Mois du patrimoine asiatique : Poulet à la cantonaise à la sauce soya
En ce Mois du patrimoine asiatique, je me suis mise à réfléchir sur les joies et les difficultés d’appartenir à une deuxième génération de Canadiens d’origine asiatique. Mon expérience semblera familière à tous ceux qui ont grandi un pied dans la culture populaire du Canada et l’autre dans les traditions et la langue de leurs parents ou grands-parents immigrés. Par exemple, ma maîtrise du cantonais est loin d’être parfaite, mais au moins, je peux commander mes plats préférés au restaurant. Quand j’étais adolescente, mes grands-parents et moi aimions autant aller chez McDonald que passer l’après-midi à faire des dumplings ensemble. Quant venait le temps d’honorer la vie des défunts, je ne comprenais pas vraiment, plus jeune, « où » allaient nos proches une fois disparus, mais je participais pleinement aux moments de recueillement sur leur tombe, où nous déposions des fleurs et de l’encens en famille, et où nous offrions des prières selon le rite taoïste.
Ces expériences me laissaient souvent avec l’impression qu’il me manquait quelque chose, d’une certaine façon, que je n’étais « pas assez » profondément enracinée dans le patrimoine dont j’étais issue. Une partie de cette impression venait de membres plus âgés de ma famille, qui s’inquiétaient que ma maîtrise du cantonais soit insuffisante pour bien communiquer avec mes grands-parents. Adolescente, ce sentiment se manifestait sous forme de honte par rapport à la relation que j’entretenais avec mon identité culturelle, et j’ai mis un certain temps à faire cette introspection et à reprendre une certaine confiance en moi.
Je m’estime certainement heureuse des liens même ténus que j’entretiens avec mon bagage culturel et je le célèbre, mais comme adulte, je suis aussi heureuse de me défaire du poids que l’on accorde à la connaissance de la culture pour évaluer la valeur de quelqu’un. J’éprouve plutôt de la joie à explorer et à réaffirmer mes racines de la façon qui me convient.
Une de ces façons d’explorer passe par la nourriture. La cuisine a toujours été pour moi une forme de connaissance culturelle qui me lie solidement à mes origines. Dernièrement, j’élargis mon répertoire et j’essaie de nouvelles recettes, en partie grâce à la merveilleuse chaîne Youtube Made With Lau. En même temps, je me rends aussi compte que je retourne à des plats familiers qui me sont chers, peut-être à cause de toute cette incertitude liée à la pandémie.
Aujourd’hui, j’aimerais vous faire découvrir une de ces recettes qui me sont chères et familières : le poulet à la cantonaise à la sauce soya. C’est l’un des premiers mets chinois que j’ai appris à cuisiner. Le plat est réconfortant, et la recette est facile et plus ou moins infaillible... la combinaison idéale pour rassurer tous les amateurs sur leurs compétences culinaires. Je présume que ces qualités expliquent que ma mère ait choisi de m’enseigner cette recette avant toute autre quand j’étais petite. Comme j’étais seule à la maison en revenant de l’école, je devais parfois préparer le souper pour ma famille, et j’aimais voir cette recette prendre forme et produire facilement un repas à la fois délicieux et nourrissant. Je l’ai aussi appréciée plus tard, avec ma vie mouvementée d’étudiante. En plus, j’aime le fait que ma mère a appris cette recette de sa propre mère, ma Por Por, et qu’elle a évolué avec le temps pour s’adapter au goût de la cuisinière. La voici, comme l’apprête ma mère.
Poulet à la cantonaise à la sauce soya
Ingrédients
- ½ tasse de sauce soya légère ou ordinaire
- ½ tasse de sauce soya foncée¹
- 1 tasse d’eau
- Un morceau de sucre rocher de 3 po (40 g) ou 3 c. à table de sucre brun
- 2 fleurs d’anis étoilé (3 pour un goût plus prononcé)
- 3 livres (1,5 kg) de poulet (pilons, ailes ou cuisses), avec la peau et les os²
- 1 tranche de gingembre (2 mm d’épaisseur) (au goût)
¹La sauce soya foncée est un ingrédient clé de ce mets, car elle donne au poulet une saveur et une coloration que la sauce soya légère ou ordinaire ne donne pas.
²La partie foncée du poulet est préférable pour cette recette. Le poulet désossé et sans la peau est une option santé, mais ne produit pas la texture tendre qui rend cette recette si spéciale, avec la chaire qui se détache d’elle-même de l’os.
Préparation
- Dans une grande casserole, sur feu moyen, combiner les deux types de sauces soya, l’eau, le sucre l’anis et le gingembre (si vous en mettez).
- Chauffer quelques minutes jusqu’à ce que le sucre soit complètement dissout. On peut accélérer le processus en le brisant en morceaux à mesure qu’il se réchauffe.
- Une fois le sucre dissout, ajouter le poulet. Retourner chaque morceau de poulet pour couvrir les deux côtés de sauce.
- Couvrir et laisser mijoter de 20 à 25 minutes en retournant de nouveau le poulet après 10 minutes. Lorsque le poulet est cuit, la peau se détache des articulations.
- Servir chaud avec un riz à la vapeur et vos légumes préférés. Verser un filet de sauce de cuisson, au goût.
Donne : 3 à 4 portions.
Note : Je dois ajouter, dans le plus pur esprit chinois de ma mère, que le reste de sauce peut être réutilisé. Pour ce faire, verser la sauce dans un contenant, puis la laisser refroidir avant de la réfrigérer. Elle se conserve ainsi jusqu’à deux semaines. On peut la réutiliser pour faire cuire du poulet. Pour ce faire, retirer la couche de graisse qui s’est formée à la surface et faire fondre la sauce à feu moyen dans une grande casserole. Une fois la sauce liquéfiée, reprendre la recette à partir de la 3e étape. On peut aussi en faire un bouillon pour une soupe aux nouilles : faire fondre la sauce, y ajouter de l’eau au goût, puis y faire mijoter des légumes, comme des carottes ou du chou nappa.