3 choses à savoir sur les nouvelles technologies de l'énergie, la formation de minéraux influencée par l'homme et les multiples utilisations des champignons
Voici Michelle Campbell Mekarski, Renée-Claude Goulet et Gordon Bardell.
Michelle et Renée-Claude sont deux conseillères scientifiques d'Ingenium. Elles fournissent des avis scientifiques d'experts sur des sujets clés concernant respectivement le Musée des sciences et de la technologie du Canada et le Musée de l'agriculture et de l'alimentation du Canada. Gordon Bardell, collaborateur invité, est stagiaire en communication scientifique au Musée des sciences et de la technologie du Canada et au Musée de l'aviation et de l'espace du Canada. Il remplace ce mois-ci Cassandra Marion, conseillère scientifique au Musée de l'aviation et de l'espace du Canada.
Dans cette captivante série mensuelle de billets publiés sur le blogue, les conseillères scientifiques d’Ingenium présentent des « pépites » d’information insolite en lien avec leur champ d’expertise respectif. Pour cette édition du mois d'août, ils nous expliquent comment les nouvelles technologies élargissent nos sources d'énergie, comment l'activité humaine a créé des conditions propices à la formation de nouveaux minéraux et comment le champignon aux multiples facettes a le potentiel de nous mener vers un avenir plus sain et plus durable.
Nouvelles sources d’énergie de rechange
L’énergie est un problème terriblement complexe. Nous en avons besoin pour alimenter nos maisons, nous transporter, créer nos vêtements, cultiver notre nourriture et un million d’autres choses. Pour être utile, l’énergie doit être abordable et fiable. Elle n’est pas très pratique si personne ne peut se la permettre, et qu’elle s’allume et s’éteint constamment. Mais l’énergie n’est pas gratuite. Il y a des coûts associés pour nous et notre planète. Les combustibles fossiles sont limités et affectent la qualité de l’air et le climat. L’énergie nucléaire présente des défis de gestion des déchets. L’énergie hydroélectrique perturbe les écosystèmes locaux. Même les énergies renouvelables, comme solaire et éolienne, exigent des matériaux limités et d’importantes activités d’extraction minières. Des centaines de millions de personnes partout dans le monde n’ont pas accès à l’énergie et la population mondiale ne fait que croître. Il y a aussi un défi de logistique pour distribuer l’énergie, de gestion de la demande élevée (comme pendant les canicules), et de construction d’un réseau énergétique pouvant résister aux perturbations et aux catastrophes.
Il n’est pas surprenant que les ingénieurs et les scientifiques explorent constamment des solutions novatrices pouvant relever ces défis. Et ils ont trouvé des solutions très créatives! Voici trois nouvelles sources d’énergie de rechange dont vous n’avez peut-être pas entendu parler.
Certaines boîtes de nuit de Londres et de Rotterdam « dansent pour sauver le monde » en utilisant l’énergie des danseurs pour alimenter les systèmes sonores et l’éclairage de leurs établissements.
Avez-vous déjà ressenti l’énergie qui se dégage lorsqu’on fait jouer une bonne chanson et que les gens se précipitent sur le plancher de danse pour danser follement? Quelques boîtes de nuit utilisent cette énergie de la danse pour générer de l’électricité! Les planchers de danse sont faits de matériaux piézoélectriques. Lorsqu’on compresse ces matériaux, les molécules s’étirent ou se serrent de façon à déplacer des charges positives et négatives, lesquelles créent de l’électricité. Alors, simplement en marchant et en sautant sur le plancher, les danseurs créent de l’énergie utilisable!
Et si nous pouvions utiliser toute la chaleur corporelle perdue que les humains génèrent juste parce qu’ils sont vivants? Dans la gare centrale de Stockholm, la chaleur produite par les 250 000 voyageurs quotidiens est captée par le système de ventilation et utilisée pour chauffer l’eau. L’eau est ensuite acheminée vers des bâtiments avoisinants pour aider à les chauffer, réduisant ainsi jusqu’à 25 % la facture de chauffage.
Les nouvelles sources d’énergie font face à un défi important, soit l’installation de nouvelles infrastructures onéreuses. Notre dernière source d’énergie de rechange a recours à une infrastructure existante très répandue. Il s’agit du Wi-Fi! Le Wi-Fi fait appel aux ondes radioélectriques pour transmettre l’information et puisque les ondes radioélectriques constituent une forme de rayonnement électromagnétique, elles transportent de l’énergie. Des antennes spéciales, qu’on appelle rectennas, peuvent capter l’énergie des ondes radioélectriques (y compris le Wi-Fi) dans l’air et la convertir en électricité. Les ondes radioélectriques contiennent très peu d’énergie, alors cette technologie ne pourrait alimenter un téléphone cellulaire. Toutefois, elle pourrait être utilisée pour des applications prometteuses visant à charger des appareils médicaux (pensons aux implants) et des capteurs à faible consommation d’énergie.
Des solutions énergétiques novatrices, comme les planchers de danse, la chaleur corporelle et les ondes Wi-Fi démontrent le potentiel de la réflexion créative pour faire face aux défis énergétiques mondiaux. Au fil des avancées technologiques, ces sources de rechange pourraient jouer un rôle vital dans l’établissement d’un avenir énergétique durable et résilient.
Par Michelle Campbell Mekarski
Alchimie anthropique : Comment les humains causent-ils la formation de nouveaux minéraux
En 1959, un géologue nommé René Van Tassel a découvert quelque chose d’étrange qui se développait dans les armoires de chêne du Musée royal d’histoire naturelle de Belgique, à Bruxelles. Il ne s’agissait pas de moisissure ou d’insectes, mais d’un nouveau minéral qui prenait forme sur la surface de certains échantillons du Musée.
Un minéral est une substance cristalline qui ne provient pas des plantes ou des animaux, et dont le motif répété est constitué des mêmes composantes de base élémentaires. Cette nouvelle substance découverte par M. Van Tassel, définie comme étant un minéral blanchâtre qui se développait suivant un motif ressemblant à des cheveux ou à des fleurs sur la surface de minéraux, de fossiles ou d’artefacts en céramique, n’avait jamais été observé auparavant dans la nature. Il l’a baptisée calclacite. Il s’avère que les armoires de chêne dans lesquelles se trouvaient les artefacts causaient cette formation.
Le bois de chêne est très acide et a tendance à libérer de l’acide acétique, soit le même acide qui donne au vinaigre son odeur et son goût bien distincts. Cet acide réagissait avec le calcium dans les échantillons, créant un nouveau minéral qui se développait sur leurs surfaces. Ce minéral appartient à un groupe de minéraux qui existe seulement sur Terre, car il est engendré par l’influence des humains.
En théorie, ces minéraux ont toujours été possibles, mais n’avaient pas été trouvés sur Terre antérieurement, car les ingrédients qui les composent ne s’étaient jamais trouvés au même endroit au même moment. Cependant, les humains aiment ramasser des objets et les déplacer. L’exploitation minière et le transport de matériaux signifient que ces ingrédients ont été transportés vers de nouveaux lieux et placés avec d’autres ingrédients nécessaires pour former ces minéraux. Ces minéraux nouvellement découverts, qui avaient besoin d’un peu d’aide des humains pour se développer, sont connus sous le nom de minéraux anthropiques. Le terme anthropique vient du mot grec anthrôpos qui signifie « humain », auquel on a ajouté le suffixe -ique qui signifie « caractérisé par ». Cependant, pour être considéré un minéral, une substance doit être d’origine naturelle. Alors, les géologues jugent que les minéraux anthropiques sont « influencés par l’action humaine » au lieu d’être « créés par l’action humaine ».
L’abhurite est un nouveau minéral inusité qui se développe sur l’étain qu’on retrouve dans des épaves de navires. Il s’agit d’une de 208 nouvelles espèces de minéraux découverts en 2017 qui sont créés par les interactions des humains avec la Terre.
Un autre minéral anthropique a été découvert sur de l’étain se trouvant dans des épaves de navires. L’étain extrait de mines était raffiné, fondu pour en faire des lingots et des outils qui étaient envoyés partout dans le monde à bord de navires. Lorsque ces navires coulaient, ils introduisaient de fortes concentrations d’étain aux produits chimiques se trouvant dans les vastes étendues d’eau. Ainsi, un nouveau minéral appelé abhurite pouvait se former par le mélange entre l’étain et l’oxygène, l’eau, et le chlore de l’eau salée. Une fois de plus, les humains ont influencé la formation de ce minéral en introduisant des navires remplis d’étain dans les profondeurs des océans. Une fois l’étain présent, la nature prenait le dessus et créait un nouveau minéral.
Les minéraux anthropiques prouvent que l’influence des humains sur la planète est plus importante qu’on ne le croit. Nos actions ont causé non seulement des changements du climat et les habitudes des espèces (comme les schémas de migration, la mise en danger des espèces et l’introduction d’espèces envahissantes), elles ont également influencé la formation de minéraux sur la planète.
Par Gordon Bardell
Célébrons le puissant champignon aux bienfaits inestimables pour la durabilité
Qu’on les aime ou non, il faut avouer que les champignons sont un aliment à la fois étrange et fascinant. Étonnamment, jusqu’à aussi récemment que les années 1960, les champignons étaient considérés comme une sorte de plante. Cependant, des avancées en recherche biologique ont mis en lumière les différences fondamentales entre eux et d’autres formes de vie, particulièrement les plantes et les animaux. À la fin des années 1960, on a donc classé les champignons dans une catégorie à part.
Vous êtes-vous déjà demandé de quoi se composent les champignons? Ils ne sont pas des plantes ni des animaux, alors que sont-ils exactement? Puisque leur biologie est si particulière, ils sont extrêmement polyvalents, pouvant être utilisés en cuisine, en médecine et dans l’industrie manufacturière. En fait, de nombreux chercheurs tentent de mieux les comprendre, car ils ont constaté leur potentiel à nous mener vers un avenir plus sain et durable.
Les champignons sont les excentriques de la nature, ni plantes ni animaux, ils s’épanouissent dans le sol et nous surprennent par leur polyvalence.
Les champignons que nous cuisinons et leurs cousins toxiques ne représentent qu’une infime fraction de leur vaste diversité. En fait, grâce aux avancées en technologie génomique, certains scientifiques (site Web en anglais seulement) estiment qu’il pourrait exister jusqu’à 5,1 millions d’espèces différentes dans le royaume des champignons! Certains sont utiles, comme la levure de champignon qui entre dans la production du pain et de l’alcool, et les moisissures qui sont responsables des saveurs caractéristiques des fromages qui sentent mauvais. Inversement, d’autres champignons, comme la rouille et le charbon, peuvent ravager des cultures, et certains peuvent même infecter notre corps et nous rendre malades.
Ce que nous mangeons est l’organe fructifère, comme la fleur d’une plante, de certains champignons. Voilà pourquoi les champignons apparaissent, se développent, disséminent leurs spores et se décomposent si rapidement. La partie principale de l’organisme du champignon est en fait cachée la plupart du temps, sous le sol ou dans sa source de nourriture. Elle forme un réseau de minces fibres qui ressemblent à des filaments, appelées hyphes, lesquelles créent une substance collante pendant qu’elles se développent. Lorsque vient le temps de se reproduire, les organes fructifères apparaissent. Ceux-ci sont composés de la même matière que les hyphes, mais sous forme beaucoup plus compacte, appelée mycélium.
Contrairement aux plantes, dont les parois cellulaires sont faites de cellulose, les champignons ont des parois cellulaires composées en partie de chitine. Cette molécule structurale se trouve également dans les exosquelettes des insectes, les coquilles des mollusques et des crustacés, et certaines algues. La chitine est la substance qui donne la texture caoutchouteuse aux champignons, ils sont donc pratiquement impossibles à surcuire. La chitine ne se décompose pas à la chaleur, comme le fait la cellulose, ce qui réduit les légumes et les fruits en bouillie s’ils sont trop cuits.
Contrairement aux plantes, les champignons ne peuvent pas produire leurs propres sucres par la photosynthèse. Ils consomment plutôt d’autres organismes pour leur survie et leur reproduction, digérant la nourriture à l’extérieur avant de l’absorber. Puisqu’ils sont des décomposeurs, les champignons exercent une fonction cruciale en recyclant des nutriments provenant de matière organique morte dans l’écosystème. Ils peuvent donc jouer un rôle important dans la création d’une économie circulaire en agriculture, où les déchets sont réutilisés et traités comme une ressource.
On explore aussi la possibilité d’utiliser les champignons de façon novatrice, comme pour créer du cuir à base de champignons, des matériaux de construction et des produits d’emballage. Ils sont efficaces pour nettoyer les polluants, surpassant souvent les bactéries, mais y mettent plus de temps. En raison de leurs propriétés nutritives et physiques intéressantes, ils sont aussi de plus en plus utilisés dans la production des fausses viandes. Toutefois, la culture des champignons est un processus lent qui demande beaucoup d’énergie et des conditions spéciales, alors de nombreux chercheurs se penchent sur la biotechnologie afin d’améliorer l’efficacité des champignons et leur compatibilité pour ces applications.
Des travaux de recherche en technologie des enduits cicatrisants (site Web en anglais seulement) explorent également comment les champignons peuvent être utilisés pour améliorer la guérison. Comme on l’a mentionné, on retrouve de la chitine dans les champignons. La chitine provenant des crustacés est déjà utilisée pour aider la guérison. On a découvert que la chitine des champignons possède les mêmes propriétés curatives. Les champignons pourraient donc être une autre source durable de cette molécule utile pour l’industrie médicale.
Les champignons, qui procurent polyvalence en cuisine, valeur nutritionnelle et potentiel dans diverses industries, sont en effet un organisme multifacette remarquable. Ils offrent de nombreux avantages pour la santé grâce à leurs composés bioactifs et pourraient même être à l’origine de nouveaux médicaments et produits médicaux pour maintenir la santé du cerveau et du corps en vieillissant. Que ce soit dans la cuisine ou le laboratoire, les champignons continuent de surprendre et d’impressionner grâce à leurs vastes usages prouvés et potentiels!
Par : Renée-Claude Goulet
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