La musique rejoint l’histoire publique et les sciences humaines numériques grâce à la bourse Garth Wilson
Comme étudiante du programme d’histoire publique de l’Université Carleton, j’ai appris, entre autres choses, à regarder au-delà de l’arbre pour voir la forêt. Les grands thèmes, les messages véhiculés dans les différentes communautés et au fil de l’histoire, ainsi que les tendances du développement social et culturel de différents publics, sont autant de sujets intéressants. Inversement, mes travaux axés sur les sciences humaines numériques dans ce même programme m’amènent à focaliser mon regard sur des détails. Le moindre point de données peut être très significatif et devrait être considéré dans son contexte global. En tant que titulaire de la bourse Garth Wilson, j’ai pu faire les deux en même temps dans le cadre de mes fonctions à Ingenium — Musées des sciences et de l’innovation du Canada.
J’ai eu l’occasion de participer à un projet qui alliait musique — un sujet qui m’intéresse depuis longtemps —, histoire publique et sciences humaines numériques. J’ai collaboré avec les conservateurs d’Ingenium David Pantalony et Tom Everrett, ainsi qu’avec des historiens et des chercheurs de Paris et de Berlin, afin d’ajouter des artefacts canadiens à une banque de données numériques du domaine de l’acoustique. Le projet m’a permis de discuter de l’ontologie de la banque de données, d’y contribuer et d’en apprendre davantage auprès d’experts du domaine sur l’avenir des banques de données numériques et sur leurs possibilités d’amélioration.
Le projet ressemblait en tous points à la forêt à laquelle je m’attendais du fait de ma formation en histoire publique. Au fil de mes conversations avec MM. Pantalony et Everrett, et de ma participation à des réunions internationales, j’ai appris de première main comment les musées utilisent les catalogues et les banques de données numériques. Nous avons discuté des façons de créer une banque de données numériques et une exposition qui soit aussi tactile et axée sur les artefacts que possible. Dans un contexte muséal où la sphère numérique est plus importante que jamais, nos conversations se sont révélées instructives et encourageantes; elles m’ont donné une bonne idée de l’orientation que prend mon domaine et de la manière dont je pourrais y contribuer.
Qui plus est, ce même projet — tout comme mes travaux à titre de boursière — m’a permis de me pencher sur des détails, ainsi que j’ai appris à le faire dans mes études en sciences humaines numériques. Outre les discussions sur les rouages d’une banque de données numériques, le volet de ma bourse de recherche consacré à la saisie de données s’est avéré très utile. En renseignant le profil des objets et des collections dans la banque de données, j’ai eu la chance de m’attacher aux détails de ces artefacts matériels. J’ai été à même d’apprécier l’importance de l’histoire matérielle de ces objets, même si les restrictions en vigueur dans les installations d’Ingenium en raison de la pandémie m’ont empêchée de les appréhender dans leur matérialité physique. J’ai appris à donner un sens aux dates, aux dimensions et à la provenance des artefacts. J’ai découvert que même les photos d’artefacts doivent être traitées comme des artefacts!
La gestion des données ressemble beaucoup à la gestion des objets proprement dits, et c’est aussi cet aspect du travail numérique que je préfère. Ces détails sont riches de sens et d’histoire, même ceux qui semblent insignifiants se révèlent multidimensionnels lorsqu’on les examine de plus près. Grâce à la numérisation, chaque « arbre » (point de données) peut être porteur de sens indépendamment des autres, puis considéré en tant qu’élément d’un ensemble plus vaste.
Le projet de recherche principal de ma maîtrise consiste à combiner lecture rapprochée et lecture distante afin de mieux comprendre le domaine de l’histoire publique dans son ensemble. Il s’agit de prendre du recul par rapport au domaine en analysant simultanément, au moyen d’outils numériques, des milliers d’articles publiés afin de dégager les tendances et les philosophies qui le caractérisent au fil du temps. Comme boursière, je n’aurais pu rêver d’un meilleur projet de recherche pour m’éclairer sur la manière de procéder afin de parvenir à cette fin. Je m’apprête à commencer un doctorat en médiation culturelle et un diplôme d’études en conservation à l’Université Carleton, alors cette expérience de travail en milieu muséal me guidera dans mes prochains travaux et études dans ce domaine.
Si le projet a entraîné son lot de difficultés (il est beaucoup plus difficile d’apprendre sur le tas en travaillant de chez soi, loin de l’environnement muséal), j’estime qu’il m’a été extrêmement utile, car il m’a permis d’explorer des archives numériques et de contribuer à une banque de données vivante.