3 choses à savoir sur la pollution par les engrais, la planète Mars et l’albatros hurleur
Faites connaissance avec Renée-Claude Goulet et Michelle Campbell-Mekarski.
Elles sont les conseillères scientifiques d’Ingenium qui fournissent des conseils d’expertes sur des sujets importants en lien avec le Musée de l’agriculture et de l’alimentation du Canada et le Musée des sciences et de la technologie du Canada. Jesse Rogerson, anciennement conseiller scientifique au Musée de l’aviation et de l’espace du Canada, continue de prêter son expertise au Réseau.
Dans cette série mensuelle de billets de blogue colorés, l’ancien conseiller et les conseillères scientifiques actuelles d’Ingenium présentent trois pépites insolites touchant à leur champ d’expertise. Pour l’édition de septembre, ils se sont penchés sur le recours à la technologie pour lutter contre la pollution par les engrais, sur la possibilité d’observer Mars et sur la façon dont on met l’albatros hurleur à contribution afin de combattre la pêche illégale.
Les plantes tirent des nutriments du sol, qui s’appauvrit au fil du temps. L’utilisation d’engrais permet de fournir aux grandes cultures, comme le maïs, les nutriments essentiels à leur croissance.
Réduire la pollution par les engrais grâce à la technologie agricole
L’azote, qui compose 78 % de l’air que l’on respire et qui est présent dans tous les êtres vivants, est un élément essentiel à la croissance des végétaux. Bien qu’il soit très abondant dans l’air, il ne se dissout pas dans l’eau de pluie, si bien que les plantes ne peuvent pas l’absorber par leurs racines. Elles le tirent plutôt de la matière organique en décomposition et des microorganismes du sol (et de la foudre!), qui combinent l’azote de l’air avec d’autres éléments pour former du nitrate et de l’ammonium, deux formes d’azote que les plantes PEUVENT absorber.
Au début des années 1900, le procédé Haber-Bosch a permis de transformer l’azote présent dans l’air en un composé assimilable par les plantes et de créer ainsi un engrais. L’invention a révolutionné l’agriculture : on pouvait désormais fournir de l’azote directement aux plantes et accroître la production agricole de manière exponentielle. Cette technique a toutefois engendré des répercussions inattendues sur l’environnement, et l’on doit aujourd’hui revoir les méthodes agricoles.
Le procédé qui permet de créer des engrais azotés laisse une empreinte carbone importante. Certes, les plantes nécessitent de grandes quantités d’azote, mais leurs besoins varient en fonction du temps, des conditions météorologiques et du sol. Le surplus d’azote est libéré rapidement dans l’environnement sous forme de gaz à effet de serre, à savoir de protoxyde d’azote (ou « gaz hilarant »), ou s’infiltrer dans la nappe phréatique.
La pollution par les engrais est un grave problème auquel les agriculteurs et les chercheurs s’attaquent ensemble au Canada, mais aussi dans le reste du monde. Quelques-unes des solutions les plus prometteuses consistent à déterminer exactement ce dont les cultures ont besoin et à quel moment, et à trouver des moyens de ne leur fournir que cela et rien d’autre.
Pour ce faire, on fait appel à la technologie. Par exemple, l’équipement moderne, qui utilise un ordinateur embarqué dans le tracteur, un système GPS et des données de terrain cartographiées pour répandre différentes quantités d’engrais sur le sol (uniquement là où c’est nécessaire), permet une application plus précise que jamais. Les agriculteurs peuvent désormais réduire à la fois la quantité d’engrais utilisée et les pertes dans l’environnement, tout en maintenant, voire en améliorant, le rendement des cultures.
Grâce aux progrès de la recherche et de la technologie dans le secteur agricole, on peut mettre en œuvre des pratiques agricoles qui améliorent la production alimentaire tout en protégeant la plus précieuse des ressources : la Terre.
Par Renée-Claude Goulet
Mars tire sa teinte rougeâtre de la rouille présente dans le régolithe (couche de roches sur le sol), dont est constituée la majeure partie de la surface de la planète.
Voir la planète Mars… à l’œil nu!
Le 13 octobre 2020, la planète Mars se trouvera plus près de la Terre qu’elle le sera durant les deux prochaines années. Voilà une excellente occasion d’observer la planète rouge avec un télescope, des jumelles ou même à l’œil nu.
La Terre met 365 jours à faire le tour du Soleil, contre 687 jours pour la planète Mars, qui est un peu plus éloignée du Soleil. Tous les deux ans environ, la Terre et Mars se trouvent à une distance minimale l’une de l’autre. Imaginez que le Soleil, la Terre et Mars sont alignés et que le Soleil et Mars se trouvent de part et d’autre de la Terre. Du point de vue de la Terre, le Soleil se trouve à l’opposé de Mars dans le ciel, un phénomène qu’on appelle l’« opposition de Mars ».
En raison de l’opposition, lorsque le Soleil se couchera en octobre et en novembre, Mars commencera à se lever. La planète décrira un arc dans la portion sud du ciel (si vous habitez dans l’hémisphère nord) et se couchera à l’ouest, à peu près au moment où le Soleil se lèvera. Comme Mars sera plus près de la Terre que d’habitude, elle vous semblera aussi légèrement plus grosse et plus brillante que d’ordinaire.
Lorsque vous observerez Mars en octobre, rappelez-vous que l’astromobile Perseverance se dirige actuellement vers la planète rouge. Lancé à la fin de juillet 2020, il devrait se poser à la surface de planète, dans le cratère de Jezero, en février 2021. Sa mission : rechercher des traces de vie passée ou actuelle sur Mars et recueillir des échantillons du sol qui devront être rapportés sur Terre plus tard. Des chercheurs canadiens de l’Université de l’Alberta et du Musée royal de l’Ontario font partie des équipes qui détermineront les endroits où Perseverance devra prélever des échantillons sur Mars et comment ils seront analysés une fois sur Terre.
Par Jesse Rogerson
Mettre à contribution l’albatros pour détecter les pêcheurs illégaux
L’efficacité des solutions visant à remédier aux problèmes environnementaux est souvent compromise par le manque de financement, de temps et des effectifs. C’est donc particulièrement fascinant d’assister à l’essor d’une idée ingénieuse.
Prenons le problème de la surpêche, à savoir la capture d’espèces marines à un rythme trop rapide pour permettre le renouvellement de leurs populations, ce qui entraîne leur déclin. La surpêche est souvent associée à un autre problème grave : celui des captures accessoires. Même si les navires de pêche ciblent une espèce en particulier, ils finissent souvent par prendre dans leurs filets ou dans leurs pièges des espèces non désirées. Les captures accessoires ne pouvant généralement pas être exploitées, elles sont donc synonymes de morts inutiles pour les créatures marines, notamment les baleines, tortues de mer et oiseaux marins menacés.
Que peut faire un pays afin de freiner la surpêche et réduire le nombre de captures accessoires? La surveillance des navires de pêche et la patrouille des océans requièrent des ressources considérables. Hélas, en raison de l’immensité des océans, il est relativement facile pour les navires de pêche illégale d’échapper à la surveillance et d’enfreindre les lois qui dictent où, quand et comment les poissons peuvent être capturés. Cela est particulièrement le cas lorsqu’ils s’aventurent en haute mer, c’est-à-dire dans une zone qui n’est sous la juridiction d’aucun État. Que faire alors?
L’albatros hurleur pourrait représenter une solution. L’envergure de ces oiseaux incroyables est de 3,5 m (environ la longueur d’une petite voiture), ce qui leur permet de parcourir plus de 8,5 millions de kilomètres au cours de leur vie — soit 10 fois l’aller-retour entre la Terre et la Lune! Les albatros sillonnent de vastes zones océaniques à la recherche de poissons, et certains chercheurs pensent que ce comportement pourrait permettre de surveiller les activités de pêche illégale.
Grâce à des enregistreurs de données spéciaux attachés à des albatros, on peut détecter les radars des navires et récolter ainsi des données en temps réel sur l’emplacement de ces derniers. Au départ, on se servait de ces données pour se renseigner sur les habitudes de vol et de chasse des albatros autour des navires de pêche. Cependant, les chercheurs se sont rendu compte qu’on pouvait comparer ces données à celles du système d’identification automatique (AIS) afin de détecter d’éventuelles activités illégales. L’AIS est un système utilisé par les navires pour s’identifier mutuellement et prévenir les collisions, et on a tendance à le désactiver quand on veut éviter d’être identifié. Dans l’océan Austral, où volent les albatros hurleurs, ces données ont déjà permis d’estimer l’ampleur de la pêche illégale.
Les albatros sont gravement touchés par le problème des captures accessoires; profitant du fait que les poissons sont amenés à la surface, ils se prennent facilement dans les mailles des filets. En raison de ce phénomène, la plupart des espèces d’albatros sont menacées ou en voie de disparition. Ces oiseaux pourraient désormais recueillir les données nécessaires à leur propre survie et à la préservation de leur espèce.
Par Michelle Campbell Mekarski