Hans Lundberg, le plus grand détective minier du Canada, Partie 4
Aussi intéressants que soient ses travaux géophysiques réalisés à partir du sol, Hans Lundberg est mieux connu en tant que pionnier de l’exploration géophysique à partir du ciel. Son travail dans ce domaine semble commencer en Suède, en 1920-21, avec des ballons captifs, de grands cerfs-volants et, peut-être, des avions. Avant même la fin de la Seconde Guerre mondiale, Lundberg prévoit que l’aviation jouerait un rôle important dans l’exploration géophysique, une fois la paix revenue. Au début, il pense que l’avion sera le principal outil. L’hélicoptère ne tarde toutefois pas à attirer son attention. Le batteur à œufs, comme on l’appelle parfois, peut aller dans des zones inaccessibles, voler tout près du sol en relative sécurité et faire du surplace ou atterrir pour confirmer une éventuelle découverte. Avant même la fin de 1945, Lundberg est le vice-président fondateur de Lundberg-Ryan Air Exploration Company, Incorporated de New York et Toronto. Cette société devient éventuellement Lundberg Explorations Limited.
En 1946, Lundberg complète et met à l’essai le premier système de levé électromagnétique aéroporté au monde. Le véhicule qu’il utilise pour tester cet équipement relativement primitif est un Bell Modèle 47, un des hélicoptères classiques du 20e siècle et un type représenté dans la collection du Musée de l’Aviation et de l’espace du Canada. Soucieuse d’augmenter sa clientèle potentielle, Bell Aircraft Corporation accepte d’aide Lundberg en lui louant un hélicoptère. Le pilote aux commandes du Modèle 47 de son usine de Niagara Falls, New York, à Downsview, près de Toronto, où des employés du célèbre avionneur de Havilland Aircraft of Canada, Limited installent l’équipement spécialisé, est nul autre que Floyd William Carlson. Le pilote d’essai en chef de Bell Aircraft compte parmi les pilotes d’hélicoptères les plus célèbres de l’époque. Également intriguée par ce que Lundberg tente d’accomplir, International Nickel Company (INCO) lui donne la permission de tester son équipement à ses installations de Sudbury, Ontario.
À partir de la mi-juin, Lundberg et sa petite équipe mènent une série de levés aériens dans le nord de l’Ontario et du Québec. La technologie de l’époque ne lui permet malheureusement pas d’exploiter pleinement ses résultats. Comme c’est le cas plus d’une fois dans sa vie, le géophysicien canadien est en avance sur son temps. Malgré cela, les économies de temps démontrées par Lundberg sont tout bonnement étonnantes. Alors qu’une équipe de personnes au sol a besoin de 70 jours pour examiner un terrain de 11 km2 (4.3 mi2), deux personnes en hélicoptère peuvent effectuer le travail en 60 minutes environ.
Les essais supervisés par Lundberg s’avèrent historiquement significatifs pour une autre raison. Un jour, alors qu’il supervise la lutte contre un feu de forêt tenace près de Sudbury, le superviseur de la protection forestière du ministère des Terres et Forêts de l’Ontario pour ce district voit le Bell Modèle 47 passer. Jack C. Dillon a une révélation. L’hélicoptère serait une plateforme idéale pour observer l’évolution d’un incendie et identifier les zones à risques. En regardant le Modèle 47 s’éloigner, Dillon se précipite vers un véhicule et se rend à l’endroit où il atterrit. Bell Aircraft accepte de le laisser voler à bord de l’hélicoptère, gratuitement, pendant environ deux heures. Cette expérience, menée le 26 juin 1946, est le premier vol en Amérique du Nord au cours duquel un hélicoptère est utilisé pour contrôler un incendie forestier.
Il est à noter que le fils cadet de Lundberg est peut-être impliqué dans l’expérience de 1946, en tant que pilote. Fin juillet, Sten Lundberg reçoit la première licence commerciale de pilote d’hélicoptère remise par le ministère des Transports du Canada à une personne qui ne travaille pas pour le gouvernement fédéral. Le jeune homme est le seul non-Américain dans le group de quatre personnes qui obtient ce jour-là cette licence convoitée, à l’usine de Bell Aircraft de Niagara Falls. Sten Lundberg rejoint l’Aviation royale du Canada en 1941. Pilote depuis 1942, il vole au combat avec le 416e Escadron. Son avion de chasse Supermarine Spitfire est abattu en France en mai 1944. Lundberg passe un an dans un camp de prisonniers de guerre. Une fois revenu au Canada, il transporte des approvisionnements en guise d’appui à des expéditions de son père dans le nord du Canada. Son frère aîné, Torkel Lundberg, quant à lui, est navigateur dans un escadron de la Royal Air Force muni de bombardiers lourds Avro Lancaster. Son appareil disparaît sans laisser de trace pendant la nuit du 21 au 22 janvier 1943. Il avait 23 ans.
Les derniers mots de la saga de Hans Lundberg vont se trouver dans la 5e et dernière partie de cet article. Et si ce texte vous semble long, ami(e) lectrice ou lecteur, veuillez noter que votre humble serviteur a été pris par surprise par les nombreux rebondissements de cette remarquable histoire.