3 choses à savoir sur les bois de cerf, ce qu'il ne faut pas jeter dans les toilettes et la pluie d'électrons
Voici Michelle Campbell Mekarski, Cassandra Marion et Renée-Claude Goulet.
Ces conseillères scientifiques d’Ingenium fournissent des conseils éclairés sur des sujets importants pour le Musée des sciences et de la technologie du Canada, le Musée de l’aviation et de l’espace du Canada et le Musée de l’agriculture et de l’alimentation du Canada.
Dans cette captivante série mensuelle de billets publiés sur le blogue, les conseillères scientifiques d’Ingenium présentent des « pépites » d’information insolite en lien avec leur champ d’expertise respectif.
Pour l'édition de décembre, découvrez ce que les bois peuvent nous apprendre sur les rennes du Père Noël, ce que vous ne devriez pas jeter dans vos toilettes, et comment la foudre sur Terre peut provoquer une pluie d'électrons dans l'espace.
La vérité à propos des rennes du père Noël... tout est dans les bois!
Le temps des Fêtes bat son plein et on commence à voir apparaître les rennes et leurs bois un peu partout, symboles représentatifs de Noël et des festivités hivernales. Mais, coup de théâtre! Selon la science, les rennes du père Noël sont probablement tous des femelles! Pourquoi? Tout est dans les bois!
Un caribou des bois boréal arborant ses bois en hiver (caribou Rangifer tarandus).
Tout d’abord, qu’est-ce qu’un renne exactement? Bien qu’ils puissent sembler mythiques, ils nous sont plus familiers qu’on croit. Au Canada, ils se trouvent sur notre pièce de 25 cents, mais, ici, on les appelle des caribous. Fait amusant : Seulement les caribous d’élevage sont appelés rennes au Canada. Ces animaux appartiennent à l’espèce Rangifer tarandus, soit le renne sur le continent européen. Ils sont de petits, mais puissants, membres de la famille des cervidés. Ils revêtent une immense importance culturelle pour les peuples autochtones et leurs modes de vie. Malheureusement, les populations de caribous au Canada sont menacées par l’activité humaine, notamment la perte d’habitat causée par l’exploitation des ressources, comme le déboisement, et les changements climatiques. Jusqu’aux années 1960, tous les caribous et les rennes étaient classés sous une seule espèce. Cependant, grâce aux outils d’analyse génétique modernes, un scientifique a reclassé le caribou canadien en espèce et sous-espèce distinctes afin de mieux adapter les efforts de conservation, car les habitats, les stratégies de survie et la taille diffèrent des divers groupes trouvés ici.
Maintenant, jasons bois. Les rennes, comme d’autres membres de la famille des cervidés (orignaux, wapitis, cerfs rouges, etc.) développent des bois. Contrairement aux cornes — qui sont permanentes, couvertes de kératine (la même protéine qui se trouve dans les ongles et les cheveux), et se développent sur les mâles et les femelles — , les bois sont composés d’os, ils tombent et repoussent chaque année. Chez les cervidés, seuls les mâles ont des bois... sauf pour les caribous, chez qui les mâles et les femelles en arborent. Ça vous intrigue? Allons plus loin.
Le processus des bois qui tombent est déclenché par les changements de lumière saisonniers. À mesure que la lumière du jour diminue, la glande pinéale du cerveau fait baisser les niveaux de testostérone, entraînant une faiblesse dans le tissu conjonctif à la base des bois, soit le pédicule. Cela provoque la chute des bois. Peu après, ils recommencent à pousser, couverts d’une couche de peau duveteuse appelée velours qui apporte le sang et les nutriments nécessaires aux os en croissance. Lorsque l’os est entièrement formé, le velours tombe et les bois sont prêts à émerveiller. La chute annuelle permet aux cervidés de développer des bois plus gros et de remplacer ceux qui sont brisés ou usés.
Voici une pépite écologique intéressante : les bois tombés ne sont pas perdus. Ils se décomposent et nourrissent l’écosystème, procurant des nutriments au sol et même une collation aux petits animaux.
Alors, pourquoi des bois se développent-ils sur les cervidés? Les cerfs mâles les utilisent pour se battre, établir la dominance entre eux et impressionner des partenaires potentiels. Et, puisque les bois demandent beaucoup d’énergie et de nutriments pour pousser, une majestueuse paire indique également qu’un cerf est en santé et a accès à amplement de nourriture.
Chez les caribous, ils ont également un autre objectif. Comme d’autres espèces de cervidés, le caribou mâle perd ses bois à la fin de l’automne, après la saison de reproduction (appelée le rut). Pour leur part, les femelles gardent les leurs pendant les durs hivers et ne les perdent qu’au printemps.
Pourquoi cette différence? C’est probablement à cause de leur habitat pauvre en ressources. Les femelles caribous sont en gestation pendant les mois d’hivers et dépendent sur leurs bois pour survivre et mener à terme leurs petits. Puisqu’elles vivent dans les régions nordiques où les hivers sont longs et enneigés, elles utilisent leurs bois pour creuser dans la neige à la recherche de la nourriture, défendre leurs petites parcelles d’alimentation et se protéger elles-mêmes ainsi que leurs petits contre les prédateurs, comme les loups.
Alors voilà, les rennes du père Noël qui gambadent avec leurs bois en décembre sont vraisemblablement des femelles. Les créateurs des classiques contes des Fêtes n’étaient possiblement pas au fait de cette petite précision du monde des cervidés, mais bon, on a maintenant un fait amusant à partager pendant les prochaines réjouissances! Joyeuses Fêtes!
Par Renée-Claude Goulet
Mettre à la toilette ou ne pas mettre à la toilette, voilà la question
Vous êtes-vous déjà demandé ce qui se passe après avoir tiré la chasse? On peut avoir l’impression que les déchets humains disparaissent dans un gouffre magique, mais ce qu’on envoie dans la toilette a plus d’impact qu’on ne peut le croire. Tirer la chasse sur des trucs inadéquats peut causer de gros dégâts à votre maison, endommager les installations de traitement des eaux usées municipales et nuire à l’environnement.
La science des obstructions
Les toilettes et les réseaux d’égouts ont été développés pour recevoir seulement trois choses : les déjections humaines, le papier hygiénique et l’eau. Le papier hygiénique est conçu spécialement pour se décomposer rapidement, assurant ainsi un bon écoulement dans les tuyaux. Lorsque des objets, comme des couches, des lingettes (même celles qui sont « jetables à la toilette »!) ou les produits d’hygiène féminine sont mis à la toilette, ils ne se décomposent pas comme le fait le papier hygiénique. Ils peuvent plutôt rester pris dans les courbes et les joints des tuyaux. Une fois coincés, ils agissent comme des « filets » et piègent plus de débris, formant ainsi des obstructions.
Ce ne sont pas uniquement les tuyaux de la ville qui sont à risque. Le réseau d’égouts municipal est directement relié à la plomberie de votre maison. Si des obstructions se forment dans le réseau plus vaste, les eaux usées peuvent refouler dans les maisons ou même inonder des quartiers complets. Imaginez des eaux d’égout brutes s’infiltrant dans votre sous-sol parce qu’un de vos voisins a mis une couche dans la toilette. Voilà un scénario cauchemardesque et entièrement évitable.
Les corps gras, les huiles et les graisses (FOG) de cuisson versés dans les drains et les toilettes peuvent empirer le chaos. Bien que ces substances s’écoulent facilement lorsqu’elles sont chaudes, elles refroidissent et se solidifient sur les parois des tuyaux, collant à divers objets, comme des lingettes ou des plastiques ayant été mis dans la toilette. Au fil du temps, ces couches de FOG et de débris s’épaississent, formant un bouchon dur et imperméable (banquise de graisse) pouvant bloquer des sections complètes du réseau d’égouts municipal. Lorsque cela se produit, des engorgements sont inévitables et les coûts pour réparer les dommages sont énormes.
Ces photos, qui ont été prises le 17 mars 2020 dans un poste de pompage d’eaux d’égout de London, en Ontario, montrent le contenu d’un blocage, dont des lingettes, des gants, des sacs, des jouets et un applicateur de tampon.
Médicaments, plastiques et SPFA : des polluants invisibles
Bien que les obstructions visibles, comme les banquises de graisse, occupent les manchettes, les polluants invisibles, comme les médicaments, les plastiques et les SPFA (substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées), présentent des défis tout aussi sérieux. Dans les installations de traitement, ces substances peuvent échapper aux systèmes de filtration et s’introduire dans les rivières et les bassins versants, où ils perturbent les écosystèmes aquatiques.
Les hormones qui se trouvent dans les médicaments peuvent nuire aux systèmes reproductifs d’espèces aquatiques, tandis que les antibiotiques contribuent au problème croissant de l’antibiorésistance dans l’environnement.
Les plastiques, y compris les microplastiques provenant de produits d’hygiène féminine envoyés dans les toilettes, se dégradent lentement et se décomposent en minuscules particules. Ces microplastiques sont alors ingérés par les poissons et autres animaux aquatiques, s’accumulent dans la chaîne alimentaire, atteignent même nos assiettes pour ensuite rester piégés dans notre corps.
Les SPFA, ou « contaminants éternels », sont particulièrement troublants. Résistants à la décomposition, ils persistent dans les sources d’eau indéfiniment, posant des risques à long terme pour la santé et l’environnement.
Les toilettes ne sont pas des poubelles
Se débarrasser adéquatement de vos déchets et ne mettre à la toilette que ces trois éléments — pipi, crottes et papier hygiénique — protège votre maison, votre portefeuille et l’environnement. Commencez par installer une poubelle dans votre salle de bain pour les articles qui ne vont pas dans la toilette. Jetez les graisses et les huiles dans un contenant scellé dans la poubelle. Rapportez les médicaments non utilisés à la pharmacie ou à une installation pour déchets dangereux au lieu de les mettre dans la toilette.
Tous les systèmes sont reliés, des tuyaux de votre maison à l’infrastructure des eaux usées de la ville, jusqu’aux rivières et aux océans. Lorsqu’un refoulement se produit, il ne reste pas uniquement dans les égouts. Il peut inonder des maisons, endommager des biens et nuire aux écosystèmes. Quand on fait de meilleurs choix, on peut prévenir les blocages, protéger des infrastructures vitales et préserver nos cours d’eau pour les générations futures.
La prochaine fois que vous serez tenté de mettre quelque chose de douteux à la toilette, prenez le temps de réfléchir. Votre plomberie et la planète vous remercieront!
Par Michelle Campbell Mekarski
Aller plus loin :
Pensez aux déchets humains différemment en visitant l’exposition Oh merde! au Musée des sciences et de la technologie du Canada jusqu’en janvier : https://ingeniumcanada.org/fr/scitech/expositions/oh-merde-repensons-les-dechets-humains.
La campagne « I Don't Flush » de l'Agence ontarienne des eaux : https://www.ocwa.com/fr/laoe-au-sein-de-la-collectivite/i-dont-flush/
L'Association canadienne des eaux potables et usées (ACEPU) nous encourage à réfléchir à ce que nous jetons dans la chasse d'eau (anglais seulement): https://cwwa.ca/covid-19-and-sewers-to-avoid-a-sewage-back-up-dont-treat-your-toilet-like-trash-can/
Renseignez-vous sur les eaux usées et sur les endroits où vous pouvez vous débarrasser de certains types de déchets à Ottawa : https://ottawa.ca/fr/vivre-ottawa/eau-potable-eaux-pluviales-et-eaux-usees/eaux-usees-et-egouts/education-sur-les-eaux-usees
Des éclairs frappent pendant un orage en Arizona, planète Terre.
Des éclairs déclenchent une pluie d’électrons!
Oui, oui, vous avez bien lu. Des éclairs sur Terre peuvent déclencher la météo spatiale sous forme d’averse d’électrons qui tombent sur notre atmosphère depuis l’espace.
Notre planète est protégée par une magnétosphère, une région dominée par notre champ magnétique, lequel agit comme bouclier pour bloquer les dangereux rayons cosmiques et vent solaire du Soleil. Le champ magnétique terrestre piège les particules chargées provenant du vent solaire, comme les protons et les électrons, ce qui crée deux régions en forme de beigne nommées les ceintures de radiation de Van Allen. La ceinture intérieure s’étend sur environ 2 000 à 12 800 kilomètres au-dessus de la Terre, tandis que la ceinture extérieure se trouve de 19 000 à 40 000 kilomètres au-dessus de la surface. Notre blindage magnétique n’est toutefois pas parfait, et les électrons rapides de ces ceintures de radiation peuvent tomber vers notre planète. Une récente étude a examiné des mesures satellitaires pour montrer comment ces dangereux électrons rapides peuvent être projetés de la ceinture de radiation intérieure et s’abattre sur la haute atmosphère. Remarquablement, ce sont les ondes radioélectriques à basse fréquence qu’on appelle siffleurs, générées par la puissante décharge d’électricité qui se produit sous forme d’éclairs, qui déclenchent ce phénomène. Ces ondes radioélectriques interagissent avec les électrons dans la ceinture intérieure, les mettant en mouvement entre les pôles, occasionnant la descente de certains d’entre eux dans l’atmosphère terrestre. Toutefois, de nombreuses questions demeurent, comme la fréquence des tempêtes d’électrons provoquées par les éclairs et leur lien avec l’activité solaire accrue.
Les électrons rapides constituent un type de rayonnement ionisant pouvant être dangereux tant pour les gens que les technologies. Ils posent un risque pour les satellites en orbite terrestre basse et les systèmes électriques des avions. Ils peuvent interférer avec la radiocommunication et la navigation GPS. De plus, ils peuvent décomposer des liens moléculaires, ce qui peut être extrêmement nuisible aux cellules vivantes. Si un humain, disons un astronaute, est exposé à d’importants niveaux de rayonnement ionisant, divers symptômes déplaisants peuvent survenir et causer des maladies ou même la mort. Par exemple, les astronautes sur la Station spatiale internationale, laquelle orbite à environ 400 km au-dessus de la Terre entre la ceinture intérieure Van Allen et notre atmosphère, peuvent subir davantage de rayonnement durant une tempête solaire ou, il s’avère maintenant, des orages sur Terre. Heureusement, il existe déjà de nombreuses interventions pour réduire le risque tant pour les gens que les technologies. Dans la plupart des cas, de meilleures prévisions météorologiques de l’espace et de la Terre, une bonne planification et le blindage rendent gérable l’exposition à court terme à ce rayonnement.
Par Cassandra Marion
Vous appréciez le Réseau Ingenium? Aidez-nous à améliorer votre expérience en répondant à un bref sondage!