourquoi limiter l’effort à une période d’environ 3 semaines? Je suis complètement déconcerté. Les voies de la direction de Maple Leaf Milling, semble-t-il, sont impénétrables.
En réalité, ces voies ne sont peut-être pas si impénétrables. Voyez-vous, en novembre 1947, Maple Leaf Milling commence à offrir des bonnets de pilote d’avion à réaction aux préadolescent(e)s et adolescent(e)s qui envoient 10 sous et le dessus d’une boîte de, tenez-vous bien, Brex, « la céréale de germe de blé qui cuit rapidement et dont la saveur vous enchantera. »
Le bonnet est apparemment annoncé dans au moins 4 provinces (Alberta, Ontario, Québec et Saskatchewan) entre novembre 1947 et novembre 1948.
Et oui, au Québec, le bonnet de pilote d’avions à réaction est annoncé en français sous le nom de « Bonnet BREX de pilote d’avion à réaction. »
Fin de la digression.
Croiriez-vous qu’un restaurant servant des céréales Red River, du jus d’orange et du café noir ouvre ses portes à Vancouver, Colombie-Britannique, en février 1990? Le Double R ferme malheureusement ses portes en avril. Voyez-vous, les fenêtres de ce restaurant sont tellement embuées que les gens à l’intérieur ou à l’extérieur ne peuvent pas voir ni à l’extérieur ni à l’intérieur. Je ne plaisante pas. Je pense.
Celles et ceux qui adorent les céréales Red River ne jurent que par leur teneur élevée en fibres et par la façon dont elles aident à faire en sorte que les choses, euh, circulent en bas. Certain(e)s d’entre elles et eux reconnaissent cependant que les céréales Red River n’ont pas beaucoup de goût.
Serait-ce considéré comme hérétique d’affirmer que, sous sa forme précuite, les céréales Red River ressemblent beaucoup à… des graines pour oiseaux? Ou que, sous sa forme cuite sans fioritures, cette céréale chaude pour petit-déjeuner sent un tout petit peu la grange, a un tout petit goût de carton mouillé et ressemble un tout petit peu à du sable mouillé dans la bouche? Désolé, désolé.
Remarquez, certaines personnes soulignent que les céréales Red River ont un tout petit goût de graines pour oiseaux, un commentaire qui amène à l’esprit une question intrigante : pourquoi ces gens ressentent-ils ou elles le besoin d’apprendre quel goût ont les graines pour oiseaux? Je vous dis ça comme ça, moi.
Ce qui me rappelle une histoire sur le géologue / paléontologue / théologien anglican anglais William Buckland. En 1826, je pense, au cours d’un voyage de noces d’un an en Europe continentale, Buckland et son épouse visitent une église ou cathédrale où, selon le clergé catholique, apostolique et romain local, le sang frais d’un saint martyr peut régulièrement être trouvé sur le sol. Il s’agenouille instamment et goûte soigneusement à cette sainte relique. Buckland conclut que c’est de l’urine de chauve-souris. Bon appétit tout le monde.
Au cours de ce même voyage, avant ou après sa rencontre avec le fluide corporel d’un mammifère volant, Buckland et son épouse visitent le Santuario di Santa Rosalia, à Palerme, royaume des Deux-Siciles, aujourd’hui en Italie. On leur montre les saints os de Santa Rosalia / La Santuzza, une noble dame normande pieuse du 12ème siècle qui est devenue ermite. Des os qui avaient sauvé les habitants de Palerme d’une épidémie lors d’un défilé dans les rues de la dite ville en 1624.
Buckland jette un coup d’œil aux os fièrement exposés dans le sanctuaire et déclare qu’ils avaient appartenu à une chèvre. Aussi embarrassante pour l’église que soit l’erreur d’identification, l’association fréquente entre les chèvres, la sorcellerie et Satan / Lucifer est peut-être bien pire. Les os sont entreposés peu de temps après.
Et oui, ami(e) lectrice ou lecteur qui cherche désespérément à changer de sujet, il semble qu’une voire même deux versions aromatisées (cassonade et érable?) des céréales Red River apparaissent sur les étagères à un moment donné dans un passé (récent?).
De fait, la recette peut être modifiée à un autre moment dans un passé récent pour tenir compte du fait que de nombreuses et nombreux consommatrices et consommateurs réchauffent désormais ce produit dans un four à micro-ondes.
À ce stade, votre humble serviteur serait négligent si je ne déboulonnais pas quelques mythes sur les fours à micro-ondes.
- Ils ne dégagent pas de rayonnement dangereux.
- Ils n’ont pas à être utilisés uniquement avec de la malbouffe.
- Ils n’altèrent pas la valeur nutritionnelle ni le goût des aliments.
- Ils n’endommagent pas les contenants alimentaires, à condition d’utiliser les bons.
- Ils n’assèchent pas les aliments et n’en laissent pas certaines parties crues s’ils sont utilisés correctement.
Mais je digresse.
Gertrude Edna Kavaner n’a malheureusement pas l’occasion de constater à quel point les céréales Red River sont devenues aimées. Elle quitte ce monde à Toronto en mars 1946, à l’âge de 58 ans.
En juin 1990, Maple Leaf Milling, à l’époque filiale du géant alimentaire anglais Hillsdown Holdings Public Limited Company, fusionne avec un géant canadien de la transformation de la viande, Canada Packers Incorporated de Toronto. Désireuse de se débarrasser de son passé de transformation de la viande, cette dernière change officiellement son nom pour Maple Leaf Foods en mai 1991.
En autant que votre humble serviteur puisse comprendre, Robin Hood Multifoods Corporation de Toronto, une filiale d’un grand fabricant alimentaire américain, International Multifoods Corporation, commence à produire des céréales Red River en 1995, à un endroit ou un autre, vraisemblablement en Ontario.
En mars 2004, The J.M. Smucker Company, un très grand fabricant américain de boissons et aliments, acquiert International Multifoods. En conséquence, la filiale canadienne du premier, J.M. Smucker (Canada) Incorporated de Halifax, Nouvelle-Écosse, je pense, devient responsable de la filiale canadienne du second, Robin Hood Multifoods de Markham, Ontario.
Un problème potentiellement grave passe devant la proue des céréales Red River en septembre 2011 lorsque l’Agence canadienne d’inspection des aliments émet un avertissement au grand public indiquant que certains emballages contiennent du soja, une légumineuse qui se trouve être un des plus courants allergènes affectant les nourrissons et enfants. Curieusement, la présence de ce soja n’est pas mentionnée sur l’étiquette.
Et non, il n’y a aucun cas de réaction allergique au moment de l’avertissement.
Quoi qu’il en soit, Smucker Foods of Canada Corporation de Markham accepte volontairement de rappeler les emballages en question. Pour une raison ou autre, le rappel ne touche pas les emballages de céréales Red River distribués aux États-Unis.
Un représentant de la maison mère américaine de Smucker Foods of Canada indique en décembre 2011 que les emballages de céréales Red River devraient réapparaître dans les magasins canadiens ce mois-là. Les dits emballages mentionneraient éventuellement la présence potentielle dans le produit de soja ainsi que, peut-être, d’avoine, moutarde, orge, sésame et triticale. Incidemment, le blé et le seigle qu’ils contiennent sont désormais découpés plutôt que concassés.
Comme c’est parfois, voire souvent, le cas, le malheur d’un produit fait le bonheur d’un autre produit. Les céréales pour petit-déjeuner qui profitent (brièvement?) des malheurs rencontrés par les céréales Red River sont les céréales Sunny Boy, produites à Camrose, Alberta, par Sunny Boy Foods Limited.
Croiriez-vous que ce produit, développé en 1928, je crois, par ce qui est alors Byers Flour Mills Limited, une firme fondée en 1926, est un mélange de blé, seigle et lin?
Vous vous souviendrez bien sûr que les céréales Red River, un autre mélange de blé, seigle et lin, arrivent sur les tablettes en 1926.
Bien que contenant les mêmes ingrédients de base, ces deux céréales chaudes pour petit-déjeuner ont des recettes légèrement différentes. La céréale Sunny Boy peut contenir un tantinet plus de seigle par exemple. Elle peut également être légèrement plus crémeuse sous sa forme cuite.
Bien que produite en Alberta jusqu’à aujourd’hui, la céréale Sunny ne réussit pas à acquérir la même aura que sa rivale. Elle a eu et a cependant toujours de grand(e)s admiratrices et admirateurs, mais revenons à notre histoire.
En 2020-21, Smucker Foods of Canada ou sa maison mère américaine mettent un terme à la production et distribution des céréales Red River. Les admiratrices et admirateurs de longue date de ce produit sont naturellement profondément déçu(e)s, voire choqué(e)s. Elles et ils ont perdu un vieil ami.
La saga de plus de 90 ans des céréales Red River semble terminée et il est effectivement triste de voir une telle icône disparaître, sans que ce soit de sa faute.
Mais ce n’est pas la fin de notre saga. Nenni. Ce ne l’est pas.
Voyez-vous, en juin 2022, Arva Flour Mills Limited d’Arva, Ontario, près de London, acquiert la marque des céréales Red River de Smucker Foods of Canada. Mieux encore, cette petite firme prévoit de vendre ce produit dans son magasin de détail d’Arva et sur son site Web d’ici la fin du mois.
Qu’elle y soit parvenue ou pas n’est pas clair mais on pourrait affirmer que cela n’a pas vraiment d’importance. Le fait principal, le seul fait en fait, c’est que la production des céréales Red River reprend, ce que ses admiratrices et admirateurs, tant au Canada qu’aux États-Unis, applaudissent au plus haut des cieux.
Incidemment, le blé et le seigle contenus dans les emballages nouvellement vendus seraient concassés plutôt que découpés. Cela signifie bien sûr qu’Arva Flour Mills doit acheter un broyeur à marteaux.
Conscients comme elle et il le sont de la nécessité de tenir compte de la demande des consommatrices et consommateurs, les deux copropriétaires achètent également l’outillage nécessaire à la production de farine sans gluten, ce que l’outillage d’origine du moulin est bien incapable de faire.
Incidemment, Arva Flour Mills n’est pas exactement un nouveau venu dans le secteur des minoteries. Voyez-vous, le moulin qu’elle exploite était, et est toujours, le plus ancien moulin à farine alimenté à l’eau en activité au Canada, ainsi qu’une des plus anciennes firmes encore en activité au Canada.
Croiriez-vous que ce moulin historique moud de la farine depuis 1819? Pour citer le titre, ici traduit, d’une chanson à succès de 1985 (!) du groupe pop rock britannique Eurythmics, est-ce que je vous mentirais?
Les copropriétaires actuels achètent le moulin à l’été 2021, au grand soulagement de nombreuses et nombreux résident(e)s d’Arva qui craignaient que des promoteurs de Toronto, de Vancouver ou de Chine ne l’achète et fassent quelque chose d’horrible à ce site historique, ce que quelques / plusieurs promoteurs du Canada et d’ailleurs sont connus pour faire à des lieux historiques au fil des ans, avec ou sans permis.
Le propriétaire du moulin au moment de sa vente tient heureusement autant à ce qu’il reste en activité que les particuliers qui souhaitent l’acquérir.
Donc, pour citer, hors contexte et en traduction le poète / dramaturge / acteur anglais William Shakespeare, tout est bien qui finit bien. Je dois maintenant y aller, alors, ta-ta.
L’auteur de ces lignes souhaite remercier toutes les personnes qui ont fourni des informations. Toute erreur contenue dans cet article est de ma faute, pas de la leur.