Béni soit celui qui apporte les merveilles du cosmos à la multitude : Armand Neustadter Spitz et ses projecteurs de planétarium, partie 1
Salutations, ami(e) lectrice ou lecteur. J’ai une question pour vous. Avez-vous déjà vu un spectacle de planétarium? Mon esprit embrumé me dit que oui, mais il ne se souvient pas où ni quand cette expérience a lieu. La mémoire est une chose inconstante, comme vous le savez bien. Plus on essaie de se rappeler quelque chose ou autre, plus il y a de chances que tout ce qui ressort de l’exercice diffère considérablement de ce qui s’est réellement passé. Ajouter au mélange quelqu’un dont le seul souhait est de vous « aider » à vous souvenir aggrave souvent l’inexactitude des souvenirs récupérés. Le nombre d’innocent(e)s envoyé(e)s en prison à la suite de tels efforts peut être plus élevé que nous ne le pensons et…
N’est-il pas étrange que notre train de pensée aboutisse souvent dans un tunnel obscur? C’est étrange en effet. (Bonjour, EP!) Pour paraphraser en traduction la chanson de 1985 du musicien écossais-canadien Lawrence Henry Gowan, les humains sont des animaux étranges et nous sommes en effet des animaux, comme les vers, oursins, méduses, libellules, calmars et araignées, mais je digresse. Revenons aux planétariums.
Comme c’est le cas avec un grand nombre d’appareils qui nous entourent, le planétarium n’est pas inventé par un seul individu qui voit une pomme tomber d’un arbre, ou quelque du genre. Nenni. Un certain couple de frères américains n’invente pas l’avion, par exemple, en 1903. Ils développent un système de contrôle qui combine le gauchissement des ailes avec un gouvernail et c’est tout. Un tout d’une importance cruciale, remarquez, qui conduit au premier vol contrôlé et soutenu d’un aéroplane motorisé, en décembre 1903, par Wilbur Wright (260 mètres (852 pieds) en 59 secondes, ce qui donne une vitesse moyenne de moins de 16 kilomètres/heure (moins de 10 milles/heure)).
Les vols précédents effectués ce jour-là ne sont guère plus que des sauts de puce.
Chose intéressante, la dite paire de frères, Wilbur et Orville Wright, n’invente pas réellement le gauchissement des ailes. Nenni. Un pionnier américain de l’aviation du nom de Edson Fessenden Gallaudet le fait vers 1896-98. Il teste même l’idée avec un cerf-volant. Gallaudet ne brevète cependant pas son idée, mais les frères Wright le font certainement. Et non, ils ne sont apparemment pas au courant du travail de pionnier de Gallaudet.
Vous savez bien sûr quand les frères Wright font la première de nombreuses apparitions dans notre blogue / bulletin / machin pontificateur. Août 2018, vous dites (tapez?), ami(e) lectrice ou lecteur. Très bien, et revenons à notre histoire. Presque.
Le résultat final de l’action en matière de brevet lancée par les frères Wright est la guerre des brevets de 1909-17, un conflit juridique qui entrave l’industrie aéronautique américaine à une époque où les besoins militaires entraînent de grands progrès en Europe et… Un autre tunnel sombre. Désolé. Revenons aux planétariums. De nouveau.
Un planétarium est un espace clos construit principalement pour présenter des spectacles éducatifs et / ou divertissants sur l’astronomie et le ciel nocturne. La caractéristique dominante d’un planétarium typique est son grand écran de projection semi-sphérique sur lequel les dits spectacles sont projetés. Une autre caractéristique importante d’un planétarium typique est son grand et étrange projecteur, monté au centre de l’espace clos.
Une digression si je peux me le permettre. Est-ce moi ou est-ce que la tête de l’Excalbien Yarnek ressemble-t-elle plus qu’un peu à une des deux sphères d’un projecteur de planétarium typique de première génération? Vous n’avez aucune idée de ce dont je parle (tape?), n’est-ce pas? Soupir… Yarnek est un des personnages d’un épisode de mars 1969 de Star Trek, en français Patrouille du Cosmos – un des pires épisodes de cette série télévisée américaine mondialement connue d’ailleurs, une série mentionnée à quelques / plusieurs reprises dans notre blogue / bulletin / machin depuis août 2017. Fin de la digression.
Avant que j’oublie, l’article d’aujourd’hui de notre fantabulastique blogue / bulletin / machin vous est présenté par une photographie que votre humble serviteur trouve dans Combat, un quotidien très intéressant publié à Paris, France. Issu d’une famille de journaux fondée clandestinement en 1941, pendant la Seconde Guerre mondiale, en France occupée et non occupée, Combat publie son premier numéro sous ce titre en août 1944. Longtemps considéré comme un quotidien politique et polémique représentant les différents courants de la gauche française non communiste, la formule de Combat s’élargit en 1953. Une nouvelle orientation donne en effet une place importante aux spectacles, à la critique littéraire et aux arts. Le dernier numéro de Combat sort en août 1974.
L’auteur de l’article, quant à lui, est Hilaire Cuny (1913-2003), un écrivain et communicateur / vulgarisateur français bien connu. Et revenons aux planétariums.
Les planétariums tels que nous les connaissons en 2022 n’existent pas, du moins pas sur la planète Terre, lorsque Armand Neustadter Spitz naît, en juillet 1904, à Philadelphie, Pennsylvanie. Il rejoint le corps étudiant de la University of Pennsylvania, à Philadelphie, en septembre 1922, avant de passer au corps étudiant de la University of Cincinnati, à… Cincinnati, Ohio, en septembre 1924. Spitz quitte cet établissement d’enseignement au printemps 1926, sans jamais obtenir de diplôme en… quoi qu’il ait étudié.
Peu de temps après, Spitz commence à travailler comme journaliste, plus précisément comme reporter de district pour un petit journal. Spitz aime vraiment ce travail. De fait, il commence à réfléchir à la possibilité de posséder un petit journal. En 1928, Spitz réalise son rêve. Il achète Haverford Township News, un petit journal de Brookline, Pennsylvanie, dont il a rejoint le personnel un trio de mois auparavant. Le nouveau propriétaire, éditeur et éditeur se concentre sur les activités communautaires. De fait, il participe à diverses activités communautaires. Alors que la Grande Dépression frappe et s’aggrave, Spitz a toutefois de plus en plus de mal à se maintenir à flot, lui et son journal. Lui et Haverford Township News doivent déclarer faillite en 1932. Il et elle ne sont en aucun cas le seul individu ou la seule firme à le faire.
Fauché et sans emploi, Spitz obtient un travail de lave-vaisselle à bord d’un cargo en route vers la France. Pendant le voyage, un officier amical enseigne à Spitz les bases de la navigation céleste. Ce dernier est fasciné à un tel point qu’il se construit un sextant à partir d’une casserole remplie d’eau, d’une planche et d’un cure-dent. L’astronomie est vraiment cool, pense Spitz.
Incidemment, un sextant est un instrument de navigation introduit au 18ème siècle. Il est principalement utilisé pour mesurer l’angle entre l’horizon et le Soleil, le jour, ou une autre étoile, la nuit.
Malheureusement, le rêve de Spitz de devenir un écrivain ou correspondant basé à Paris ne se concrétise pas. Il monte à bord d’un autre navire et retourne aux États-Unis. Bien que Spitz essaye apparemment à nouveau le journalisme, en 1935, il rejoint le personnel du Haverford College, à… Haverford, Pennsylvanie, en tant qu’assistant astronome et conférencier en astronomie. Spitz aime vraiment ce travail. Il aide le collège jusqu’en 1943 environ, transmettant sa passion toujours croissante à un public aussi vaste qu’humainement possible.
En 1935-36, après de nombreuses recherches préparatoires et sur une période de plusieurs jours passés à empester la cuisine de la maison familiale, Spitz assemble une lune en papier mâché de 1.2 mètre (4 pieds) où on peut voir chaque vallée, montagne, cratère, etc., celles et ceux de la face de notre satellite visibles pour nous, bien sûr.
Incidemment, les premières photographies de la face cachée de la Lune sont prises en septembre 1959 par la sonde soviétique Luna 3.
Au cours des mois et années qui suivent 1935-36, Spitz emmène sa Lune en papier mâché dans de nombreuses écoles et musées, ce qui ennuie initialement beaucoup sa très jeune fille. Voyez-vous, Verne Carlin Spitz aime beaucoup jouer avec cette grosse bille grise.
Croiriez-vous qu’un numéro de septembre 1936 de Science News Letter, l’hebdomadaire d’une organisation américaine de vulgarisation scientifique bien connue, Science Service Incorporated, contient en couverture une photographie de l’enfant alors âgée de 5 mois assise sur la Lune? Si je peux paraphraser, en traduction, une chanson bien connue de 1977, si 1977, du groupe de rock anglais The Police, des petits pas sont ceux qu’on fait, assis sur la Lune. Désolé.
Comme vous pouvez l’imaginer, les présentations et conférences de Spitz ne passent pas inaperçues. De fait, il devient un peu célèbre, tout comme sa Lune. Relativement abordable à fabriquer (environ 15 $, soit près de 400 $ en devise canadienne de 2022, en ce qui concerne la Lune originale), le grand modèle est largement copié, avec plus ou moins de succès. L’original, en revanche, est finalement exposé en permanence, pendant un certain temps, à la Academy of Natural Sciences of Philadelphia, la plus ancienne (1812) institution de recherche et musée en sciences naturelles des Amériques.
En 1935, Spitz offre ses services en tant que rédacteur publicitaire bénévole pour le plus ancien (1824) et principal centre scientifique et technologique des États-Unis, le Franklin Institute de Philadelphie. Il est sollicité pour la première fois l’année suivante. Le travail de relations publiques de Spitz connaît un tel succès qu’il occupe divers postes à l’institut :
- rédacteur en chef de The Franklin Institute News, de 1936 à 1943,
- fondateur et directeur du département de météorologie, de 1940 (?) à 1947,
- directeur adjoint des relations publiques, de 1941 à 1943,
- directeur de l’éducation, de 1941 à 1953, et
- chargé de cours au Fels Planetarium de l’institut, de 1942 à 1955.
Le Franklin Institute porte bien sûr le nom d’un scientifique, philosophe politique, inventeur, imprimeur, homme d’état, éditeur, écrivain et diplomate américain vraiment remarquable, Benjamin Franklin.
Franchir la porte du Fels Planetarium s’avère particulièrement difficile étant donné le manque de formation universitaire de Spitz. Les efforts qu’il déploie en valent cependant la peine. En plus d’une décennie, Spitz donne plus de 1 001 conférences sur une variété de sujets.
La direction du Franklin Institute se rend compte très tôt que la radio et, plus tard, la télévision pourraient être d’une grande aide dans son travail éducatif. Spitz fait plus que sa part de discussions et de présentations dans ces médias. Certains d’entre elles ne sont diffusés que localement, mais d’autres attirent l’attention de gens à travers les États-Unis. La première émission de radio de Spitz, My Stars, sur ce qui est visible dans les cieux, est apparemment à l’antenne (chaque semaine?) entre 1935 et 1942, lorsque l’entrée des États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale provoque la fin de plusieurs émissions de radio.
Désireux de répandre sa passion pour les étoiles, Spitz commence à travailler sur un livre d’astronomie simple qui pourrait être compris par des enfants d’âge scolaire. Le dit livre leur fournirait des faits de base et des histoires intéressantes. Il les aiderait également à localiser et identifier les étoiles et constellations les plus visibles. Cela est fait de la manière la plus ingénieuse, grâce à l’utilisation d’une série de motifs d’étoiles inclus dans le livre.
Pour voir un coin particulier du ciel, un enfant ou adulte doit simplement retirer du livre la page avec le motif approprié. Elle ou il perce ensuite des trous dans le motif, là où se trouvent les étoiles, découpe le motif hors de la page et plie le morceau de papier pour former, enfin, quelque chose qui ressemble un peu à une très grosse et mince galette jamaïcaine. Mettre ce « planétarium à pointes d’aiguille » devant la lumière dans une pièce sombre duplique l’apparence du coin particulier du ciel qui intéresse l’enfant ou adulte. Facile comme tout.
The Pinpoint Planetarium de Spitz est publié au début de 1940. Croiriez-vous que le nom de son illustrateur est… G. Carter Morningstar, en français G. Carter Étoile du matin? Certaines personnes pensent apparemment que ce nom est un nom de plume. Incidemment, ce graphiste fait un certain nombre de choses pour le Franklin Institute au cours des années 1930.
Comme vous pouvez bien l’imaginer, les copies intactes de The Pinpoint Planetarium sont aussi rares qu’un honnête « n’hésitez pas à choisir une profession que vous abhorrez » et très, très collectionnables. Ceci étant dit (tapé?), un éditeur américain a la bonne idée de publier une réimpression de ce livre des plus intéressants en 2021.
Croiriez-vous que le Franklin Institute et Spitz sont des pionniers de la télévision éducative? Ouais. Of Shoes and Ships est diffusée en 1941. Bien qu’affectée par l’entrée des États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale, la première émission télévisée d’éducation scientifique des Amériques, sinon du monde, reste à l’antenne jusqu’en 1946.
Vous saviez bien sûr, ami(e) lectrice ou lecteur érudit(e), que les mots Of shoes – and ships (Des navires – et des chaussures) sont tirés d’un vers d’un poème écrit par l’auteur, mathématicien et poète anglais Lewis Carroll, né Charles Lutwidge Dodgson. Et oui, The Walrus and the Carpenter, en français Le morse et le charpentier, est récité à Alice (Liddell?) par deux habitants du pays des merveilles, Tweedledee et Tweedledum, en français Bonnet Blanc et Blanc Bonnet / Tralalère et Tralali.
Alors qu’il développe une série de montages sur la météorologie peu de temps après, Spitz pense qu’un simple livre sur ce sujet, un livre que des enfants d’âge scolaire pourraient comprendre, serait une bonne idée. Travaillant en coopération avec Sarah Marjorie Jordan, née Irvine, je pense, il co-écrit A Start in Meteorology : An Introduction to the Science of the Weather, publié en 1942.
Fait intéressant, le livre contient une chose vraiment super, en plus de tous les adjectifs, adverbes, conjonctions, noms, noms de famille, prénoms, pronoms et verbes bien sûr, à savoir un morceau de papier spécialement traité intégré dans la couverture qui change de couleur en fonction du niveau d’humidité de l’air ambiant.
Très probablement dès le début de 1943, Spitz est chargé de cours en météorologie et navigation céleste dans les toutes nouvelles Air-Mar Navigation Schools du Franklin Institute, qui dispensent une formation en navigation maritime et aérienne à des jeunes Américains servant dans les forces armées.
Croiriez-vous que tout le travail de Spitz axé sur la météo, des expositions aux conférences, conduit à la création, en 1940 (?), d’un département de météorologie dans les murs du Franklin Institute? Et oui, Spitz est le directeur fondateur du dit département.
En 1944, les choses vont assez bien, du point de vue de la Seconde Guerre mondiale, pour permettre le lancement d’une émission de radio hebdomadaire par le Franklin Institute. Née d’une suggestion faite par une surintendante de district des écoles publiques de Philadelphie qui se trouve être la belle-mère de Spitz, Science Is Fun met en lumière des événements scientifiques, anniversaires importants et événements en cours à l’institut et au Fels Planetarium. Programme largement acclamé, Science Is Fun devient rapidement une partie du programme des écoles publiques de Philadelphie destiné aux élèves des 3ème aux 6ème années. Spitz est un contributeur régulier à la série. Il rédige également un guide de l’enseignant.
À partir du début de 1945, sinon plus tôt, Spitz travaille sur une émission de radio hebdomadaire pour les étudiant(e)s de niveau secondaire de Philadelphie en coopération avec le directeur du Fels Planetarium, le Dr Roy Kenneth Marshall. Great Moments in Science ne reste cependant peut-être pas à l’antenne très longtemps.
Avec le retour de la paix, Spitz élargit un peu son horizon. Il est en effet très occupé vers 1946-47. Spitz passe quelque temps à Porto Rico, un territoire non incorporé des États-Unis, en tant que consultant en éducation scientifique pour le United States Department of Education. De plus, il joue un rôle dans la création de Science Associates Incorporated, un distributeur américain d’équipements astronomiques et météorologiques amateurs. Spitz joue également un rôle dans la création des Amateur Weathermen of America, une organisation dont le but principal est de fournir des prévisions météorologiques locales, oserait-on dire (taper?) presque personnalisées.
Une des réalisations les plus importantes, bien que peu fréquemment mentionnées, de Spitz a lieu en mai 1950. En collaboration avec le susmentionné Science Service, Spitz coordonne et dirige la première National Science Fair, qui se tient, bien sûr, au Franklin Institute.
Incidemment, la première National Science Fair canadienne a lieu à Ottawa, Ontario, à la Carleton University, en mai 1962.
Et maintenant, le moment que vous attendiez, c’est-à-dire le moment où cette interminable pontification commence à traiter du sujet central de l’article d’aujourd’hui : les projecteurs de planétarium. Enfin, presque. Voyez-vous, ami(e) lectrice ou lecteur, votre temps est écoulé et vous devrez attendre jusqu’à la semaine prochaine. En attendant, prenez un verre, du jus de pruneau ou de navet peut-être, et reeelaxez.
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