Importance du réchauffement de l’Arctique et comment nous pouvons agir
La vérité sur le réchauffement de l’Arctique
En tant que pays de l’Arctique, le Canada s’intéresse directement à ce qui se passe dans le Grand Nord. Bien que très peu de pollution soit produite localement, l’Arctique se réchauffe trois fois plus vite que la moyenne mondiale (2,3 C à ce jour) [Bush et Lemmen, 2019]. Ce taux de réchauffement entraîne de nombreux changements dans l’environnement, ce qui pose des défis pour les collectivités autochtones et les espèces sauvages de l’Arctique. Le Rapport sur le climat changeant du Canada décrit la façon dont l’environnement canadien a changé au cours des dernières décennies et ce à quoi les Canadiens peuvent s’attendre alors que le climat continue de se réchauffer. Certaines des répercussions les plus importantes dans l’environnement canadien se produiront dans le Nord.
Le réchauffement de l’Arctique contribue aux changements climatiques
Les habitants de l’Arctique ne sont pas les seuls à subir des répercussions. Le réchauffement de l’Arctique aggrave les répercussions des changements climatiques pour toute la population de la planète. La raison est que la fonte de la glace arctique et de la couverture de neige s’accélère et expose de plus en plus la surface plus foncée de l’océan et de la terre. Ce phénomène réduit l’albédo de la Terre – qui ne reflète plus les rayons du soleil aussi bien – ce qui accélère le réchauffement et agit comme une chemise noire pendant une journée ensoleillée. De plus, comme la toundra arctique habituellement gelée en permanence (« pergélisol ») commence à fondre, elle peut libérer une grande quantité de méthane – un autre puissant gaz à effet de serre. La libération du méthane dans l’atmosphère combinée à la réduction de l’albédo produit un effet d’entraînement et de réchauffement accru.
Polluants climatiques de courte durée de vie
Pourquoi l’Arctique se réchauffe-t-il? Le dioxyde de carbone (CO2) est la principale cause des changements climatiques dans le monde, car le charbon, le pétrole et le gaz brûlés se transforment tous éventuellement en CO2. De plus, le méthane, le monoxyde de carbone et tous les autres polluants à base de carbone deviennent éventuellement du CO2 atmosphérique par réactions chimiques. Lorsqu’il se retrouve dans l’atmosphère, le CO2 peut y demeurer pendant des siècles (ce qu’on appelle sa « durée de vie » dans l’atmosphère). Par conséquent, il est très difficile d’éliminer le CO2 après son émission. De fait, si toutes les émissions de CO2 d’origine humaine s’arrêtaient soudainement, les concentrations de CO2 atmosphériques et les températures mondiales demeureraient élevées pendant des décennies avant de commencer à baisser.
Par ailleurs, les polluants climatiques de courte durée de vie (PCDV) sont des polluants atmosphériques qui contribuent au réchauffement de la planète, mais ils ne demeurent pas dans l’atmosphère aussi longtemps que le CO2. Par exemple, la durée de vie du méthane est d’environ dix ans seulement – ce qui est court comparativement au CO2! Si nous pouvions « fermer » toutes les sources de méthane, il serait possible d’observer un effet positif sur le climat en seulement quelques années. C’est pourquoi le méthane est considéré comme un PCDV.
La suie (celle qui se retrouve dans votre cheminée), également appelée « carbone noir », est un PCDV. Sa durée de vie dans l’air est même plus courte que le méthane; seulement une semaine! Malgré sa courte durée de vie dans l’atmosphère, la suie peut quand même être transportée jusqu’en Arctique à partir de sources éloignées. La suie se déposera alors sur la neige et la rendra foncée, ce qui réduit également l’albédo. Les particules foncées sur la neige absorbent la chaleur du soleil et réchauffent la surface, ce qui augmente la vitesse de la fonte. Tout comme pour le méthane, si nous pouvions « fermer » toutes les sources de suie, cela produirait un effet de refroidissement sur le climat à court terme.
Alors, que pouvons-nous faire pour réduire le réchauffement de l’Arctique? En plus de réduire les émissions de CO2, nous pouvons prendre des mesures pour réduire les émissions de PCDV.
Comment refroidir l’Arctique
La figure ci-dessus est tirée de l’Évaluation intégrée sur le carbone noir et l’ozone troposphérique de 2011 du Programme des Nations Unies pour l’environnement et de l’Organisation météorologique mondiale. Elle montre la hausse moyenne des températures mondiales comparativement à la moyenne préindustrielle dans le temps (ligne noire) et les projections pour l’avenir (lignes de couleur) si les réductions d’émissions se concrétisaient. La ligne violette représente l’augmentation de température si rien de nouveau n’était fait; l’Arctique se réchaufferait de 2,7 degrés! La ligne rouge indique ce qui se produirait si nous réduisions seulement le CO2; aucun impact sur la température pour les 30 premières années! La ligne bleue montre ce qui se produirait si les réductions touchaient seulement les PCDV, le méthane et le carbone noir; une réduction presque immédiate du réchauffement, mais les températures continueraient de grimper au-delà de la cible de 2 degrés après environ 30 ans. La ligne verte représente le scénario optimal; tant les émissions de CO2 que de PCDV sont réduites et cela entraîne des réductions rapides du réchauffement à court terme et des réductions supplémentaires du réchauffement – vers des températures stables – à long terme.
Vous pouvez contribuer à réduire les PCDV
Alors, que pouvons-nous faire pour réduire le réchauffement de l’Arctique? Vous pourriez penser qu’en tant que citoyen qui n’habite pas à proximité, vous ne pouvez rien y faire. Mais c’est faux! La figure ci-dessous montre les types d’émissions et leur importance dans le réchauffement de l’Arctique. Comme les émissions des zones peuplées sont transportées vers l’Arctique, une action individuelle peut changer les choses. Les navires qui empruntent les voies navigables de l’Arctique sont l’une des rares sources de PCDV qui émettent directement des polluants dans l’atmosphère arctique.
D’autres sources importantes de PCDV dans l’Arctique ont tendance à être situées beaucoup plus au sud (c’est-à-dire aux latitudes moyennes). Les émissions des véhicules non électriques – en particulier des véhicules diesel – sont une source de PCDV, tout comme les émissions provenant du chauffage résidentiel (p. ex., fournaise au gaz, foyer au bois), de la cuisson et des déchets alimentaires qui ne sont pas compostés. Ce sont des émissions sur lesquelles les Canadiens ont un bon contrôle.
Les feux de forêt sont une autre source importante de PCDV, mais nous pouvons également avoir une incidence sur leur fréquence, car de nombreux feux de forêt sont déclenchés par des pratiques imprudentes ou dangereuses. Par exemple, en Colombie-Britannique, 40-95 % des feux de forêt sont d’origine humaine.
Les industries comme celles du charbon, des hydrocarbures (y compris celles qui utilisent ces combustibles en grande quantité) et de l’agriculture sont également des sources importantes de PCDV. Économiser l’énergie autant que possible et réduire notre consommation de viande peuvent réduire la demande d’énergie de ces secteurs et nous permettre de contrôler nos émissions. Enfin, nous pouvons communiquer aux décideurs notre désir d’élaborer et de faire appliquer des mesures de protection environnementale concrètes.
Que font les gouvernements pour aider à régler cette situation?
Au sein d’Environnement et Changement climatique Canada (ECCC), les scientifiques cherchent à comprendre les changements climatiques et ses répercussions actuelles et futures sur le Canada. Le Ministère gère un réseau de stations qui mesurent les niveaux de PCDV dans l’ensemble du Canada, notamment l’Observatoire de veille atmosphérique du globe du docteur Neil Trivett à Alert, au Nunavut (photo ci dessus). Les scientifiques d’ECCC élaborent et utilisent également des modèles informatiques qui simulent le système climatique afin de prévoir l’incidence des émissions de PCDV et de gaz à effet de serre provenant de différents pays et sources d’émissions sur les températures de l’Arctique. Les résultats servent à appuyer la prise de décisions fondées sur des données probantes.
Les scientifiques canadiens ne travaillent pas en vase clos; ils collaborent avec des chercheurs du monde entier dans le cadre de réseaux mondiaux et internationaux afin de réaliser les meilleures études scientifiques possible. Par exemple, les scientifiques d’ECCC font partie d’un groupe d’experts sur les PCDV dans le cadre du Programme de surveillance et d’évaluation de l’Arctique (PSEA). Ce groupe est composé de membres des huit pays arctiques* et des cinq pays « observateurs de l’Arctique »**; des nations qui ne sont pas situées à proximité de l’Arctique, mais qui ont un intérêt direct dans les enjeux connexes. Ce groupe d’experts travaille actuellement sur le prochain rapport d’évaluation du PSEA sur les PCDV, qui sera présenté au Conseil de l’Arctique lors de sa prochaine réunion importante au printemps 2021. Il s’agira d’une étape importante, car le Conseil de l’Arctique est un groupe intergouvernemental d e haut niveau qui a le pouvoir de prendre des décisions importantes concernant l’Arctique et le monde. Après la publication des derniers rapports d’évaluation du PSEA2,3 en 2015, le Conseil de l’Arctique a convenu de réduire les émissions de carbone noir de 25 à 33 % par rapport aux niveaux de 2013 d’ici 2025. Certaines de ces réductions sont déjà en cours grâce à l’amélioration des technologies et des pratiques dans l’industrie, les transports et la gestion des déchets, mais il reste encore beaucoup de travail à faire à tous les niveaux de participation!
* Les huit pays de l’Arctique sont : le Canada, le Danemark, la Finlande, l’Islande, la Norvège, la Fédération de Russie, les États-Unis et la Suède.
**Les cinq pays observateurs sont : la France, l’Inde, l’Italie, l’Espagne et le Royaume-Uni.
Message à retenir
Si vous souhaitez participer à la lutte contre les changements climatiques, il existe des moyens de réduire les émissions de PCDV et de CO2.
- Réduisez votre consommation d’énergie à la maison :
- Éteignez les lumières;
- Utilisez moins de chauffage en hiver et moins d’air conditionné en été;
- Isolez votre maison adéquatement;
- Évitez les feux de bois, sauf en cas d’urgence;
- Compostez les déchets alimentaires et recyclez le papier et le plastique.
- Réduisez votre consommation d’énergie liée aux transports :
- Optez pour la marche ou le vélo pour les courts trajets;
- Utilisez le transport en commun ou le covoiturage pour les trajets plus longs.
- Parlez à d’autres personnes, notamment aux décideurs, du rôle qu’elles peuvent jouer.
Références
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Bush, E. et D.S. Lemmen, éditeurs (2019) : Rapport du Canada sur les changements climatiques; gouvernement du Canada, Ottawa (Ontario), 444 p., https://changingclimate.ca/CCCR2019/, 2019.
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AMAP Assessment 2015: Black carbon and ozone as Arctic climate forcers, https://www.amap.no/documents/doc/amap-assessment-2015-black-carbon-and-ozone-as-arctic-climate-forcers/1299 (en anglais seulement), 2015.
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AMAP Assessment 2015: Methane as an Arctic climate forcer, https://www.amap.no/documents/doc/amap-assessment-2015-methane-as-an-arctic-climate-forcer/1285 (en anglais seulement), 2015