Être dyslexique en temps de pandémie de la COVID-19
Au fur et à mesure de sa progression dans le monde cette année, la pandémie de la COVID-19 a obligé d’innombrables personnes à modifier leurs habitudes quotidiennes. De même, mon existence s’en est trouvée bouleversée en peu de temps. À certains égards, ces changements nécessaires se sont avérés plus importants pour moi, car à l’instar d’un Canadien sur cinq, je suis dyslexique.
En tant que personne handicapée, je crois qu’il faut rechercher les similitudes entre les gens, mais qu’il est tout aussi important de comprendre et de tenir compte de ce qui distingue les individus.
Dans une courte série de trois billets, je livrerai un aperçu de mon cheminement en tant que dyslexique, de mes difficultés personnelles dues à la pandémie de la COVID-19 et des répercussions de mon handicap sur ma perception de la collection d’Ingenium — Musées des sciences et de l’innovation du Canada.
La dyslexie a une incidence majeure sur mon quotidien, que bien peu de gens comprennent. Ceux qui ne savent pas ce qu’est la dyslexie pensent souvent qu’une personne dyslexique ne parvient pas à lire parce que les lettres du texte lui semblent s’aligner pêle-mêle. Même si j’ai personnellement de la difficulté à lire et à écrire, de nombreux dyslexiques y parviennent sans problème. De manière plus générale, le « câblage physique » du cerveau d’une personne dyslexique diffère de celui du cerveau d’une personne neurotypique. À titre d’exemple, j’ai des problèmes avec ma mémoire à court terme, ou mémoire de travail. Je n’ai jamais été capable de mémoriser mon numéro de téléphone ni mon adresse, et même si je sais comment me rendre à un endroit, je suis incapable d’utiliser le nom des rues et des indications pour expliquer comment y aller. En 2014, j’ai acheté mon premier téléphone intelligent et commencé à utiliser Google Maps. Cela a révolutionné ma vie! Jusqu’alors, je ne pouvais pas vraiment me déplacer aussi librement que je le voulais parce que je me perdais et ne me souvenais plus de mon numéro de téléphone ni de mon adresse (en plus, je n’arrive pas à lire l’horaire des autobus).
En revanche, le cerveau d’une personne dyslexique présente de nombreux atouts. Si ma mémoire à court terme me pose des difficultés, ma mémoire visuelle, elle, est très bonne. Mon aptitude pour l’analyse de données et ma capacité à anticiper des événements font aussi partie de mes points forts. Le cerveau d’une personne dyslexique est également doué pour la résolution de problèmes dans un sens beaucoup plus large, et il se distingue par sa capacité à établir des liens entre des notions abstraites.
Grâce aux progrès réalisés en neurosciences au cours de la dernière décennie, on comprend mieux la dyslexie. L’imagerie par résonance magnétique (IRM) et d’autres techniques d’imagerie ont permis aux scientifiques de mieux comprendre ce qui se passe réellement dans le cerveau humain. Par exemple, on sait aujourd’hui que la lecture active des sections différentes dans le cerveau d’une personne dyslexique et celui d’une personne non dyslexique. On pensait auparavant que des handicaps comme l’autisme et la dyslexie pouvaient être surmontés, mais on sait maintenant que le câblage physique du cerveau est différent chez certaines personnes.
Sachant cela, la société découvre qu’on peut exister de différentes manières, qu’il n’y a pas de « mode de fonctionnement unique ». Tandis qu’on change d’optique, il est important de considérer les personnes handicapées non pas comme « déficientes », mais plutôt comme différentes, et de prendre du recul afin d’apprécier les atouts que présentent ces capacités différentes.
Vous souhaitez en apprendre davantage sur l’accessibilité? Restez à l’affût des prochains articles de cette série en trois volets, intitulés Le télétravail à l’ère de la COVID-19 vu par une personne dyslexique et Pour une meilleure représentation de l’accessibilité dans la collection d’Ingenium.